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dossier - Végétaux d'agrément

Classiques et nouveaux sous l'œil du réseau

Éric Chapin* et 28 autres animateurs du RES (Réseau d'épidémiosurveillance) ZNA** - Phytoma - n°635 - juin 2010 - page 20

Bilan phytosanitaire 2009, premier issu du nouveau réseau d'épidémio-surveillance des organismes nuisibles aux végétaux présents en ZNA
P. archon (ph. INRA)

P. archon (ph. INRA)

Chenilles de la processionnaire du chêne T. processionea. Le niveau de ses populations est important depuis maintenant quatre ans. En 2009, elle a même attaqué des érables et des robiniers, en plus des chênes ! ph. FREDON Île-de-France

Chenilles de la processionnaire du chêne T. processionea. Le niveau de ses populations est important depuis maintenant quatre ans. En 2009, elle a même attaqué des érables et des robiniers, en plus des chênes ! ph. FREDON Île-de-France

Population d'ailantes A. altissima. L'espèce avait été plantée volontairement, mais elle se montre désormais invasive et concurrence les essences locales. ph. Philippe Tixier-Malicorne, FREDON Languedoc-Roussillon

Population d'ailantes A. altissima. L'espèce avait été plantée volontairement, mais elle se montre désormais invasive et concurrence les essences locales. ph. Philippe Tixier-Malicorne, FREDON Languedoc-Roussillon

Déformations de feuilles et fleurs de fuchsia dues à Aculops fuchsiae, présent en Bretagne, Pays-de-la-Loire et Basse-Normandie. ph. FEREDEC Bretagne

Déformations de feuilles et fleurs de fuchsia dues à Aculops fuchsiae, présent en Bretagne, Pays-de-la-Loire et Basse-Normandie. ph. FEREDEC Bretagne

Après les gazons dans les pages précédentes, voici le tour d'autres végétaux d'agrément. Ceci est le premier bilan phytosanitaire établi dans le cadre du RES ou « réseau d'épidémio-surveillance » mis en place en 2009. Un point de situation utile à ceux qui veulent gérer au mieux la santé des végétaux des ZNA en 2010. On y évoque des organismes nuisibles de type ravageurs et maladies, d'abord classiques et enfin nouveaux, sans oublier, entre les deux, des oiseaux agaçants et des plantes invasives. Pucerons, oïdiums, duo de processionnaires, étourneau, ailante, capricorne asiatique, chancre coloré du platane, charançon et papillon du palmier, phytopte du fuchsia, coccinelle et frelon tous deux asiatiques, les voilà épinglés. Et d'utiles auxiliaires mis en épingle.

La compétence des animateurs du réseau de surveillance épidémiologique des ZNA, appartenant au réseau des FREDON, nous permet aujourd'hui de dresser un bilan des risques liés aux principaux organismes nuisibles en ZNA (hors gazon) en 2009. Bilan utile pour surveiller et gérer la santé végétale dans ces ZNA en 2010.

Grands classiques au fil des saisons

Pucerons et autres insectes piqueurs-suceurs

Début 2009, les conditions climatiques ont limité le développement des pucerons et des psylles sur une grande partie de la France métropolitaine. Par exemple en Bourgogne, les pucerons ont subi un hiver rigoureux et les faibles populations de printemps n'ont nécessité aucune intervention dans la plupart des cas.

Durant l'été, les précipitations ont été abondantes sur le Nord-Ouest ainsi que du Limousin à la Lorraine. Les plantations ont ainsi été relativement préservées des insectes piqueurs-suceurs. L'inflexion des populations constatée au cœur de l'été coïncide avec des périodes orageuses intenses néfastes aux pucerons.

Cependant, dans le Grand Sud, la population estivale de tigre du platane (Corythucha ciliata) a été très importante localement, notamment sur les sites où les interventions phytosanitaires ont été abandonnées.

Enfin les conditions climatiques de fin d'été et d'automne ont été favorables au maintien des populations de pucerons sur une grande majorité du territoire métropolitain.

Maladies cryptogamiques

Les précipitations du printemps 2009 ont été contrastées en France. Elles ont été globalement déficitaires du Poitou-Charentes au Nord-Pas-de-Calais, sur la Bourgogne, la Franche-Comté et en Rhône-Alpes. Dans ces zones, l'intensité et la fréquence des maladies cryptogamiques ont donc été globalement plus faibles que les années précédentes. Ce fut le cas pour l'oïdium (chêne, rosier...), le black-rot du marronnier (Guignardia aesculi), la rouille grillagée du poirier, l'anthracnose sur platane (Apiognomonia platani), la maladie des taches noires du rosier (Marssonina rosae), même si, localement dans le quart nord-est, ces pathogènes ont pu se développer tardivement grâce à la chaleur et l'humidité de fin d'été.

En revanche, sur le midi méditerranéen et les Pays-de-la-Loire, les précipitations ont dépassé nettement les moyennes saisonnières, d'où parfois une pression élevée des oïdiums sur de nombreuses essences ornementales : platane, rosier, Lagerstroemia, marronnier...

L'automne 2009, relativement chaud (température moyenne supérieure à la normale de 1,5 °C), a vu des précipitations sensiblement inférieures aux normales sur la moitié est du pays mais assez nettement excédentaires plus près de l'Océan Atlantique et de la Manche, conditions favorables au développement de la rouille du rosier.

Populations d'auxiliaires actives : exemple d'un site de référence dans la Manche

Le dispositif d'épidémiosurveillance national comporte des parcelles pilotes de référence suivies selon des protocoles d'observation spécifiques. C'est le cas du cimetière américain de Saint-James (American Battle Monuments Commission) dans le département de la Manche. Sur ce site, les attaques parasitaires sont suivies sur les rosiers, ainsi que la faune auxiliaire associée, par mesure de la fréquence de présence des insectes (Figure 1).

En début de saison, les micro-hyménoptères parasitoïdes de pucerons ont été observés avec une fréquence plus faible qu'en 2008. Fin août, on observe un deuxième pic relativement discret suite au retour des pucerons.

Les cécidomyies prédatrices de pucerons ont été actives surtout courant juin. Les syrphes, quant à elles, ont occupé le devant de la scène à partir de juillet. Elles ont pâti des faibles températures de juin mais se sont ensuite bien maintenues durant l'été (fréquence sur les rosiers de 20 % en moyenne). Fait marquant de 2009 : l'importance des populations de chrysopes comparée à celle des années passées. Elles supplantent même largement les syrphes en cours de saison avec une fréquence de l'ordre de 40 %. Enfin, les coccinelles sont restées discrètes. La plus fréquente est la coccinelle à deux points (Adalia bipunctata). La coccinelle à sept points (Coccinella septempunctata) est surtout présente en début de saison. L'espèce d'origine asiatique Harmonia axyridis n'a pas été observée alors qu'elle est présente dans la région.

En août, les populations d'auxiliaires ont subi une pause estivale moins marquée que les pucerons, ce qui leur a permis d'être efficaces en fin de saison et de contenir rapidement le retour des ravageurs. Syrphes et hyménoptères parasitoïdes ont assuré l'arrière saison. En 2009, cette faune auxiliaire indigène a permis d'éviter toute intervention sur certains sites.

Organismes de qualité d'importance

Indépendamment du climat, certains organismes nuisibles posent des problèmes récurrents. On citera par exemple les champignons lignivores, le tigre du platane (Corythucha ciliata), la mineuse du marronnier (Cameraria ohridella), ainsi que le flatide pruineux (Metcalfa pruinosa) dans le Sud-Ouest.

C. ohridella reste très présente, entraînant parfois la défoliation des arbres dès mi-juillet. Selon des observations auvergnates, il semble que les dégâts de ce micro-lépidoptère s'intensifient en zones de moyenne altitude (500-800 m).

Par ailleurs on note de nouvelles détections, dans le Doubs sur buis sauvages et en Bourgogne dans un jardin, de cylindrocladiose du buis due au champignon Cylindrocladium buxicola. Sa présence est confirmée en Côte-d'Or, dans les Pyrénées-Atlantiques, l'Eure et la Somme.

Champignon sur frêne

Sur frêne, le champignon Chalara fraxinea a été découvert en 2008 en Haute-Saône en milieu forestier. Sa pression est de plus en plus importante dans le secteur sous-vosgien et toute la Franche-Comté, et ce quels que soient les placettes et l'âge des peuplements. Malgré les restrictions de commercialisation décidées par l'ONF, le pathogène continue à progresser d'une centaine de kilomètres par an. Il est détecté de façon récurrente en Moselle, Vosges, Meurthe-et-Moselle, Côte-d'or, Saône-et-Loire, et de façon isolée en Haute-Marne et dans le Pas-de-Calais, en Lorraine et en Haute-Saône. Il faut être très vigilant dans les régions limitrophes.

Les deux processionnaires

Pour la 4e année consécutive, les populations de chenilles processionnaires du pin (Thaumetopoea pityocampa) et du chêne (Thaumetopoea processionea) présentent un niveau de population très important. Ceci engendre des risques sanitaires si des passants ou jardiniers côtoient les chenilles urticantes.

La processionnaire du pin continue à remonter vers le nord et en altitude. Fait exceptionnel : des processions atypiques ont été observées en novembre-décembre sur les bassins de Clermont et Thiers (Auvergne). La processionnaire du chêne, quant à elle, continue sa descente vers le sud ; de très grosses attaques ont été observées en Ile-de-France. Ses populations ont été tellement importantes que les chenilles se dispersent et se nourrissent sur d'autres espèces végétales telles que le robinier faux acacia ou l'érable champêtre.

Étourneaux, pigeons et autres vertébrés

Étourneau sansonnet, la bête noire !

En espaces verts, parcs et jardins, notamment en milieu urbain, les organismes de petite taille tels qu'insectes et champignons ne sont pas seuls à provoquer des désagréments. Certains vertébrés adoptent en effet un comportement parfois déplaisant pour les riverains.

L'étourneau sansonnet (Stumus vulgaris) est parfaitement adapté à la ville. Les alignements de grands arbres (platanes, tilleuls...), parcs d'agrément et haies de jardins privés peuvent accueillir à partir de l'automne des dortoirs de plusieurs milliers d'oiseaux. Ils causent des nuisances d'ordre sanitaire : transport de maladies (bactéries, virus) et production importante de déjections sous les dortoirs. D'autre part, ces déjections corrosives dégradent la végétation, le mobilier urbain et les véhicules stationnés. Enfin, vu leur grand nombre, le vacarme de ces oiseaux est particulièrement gênant la nuit.

Plusieurs méthodes de lutte sont déployées : effarouchement sonore, intervention d'un fauconnier... L'étourneau peut être classé comme nuisible par arrêté préfectoral et être chassé en zone rurale.

Pigeon, régulation...

Le pigeon biset (Columba livia), au comportement grégaire et peu farouche, est susceptible lui aussi de dégrader les bâtiments, le mobilier urbain et les carrosseries de voiture. Commun en France, il colonise facilement les villes et zones d'activités industrielles où il trouve aisément à se nourrir et se loger. Sa présence en ville fait l'objet d'actions de régulation (stérilisation des œufs, mise en place d'équipements pour empêcher la nidification ou l'accès aux rebords de bâtiments). L'espèce n'a pas le statut d'oiseau protégé et n'entre pas dans le cadre de la réglementation sur les espèces sauvages.

Plantes invasives en France métropolitaine

Leur impact

Les ZNA, naturelles ou non, sont soumises à une pression exercée par des végétaux invasifs dont la nuisibilité sur les écosystèmes ou les activités humaines pose de sérieuses difficultés :

– impact sur la santé : exemple de l'ambroisie (Ambrosia artemisiifolia).

– impact sur les activités économiques liées à l'eau (pêche, circulation des bateaux, dégradation des berges) et au pâturage des troupeaux : les ludwigies, jussies et isnardies (toutes des Ludwigia sp), le millefeuille aquatique (Myriophyllum aquaticum), les renouées (Fallopia sp), le séneçon du Cap (Senecio inaequidens)...

– impact sur les milieux naturels par concurrence vis-à-vis des plantes locales : herbe de la pampa (Cortaderia selloana), ailante (Ailanthus altissima), griffe de sorcière (Carpobrotus edulis)...

Les plantes invasives colonisent divers milieux, des zones humides aux zones sèches.

Pourquoi ont-elles ce pouvoir de colonisation et d'agressivité vis-à-vis des espèces autochtones ou plantées ? Grâce à un potentiel de multiplication très important – par voie sexuée ou végétative – et à leur capacité à s'installer dans des milieux difficiles où elles supplantent rapidement les autres espèces. De plus ces plantes résistent à bon nombre de pathogènes et sont, pour la plupart, peu ou pas consommées par les insectes phytophages. Enfin elles sont difficiles à éliminer avec les méthodes conventionnelles de lutte contre les adventices.

Tout cela en fait de redoutables adversaires pour les gestionnaires des ZNA.

Pourquoi sont-elles arrivées ?

Ces végétaux ont été soit introduits accidentellement (cas d'A. artemisiifolia), soit volontairement plantés à une époque où l'on ignorait leur caractère invasif (C. selloana, A. altissima, Ludwigia sp., etc.).

De ce fait, du nord au sud de la France, nous trouvons ces espèces dès que les milieux leur sont propices. Ainsi, les renouées (Fallopia sp) prospèrent en zone méditerranéenne au bord de cours d'eau de plaine, l'ailante ponctue le paysage le long des routes partout en France.

Évolution et vigilance

Les listes de plantes invasives, issues d'observations de terrain, sont régulièrement mises à jour au niveau européen (OEPP), national et local. Ces dernières années, de nouvelles espèces commencent à manifester un caractère invasif comme l'onagre rose (ou primevère du Missouri) Oenothera speciosa, le cheveu d'ange Stipa tenuifolia, l'herbe aux écouvillons Pennisetum villosum, présentes en zone méridionale.

Nos plantes ornementales d'aujourd'hui ne doivent pas devenir nos invasives de demain ! Il faut être vigilant, prendre le temps d'analyser les réalisations paysagères actuelles et d'en tirer des enseignements pour le long terme. Une liste d'espèces indésirables dont la plantation est déconseillée, des restrictions d'usage pour certaines, des choix d'hybrides stériles... sont autant de solutions à mettre collectivement en œuvre, tout en tenant compte aussi des impératifs économiques de la filière du paysage.

Zoom sur les principaux organismes invasifs phytophages

Capricorne asiatique, rappel utile

Rappelons qu'Anoplophora glabripennis est un longicorne phytophage, de quarantaine, qui s'attaque à un grand nombre d'arbres feuillus à bois tendre.

L'adulte d'A. glabripennis se nourrit de l'écorce des jeunes rameaux qu'il décape jusqu'au bois sur des surfaces de plusieurs cm². Les larves se développent dans le haut du tronc et les grosses branches d'au moins 5 cm de diamètre, créant ainsi des galeries d'une dizaine de mm de diamètre en fin de cycle. Celles-ci entravent la circulation de la sève, d'où un jaunissement précoce du feuillage et un ralentissement de la croissance chez le sujet atteint. À terme, on assiste à la mort des branches hautes, puis de l'arbre entier. De plus, les nombreuses galeries fragilisent la résistance mécanique des branches, d'où un risque de chutes et un réel danger dans les zones fréquentées par le public. L'insecte représente aussi un risque majeur pour les productions forestières en dévalorisant les grumes.

Un arrêté national de lutte obligatoire du 28 mai 2003 oblige à détruire les adultes et incinérer les arbres infestés ; il prévoit l'instauration de périmètres de surveillance autour des foyers ainsi que des restrictions de circulation du matériel végétal contaminé. Chaque année, les foyers font l'objet d'un suivi (prospection, recensement et expertise des arbres) et d'une campagne de lutte (traitements et destruction des arbres infestés). Le protocole de surveillance prévoit des prospections pendant 4 ans à partir de la date de découverte du foyer, période renouvelée à chaque découverte d'un nouvel insecte ou indice de présence.

Situation en 2009

Le foyer de Gien (Loiret), identifié en juillet 2002 sur deux érables de la cour d'un lycée giennois mais déclaré tardivement au SRPV (aujourd'hui SRAL Service Régional de l'Alimentation), semble aujourd'hui en extension. En 2003, 30 arbres avaient été abattus, dont 19 érables et 7 bouleaux. Depuis lors, de nouveaux foyers sont régulièrement découverts dans la ville grâce aux prospections, aux observations des agents municipaux et aux signalements des particuliers. En 2009, la ville de Saint-Martin-sur-Ocre, séparée de Gien par la Loire, est officiellement déclarée contaminée.

À Sainte-Anne-sur-Brivet (Loire-Atlantique), les actions engagées ont permis de contrôler l'extension du foyer découvert en juillet 2004 mais sans éradiquer la population. En effet, en 2009, un adulte volant a été identifié mais pas son hôte, malgré une prospection minutieuse. À suivre...

À Strasbourg, un adulte vivant de capricorne asiatique a été collecté au sol, mi-juillet 2008 au port du Rhin. Deux arbres contaminés ont été abattus et brûlés sur place à Strasbourg. Depuis pas de nouvelle détection, à suivre...

Détection en Bourgogne : à l'automne 2008, un individu mort d'A. glabripennis a été découvert par un particulier. Son origine reste à déterminer car l'insecte a été retrouvé à proximité d'arbres où aucun trou d'émergence n'a été vu. La prospection menée durant l'été 2009 par le SRAL et la FREDON Bourgogne n'a révélé aucun signe caractéristique de l'activité du ravageur.

De nouvelles observations de contrôle de ce capricorne sont prévues en 2010.

Platane, le chancre coloré s'étend

La répartition du chancre coloré (Ceratocystis platani) tend à se développer entre les régions PACA et Aquitaine puis entre PACA et Rhône-Alpes. Par ailleurs, on note une forte extension des foyers du canal du Midi (patrimoine mondial de l'UNESCO), malgré les actions de lutte engagées. À ce jour, on comptabilise 141 communes touchées en Aquitaine, Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Rhône-Alpes. Les départements du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône sont les plus contaminés, avec en moyenne 2 000 platanes à abattre par an. L'eau est favorable à la dissémination du champignon et la majorité des communes très infestées de ces deux départements se situent sur des réseaux hydrographiques importants : bassin des Sorgues, canal des Alpines... Sur ces zones, le coût de la gestion des foyers, à la charge du gestionnaire, est un frein à l'éradication du parasite.

Conformément aux réglementations en vigueur, la lutte contre cette maladie de quarantaine repose sur des mesures prophylactiques essentielles ainsi que sur la détection précoce et l'élimination des foyers (abattage). Par ailleurs, l'utilisation du cultivar Platanor Vallis Clausa, sélectionné pour sa résistance, permet aux concepteurs et gestionnaires d'espaces verts d'envisager des plantations en sols contaminés en remplacement des platanes abattus, ou bien des aménagements dans les zones saines.

En parallèle, la surveillance doit être renforcée sur les territoires pas ou peu infestés afin de contrer la progression de la maladie.

Charançon rouge du palmier : populations en augmentation

Bien que très localisé au littoral méditerranéen, le sujet du charançon rouge, Rhynchophorus ferrugineus, a une dimension nationale. Ce nuisible inféodé aux palmiers a été détecté pour la première fois en 2006 en Corse et Provence-Alpes-Côte-d'Azur et en 2007 en Languedoc-Roussillon. En 2009, de nouveaux foyers ont été décelés en Haute-Corse à Aléria, et à Antibes et Vallauris, dans les Alpes-Maritimes.

Un patrimoine de renommée mondiale, la Promenade des Anglais, situé à quelques kilomètres de ces foyers, est directement menacé ! Les mesures de lutte doivent être renforcées car on constate une extension de la plupart des foyers et une augmentation des populations de l'insecte. À titre d'exemple, dans le Var, département le plus infesté de France, les populations, capturées grâce à un réseau de piégeage de référence, ont été multipliées par 2 au minimum. En effet, fin 2009, on comptabilise 1 389 captures pour 209 pièges (en moyenne 6,64 captures/piège) contre 645 captures dans 204 pièges (3,16 captures/piège) en 2008. Sur cette zone, le nombre de palmiers déclarés auprès du SRAL est croissant voire exponentiel (Figure 2). On note quelques exceptions comme la commune de Sainte-Maxime qui n'enregistre aucun nouveau palmier infesté depuis 2007 malgré une surveillance rapprochée. Mais ses palmiers subissent par ailleurs des populations de papillon palmivore très élevées ; y aurait-il une compétition interspécifique ?

Notons que la France n'est pas seule à avoir des difficultés de lutte contre le charançon rouge. L'Italie, l'Espagne, la Grèce et le Portugal ne parviennent pas à prendre le dessus sur les populations. Les raisons sont très variées : manque d'accessibilité dans les propriétés privées, aire de répartition trop étendue, abattage systématique onéreux, contraignant et peu réactif, populations très importantes dans les palmiers, premières détections souvent trop tardives, manque d'efficacité de spécialités phytosanitaires quels que soient le mode d'application et la substance active ou l'agent biologique utilisés...

En France, l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) a mis au point une stratégie intégrée d'éradication. Cette stratégie comprend des actions d'ordre organisationnel (communication, formation des acteurs, développement de réseau d'observateurs et d'opérateurs, implication des particuliers...) et des actions phytosanitaires comme la taille sanitaire, le piégeage massif (qui ne doit pas être considéré comme un moyen de lutte efficace à lui seul) et des traitements préventifs dans les zones de lutte. La taille sanitaire, pratiquée pour la première fois en 2009 en France, consiste à éliminer l'ensemble des tissus infestés du palmier. Elle a pour atouts d'être facile à mettre en œuvre, d'éradiquer le foyer traité et de sauver le palmier si le bourgeon terminal n'est pas atteint ; mais elle n'empêche pas de nouvelles infestations.

La figure 2 illustre l'évolution, dans une agglomération du Var, du nombre de palmiers infestés déclaré.

Papillon palmivore

Dans les zones très infestées par le papillon palmivore Paysandisia archon comme l'Hérault et le Var, on constate la mort de nombreux palmiers et une évolution dans la gamme d'hôtes sensibles à ce ravageur. En effet, depuis 2001 (date de sa détection en France), on connaissait le Chamaerops humilis (inscrit dans la flore naturelle française) et le Trachycarpus fortunei comme sensibles. Or depuis 2009, il est confirmé que les chenilles peuvent engendrer la mort de palmiers des Canaries (Phoenix canariensis) adultes et amoindrir considérablement la résistance mécanique des palmes, qui peuvent être dangereuses à cause de leurs forts aiguillons.

Les détections au sein des départements de la moitié ouest de la France n'ont semble-t-il pas eu de suite. Cependant le risque de contamination lié à la plantation de plants infestés reste élevé, quels que soient le lieu et la saison. Le point positif réside dans la mise au point de plusieurs stratégies de lutte, très différentes et complémentaires.

Malgré cela, la surveillance des lots de palmiers, produits ou commercialisés, reste de rigueur.

Phytopte du fuchsia

Le phytopte du fuchsia (Aculops fuchsiae), acarien originaire d'Amérique du Sud (Californie, Brésil), a été détecté pour la première fois en France dans le golfe du Morbihan en 2003. Actuellement, toute la Bretagne ainsi qu'une partie de la Basse-Normandie et des Pays-de-la-Loire sont touchées par cet organisme de quarantaine, présent en jardins et espaces verts.

La dissémination se fait très facilement par le vent, les insectes pollinisateurs et les oiseaux ; mais le plus souvent, elle a lieu lors d'échanges de boutures porteuses du ravageur. Ce microscopique acarien est responsable d'une déformation des feuilles et de l'apparition d'excroissances (galles) qui gonflent et prennent une teinte rouge provoquée par la concentration des pigments de la plante. Les galles foliaires ressemblent à celle de la cloque du pêcher... mais sur fuchsia. La croissance de la plante est stoppée et les fleurs se déforment (photo).

La lutte contre cet organisme est obligatoire en permanence sur tout le territoire français : l'arrêté ministériel du 10 mai 2004 impose à tout détenteur ou producteur de fuchsias déclarés contaminés de détruire ces végétaux par arrachage (ce qui inclut la souche) et incinération.

En Bretagne : Le problème se situe davantage en espaces verts et chez les particuliers, où les plantes en pleine terre repoussent parfois après arrachage. La meilleure solution consiste à détruire les sujets atteints sur place, par le feu, pour éviter toute dissémination... ce qui est difficile en ville et lotissements si la réglementation interdit le feu. Pour résoudre le problème, certaines communes ont mis en place des lieux de dépôt bâchés afin que les jardiniers amateurs puissent déposer leurs plantes contaminées pour une incinération globale.

Les espoirs d'éradication du ravageur sont très minces en Bretagne vu l'ampleur des contaminations et la capacité d'adaptation de l'acarien aux conditions climatiques.

En Pays-de-la-Loire : l'acarien progresse sur la façade atlantique bordant la Bretagne. La presqu'île Guérandaise et la région de Saint-Nazaire sont touchées depuis 2006. Le ravageur est détecté régulièrement sur Nantes depuis 2005. En 2009, il a franchi la Loire dans le pays de Retz (sud-ouest de Nantes). Ces trois secteurs doivent faire l'objet d'une vigilance accrue de la part des particuliers, des services espaces verts et des professionnels.

En revanche, la production régionale n'est pas touchée pour l'instant. Seuls deux cas ont été détectés en pépinière et en jardinerie sur des plants de fuchsias issus de l'achat-revente. La vigilance est de rigueur !

Coccinelle asiatique : quand un auxiliaire devient invasif...

Il y a quelques années encore, la coccinelle asiatique Harmonia axyridis ne faisait pas partie de notre faune locale. Elle est aujourd'hui souvent rencontrée sur les cultures et les parcs et jardins, en Europe et notamment dans la moitié nord de la France. L'insecte s'est établi en 2001 en Belgique, en 2003 dans l'est de la France et en 2004 dans le nord. Depuis, son aire de répartition ne cesse de s'étendre ; on a décelé des populations en Corse !

En France, des questions se posent quant à son influence possible sur l'équilibre de la faune indigène. De plus, les pullulations devenues courantes dans les habitations sont mal perçues par la population. Enfin, comme elle est présente sur nos cultures, il faut intégrer son action prédatrice dans les stratégies de protection biologique utilisant l'introduction ou la conservation d'espèces indigènes d'auxiliaires. Cet insecte fait l'objet d'un suivi spécifique en Nord-Pas-de-Calais.

<p>* FREDON (Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles) Provence-Alpes-Côte-d'Azur. ericchapin.fredon@orange.fr</p> <p>** On trouvera leurs noms dans l'encadré 1 et des explications sur le réseau dans l'encadré 2 p. 21.</p>

1 - Qui sont les rédacteurs de ce bilan ?

Éric Chapin (FREDON Provence-Alpes-Côte-d'Azur)

Nicolas André (FREDON Languedoc-Roussillon)

Dominique Arcangioli (GDON de Marseille)

Laurence Arene (FREDEC Midi-Pyrénées)

Frédéric Augier (FREDON Bourgogne)

Marie Bardet (FREDON Bourgogne)

Céline Casset (FREDON Pays-de-la-Loire)

Sandrine Douteau (FDGDON Vendée)

Carole Fellis (FDGDON Vaucluse)

Jérémy Gourdien (FDGDON Loire-Atlantique)

Carine Guillou (FREREDEC Bretagne)

Mickaël Isambert (FDGDON Yonne)

Noémie Jaquemin (FREDON Pays-de-la-Loire)

Elisabeth Jodin (FREDON Lorraine)

Julien Kervella (FREREDEC Bretagne)

Arnault Lebel (FREDON Picardie)

Michaël Lecat (FREDON Corse)

Céline Magen (FREDON Ile-de-France)

Maryse Meriau (FREDON Centre)

Carol Miniggio (FDGDON Vaucluse)

Marie-Charlotte Paput (FREDON Bourgogne)

Laurène Pérez (FREDON Provence-Alpes-Côte-d'Azur)

David Philippart (FREDON Normandie)

Sophie Quennesson (FREDON Nord-Pas-de Calais)

Christel Rapaport (FREDON Aquitaine)

Laurent Rebillard (FREDON Franche-Comté)

Gilles Romane (FREDON Auvergne)

Nicolas Tesson (FDGDON Vendée)

Philippe Tixier-Malicorne (FREDON Languedoc-Roussillon)

Camille Vatelot (FNLON)

2 - RES en zones non agricoles (ZNA) : détecter, identifier, comprendre et évaluer le risque phytosanitaire

Le réseau d'épidémiosurveillance (RES) dans le domaine végétal a été créé pour assurer une surveillance exhaustive et régulière de l'état sanitaire des végétaux sur le territoire français, en zones agricoles et non agricoles (ZNA).

Des comités régionaux, présidés par les Présidents des Chambres régionales d'agriculture et associant l'ensemble des acteurs participant à la veille sanitaire, ont été créés. Ils ont défini en 2009 des schémas régionaux reposant sur un réseau d'observateurs avec un animateur régional par filière végétale, désigné en fonction de sa compétence.

Ces animateurs coordonnent le réseau d'observateurs, compilent les données recensées pour leur filière et rédigent un Bulletin de Santé du Végétal (BSV) donnant une évaluation du risque et mis gratuitement sur le site de la DRAAF (Direction régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt). Ainsi tous les acteurs peuvent raisonner leurs pratiques (itinéraires techniques, préconisations...) en fonction de l'analyse du risque.

En matière d'horticulture et de paysage, il existe selon les régions soit deux bulletins distincts soit un bulletin mixte abordant à la fois les ZNA et les productions horticoles. Le dispositif d'épidémiosurveillance de la filière ZNA est en cours d'élaboration dans une quinzaine de régions où les comités régionaux d'épidémiosurveillance ont désigné les animateurs filière ZNA appartenant au réseau des FREDON(1).

L'implication de l'ensemble des acteurs (applicateurs, distributeurs, experts, agents de collectivité, jardiniers, botanistes, amateurs, élagueurs, green-keepers...) dans l'observation élargira bientôt la connaissance. Le déploiement de réseaux exhaustifs et pérennes permettra de suivre en temps réel la situation phytosanitaire nationale ou locale, d'identifier précocement les nouvelles problématiques (indispensable notamment vis-à-vis des organismes invasifs), de renforcer les connaissances sur la dynamique des populations et de raisonner au mieux les pratiques phytosanitaires.

(1) Fédérations régionales de défense contre les organismes nuisibles.

Figure 1 - Dynamique des populations d'auxiliaires sur le site pilote du cimetière de Saint-James (Manche), deux parcelles suivies en 2009.

3 - Frelon asiatique, il s'invite chez l'habitant !

Nid accroché à un appentis. Il peut abriter jusqu'à 2 000 frelons. ph. FDGDON de Vendée

Nid accroché à un appentis. Il peut abriter jusqu'à 2 000 frelons. ph. FDGDON de Vendée

Distribution connue de V. velutina en France en 2009. En orange, les départements où le frelon était déjà signalé en 2008. En rouge, ceux où les premiers signalements vérifiés datent de 2009 (Aude, Vienne, Indre, Indre-et-Loire, Maine-et-Loire et Seine-Saint-Denis).

Distribution connue de V. velutina en France en 2009. En orange, les départements où le frelon était déjà signalé en 2008. En rouge, ceux où les premiers signalements vérifiés datent de 2009 (Aude, Vienne, Indre, Indre-et-Loire, Maine-et-Loire et Seine-Saint-Denis).

Le frelon asiatique s'attaque peu aux végétaux en ZNA (sauf les fruits mûrs des jardins de particuliers en fin d'été) mais il les affecte indirectement en s'attaquant aux abeilles donc à la pollinisation. D'où sa place un peu à part dans ce bilan.

Le frelon asiatique Vespa velutina nigrithorax est un hyménoptère invasif d'origine asiatique introduit accidentellement en France, en Aquitaine (premier signalement dans le Lot-et-Garonne en 2005). Ce n'est pas un organisme réglementé ni reconnu nuisible au sens réglementaire, donc aucune mesure de lutte collective n'est obligatoire.

Il nidifie sous des abris aérés, dans la frondaison des arbres et le creux des murailles. Le nid, de forme quasi sphérique (souvent plus de 40 cm de diamètre), peut renfermer plus de 2 000 individus. L'activité du frelon est strictement diurne. Les colonies ne vivent qu'un an. Ce prédateur d'abeilles (il peut détruire entièrement une colonie) voit son extension exponentielle et d'une ampleur telle que tout espoir d'éradication est vain.

L'installation des nids au voisinage des plans d'eau quels qu'ils soient, y compris piscines et bassins dans les jardins et espaces ouverts au public, en fait un organisme très redouté. En effet, il est très largement représenté en périphérie des agglomérations. Au printemps, il y a plus de nids près des habitations (avant-toits, appentis, haies et massifs buissonnants) que dans la partie haute des arbres. Largement relayé via Internet, un protocole de piégeage des fondatrices (femelles fécondées) au printemps est mis en place tout azimut, particulièrement en zones péri-urbaines, malgré la forte remise en cause de l'opération par de nombreux scientifiques spécialistes. La non sélectivité des pièges mettrait en danger la biodiversité. De plus, la capture des fondatrices, diminuant la compétition intra spécifique, pourrait conduire à l'augmentation du nombre de nids. La recherche s'oriente vers la mise au point d'une phéromone spécifique permettant la protection du rucher en été et à l'aube.

L'enlèvement des nids de frelon doit être réalisé en été avec mille précautions car l'approche à moins de 5 m est dangereuse. Une tenue spécifique de protection intégrale est indispensable. Il est fortement recommandé de faire appel à une entreprise spécialisée pour la destruction des nids.

32 départements étaient touchés fin 2009 dont 29 de proche en proche à partir du Sud-Ouest et 3 « isolés » : l'Ille-et-Vilaine, la Côte-d'Or (où une douzaine de nids ont été détruits en 2009) et la Seine-Saint-Denis (un nid).

Figure 2 - Évolution du nombre de palmiers déclarés infestés par le charançon rouge dans une communauté de communes du Var.

 ph. E. Chapin

ph. E. Chapin

Résumé

Le bilan phytosanitaire de l'année 2009 en ZNA (sauf sur gazons) est présenté pour la première fois dans le cadre du Réseau d'épidémiosurveillance mis en place en 2009.

Il fait le point sur :

– les organismes nuisibles « classiques » à la pression liée au climat annuel : insectes piqueurs-suceurs (pucerons, tigre du platane), maladies (divers oïdiums, anthracnose, rouilles, etc.) et la régulation des ravageurs par des auxiliaires ; l'exemple d'une parcelle pilote dans la Manche suivie dans le cadre du RES est donné ;

– des organismes semblant moins liés au climat annuel tels la mineuse du marronnier, le flatide pruineux, Chalara fraxinea sur frêne et les processionnaires du pin et du chêne ;

– les nuisances dues à deux vertébrés : l'étourneau sansonnet et le pigeon biset.

– les plantes invasives : citations d'espèces présentes, analyse des causes des problèmes posés, conseils de prévention de nouveaux problèmes ;

– les principaux organismes phytophages invasifs : capricorne asiatique, chancre coloré du platane, charançon rouge du palmier, papillon palmivore, phytopte du fuchsia et coccinelle asiatique.

En marge de cela, il présente le RES et fait un point sur le frelon asiatique, peu phytophage mais nuisible aux végétaux par sa prédation sur les abeilles.

Mots-clés : ZNA (zones non agricoles), RES (réseau d'épidémiosurveillance), organismes nuisibles, ravageurs, maladies, plantes invasives, auxiliaires.

L'essentiel de l'offre

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