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Gestion

Surveillance des cultures : un service collectif qui profite aussi à l'entreprise

Valérie Vidril - Le Lien Horticole - n°759 - juin 2011 - page 13

Les observateurs du réseau d'épidémiovigilance jouent le rôle de sentinelles dédiées aux filières, mais leur implication bénéficie également à l'entreprise ou au service « espaces verts ».
En Pays de la Loire, les observateurs du réseau d'épidémiovigilance bénéficient de formations sur la reconnaissance des ravageurs et des auxiliaires. PHOTO : NOÉMIE JACQUEMIN, FREDON-PAYS DE LA LOIRE

En Pays de la Loire, les observateurs du réseau d'épidémiovigilance bénéficient de formations sur la reconnaissance des ravageurs et des auxiliaires. PHOTO : NOÉMIE JACQUEMIN, FREDON-PAYS DE LA LOIRE

Le renforcement de la Surveillance biologique du territoire (SBT), dans le cadre du plan national Écophyto 2018, vise à permettre au producteur, technicien ou au gestionnaire d'espaces verts de limiter ses applications phytosanitaires au strict nécessaire. Les bulletins de santé du végétal (BSV) – qui remplacent depuis maintenant deux ans les Avertissements agricoles – doivent l'y aider, en lui fournissant une analyse des risques liés aux bioagresseurs identifiés (*). Ces bulletins ne donnent aucune préconisation de traitement, mais peuvent fournir des conseils de prophylaxie ou tenir compte, dans l'analyse du risque, des auxiliaires présents naturellement. Ce sont les observations réalisées en amont par un réseau de professionnels impliqués qui permettent de rédiger ces BSV : conseillers techniques, responsables d'espaces verts, enseignants, producteurs... Plus ce réseau sera dense, plus la surveillance du territoire sera précise, et plus les professionnels pourront raisonner finement leurs stratégies de contrôle des bioagresseurs. Ce travail d'observation, certes lourd au départ, offre des contreparties.

Engagement

OUVRIR L'ŒIL ET NOTER

Dès le début du printemps, l'observateur surveille une ou plusieurs cultures sur des parcelles fixes, voire flottantes selon les phénomènes sanitaires qui apparaissent. Chaque semaine, la « sentinelle » relève les pièges, précise le stade phénologique, note les maladies, compte les ravageurs et les auxiliaires biologiques selon un protocole préétabli. Les adventices peuvent également être observées en espaces verts. Il se base sur une liste d'organismes nuisibles principaux à observer, mais la notation d'autres ravageurs ou maladies est prévue. Il transmet ses observations à l'animateurfilière, qui assure la rédaction des Bulletins de santé du végétal (BSV) et leur mise en ligne dans les trois jours. « Pour la filière horti/pépi, les observateurs rentrent leurs données dans un programme spécifique qu'ils envoient par mail », explique Noémie Jacquemin, de la Fredon, animatrice pour la filière « Cultures ornementales » en Pays de la Loire. Dans cette région, une quinzaine de cultures horticoles sont suivies sur 84 parcelles par plus d'une quarantaine d'observateurs recensés à ce jour ; un bulletin est rédigé tous les 15 jours jusqu'à l'automne ; la fréquence est réduite en période hivernale. « À terme, les observations seront rentrées dans une base de données nationale qui est déjà opérationnelle pour certaines filières. »

Sensibilisation

S'IMPLIQUER DANS LA PBI

Participer à la SBT renforce l'engagement de l'établissement ou du service « espaces verts » dans la Protection biologique intégrée (PBI). L'observateur est souvent déjà sensibilisé, comme Olivier Dhommeaux, chef de culture hors-sol aux pépinières Levavasseur (Brain-sur-l'Authion, 49). Il réalise le suivi épidémiologique sur Photinia et Prunus laurocerasus depuis le printemps 2010. « Cela fait huit ans que nous modifions nos pratiques dans l'entreprise. Nous avons commencé par n'utiliser que des produits compatibles avec les auxiliaires, puis nous avons supprimé les traitements préventifs. Depuis 2005-2006, nous suivons des formations PBI avec le Bureau horticole régional. » Outre les notations formalisées dans le cadre de la SBT, le chef de culture a élargi ses contrôles à l'ensemble des cultures de la pépinière. Participer au réseau a également donné envie à Sébastien Roulet, chef de culture chez Horticulture Bernard Froger (Les Ponts-de-Cé, 49), d'étendre ses observations, alors qu'il était essentiellement intéressé par le seul piégeage d'Autographa gamma et Duponchelia fovealis.

Connaissances

PROFITER DE FORMATIONS SPÉCIFIQUES

Avant de démarrer leurs travaux de notation, les observateurs bénéficient d'une formation déterminée selon les besoins de la filière et de la région : pour la filière ornement en Pays de la Loire par exemple, la formation porte sur la reconnaissance des ravageurs, maladies et auxiliaires associés. Pour maintenir leurs compétences, des formations régulières leur sont ensuite proposées. « Au début, il faut consacrer du temps à l'observation, reconnaît Olivier Dhommeaux. Mais on le regagne très vite, car on sait où chercher et quoi observer. Les formations et la pratique permettent une meilleure connaissance de la faune et des symptômes. » En détectant les premiers foyers, le producteur peut suivre leurs évolutions et cibler les interventions avant que les dommages ne se propagent à l'ensemble de la culture. Les formateurs aussi trouvent leur compte à participer à la SBT. Jacky Granger, responsable adjoint du domaine pédagogique et expérimental à Agrocampus/Inra, surveille une parcelle de pieds-mères de rosier en pot : « Les équipes cherchaient à améliorer la qualité de la PBI. La méthodologie mise en œuvre dans le cadre de la SBT permet d'affiner les observations. » François Dorineau, du lycée du Fresne, intègre d'ailleurs le protocole régional dans ses formations.

Moyens

DISPOSER D'OUTILS ET DE CONSEILS GRATUITS

Un ensemble d'outils spécifiques, utiles à la surveillance des cultures, est fourni gratuitement aux observateurs : loupes, matériel de piégeage, fiches d'identification et protocoles d'observation. Pour l'instant, le paiement des observations n'est pas la règle. Cependant, « depuis 2010, une indemnité est versée aux observateurs consacrant un surplus de temps à la SBT, précise Gilles Wuster, de la Draaf-Sral Pays de la Loire. Cette indemnité est une reconnaissance du travail fourni... » Un logiciel de relevés permet aux participants d'établir le bilan des observations et de le restituer en éléments exploitables pour la rédaction du BSV. « En cas de besoin, nous pouvons nous appuyer sur l'animateur-filière pour nous aider dans les notations ou l'identification des ravageurs, maladies et auxiliaires », ajoute Sébastien Roulet.

Échanges

RÉSEAUTER POUR ÊTRE LES PREMIERS INFORMÉS

Olivier Dhommeaux soulève un autre avantage à participer au réseau : la mutualisation. « Mes collègues observateurs sur d'autres cultures m'avertissent dès qu'ils ont détecté une maladie, ça me fait gagner du temps », illustre le chef de culture. Par ailleurs, les observateurs reçoivent les bulletins par mail, alors que la consultation des BSV nécessite le plus souvent de se rendre sur le site internet des Draaf (www.draaf.nomdelaregion.agriculture.gouv. fr) ou sur www.agrilianet.com : à charge au professionnel d'aller les consulter, car peu de services proposent encore un envoi par mail. La chambre régionale d'agriculture des Pays de la Loire devrait le faire prochainement.

<p>(*) Autres objectifs visés par les BSV : détecter les risques parasitaires émergents et surveiller les effets non intentionnels des traitements phytosanitaires (biovigilance).</p>

Le suivi biologique en action

Au sein de chaque région, le pilotage de la Surveillance biologique du territoire (SBT) est confié aux chambres régionales d'agriculture, sous l'autorité de la Draaf (Direction régionale de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt). Le comité de pilotage fixe les grandes orientations de la SBT. Des comités techniques opérationnels, suivis par des animateurs de filière, organisent la mise en œuvre concrète du réseau de surveillance avec les différents partenaires : choix des cultures et des bioagresseurs à suivre, représentativité parcellaire, répartition des observations en utilisant des protocoles de surveillance harmonisés... L'animateur-filière assure la rédaction des Bulletins de santé du végétal (BSV) à partir des informations remontées par un réseau d'observateurs. Il évalue les risques à l'aide de modèles de prévision, quand ils existent. Les observations collectées et synthétisées sont mises en relation avec le stade phénologique et les données météorologiques, puis confrontées aux seuils de nuisibilité. Différentes photos (ravageurs, maladies, auxiliaires) illustrent le bulletin. Le rythme de publication du BSV varie selon l'actualité sanitaire, les cycles de culture et la complexité des suivis. L'existence d'un BSV pour une filière (horticulture ornementale, zones non agricoles, arboriculture...) dépend de l'importance relative de la filière à l'échelle régionale et de la volonté des professionnels à s'impliquer dans le dispositif.

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