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Sol, biodiversité et pratiques culturales

Christian Steinberg* et Claude Alabouvette* - Phytoma - n°635 - juin 2010 - page 8

Impact du travail du sol, de la rotation et des intrants
 ph. C. Cordier, Agrene

ph. C. Cordier, Agrene

1- Broyage d'une culture assainissante avant enfouissement. On parle de biofumigation.

1- Broyage d'une culture assainissante avant enfouissement. On parle de biofumigation.

2- Couverture du sol avec un film plastique après enfouissement d'une culture assainissante. On peut parler de biodésinfection.

2- Couverture du sol avec un film plastique après enfouissement d'une culture assainissante. On peut parler de biodésinfection.

À l'heure du Grenelle de l'Environnement et du plan Ecophyto 2018, il est de bon ton de parler de biodiversité et plus encore de préservation de la biodiversité. Mais que met-on sous ce terme et plus particulièrement sous le terme de bio-diversité microbienne des sols ? Dans certains médias et auprès du grand public, l'agriculture est présentée comme destructrice de la diversité et quand il s'agit du sol, la « boîte noire » par excellence, certains n'hésitent pas à vendre méthodes ou produits supposés dynamiser la vie microbienne des sols que les pratiques traditionnelles contribueraient à détruire. L'objectif de cet article est de faire le point des connaissances scientifiques encore très fragmentaires et sur les effets connus, bénéfiques ou délétères, des pratiques culturales.

Le sol constitue un réservoir très important de micro-organismes. Ces micro-organismes incluent d'une part les archaea et les bactéries, procaryotes, qui constituent deux des trois domaines biologiques les plus importants de l'arbre phylogénétique de la vie, et d'autre part les champignons qui font partie du troisième domaine, celui des eucaryotes comprenant les protistes, champignons, plantes et animaux.

Le sol, réservoir de biodiversité microbienne

Une biomasse abondante

On compte, selon les estimations actuelles, 2 x 109 cellules bactériennes par gramme de sol jusqu'à 1 m de profondeur.

Exprimée dans une autre unité, la biomasse bactérienne est de l'ordre de 1 500 kg/ha sur une profondeur de 20 cm ; celle des champignons atteint 3 500 kg/ha pour une densité d'environ 103 propagules par gramme de sol.

Une diversité mieux connue

Cette microflore abondante recèle une très grande diversité. Jusqu'à un passé récent, nous n'avions accès qu'aux populations cultivables in vitro. Or des travaux récents indiquent que cette microflore cultivable ne représente que 0,1 à 10 % de la microflore totale des sols.

Les progrès enregistrés dans les méthodes d'extraction de l'ADN du sol et de son analyse permettent maintenant d'entreprendre des études sur les communautés microbiennes. Le nombre de génotypes microbiens différents est estimé à 104 par gramme de sol, mais aucune quantification exhaustive de la diversité des bactéries et champignons n'a encore pu être réalisée.

On considère cependant que la diversité microbienne, dont l'origine remonte à plus de 3,7 milliards d'années, est plus importante que celle des domaines animaux et végétaux, plus récents dans l'histoire de notre planète. Cette forte diversité microbienne, fruit d'une longue évolution, est vraisemblablement apparue en réponse à différentes contraintes environnementales qui ont existé sur Terre.

À cette grande diversité des communautés microbiennes correspond un formidable réservoir de gènes et de fonctions dont l'intérêt ne se révèle qu'en réponse à des conditions extrêmes ou nouvelles (réchauffement climatique).

Le sol est un environnement hétérogène au sein duquel les différents composants de la fraction solide (sables, limons, argiles, matières organiques) fournissent des quantités innombrables de micro-habitats constituant autant de niches écologiques différentes permettant la conservation de cette diversité.

Pratiques culturales et diversité microbienne

Généralités

Les structures des communautés microbiennes sont affectées par des phénomènes naturels (succession des saisons...), mais aussi par les perturbations liées aux pratiques culturales. Le travail du sol, la rotation, l'application de pesticides, l'apport de fertilisants et d'amendements organiques et l'introduction de micro-organismes affectent les communautés bactériennes et fongiques. De nombreuses études ont montré que ces pratiques affectent la structure de ces communautés, mais on a beaucoup moins de certitude concernant leur diversité.

En effet les pratiques culturales, et plus globalement les activités anthropiques, affectent significativement la structure des communautés microbiennes (bactéries, champignons libres et champignons mycorhizogènes) et la microfaune du sol. Mais les outils actuellement disponibles ne permettent pas d'être affirmatif quant à l'érosion de la diversité en milieu naturel.

Résultats en conditions contrôlées

En conditions contrôlées, cette érosion est significative en ce qui concerne la diversité taxonomique, mais la redondance fonctionnelle permet, dans certains cas, de compenser cette érosion taxonomique et d'assurer les fonctions attendues. En effet, des études ont montré d'une part une forte redondance fonctionnelle au sein des communautés de micro-organismes et, d'autre part, l'absence de relation directe entre fonction et biodiversité. Certaines fonctions générales augmentent quand la diversité diminue, alors que des fonctions plus spécifiques (nitrification, dénitrification, oxydation du méthane) restent stables ou diminuent avec la réduction de la biodiversité.

Au laboratoire, après application d'un stress modéré, la résistance et la résilience de la diversité dépendent du groupe fonctionnel considéré, les nitrifiants étant, par exemple, plus affectés que d'autres groupes. Il apparaît également que la résilience est généralement plus faible dans les sols à faible diversité et peut disparaître complètement lorsque des stress successifs sont appliqués à ces sols.

Enfin, la résistance aux stress et la résilience de la diversité dépendent également des communautés composant la microflore, du type de stress appliqué et des caractéristiques du sol. Ces résultats soulignent les difficultés et les précautions avec lesquelles il convient d'interpréter les données résultant d'observations au champ.

Impact du travail du sol

Il est difficile d'évaluer l'incidence du travail du sol sur la diversité des micro-organismes car cette pratique est souvent associée à un itinéraire technique dans lequel le précédent cultural, la rotation et la gestion des résidus de culture sont pris en compte.

Le labour, en général

D'une manière générale, le labour réduit la biomasse et à un moindre degré la diversité microbienne des sols. Cet effet négatif serait lié à la destruction mécanique des hyphes fongiques qui jouent un rôle majeur dans la formation d'agrégats stables.

La communauté fongique est plus affectée par le labour que la communauté bactérienne, ce qui a des conséquences négatives sur la décomposition de la matière organique et la séquestration du carbone dans le sol à laquelle les champignons participent activement.

La structure des communautés bactériennes est modifiée temporairement suite au labour, ce qui se traduit par des successions de populations adaptées aux nouvelles conditions environnementales et par une modification de la diversité fonctionnelle de ces bactéries.

L'intensité des activités enzymatiques impliquées dans la diversité fonctionnelle des bactéries est toujours plus faible en sol labouré qu'en non labour.

Travail superficiel et « non labour »

Le travail superficiel comme l'absence de labour ont des effets positifs sur la densité, la diversité et la structure des communautés microbiennes. La présence de résidus laissés à la surface du sol constitue des niches dans lesquelles peuvent se développer des agents phytopathogènes, mais aussi des micro-organismes antagonistes des agents pathogènes.

À long terme, l'absence de labour et le maintien des résidus peuvent créer des conditions favorables au développement des antagonistes et des prédateurs et aboutir à un équilibre écologique stable, alors que l'exportation des résidus affaiblit le système.

Impact des rotations et de la diversité végétale

Les racines exercent une action mécanique sur le sol, ce qui en modifie la structure et, d'autre part, libèrent des exsudats qui sont une source de nutriments pour les micro-organismes.

Rôle des exsudats racinaires

Les exsudats sont composés de substrats simples (acides aminés, acides organiques, sucres, acides gras et stérols), polymères insolubles (cellulose, protéines), vitamines, phytohormones, enzymes, toxines, et de signaux susceptibles d'agir sur les micro-organismes. La composition de ces rhizo-dépôts organiques varie selon les espèces considérées et le stade de développement de la plante. Les micro-organismes de la rhizosphère, qui utilisent ces nutriments, produisent des métabolites secondaires qui peuvent avoir un impact positif sur la rhizogenèse et la croissance de la plante (mise à disposition d'éléments minéraux, fixation d'azote, bio-protection vis-à-vis d'agents pathogènes).

La complexité des interactions entre la plante et les communautés bactériennes et fongiques est particulièrement importante mais ne peut se résumer aux effets d'une seule espèce végétale ; il faut considérer l'influence d'un ensemble d'espèces végétales présentes simultanément ou successivement sur la même parcelle.

Rôle de la succession, quelques exemples

Il a été montré que la mise en culture d'une prairie permanente a pour conséquence une perte de la diversité des différentes communautés microbiennes d'origine tellurique.

Cette érosion de la diversité est moins importante dans un système conduit en rotation qu'en monoculture. La nature de la succession des cultures peut avoir une incidence sur la préservation (ou la résilience) de la diversité bactérienne. Ainsi, la diversité bactérienne dans la rhizosphère du blé après une culture de légumineuses est plus importante que celle mesurée après un précédent blé. L'introduction de légumineuses dans les rotations a un effet positif sur la diversité microbienne ; il se traduit en particulier par une réduction de la gravité des maladies d'origine tellurique.

L'intensité de l'érosion de biodiversité observée en monoculture est dépendante de l'espèce végétale cultivée. Ainsi la diversité infraspécifique des Rhizobium leguminosarum est beaucoup plus faible en sol cultivé en maïs qu'en sol cultivé en blé ou qu'en rotation blé-maïs.

Rôle des résidus de récolte

Outre les rhizo-dépôts, les résidus de récolte jouent un rôle dans l'établissement et le maintien d'une diversité microbienne. La décomposition de ces résidus stimule une partie de la microflore, établissant un gradient dans la structure des communautés microbiennes depuis le sol jusqu'aux résidus.

Ce gradient est très marqué pour les communautés bactériennes et dépend de la nature des résidus ; il est moins marqué pour les communautés fongiques. L'importance du phénomène est directement proportionnelle à la quantité, à la localisation et la distribution de ces résidus de récolte dans la parcelle.

Rotation et pathogènes

La rotation des cultures est souvent décrite comme un moyen d'éviter la prolifération des agents pathogènes spécifiques d'une espèce végétale donnée. Ainsi, la plus grande diversité microbienne observée dans un système de rotation sur 3 ans expliquerait que la pomme de terre y soit moins soumise aux attaques de Phytophthora erythroseptica que lors d'une rotation sur 2 ans.

À l'opposé de la rotation, la monoculture, qui favorise l'augmentation de la densité de l'inoculum pathogène peut, dans certains cas, conduire à la résistance des sols. L'exemple le plus connu est celui du « déclin » du piétin échaudage du blé. Dans ce cas, la monoculture induit une prolifération de populations de Pseudomonas fluorescens, antagonistes de l'agent pathogène Gaeumannomyces graminis var tritici ; après quelques années de monoculture, ces bactéries sont suffisamment abondantes pour limiter la gravité de la maladie.

Rotation et cultures intermédiaires : cas de la « biofumigation »

La rotation peut également inclure des cultures intermédiaires. Au delà de leur intérêt pour assurer un couvert végétal sur la parcelle et/ou piéger les nitrates restant après récolte, il est possible de choisir des espèces végétales ayant la capacité de modifier les équilibres microbiens des sols en faveur des populations microbiennes bénéfiques aux cultures.

Les cruciféracées et les alliacées libèrent dans le sol des molécules toxiques voire biocides (isothiocyanates, thiosulfinates et zwiebelanes).

Ces molécules permettent de limiter les dégâts occasionnés par des nématodes et certaines maladies cryptogamiques. L'effet de ces plantes peut être accentué par incorporation au sol de la biomasse produite (photo 1). Associé à une anoxie plus ou moins poussée, les molécules toxiques exercent une double sélection sur la microflore, inhibant certains micro-organismes parmi lesquels des agents pathogènes, et favorisant d'autres populations dont celles des bénéfiques. La culture de ces plantes modifie donc significativement la structure des communautés microbiennes et de la microfaune dans les couches superficielles du sol.

Cette pratique, dite biofumigation ou biodésinfection, induit une réduction temporaire de la diversité microbienne affectant les populations délétères. Elle peut être renforcée par l'emploi de films plastique, ce qui l'apparente à la solarisation (photo 2).

Peu de travaux s'intéressent à l'incidence directe de ces pratiques sur la diversité microbienne, l'essentiel des informations concernent la réduction de la gravité des maladies d'origine tellurique ce qui conduit à envisager une action sur la réceptivité des sols, elle-même fonction de la diversité microbienne (cf ci-après). L'incidence sur la biodiversité microbienne de ces pratiques alternatives à l'utilisation de pesticides est sans commune mesure avec celle induite par la désinfection des sols à la vapeur ou à l'aide de fumigants chimiques.

Les températures et durées d'application de ces traitements conduisent en effet à une perte significative de nombreuses espèces microbiennes, entraînant également la perte définitive de fonctions d'intérêt impliquées dans les cycles bio-géochimiques.

Impact de la fertilisation

Les fertilisants minéraux et amendements organiques sont appliqués pour améliorer la productivité mais leurs effets secondaires sur la biodiversité microbienne sont mal connus.

Fertilisation minérale

Les fertilisants minéraux ont des effets directs limités sur la diversité ; en revanche ils auraient des effets indirects susceptibles de modifier significativement cette diversité. Ils stimulent la croissance de la plante, donc l'exsudation racinaire et les retours de résidus végétaux, favorisant ainsi l'activité et modifiant la structure des communautés microbiennes.

Mais selon certaines études, la fertilisation minérale réduit la biomasse et les activités microbiennes dans le sol et provoque un déséquilibre au détriment de la communauté fongique dont le développement est limité. Ce phénomène est particulièrement marqué dans le cas des apports de phosphate qui réduisent le nombre et la diversité des spores de champignons mycorhizogènes colonisant les racines. De même, la fertilisation azotée inhibe la réalisation de la symbiose fixatrice d'azote et affecte négativement la diversité génétique des populations de Rhizobium impliquées dans la symbiose. Enfin, les apports de nitrate d'ammonium affectent significativement la structure et réduisent l'activité des communautés méthanotrophes dans le sol alors que ce phénomène n'est pas observé avec une fertilisation organique.

Amendements organiques

D'une manière générale, les amendements organiques affectent la diversité microbienne d'une manière positive. Deux facteurs sont directement impliqués dans les modifications observées :

– d'une part les matières organiques apportées constituent des sources nutritives importantes et variées ; elles peuvent de ce fait stimuler le développement de micro-organismes,

– d'autre part les matières organiques apportées au sol hébergent des populations microbiennes complexes, qui vont s'installer au sein de la microflore.

L'apport de matière organique favorise l'activité des communautés fongiques car les champignons jouent un rôle pionnier dans la décomposition de cette matière organique. Ce processus est particulièrement important puisqu'il permet le recyclage du carbone dans les réseaux trophiques, conduit au maintien du pool de C dans le sol et à la minéralisation de la matière organique assurant l'alimentation des plantes.

Selon la nature de la matière organique apportée, ce sont des groupes fongiques différents qui sont sélectionnés et décomposent les molécules complexes en molécules plus simples que d'autres populations vont alors dégrader, assurant une succession de communautés dont la structure est différente tout au long de cette dégradation. La libération de molécules plus simples et assimilables par les bactéries va alors stimuler le développement de populations bactériennes. Enfin, il est possible, grâce à l'apport de matières ou de substrats organiques variés, de stimuler le développement de micro-organismes bénéfiques et de contrôler le développement de micro-organismes phytopathogènes.

Il est possible de conclure que les amendements organiques ont généralement un rôle positif sur le fonctionnement du sol. Cependant la diversité microbienne peut être modifiée de manière négative par exemple par introduction, notamment par le biais des fumiers, de microorganismes pathogènes de l'homme, de l'animal ou des cultures.

Impact des pesticides

Herbicides, les cas 2,4-D et atrazine

Bien que tous les pesticides de synthèse soient susceptibles de modifier la diversité microbienne, c'est l'usage des herbicides qui a fait l'objet du plus grand nombre d'études en relation avec leurs effets indésirables sur les communautés microbiennes telluriques. Il a été montré que la structure génétique des communautés bactériennes de sols agricoles est significativement altérée en réponse à l'application de 2,4-D ou d'atrazine. Ces modifications sont particulièrement notables durant les premiers jours suivant l'application et s'estompent par la suite.

Les études concernant l'utilisation de l'atrazine révèlent que les gènes de dégradation de cette molécule, présents en nombre très limité dans la communauté bactérienne des sols avant les applications du désherbant, sont transférés horizontalement entre espèces bactériennes, augmentant ainsi progressivement le potentiel de biodégradation de ce désherbant par les communautés bactériennes des sols.

Insecticides, le cas des organochlorés

Les insecticides organochlorés sont particulièrement dommageables pour la microflore tellurique. Ils affectent significativement plusieurs groupes au sein des bactéries et des champignons hétérotrophes mais ils affectent également les bactéries nitrifiantes, autotrophes.

À l'inverse, des groupes bactériens sont capables de biodégrader certains insecticides, comme le lindane. À ce propos, il faut noter que l'utilisation de cette molécule de synthèse, complètement nouvelle lorsqu'elle a été introduite sur le marché, a conduit la communauté bactérienne à créer de novo, en quelques décennies, un gène de dégradation du lindane par combinaison de matériel génétique issu de différentes espèces microbiennes. Cet exemple souligne le potentiel génétique de la microflore et illustre parfaitement son potentiel d'adaptation rapide aux variations de l'environnement.

Fongicides, le cas du cuivre

Le cuivre est un fongicide fréquemment utilisé, en particulier en agriculture biologique. Bien qu'il soit appliqué pour lutter contre des maladies foliaires, une grande partie de ce fongicide arrive au sol et s'y accumule.

La structure de la communauté bactérienne est peu modifiée alors que celle des champignons l'est significativement. Mais les fonctionnalités du sol ne le sont pas, ce qui suggère une pression non sélective du cuivre et un degré élevé de résistance génétique et fonctionnelle aux perturbations causées par ce fongicide.

Impact des inoculations microbiennes

Effets agronomiques

Les inoculations de micro-organismes bénéfiques sont de plus en plus fréquemment utilisées en agriculture pour assurer ou optimiser des fonctions déficientes dans l'agro-écosystème. Le meilleur exemple est l'introduction de Bradyrhizobium japonicum dans les sols européens pour permettre la culture de soja, plante d'origine étrangère, dont la production est dépendante de la symbiose fixatrice d'azote réalisée par cette bactérie, initialement absente des sols européens.

Outre la fixation symbiotique, les inoculations de micro-organismes concernent aussi la fixation libre de l'azote, la promotion de croissance des plantes, la lutte biologique contre des microorganismes phytopathogènes. Les micro-organismes introduits sont des bactéries incluant les actinomycètes, des champignons libres ou des champignons endomycorhizogènes.

Effets sur la biodiversité microbienne

Ces inoculations affectent positivement et de manière définitive la diversité microbienne originelle, les micro-organismes introduits s'établissant de manière durable bien qu'à des densités souvent très faibles. Cette faible densité de persistance liée à la faible compétitivité des souches introduites oblige à renouveler régulièrement les inoculations pour obtenir l'effet bénéfique désiré.

Les effets secondaires de ces inoculations se traduisent par un déplacement quantitatif (diminution d'abondance) de populations écologiquement proches de celle introduite. Néanmoins cette modification de structure est éphémère aussi bien pour les communautés bactériennes que pour les communautés fongiques et son intensité est inférieure à celle provoquée par la saisonnalité et la variabilité naturelle de la structure.

Conclusion

Les sols hébergent de nombreuses communautés microbiennes qui recèlent une extrême diversité tant au niveau taxonomique que fonctionnel. Toutes les pratiques culturales ont un impact sur ces communautés et affectent leurs fonctions mais il est difficile, à l'heure actuelle, d'apprécier avec certitude leurs effets sur la biodiversité.

Dans le cadre d'une agriculture durable, il faut apprendre à gérer les communautés microbiennes via des pratiques et des itinéraires culturaux adaptés, afin que soient favorisées les communautés utiles à la qualité des sols et des récoltes et la préservation de l'environnement.

<p>* UMR MSE, INRA-Université de Bourgogne. 17, rue Sully. 21000 Dijon. christian.steinberg@dijon.inra.fr</p> <p><b>Photo en médaillon : diversité microbienne du sol révélée sur milieu nutritif.</b></p>

1 - Biodiversité, définitions... diverses

Le terme biodiversité a été utilisé de différentes manières. En microbiologie classique, la diversité spécifique est décrite par le nombre de types (espèces) différents dans une communauté donnée et un habitat donné (richness) et par l'abondance relative (evenness) des différents types (espèces) composant la richesse spécifique de l'habitat. La biodiversité inclut en outre dans sa définition les fonctionnalités de l'écosystème.

En écologie moléculaire, la biodiversité peut être décrite par le nombre et la distribution de différentes séquences d'ADN extraites de la communauté d'un habitat, en relation avec les fonctionnalités de l'écosystème. Selon les méthodes utilisées pour analyser l'ADN du sol, on parlera de structure ou de diversité des communautés microbiennes. Compte tenu du rôle des micro-organismes dans le fonctionnement biologique des sols, on est souvent amené à considérer la diversité fonctionnelle des micro-organismes et à distinguer des groupes fonctionnels plutôt que de s'intéresser à la diversité taxonomique qui est difficilement accessible. La grande diversité de micro-organismes capables d'assurer une même fonction a conduit à proposer la notion de redondance fonctionnelle. Celle-ci indique qu'il existe une certaine interchangeabilité des espèces pour une même fonction. Cependant, cette notion de redondance fonctionnelle est toute relative et il serait faux de croire que certaines populations sont inutiles.

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Résumé

Le sol est un réservoir de biodiversité microbienne. L'impact des pratiques culturales sur cette biodiversité est encore mal connu. Cependant, on a déjà quelques indications.

Après avoir défini cette biodiversité et les types de micro-organismes qui la constituent, cet article évoque les influences :

– du travail du sol (labour ou travail superficiel et non-labour) ;

– des rotations de cultures et incluant des cultures intermédiaires, entre autres la pratique de biofumigation ;

– de la fertilisation minérale et des amendements organiques ;

– des pesticides étudiés (herbicides 2,4-D et atrazine, insecticides organochlorés notamment le lindane, fongicides notamment le cuivre) ;

– des inoculations microbiennes (de microorganismes bénéfiques aux cultures).

Mots-clés : sols, biodiversité microbienne, pratiques culturales, travail du sol, rotation, cultures intermédiaires, biofumigation, fertilisation minérale, amendements organiques, pesticides, herbicides, insecticides, fongicides, inoculations microbiennes.

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