Serge Ferron, responsable du fleurissement de la ville de Château-Gontier (au centre), entouré de Bertrand Mallet (à gauche), chef de projet du bureau d'études, et d'Edmond Lemarchand, le responsable du service des espaces verts.
La mise en place des mosaïcultures a lieu début juin après les plantations de massifs. Pour gagner du temps, les plantes ont été précultivées sous tunnel dans des cadres métalliques.
De nombreux massifs ont été remplacés par des rosiers ou d'autres arbustes fleuris, voire des vivaces, pour limiter les interventions de plantation chaque année.
Château-Gontier fait partie des rares communes à avoir obtenu la « Fleur d'Or » en 2010. Une récompense qui lui sera remise début mars.
Le 9 mars prochain aura lieu la remise des prix du fleurissement 2010. Au cours de la cérémonie organisée par le CNVVF (Conseil national des villes et villages fleuris), quelques collectivités seront mises à l'honneur : ce sont celles qui se verront remettre la « Fleur d'or », récompense suprême qui remplace les anciens « Grands Prix », à la différence qu'elle n'est attribuée que pour une année et ne peut pas être renouvelée avant six ans... Sans compter que seules neuf communes peuvent se voir attribuer ce label chaque année. Quel est donc le secret de ces collectivités qui connaissent une telle réussite, pendant que d'autres éprouvent toutes les peines du monde à progresser au palmarès ? Nous visiterons un certain nombre d'entre elles en 2011 afin d'analyser leur travail et constituer des exemples pour tous ceux qui souhaiteraient s'en inspirer...
À mi-chemin entre Angers et Laval, la ville de Château-Gontier (Mayenne), qui compte près de 12 000 habitants, fait partie des municipalités qui ont décroché le Graal en 2010 et qui pourront donc apposer le panonceau de la « Fleur d'Or » cette année. La ville est présente au sommet du palmarès depuis 1988, avec 4 fleurs, puis le Grand Prix en 1992, renouvelé en 1995. Mais tout n'a pas toujours été parfait : en 1998, le jury passé pour contrôler le Grand Prix donne un avertissement. « Cette sanction nous a permis de comprendre que nous n'avions pas pris le cap de ce que l'on appelait le “nouveau fleurissement”, explique Serge Ferron, responsable du fleurissement de la commune. Comme beaucoup de villes, nous pratiquions encore la “fleur au kilo” »...
Les équipes dédiées aux espaces verts se remettent en question sous la houlette de leur directeur, Edmond Lemarchand. Serge Ferron part en formation à Chaumont-sur-Loire où il rencontre Michel Gallais, alors responsable du service des espaces verts de la ville de Marans (17), qui a largement contribué à faire évoluer le fleurissement. Les visites des villes en pointe de la région, comme Nantes, sont organisées... « Le bon virage a été pris rapidement et a permis de faire reconnaître le fleurissement, même si nous avions peu de recul quant au comportement de nombreuses espèces disponibles sur le marché, poursuit Serge Ferron. Nous connaissions les végétaux classiques, mais intégrer la gamme des nouvelles plantes n'a pas toujours été simple. Surtout qu'ici, les végétaux se développent énormément. Une année, nous avons planté des Tithonia qui sont montés à 2 m de hauteur ! »
Les services techniques ont changé leurs habitudes et le style du fleurissement. « Avant, les massifs étaient fleuris dès leur plantation et le restaient jusqu'aux gelées. Maintenant, nous plantons par séquence. Beaucoup de vivaces sont intégrées et les floraisons s'échelonnent. C'est beaucoup plus technique », estime Serge Ferron. De même, alors qu'il y a quinze ans les « massifs étaient conçus en fonction de ce que nous avions mis en culture et qui était disponible dans la serre », désormais, une chromatique par zone est choisie dès le mois de novembre. Un tour de la ville est réalisé, un bilan de ce qui a bien ou mal fonctionné est effectué. Des nouveautés sont recherchées. À partir de ce travail, un choix de palette végétale est fait. Par contre, les massifs ne sont pas dessinés, ils seront plantés par séquence. L'unité de la ville est réalisée grâce à une espèce que l'on retrouve un peu partout ou par une couleur dominante. Ce travail réalisé, les commandes de végétaux peuvent être lancées en fin d'année.
Au-delà de ces aspects liés à l'organisation, l'évolution a été possible grâce à une reconsidération des surfaces fleuries. Environ 1 000 m² de massif sont réalisés chaque année, pour vingt-deux scènes proposées aux habitants. La ville comptait soixante points fleuris il y a une vingtaine d'années... Et si, en 1984, la ville disposait de quatorze employés au service des espaces verts pour une vingtaine d'hectares à entretenir, ils sont aujourd'hui vingt-quatre pour entretenir 65 hectares, en comptant toutefois la propreté urbaine intégrée au service en 2007.
Dans le même temps, le nombre de plantes utilisées a diminué : 120 000 unités par an il y a quinze ans contre 50 000 estivales aujourd'hui... pour un résultat qui a fait l'unanimité du jury en 2010 ! Nombre de massifs ont été plantés en rosiers ou autres plantes fleuries pérennes. De la même manière, il y a quinze ans, toutes les plantes utilisées étaient produites en régie « mais aujourd'hui, l'énergie est devenue trop chère. Nous avons donc décidé d'acheter des micromottes. Cela nous permet de ne chauffer qu'une seule serre. Les micromottes arrivent dans la serre chauffée en semaine 12, le second abri n'est pas chauffé et permet de cultiver des vivaces », poursuit Serge Ferron.
Pour autant, le virage pris n'est pas à 180 ° et une certaine continuité est assurée, par exemple en conservant la mosaïculture, « un savoir-faire qu'il serait dommage de perdre », estiment les responsables du service des espaces verts de la ville. Alors, même si certains trouvent que c'est désuet, 105 m² de mosaïques florales sont plantés chaque année. Echeveria et Alternanthera sont les deux espèces essentielles utilisées dans ces réalisations, dessinées par le bureau d'études en interne. Depuis l'an dernier, le service a innové au niveau des techniques de réalisation des massifs. Partant du constat que les Alternanthera n'aiment pas le froid, les massifs sont réalisés sous tunnel, fin avril, ce qui permet au personnel de travailler à l'abri quel que soit le temps. L'atelier mécanique a réalisé des cadres métalliques de 1 m² et de 7 cm de hauteur avec un fond grillagé dont les mailles mesurent 5 cm en tous sens. Ces cadres sont remplis de substrat et les plantes sont installées suivant le croquis défini. En juin, quand l'ensemble des massifs sont plantés et que l'heure est venue de mettre en place les mosaïques, les cadres sont pris dans les tunnels et installés à l'aide d'un camion-grue directement sur les massifs dont le sol a été préalablement préparé. « De cette manière, nos massifs sont bien développés dès leur installation et très rapides à mettre en place : un massif de 20 m² est installé en une demi-journée. Le plus long est de réaliser les cadres en amont mais ils ont l'avantage d'être réutilisables chaque année », précise Serge Ferron. Cette optimisation du temps de travail permet de limiter les coûts de la mosaïculture. À raison de 220 plantes par m², le coût d'achat en végétaux est d'environ 5 500 euros. Il faut compter 216 heures pour la plantation, 144 pour la taille (jusqu'à six interventions par an) et 72 pour l'arrachage (les Echeveria doivent être remis en culture car, à la différence des Alternanthera, ils ne sont pas rachetés tous les ans). Soit, à l'arrivée, un coût de 276 euros par m² et 15,5 % du temps de travail du service dans l'année...
À l'opposé, Château-Gontier pratique aussi la gestion différenciée. En 2005, la ville a récupéré en gestion le parc de l'Oiselière d'une superficie de 9 hectares. Prenant conscience de la richesse de ce lieu et dans un souci de préservation de la biodiversité, les élus ont décidé de protéger ce poumon vert situé près du cœur de la ville. « Les chênes et les noyers s'étaient semés par centaines, explique Edmond Lemarchand. Différents aménagements ont été réalisés avec notamment un terrain multisport, des allées constituant un circuit de promenade et d'entraînement sportif. Nous avons choisi de tracer des allées là où la végétation était la moins dense. Un passage de tondeuse est effectué régulièrement, uniquement de chaque côté de celles-ci, le reste de la surface est laissé pour le développement de la végétation spontanée et pour l'abri et la reproduction de nombreux insectes et espèces animales. Deux bassins de retenue ont été creusés avec une végétation qui s'y est développée en périphérie sans aucune intervention de notre part. »
Autre clé de la réussite, la communication. Au pied des remparts de la ville, toutes les espèces utilisées pour le fleurissement sont plantées et étiquetées de manière à ce que les habitants sachent de quels végétaux il s'agit. D'autre part, des panneaux d'information sont installés devant certains massifs. Ils expliquent brièvement les choix de plantations...
Cinq conseils pour réussir son fleurissement
- Anticiper les besoins en végétaux pour lancer les appels d'offres d'achat de végétaux, de jeunes plants ou de plantes finies, assez tôt pour être certain d'être bien servi, en qualité et en quantité, par les fournisseurs. Des appels d'offres passés trop tard sont souvent synonymes de variétés modifiées parce qu'elles ne sont plus disponibles, de plants pas suffisamment développés parce qu'ayant eu un cycle de culture trop court...
- Être ouvert à ce qui se passe un peu partout en France. Des visites chez des collègues et des formations régulières sont un gage de disponibilité et d'ouverture face aux changements.
- Choisir un thème qui ne soit pas trop restrictif mais qui soit suffisamment fort pour être repéré facilement par le visiteur.
- Choisir ses végétaux en fonction de ses besoins et ne pas faire son fleurissement en fonction de ce dont on dispose dans la serre ou chez l'horticulteur.
Ne pas hésiter à conserver l'ensemble des techniques maîtrisées par le service, à condition de les utiliser avec modération et dans des endroits adaptés.