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Technique

Choisir son fertilisant organique ou organo-minéral naturel

Isabella Tomasi (2) - Le Lien Horticole - n°741 - février 2011 - page 14

Voici quelques pistes pour permettre au producteur de se repérer dans l'offre en pleine croissance des fertilisants organiques.
Le producteur n'a pas d'intérêt économique à acheter les matières organiques brutes en quantités limitées (inférieures à quelques tonnes). Les engrais formulés en granulés facilitent l'incorporation des éléments fertilisants dans les substrats et garantissent une meilleure distribution de ceux-ci. PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

Le producteur n'a pas d'intérêt économique à acheter les matières organiques brutes en quantités limitées (inférieures à quelques tonnes). Les engrais formulés en granulés facilitent l'incorporation des éléments fertilisants dans les substrats et garantissent une meilleure distribution de ceux-ci. PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

L'intérêt grandissant en horticulture pour les fertilisants organiques rencontre une multitude de produits revendiquant des avantages vérifiés ou non. Les matières premières fertilisantes autorisées pour une production végétale selon le cahier des charges de l'agriculture biologique (AB) sont listées dans l'annexe 1 du règlement CE 889/2008 du 5 septembre 2008. Pour un producteur désirant fertiliser avec des intrants d'origine naturelle, cette liste donne un aperçu des matières premières rencontrées sur le marché.

1 FERTILISATION AZOTÉE ORGANIQUE.

Pour des cultures en pleine terre, les apports en azote organique sont assurés par des rotations avec des engrais verts, des composts de fumier et des épandages d'engrais organiques du commerce. Le parcours technique le plus rencontré en culture hors-sol est basé sur le choix d'un substrat de culture contenant au moins 20 à 30 % de compost mature de déchets verts - reconnus pour leurs apports en souches microbiennes et en composés humiques - et de matières premières fertilisantes autorisées en AB. Après 12 à 16 semaines de culture avec cette fertilisation du substrat, les plantes montrent des signes d'une difficulté à maintenir la photosynthèse et la croissance à son optimum. Un ou deux surfaçages avec des engrais organiques permettent d'assurer la nutrition des plantes au-delà de cette durée de culture.

Pour fertiliser avec le même dosage qu'un kilogramme d'engrais conventionnel enrobé incorporé par mètre cube de substrat, il faut utiliser en moyenne 2,5 kg d'engrais organique en granulés. En pépinière d'arbres et d'arbustes, il faut appliquer 3 à 15 g d'engrais organique granulés par litre de conteneur, avec un dosage plus faible pour les plantes sensibles à la conductivité. Généralement, les producteurs appliquent les formulations liquides organiques en appoint pour des cultures sous serre, en subirrigation ou en goutte-à-goutte. Les fertilisants azotés contiennent diverses formes organiques, jusqu'aux acides aminés. Ceux-ci peuvent être absorbés tels quels par le système racinaire. En application foliaire, ils présentent des effets antistress et promoteurs de la croissance sur certaines cultures.

Les fertilisants organiques liquides sont plus coûteux que leurs homologues conventionnels : 3 à 4 euros HT le litre (densité 1,3) pour des liquides concentrés de 3 à 5 % d'azote organique. Il faut compter 0,8 à 1 euro HT le kg pour des granulés organiques et organo-minéraux.

2 DISPONIBILITÉ EN AZOTE ASSIMILABLE.

Elle résulte de la minéralisation de l'azote organique – présent sous forme de protéines et devant être minéralisé en ammonium et en nitrate –, du lessivage et de la séquestration des formes solubles minéralisées de l'azote. Les températures froides (< 15 °C), le manque d'eau, la conductivité élevée du substrat, l'absence de matières organiques compostées limitent la minéralisation de l'azote dans les supports de culture. Une matière organique mal compostée ajoutée au support de culture séquestre une partie de l'azote lors de sa dégradation biologique. Si les températures sont chaudes, le contrôle des arrosages permet de limiter les pertes par lessivage. En culture d'extérieur, une pluie mal positionnée peut obliger le producteur à effectuer un nouvel apport d'azote organique.

Les matières premières organiques d'origine animale présentent des concentrations en azote total plus importantes (jusqu'à 13 % d'azote organique total pour le guano) que celles d'origine végétale ; une faible partie est minéralisée et disponible rapidement. La minéralisation de l'azote organique d'origine animale suit des courbes de disponibilité différentes de celles des matières d'origine végétale : soit une libération rapide après un certain temps de latence (poudre de corne broyée), soit une libération constante avec une quantité finale disponible élevée (farine de plume). Des essais menés à l'institut Weihenstephan (Allemagne) en 2001 en culture de salades sur tourbe ont montré que la minéralisation de l'azote organique après douze semaines à 15 °C était de 82 % pour le guano du Pérou et les farines de sang et de plumes, 71 % pour les tourteaux de ricin, 62 % pour la poudre de corne. Des essais en conditions contrôlées (humidité constante et température de 28 °C), en absence de culture de plantes, après douze semaines, montrent que l'azote du fumier de bovin composté est minéralisé à 25 % (1). Dans le cas des matières organiques d'origine végétale, la finesse de la granulométrie du produit active la minéralisation de l'azote total.

3 DONNÉES TECHNIQUES DISPONIBLES POUR LE PRODUCTEUR.

Le producteur devrait pouvoir disposer des courbes de minéralisation des matières premières azotées en fonction de leur nature et de leur granulométrie, fournies par les fabricants d'engrais organiques et de supports de culture. Mais elles ne sont généralement pas disponibles. De même, les fabricants ne donnent pas d'informations précises sur la nature et les dosages des matières premières entrant dans la composition des formulations d'engrais. Le professionnel doit donc s'attendre à réaliser des ajustements dans le fractionnement des apports de fertilisants pour éviter des effets de carence.

Les fiches techniques des fertilisants acceptés en AB doivent présenter le dosage de l'azote organique total et des formes solubles (ammonium, nitrate et urée) dans tous les cas ; dans celui des liquides, il doit également préciser le dosage de l'azote insoluble (acides aminés libres et totaux). Les formes ammonium et nitrate doivent être chacune inférieures à 1 % et l'urée doit être absente des formulations utilisables en AB. Les matières premières naturelles autorisées en AB présentent des teneurs en phosphore soluble très faibles (maximum 2 %) et toutes les formes solubles de synthèse sont interdites. Au sein du support de culture, l'activité microbienne intervient au fur et à mesure des besoins de la plante pour rendre disponible le phosphore non soluble apporté par les fertilisants organiques. En apport complémentaire dans les formulations liquides, il existe une source de phosphore soluble limitée jusqu'à 3 % de phosphore total et acceptée en agriculture biologique : des extraits d'algues obtenus par solubilisation à l'acide phosphorique.

4 POTASSIUM, MAGNÉSIUM ET VITALITÉ.

Des producteurs en pleine terre utilisent les extraits de vinasse de mélasse de betterave ainsi que des vinasses brutes pour leur richesse en potassium et magnésium. Du sulfate de potassium obtenu de sel brut de potasse est aussi cité dans le règlement européen pour l'AB. Certains intrants appliqués en foliaire et/ou racinaire présentent des effets de stimulation de la vitalité des végétaux, qui répondent ainsi mieux aux stress biotiques et/ou abiotiques. Les résultats sont démontrés depuis plus de dix années en maraîchage et en arboriculture dans divers pays. Ce sont des produits issus de végétaux en général, tous acceptés en AB (extraits d'algues, d'ortie, de consoude, acides humiques, acides aminés, avec ou sans résidus microbiens, mycorhizes, bactéries...) et qui revendiquent des effets sur la croissance, l'enracinement, l'optimisation de la photosynthèse et la tenue des végétaux d'ornement dans le circuit de vente. Les expérimentations continuent pour déterminer les cultures répondant au mieux à ces utilisations et évaluer les formulations mises sur le marché les plus intéressantes en termes de performance/coût.

<p>(1) Selon la norme XP U44-163, qui donne les conditions de mise en œuvre d'essais de minéralisation de l'azote organique pour des amendements organiques.</p> <p>(2) Consultante ingénieur agronome-microbiologiste.</p>

Une réglementation des intrants organiques variable d'un pays à l'autre

La mise sur le marché de matières organiques non fertilisantes mais ayant des effets de stimulation de la vitalité par exemple (extraits d'algues, acides humiques, acides aminés, mycorhizes, bactéries...) est facilitée dans certains pays européens. En France, leur utilisation ne peut se faire que dans le cadre d'un complément aux supports de culture ou matières fertilisantes, à la condition que ces additifs aient préalablement fait l'objet d'une autorisation de mise en marché pour l'usage en question. En Allemagne et en Autriche, des complexes de microorganismes, des mélanges d'une multitude de matières actives d'origine minérale, animale ou végétale dans des formules homéopathiques, ou encore des extraits de plantes sont commercialisés comme des produits destinés à renforcer la vie microbienne des supports et la vitalité des végétaux. En Italie, les acides aminés, les extraits d'algues et certaines souches de champignons mycorhiziens sont mis sur le marché sous la dénomination « biostimulants » dans le cadre de la réglementation des matières fertilisantes ; leur utilisation est reconnue depuis plus de vingt années avec de réels succès sur certaines cultures. Des tests en laboratoire sur des cellules végétales et des plantules, réalisés en quatre semaines, déterminent la nature des effets des formulations mises sur le marché – effets hormonaux, biostimulants, fertilisants (Institut Relation Sol Plantes, Centro par le Ricerca in Agricoltura, Anna Benedetti, Rome). En Espagne, une réglementation couvre tous les produits promoteurs de croissance et de vitalité, contenant peu d'éléments fertilisants. Cependant, les fabricants et distributeurs ne donnent pas suffisamment d'informations techniques de référence sur leur efficacité et encore moins sur la nature des compositions souvent complexes.

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