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Gestion

Apprentissage : des inquiétudes à tous les niveaux

Odile Maillard - Le Lien Horticole - n°746 - mars 2011 - page 16

Préparation incomplète, contraintes administratives, financements insuffisants, déficit du nombre d'entreprises d'accueil... Les freins au développement de l'apprentissage inquiètent à la fois les acteurs de la formation et les filières.
L'alternance formation/entreprise est un atout dans les formations par apprentissage. Pourtant, l'initiation des plus jeunes, la mise en œuvre du « bac pro 3 ans », la transparence de l'utilisation de la taxe, l'adaptation à la fonction publique et le nombre d'entreprises d'accueil doivent encore être adaptés ou améliorés pour une satisfaction à tous les niveaux.

L'alternance formation/entreprise est un atout dans les formations par apprentissage. Pourtant, l'initiation des plus jeunes, la mise en œuvre du « bac pro 3 ans », la transparence de l'utilisation de la taxe, l'adaptation à la fonction publique et le nombre d'entreprises d'accueil doivent encore être adaptés ou améliorés pour une satisfaction à tous les niveaux.

Avec le lancement au 1er janvier 2011 du Dima (Dispositif d'initiation aux métiers en alternance) par le gouvernement, Patrick Guès, responsable communication pour les Maisons familiales rurales (MFR) note un progrès : « Le Dima va permettre une formation par alternance, sous statut scolaire, destinée à faire découvrir à des jeunes de plus de 15 ans un “environnement professionnel correspondant à un projet d'entrée en apprentissage”. Les MFR se félicitent que ce texte offre enfin un cadre législatif incontestable, après l'épisode malheureux de l'apprentissage junior (en 2006). »

Pour autant, rien n'est joué. « Les MFR regrettent que ce parcours soit encore trop souvent conçu comme une filière de relégation pour des jeunes en échec scolaire (...). La lutte contre les ruptures de contrat est plus que jamais prioritaire. Une préparation de qualité à l'apprentissage permettrait de mûrir un projet et de choisir une formation, quel que soit le diplôme préparé, y compris pour des jeunes inscrits en lycée », poursuit Patrick Guès. Les MFR attendent un financement État/Régions et un accord entre les différents acteurs pour développer ce type de parcours dans les centres de formation d'apprentis (CFA).

Durant un déplacement en Seine-Saint-Denis le 1er mars dernier, le président de la République a évoqué le développement de l'alternance. Au-delà d'annonces immédiates dont elles prennent acte, les MFR attendent des mesures structurelles qualitatives et financières à plus long terme. Objectif : doubler le nombre de jeunes concernés.

Bac pro 3 ans

PEU ADAPTÉ À L'APPRENTISSAGE

Mais l'apprentissage n'est pas seulement en question au niveau des jeunes scolarisés en lycée. La mise en œuvre actuelle des « bacs pro 3 ans » est jugée mal adaptée à l'apprentissage. Il est difficile pour les entreprises d'embaucher un jeune de 15 ou 16 ans avec un contrat de travail sur une période aussi longue. Parallèlement, pour ces adolescents, s'engager dans un cursus figé dès la classe de seconde est ambitieux alors qu'ils sont en phase de réflexion sur leur projet professionnel. Les passerelles entre filières, en cours de formation, sont difficilement utilisables avec un contrat de travail longue durée...

Patrick Guès évoque une autre inquiétude des MFR. « Les bacs pro devraient être le moteur essentiel du développement de l'apprentissage aujourd'hui. Or, les 21 892 apprentis en moins dans le niveau V, après la disparition des BEP (Brevet d'étude professionnel), n'ont pas été compensés par les 10 754 bacs pro supplémentaires. Le socle de l'apprentissage constitué par les niveaux V et IV s'appauvrit. » Pour tirer entièrement profit des potentialités que recèle l'alternance, les MFR souhaitent un cursus du « bac pro 3 ans » en apprentissage plus attractif, des parcours initiatiques à l'apprentissage dans les CFA, pour des jeunes ayant terminé le collège, et pour augmenter le nombre d'élèves titulaires d'un CAP passant en filière bac pro. Autre proposition : développer la mixité des statuts (apprentissage, scolaire, contrat de professionnalisation) durant la formation et au sein des groupes.

Certaines règles sont également jugées trop contraignantes : il faudrait permettre l'entrée en apprentissage tout au long de l'année, encourager les changements d'entreprise et la mobilité hors des frontières pendant la formation.

Concernant le financement, les MFR demandent, toujours selon Patrick Guès, « de limiter le montant de la taxe d'apprentissage par apprenti, de simplifier ses règles de répartition. Et de fusionner la contribution au développement de l'apprentissage avec la taxe d'apprentissage ».

Taxe d'apprentissage

MANQUE DE TRANSPARENCE

De son côté, la fondation d'Auteuil a fait réaliser une enquête (1) sur l'état d'esprit des chefs d'entreprise face à l'apprentissage et à son financement. Près de sept chefs d'entreprise sur dix estiment qu'ils y auront moins recours en 2011. Au premier rang des obstacles rencontrés, ils citent d'abord l'insuffisante adaptation des apprentis au monde de l'entreprise (19 %), puis leur propre méconnaissance du dispositif. L'utilisation de l'« impôt solidaire » que constitue la taxe d'apprentissage manque de transparence (pour 44 % des chefs d'entreprise interrogés) et seulement 39 % d'entre eux connaissent précisément l'établissement auquel la taxe est destinée. La fondation d'Auteuil rappelle que cette taxe finance notamment l'achat d'équipements pédagogiques ou l'accompagnement des étudiants en stage.

Pour le CNFPT (Centre national de la formation publique territoriale), les résultats des plus récentes études (2) notent une faible proportion de jeunes et montrent que l'apprentissage est sous-utilisé, voire marginal, dans la fonction publique. Dommage que les derniers chiffres datent de 2008, mais les tendances restent intéressantes. Les freins identifiés sont nombreux : procédures administratives contraignantes comme l'agrément des maîtres d'apprentissage, coûts de formation à la charge des administrations, pas d'embauche directe à l'issue du contrat (il faut passer les concours externes en vue d'une titularisation)... Toutefois, des assouplissements sont en cours et certaines régions prennent en charge tout ou partie des frais pédagogiques pour favoriser l'apprentissage dans les collectivités.

Expérience sur le terrain

UN DÉFICIT D'ENTREPRISES D'ACCUEIL

Globalement, la filière horticole déplore un déficit d'entreprises d'accueil pour les apprentis. Pour le CFPF (Centre de formation professionnelle forestière) de Châteauneuf-du-Rhône, dans la Drôme (26), l'inquiétude porte sur l'accueil des prochains grimpeurs-élagueurs. Un problème rencontré en particulier pour le certificat de spécialisation par alternance de niveau III (bac + 2) qui sera lancé à la rentrée 2011.

« Soutenez le métier de gestionnaire des arbres d'ornement en accueillant un apprenti ! » Tel est le mot d'ordre lancé alors que les futurs techniciens spécialisés dans l'arbre urbain ont besoin d'un ensemble de compétences toujours plus pointues et d'expérience de terrain.

<p>(1) Enquête réalisée par téléphone, en décembre 2010, par l'institut Ipsos auprès de 301 dirigeants de PME de 10 à 499 salariés. Disponible sur www.fondationauteuil.org/images/stories/pdf/aider/2011/apprentis_auteuil_ipsos_dec_2010.pdf</p> <p>(2) Publication de l'observatoire de l'emploi, des métiers et compétences du CNFPT, téléchargeable sur www.cnfpt.fr et www.observatoire.cnfpt.fr</p>

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CHIFFRES

Nouveaux contrats (chiffres 2008) :

- 300 000 dans le privé,

- moins de 7 000 dans le public.

Taux de rupture : de 25 à 30 % des contrats d'apprentissage ne vont pas à terme.

L'essentiel de l'offre

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