Futiles, les conversations liées à la pluie et au beau temps ? Malheureusement pas cette année, tout particulièrement ce printemps. Tout avait pourtant plutôt bien commencé, avec un mois d'avril anormalement doux qui avait incité les jardiniers à se mettre au travail bien tôt. Mais la douceur se transformant en chaleur et le climat restant désespérément sec pour une grande majorité du territoire, le mois de mai a viré à la catastrophe pour de nombreuses entreprises.
Si les jardineries semblent ne pas trop mal s'en sortir, c'est essentiellement grâce à de bonnes ventes de produits manufacturés : les beaux jours incitent à l'achat de barbecues et de mobilier de jardin. Par contre, les étals restent chargés en végétaux, les ventes sont trop faibles pour générer les réassorts nécessaires pour écouler les produits présents dans les serres de production.
Les villes fleuries s'interrogent...
Du côté du marché du paysage, l'heure est aux interrogations, en particulier pour les collectivités. Les plantations de massif ont débuté vers la mi-mai, c'est également à cette période que sont tombés les premiers arrêtés de restriction d'arrosage (qui concernent près de la moitié des départements français aujourd'hui). Pour les villes qui ont planté, la question se pose de savoir s'il sera possible d'arroser, et ce pour la durée de la saison. Pour celles qui ne l'ont pas encore fait, il faut décider si le programme de plantation prévu doit être effectué dans son intégralité.
Un sondage réalisé la semaine dernière auprès de nombreuses villes bien placées au palmarès du fleurissement montre que beaucoup d'entre elles ont réduit le nombre de massifs implantés. Dans la région Centre et en Normandie, par exemple, certaines réfléchissent à la possibilité de ne pas fleurir du tout l'espace public cette année.
Le CNVVF, Conseil national des villes et villages fleuris, a affirmé que, comme en 2003, il tiendrait compte du contexte climatique pour noter les communes concernées par le passage d'un jury cette année.
Les collectivités interrogées insistent sur les efforts qu'elles ont entrepris, en particulier depuis 2003, pour limiter leurs besoins en eau : recours massif aux paillages, limitation des surfaces engazonnées particulièrement gourmandes en eau (certaines villes ont déjà arrêté d'arroser les gazons cette année !) ou choix d'espèces bien adaptées aux climats locaux et donc plus aptes à supporter les excès du climat. On peut penser que si 2003 avait constitué un virage dans la gestion des espaces verts et une prise de conscience pour bien des villes qui n'avaient pas encore modifié leurs habitudes vis-à-vis de l'irrigation des espaces verts, 2011 pourrait d'ores et déjà s'annoncer comme une année d'accélération des tendances : les gestionnaires interrogés la semaine dernière se félicitent d'avoir su modifier leur palette végétale pour se tourner vers plus de vivaces, ou d'avoir réduit leur nombre de suspensions ou de bacs considérés comme exigeants en eau...
Des tendances qui s'affirment un peu plus chaque saison depuis maintentant une petite dizaine d'années et qui se ressentent du côté des producteurs. Certains affirment que seules quelques commandes de fin de programme de plantations ont été annulées, d'autres déplorent des désistements plus sérieux. Mais, surtout, la frilosité des collectivités, additionnée à celle des consommateurs, donne un mois de mai pour le moins morose, pour ne pas dire plus. Les prochaines semaines devraient permettre d'affiner l'ensemble de ces ressentis, mais on peut déjà craindre un printemps 2011 difficile, une désillusion dont la filière se serait volontiers passée...