Retour

imprimer l'article Imprimer

Technique

Quel est votre diagnostic ? C'est la fausse-cloque à Exobasidium

Par Jérôme Jullien, expert horticole - Le Lien Horticole - n°752 - mai 2011 - page 10

Protubérances blanches. Au printemps, le responsable d'une pépinière du nord-ouest de la France spécialisée dans la production des plantes de terre de bruyère détecte des protubérances d'un blanc pur ou rosé sur certaines feuilles d'azalées japonaises. Ces symptômes pourraient compromettre leur commercialisation. PHOTO : GILLES WUSTER

Protubérances blanches. Au printemps, le responsable d'une pépinière du nord-ouest de la France spécialisée dans la production des plantes de terre de bruyère détecte des protubérances d'un blanc pur ou rosé sur certaines feuilles d'azalées japonaises. Ces symptômes pourraient compromettre leur commercialisation. PHOTO : GILLES WUSTER

DÉTECTION

Le chef de culture contacte son conseiller horticole pour établir un diagnostic et évaluer le risque parasitaire. Selon toute vraisemblance, les cloques sont d'origine cryptogamique, car aucun ravageur n'est retrouvé à l'intérieur des galles. Des échantillons sont adressés à un laboratoire d'analyses mycologiques pour déterminer les pathogènes en cause. Quelques jours plus tard, les résultats signalent dans les galles la présence d'un mycélium court, pourvu de petits suçoirs. Deux maladies sont mises en évidence : la galle cireuse de l'azalée ou fausse-cloque de l'azalée (Exobasidium japonicum = E. vaccinii var. japonicum) sur Azalea japonica et la fausse-cloque du camélia (Exobasidium camelliae) sur Camellia japonica. Sur le plan taxonomique, ces champignons appartiennent à la classe des basidiomycètes, à l'ordre des exobasidiales et à la famille des exobasidiacées. D'autres espèces sont rattachées au genre Exobasidium sur diverses éricacées, notamment E. rhododendri sur le rhododendron et E. vaccinii sur le myrtillier ou l'airelle rouge (Vaccinium vitis-idaea). L'espèce E. vaccinii a été subdivisée en plusieurs sous-espèces ou variétés biologiques, dont E. vaccinii var. japonicum (= E. japonicum). Les azalées Azalea japonica et A. indica cultivées en pot, taillées et arrosées par aspersion sont particulièrement sensibles à E. japonicum. En pépinière, certaines variétés d'azalée japonaise comme 'Anne Frank' semblent plus réceptives à la maladie. D'ordinaire, les fausses-cloques sont plus spectaculaires que graves, car elles n'atteignent pas les fonctions vitales des plantes. Elles sont surtout inesthétiques, mais entraînent une réduction de croissance. En cas d'attaque d'un bourgeon, son axe reste court et les écailles déformées constituent une rosette charnue dans laquelle se situent parfois des feuilles dont le développement est à peu près normal. La floraison est quelquefois dépréciée. À l'origine, les fausses-cloques étaient très répandues au Japon, puis ces maladies sont apparues en Europe à partir de 1907 en Italie, Belgique, Pays-Bas et Italie. Les premières détections en France datent de 1913. Dans la région de Gand en Belgique, la fausse-cloque de l'azalée est appelée « maladie des petites oreilles » d'après l'aspect des feuilles atteintes.

CONFUSIONS POSSIBLES

Lorsqu'un observateur est confronté la première fois à une fausse-cloque, il peut penser à une galle d'insecte. Mais dans ce cas, une coupe de la boursouflure galliforme ne révèle ni larve, ni imago. En revanche, à l'aide d'une loupe, on peut observer que le mycélium condensé sous l'épiderme apparaît en un stroma caractéristique d'une attaque de champignon. C'est à cet endroit que se forment les fructifications. Autre cause de confusion, la pourriture grise (Botrytis cinerea) peut surinfecter les fausses-cloques en présence d'humidité et masquer en quelques jours le pathogène primaire.

TRANSMISSION ET DÉVELOPPEMENT

La plupart des exobasidiacées attaquent des végétaux de la famille des éricacées. Ces champignons subsistent dans les bourgeons de l'extrémité des rameaux et sur les organes malades. L'infection des plantes hôtes a lieu au début de la période végétative, soit par pénétration des filaments intercellulaires au travers des stomates, soit par perforation directe de la paroi épidermique. Les suçoirs sont simples ou en bâtonnets. Les hyphes, très grêles, sont rassemblés en paquets sous les cellules de la couche épidermique. Ils donnent finalement un faisceau de basides – cellules reproductrices des basidiomycètes – qui émergent par suite d'un éclatement cuticulaire. Chez les exobasidiales, les basides sont produites le plus souvent à la surface des organes parasités, les feuilles surtout, qui sont plus ou moins profondément déformées en grosses galles colorées. La maladie se traduit au niveau des jeunes organes par une hypertrophie marquée des tissus. Le parenchyme des feuilles malades n'a plus aucune différenciation fonctionnelle. Il est pratiquement privé de chlorophylle, mais pourvu d'une grande quantité de sucres et de tanin. Les pigments verts régressent au profit d'anthocyanes entraînant une coloration blanc crème, rosâtre ou rougeâtre. La fructification des basides du champignon apparaît à la surface de la cuticule épidermique sous la forme d'un duvet blanchâtre composé de basidiospores. Lorsqu'elles germent, ces spores produisent des conidies bourgeonnantes se multipliant comme des levures. Elles sont à l'origine des contaminations secondaires. Leur dissémination est assurée par les courants d'air, les outils de taille et les aleurodes, notamment l'aleurode des serres (Trialeurodes vaporariorum). Les piqûres de cet insecte assurent les infections. Ensuite, l'incubation est assez longue, jusqu'à plusieurs semaines selon les températures et l'humidité, au cours de laquelle aucun symptôme n'apparaît. En fin de cycle, les galles brunissent et se dessèchent.

Les symptômes observés

Feutrage blanchâtre. Les galles foliaires modifient totalement l'aspect du limbe. Il devient très épais, reste plan ou se gaufre, et prend une coloration d'abord vert pâle, puis blanc nacré ou rose saumon. Ensuite, un feutrage blanchâtre recouvre la surface des parties altérées.

Feutrage blanchâtre. Les galles foliaires modifient totalement l'aspect du limbe. Il devient très épais, reste plan ou se gaufre, et prend une coloration d'abord vert pâle, puis blanc nacré ou rose saumon. Ensuite, un feutrage blanchâtre recouvre la surface des parties altérées.

Uniquement à l'extrémité des rameaux. La déformation des bourgeons et des feuilles s'exprime uniquement à l'extrémité des rameaux. Les galles plus âgées sont marron clair. Les excroissances sont de dimensions et de formes très variables.

Uniquement à l'extrémité des rameaux. La déformation des bourgeons et des feuilles s'exprime uniquement à l'extrémité des rameaux. Les galles plus âgées sont marron clair. Les excroissances sont de dimensions et de formes très variables.

Déformation des bourgeons. En cas d'attaque d'un bourgeon, l'axe reste court et les écailles déformées constituent une rosette charnue dans laquelle se situent parfois des feuilles dont le développement est à peu près normal.

Déformation des bourgeons. En cas d'attaque d'un bourgeon, l'axe reste court et les écailles déformées constituent une rosette charnue dans laquelle se situent parfois des feuilles dont le développement est à peu près normal.

Des galles sur camélias également. Dans la pépinière, de rares camélias manifestent également des excroissances brun fauve et blanchâtres au niveau des feuilles, plus rarement des pièces florales. L'hypertrophie a la grosseur d'une noix, mais peut s'étendre jusqu'à 15 cm de long. Le camélia appartient à la famille botanique des théacées et non des éricacées comme l'azalée, mais toutes deux sont originaires du Japon. PHOTOS : JÉRÔME JULLIEN

Des galles sur camélias également. Dans la pépinière, de rares camélias manifestent également des excroissances brun fauve et blanchâtres au niveau des feuilles, plus rarement des pièces florales. L'hypertrophie a la grosseur d'une noix, mais peut s'étendre jusqu'à 15 cm de long. Le camélia appartient à la famille botanique des théacées et non des éricacées comme l'azalée, mais toutes deux sont originaires du Japon. PHOTOS : JÉRÔME JULLIEN

MÉTHODES DE LUTTE

Une fois la maladie déclarée, la prophylaxie est importante pour éviter une dissémination du champignon dans la culture. Supprimer les galles avant la sporulation. La stratégie de lutte préventive consiste à effectuer si possible une rotation des cultures, à balayer les bâches au sol avant le placement des conteneurs, à prélever les boutures et les greffons sur des pieds-mères sains, à lutter contre les aleurodes vecteurs en serre et à éviter l'arrosage par aspersion à la faveur d'une irrigation localisée au goutte-à-goutte. En culture hors-sol, il est nécessaire de distancer les azalées suffisamment entre elles pour limiter le confinement de végétation. En complément de ces mesures culturales, un traitement peut être réalisé avant le débourrement avec une bouillie bordelaise. En période de végétation, notamment sous abri où les risques de contamination sont les plus importants, il est possible d'appliquer un fongicide autorisé en cultures florales ou sur arbustes d'ornement, par exemple à base de myclobutanil + mancozèbe ou cyprodinil + fludioxonil.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :