En France, le problème du végétal serait plus lié à une interface entre distributeurs et consommateurs qui fonctionne très mal qu'à une pénurie sur le marché. Pour Marcel Gaziella, « il y a un manque cruel de compétences sur le végétal dans les jardineries alors que les plantes sont notre cœur de métier. Les végétaux devraient représenter plus de la moitié du chiffre d'affaires des magasins. D'autant que c'est le végétal qui fait vivre les points de vente car ils offrent les plus belles rotations. Les plantes vertes partent en une semaine, les camélias en quinze jours ! Seuls les gros sujets traînent un peu en pépinière, mais nous devons savoir les entretenir ».
Pour ce responsable des achats végétaux du groupement Pollen, ce manque de compétence nuit gravement à l'évolution de la production française. Elle qui est déjà handicapée par des distorsions de concurrence avec d'autres pays européens plus laxistes en terme de coût de main-d'œuvre, elle doit aussi faire face à l'absence de vendeurs compétents. « Un camélia qui vient de Bretagne est autrement plus intéressant pour un jardinier que la même plante en provenance d'Italie, fait remarquer Marcel Gaziella. Sauf que le prix n'est pas le même. Et comme le consommateur n'a pas d'interlocuteur en magasin qui puisse lui expliquer cette différence, le jardinier va se fier à ce qu'il appréhende le mieux : le prix. »
Du coup, le commerce jardin se trouve face à la concurrence de la grande distribution qui s'engouffre dans tous les créneaux laissés libres. Et la guerre se fait alors sur les mêmes produits, avec le risque de voir se développer la vente de végétaux comme des consommables. Un camélia sera acheté pour une simple floraison et mis au rebut l'année suivante.
« Nous devons refaire rêver les gens, martèle Marcel Gaziella. Notre rôle est de vendre du rêve et un cadre de vie. Avec une clientèle plus sensible à l'achat d'impulsion, nous devons être très professionnels pour éviter les déceptions. » Ce débat sur la compétence des vendeurs semble éternel et sans solution. « C'est vrai qu'avec des salaires proches du Smic tout en travaillant tous les week-ends, nous allons avoir du mal à faire évoluer les choses, remarque Marcel Gaziella. Pourtant, il ne faut pas grand-chose pour redémarrer. »
Notre homme reste cependant inquiet sur l'évolution du monde des jardineries. « Ceux qui savent travailler le végétal s'en sortiront, estime-t-il. Les autres auront de grosses difficultés. »
Et pour lui, la production française doit continuer à exister, même si elle subit une concurrence déloyale d'autres pays européens. La remise à plat du système de collecte des rolls CC devrait faciliter la logistique. Et s'il fait des achats en Espagne, en Italie et en Hollande, il travaille aussi beaucoup avec les producteurs français.
« Le Salon du végétal est un lieu de rencontre privilégié pour découvrir de nouveaux fournisseurs, même si les tendances et les nouveautés se font rares. Ce salon est indispensable, au même titre que ceux d'Essen et de Padoue », précise-t-il.
« Actuellement, nous devons gérer des baisses d'achats de la part des consommateurs sur des familles de végétaux comme les arbustes de haie et les arbres tiges d'ombrage ou d'alignement. La réduction de la taille des jardins fait qu'il n'y a plus de place pour les haies et les arbres. En outre, le manque de moyens côté consommateur entraîne des investissements plus calculés. Au final, trop bataillés, les prix des végétaux de haie baissent au point que les producteurs sont obligés de les vendre à perte ou presque. Certains en ont abandonné même la production ! », précise Marcel Gaziella, pour qui le nœud du problème est dans le savoir-vendre en magasin. Un autre débat...