Au lycée, le plan Écophyto passe, entre autres, par l'utilisation de l'aubergine en tant que plante piège d'aleurodes en culture de fuchsia. Les comptages sont effectués par les élèves.
Trialeurodes vaporariorum se concentre sur l'apex (la pointe) des feuilles d'aubergine, tandis que Bemisia tabaci se positionne sur l'ensemble du feuillage : c'est un moyen efficace de les différencier sans loupe.
L'exploitation du lycée horticole Le Fresne, à Angers, dans le Maine-et-Loire, fait partie des acteurs du plan Écophyto 2018. À ce titre, elle s'est engagée à mettre en place, pendant trois ans, plusieurs itinéraires techniques innovants concernant les économies en utilisation de pesticides.
Parcours innovants
DES OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES
« Nous faisons partie d'un groupe d'établissements pilotes mobilisés sur le plan Écophyto 2018 (axe 2 – action 16). Il s'agit de mettre en place des parcours innovants mais également de sensibiliser les jeunes en formation, futurs salariés ou exploitants. Tous les enseignants abordent le sujet en cours et les élèves pratiquent sur le terrain. Les apprenants doivent conduire des essais, savoir calculer l'IFT (critère de mesure des résultats Écophyto par indice de fréquence de traitement)... L'objectif visé est de réduire l'utilisation des traitements de 50 % », explique Éric Duclaud, directeur de l'exploitation du lycée. Certains parcours sont complémentaires ou menés en complémentarité avec d'autres expérimentations suivies par des organismes de recherche et/ou d'expérimentation.
Plantes pièges
L'EXEMPLE DE L'AUBERGINE
C'est le cas avec l'utilisation de plantes pièges (aubergine) en culture sous serre contre les aleurodes. Un premier essai était en cours l'hiver dernier sur le poinsettia et un second est en place ce printemps sur le fuchsia et sur le « géranium zonale », toujours contre l'aleurode sous serres. Ce travail s'effectue en partenariat avec la station d'expérimentation Arexhor Pays de la Loire (du réseau Astredhor), aux Ponts-de-Cé, et avec l'Inra d'Avignon, pour sélectionner les variétés d'aubergines les plus attractives. On compte un pied d'aubergine tous les 40 m². Les aleurodes se regroupent en masse sous les feuilles sur lesquelles elles sont gérées : effeuillage pour enlever les pontes et les larves, apport d'auxiliaires, voire d'insecticide en localisé. La culture de poinsettia 2011 fera l'objet d'une nouvelle expérimentation pour affiner les résultats et pour comparer les coûts. La variété d'aubergine la plus « performante » trouvée en 2010 sera réutilisée. « Nous tendons vers le zéro insecticide mais nous allons comparer les coûts pour l'utilisation de l'auxiliaire Amblyseius swirskii (57 euros les cent sachets) à appliquer toutes les quatre semaines, uniquement sur les pieds d'aubergine, et pour celle d'un insecticide localisé et d'un lâcher d'auxiliaires sur le poinsettia. Cette approche devrait aussi convenir pour l'hibiscus et le “géranium zonale” en évitant les lâchers massifs onéreux... », souligne Éric Duclaud. Les élèves de l'établissement participent aux relevés et apprennent à observer sous le contrôle scientifique d'Alain Ferre, directeur de la station Arexhor Pays de la Loire.
Plantes compagnes
LA CRÉATION DE HAIES NATURELLES
« En pépinière, toujours dans le cadre d'Écophyto, nous essayons de booster la nature et de travailler sur la biodiversité », poursuit le directeur de l'exploitation. Le lycée et la station Arexhor Pays de la Loire testent quelques pieds de Ribes sanguineum au milieu des cultures d'azalées (sur 0,5 hectare). Démarrant tôt en saison, le groseillier attire trois à cinq espèces de pucerons spécifiques qui se succèdent dans le temps. Les prédateurs naturels présents dans les haies alentours, plus ou moins en diapause, « se réveillent », consomment les pucerons des Ribes, se multiplient, et peuvent intervenir plus massivement contre une attaque sur les azalées. « Voilà pour la théorie. Reste à valider ce concept de “plantes compagnes” sur plusieurs années. Des haies naturelles devront être créées à la place des traditionnelles haies monospécifiques de conifères. »
Les équipes cherchent par ailleurs à refaire pousser des fleurs dans des carrés de pépinière, par exemple du Bidens, des chrysanthèmes, des potentilles... « C'est vraiment intéressant de pouvoir favoriser la prédation naturelle contre des parasites majeurs comme les pucerons. C'est simple, mais encore faut-il sélectionner les bonnes espèces car, à l'extérieur, tout ne va pas sur tout. Cette expérimentation, mise en place sur quelques mètres carrés à la station Arexhor, est poursuivie sur des planches de cultures plus vastes au lycée Le Fresne et chez quelques pépiniéristes et rosiéristes. »
Projet BiodivEA
L'ACCOMPAGNEMENT D'UN MARAÎCHER
Le lycée participe aussi à d'autres initiatives. « En parallèle, nous faisons partie du projet BiodivEA (biodiversité dans les exploitations agricoles), dont l'objectif est de mobiliser l'enseignement agricole sur la thématique de la biodiversité. Un groupe d'une dizaine de lycées travaille sur ce thème dans les exploitations agricoles en local, indique Éric Duclaud. Écophyto et BiodivEA sont deux actions complémentaires. Elles visent à diminuer l'usage des pesticides en favorisant le développement de méthodes alternatives : plantes pièges, plantes compagnes, biodiversité naturelle et développement des productions biologiques tout en soutenant la création d'une entreprise. Nous avons, par exemple, favorisé l'installation d'un maraîcher, en voisinage de nos terrains. Il produit en bio, en agriculture bio-dynamique, et adhère au groupement Demeter. Il transforme progressivement 3,2 hectares de nos terrains en agrobio. Les produits récoltés seront en partie commercialisés au restaurant du lycée, en circuit très court. »
En pratique, il y a notamment des analyses biologiques du sol à effectuer et beaucoup de comptages. « Les élèves participent totalement à la démarche. Toutes les classes sont concernées par ce projet, chacune avec sa thématique. Il s'agit de remettre l'agronomie au centre de nos formations autour de sept axes stratégiques développés sur trois ans. Le suivi et la mesure de la biodiversité naturelle sont également réalisés par le Museum national d'Histoire naturelle de Paris, partenaire de BiodivEA. Et toujours en local, nous travaillons avec la ligue de protection des oiseaux (LPO 49), le Rucher-École 49 dont le siège est au Fresne. Dans ce cadre, nous envisageons de planter des espèces censées nourrir les abeilles et les oiseaux pour augmenter la biodiversité du territoire et créer un corridor écologique. La dynamique des populations d'abeilles va être particulièrement suivie », conclut Éric Duclaud.