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Débat

Écophyto à SupAgro, les étudiants s'en mêlent

ÉTUDIANTS EN LICENCE PROFESSIONNELLE AGRICULTURE RAISONNÉE ET CERTIFICATION ENVIRONNEMENTALE, PROMO 2011-2012 - Phytoma - n°656 - août 2012 - page 45

Un « projet tuteuré » aboutit à un forum de qualité.
La parole est aux différents groupes ph. SupAgro

La parole est aux différents groupes ph. SupAgro

Le plan Ecophyto 2018, bien connu de nos lecteurs et qui vise à réduire l'usage des produits phytopharmaceutiques, vient illustrer le contenu pédagogique de la licence professionnelle « Agriculture raisonnée et certification environnementale » délivrée par Montpellier SupAgro. L'un des objectifs principaux de cette formation est de favoriser la gestion raisonnée des intrants agricoles. Dans ce cadre, les étudiants ont organisé un forum le 15 mars 2012. Ils en rendent compte ici.

Ecophyto au programme

Programme pédagogique

Le plan Ecophyto 2018 est l'un des fils conducteurs de la formation préparant à cette licence professionnelle. En 2012, il a constitué l'objet central du module « projet tuteuré » qui a débouché sur l'organisation du forum « Ecophyto 2018 », tenu le 15 mars 2012, au sein du Campus de Montpellier SupAgro.

Programme de la journée

Environ 130 personnes y ont assisté : étudiants ingénieurs de SupAgro et de BTS agricoles, chercheurs (INRA, CIRAD), enseignants-chercheurs et professionnels : entreprises (firmes phytosanitaires, coopératives, services), chambres d'agriculture, agriculteurs.

Nous avons présenté, lors de la matinée, le travail réalisé tout au long de l'année sur les quatre sujets suivants :

– Présentation générale du dispositif Ecophyto 2018,

– Réseau « Ferme » de démonstration Ecophyto,

– Réseau d'expérimentation Ecophyto : exemple sur vigne,

– Mise en oeuvre du plan Ecophyto en zones non agricoles.

L'après-midi, nous avons invité des intervenants extérieurs pour une suite de présentations suivies d'un débat :

– M. Christophe Pueyo, de la DRAAF(1),

– M. Dominique Jonville, de BASF,

– Mme Jacqueline Jamet, de la CLCV(2),

– M. Laurent Morano, de l'UPJ(3),

– M. Xavier Langlet, de la DGAL(4),

– M. Serge Martin-Pierrat, agriculteur du réseau FARRE(5).

Présentations des étudiants

De la globalité au réseau « Ferme »

Après une présentation de notre licence professionnelle par Serge Kreiter, la parole est passée aux quatre groupes. L'exposé du groupe « organisation » a présenté le plan Ecophyto 2018, ses 9 axes et son déploiement territorial, et annoncé d'autres présentations en lien avec les différents axes.

La deuxième présentation est celle du « réseau Ferme » : dispositif national et mise en place en Languedoc-Roussillon (filière arboriculture).

Elle a montré le rôle des acteurs impliqués dans la mise en place d'un tel réseau et les difficultés rencontrées, notamment avec le manque d'IFT de référence. Autre limite : après les trois années prévues de fonctionnement du dispositif, on ne connait pas le devenir des exploitations et des résultats.

Cependant, un tel réseau nous semble être un outil primordial de communication, au travers de la promotion de pratiques adaptées à chaque filière de production.

Réseau « EXPEcophyto », la voix du Chapitre

Le troisième exposé, sur le dispositif « EXPEcophyto » , détaillait la mise en place d'expérimentations de méthodes de cultures moins consommatrices en produits phytos. Il s'est appuyé sur le travail du domaine viticole du Chapitre.

Cette ferme d'expérimentation de Montpellier SupAgro située à Villeneuve-les-Maguelone a comme objectifs le « zéro herbicide », l'optimisation des traitements fongicides (outils d'aides à la décision) et deux traitements insecticides par saison. Elle expérimente de nouvelles pratiques. Mais il est encore trop tôt pour évaluer les résultats préliminaires obtenus.

Un regret : que l'exposé n'ait pas pu évoquer l'impact économique de la mise en place des pratiques innovantes proposées.

ZNA (zones non agricoles), des spécificités

Enfin le dernier groupe a présenté la spécificité du plan Ecophyto 2018 pour les zones non agricoles (ZNA).

Il a évoqué les spécificités des risques de pollution, notamment la problématique de transfert de produits vers les eaux superficielles, globalement différente du processus de pollution diffuse lié aux pratiques agricoles.

Il s'est ensuite focalisé sur la réglementation particulière appliquée dans ces zones, puis sur la comparaison de l'utilisation des produits phytos en ZNA par rapport au monde agricole. La formation des utilisateurs a été évoquée, soutenue par L. Morano (UPJ). Enfin, les étudiants ont présenté l'exemple d'une commune pilote, Lédignan, très sensibilisée à l'enjeu « eau ».

Questions et dialogues

Après chaque exposé des élèves, tous jugés clairs, l'auditoire a posé des questions spécifiques, permettant ainsi une interaction entre étudiants et participants au forum.

Les deux dernières présentations ont suscité beaucoup de réactions dans la salle, notamment de nombreuses questions sur la réglementation et les contrôles appliqués aux jardiniers amateurs et aux collectivités. Le groupe ZNA, resté le plus longtemps sur l'estrade, a dû répondre à davantage de questions et de remarques de la part du public. En fin de matinée, un débat s'est initié dans l'amphithéâtre, permettant d'aborder des questions plus générales. Les professionnels nous ont aidés à répondre aux questions.

Cette matinée, très enrichissante pour nous, nous a permis d'approfondir notre connaissance du plan « Ecophyto 2018 » et du monde professionnel en général. Elle nous a également permis de nous exprimer devant un public de professionnels et d'étudiants. Discussions poursuivies autour du buffet de midi.

Impressions des étudiants

Groupe « Réseau Ferme »

« C'est la première fois que nous nous exprimons devant un auditoire d'initiés ! Cela nous a fait progresser à l'oral. Ceci a développé notre capacité à appréhender ce type d'événement, qui provoque chez nous de l'anxiété alors que nous y serons confrontés demain. En fin de présentation, les réponses à diverses questions de participants nous ont fait remobiliser nos connaissances pour leur répondre le plus pertinemment possible.

Nous avons appris à mieux connaître le travail des différents acteurs et leurs interactions. Nous avons pu aboutir à une analyse du réseau « Ferme ». Nous nous sommes appuyés sur un exemple concret : le réseau de M. Pascal Delon, ingénieur réseau du département du Gard, que nous remercions vivement pour son aide ».

Groupe « EXPEcophyto »

« Cette journée nous a permis de mieux appréhender l'objectif du « plan Écophyto 2018 ». Il sera difficile à atteindre en 2018 si on se réfère aux connaissances objectives actuelles, mais il a créé une réelle émulation dans le monde agricole et va permettre une recherche efficace de nouvelles stratégies ».

Groupe Ecophyto en ZNA

« Nous étions impressionnés à l'idée de monter sur l'estrade. Mais, une fois au micro, connaissant notre sujet, notre peur est passée. Nous avons apprécié le bon retour des professionnels (notamment L. Morano).

Notre exposé a suscité des réactions dans l'auditoire. Les remarques, pertinentes, nous ont permis d'approfondir notre réflexion sur l'utilisation de produits phytos en zones non agricoles.

De plus, les questions ouvertes, en fin de matinée, nous ont permis de nous rendre compte de certaines contradictions à l'intérieur du dispositif, notamment à l'égard de l'agriculture biologique. »

Avis de professionnels

Celui de l'administration régionale agricole

L'après-midi était consacrée à des témoignages d'acteurs impliqués dans la mise en place du plan Ecophyto. Nous avons trouvé les interventions des divers professionnels très intéressantes. Elles complétaient les exposés des étudiants avec une approche professionnelle.

D'abord, M. Christophe Pueyo a donné le point de vue de la Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF). Il nous a présenté l'accompagnement des exploitations dans la démarche « écophyto 2018 », les actions menées pour fédérer les agriculteurs autour de ce plan et les dispositifs expérimentaux mis en place pour répondre à l'objectif de réduction de l'usage des produits phytos.

De l'industrie phyto

Ensuite, M. Dominique Jonville, responsable filière céréales chez BASF, a donné la position du monde de l'agrochimie vis-à-vis du dispositif Ecophyto. Il a expliqué comment son entreprise, qui commercialise des produits phytos, s'adapte au plan Ecophyto. Il a déploré la mauvaise image des firmes commercialisant des produits phytos auprès du grand public, et a rappelé leur intérêt pour la production agricole.

Il a montré que les ventes de produits phytos par BASF ont diminué depuis 2002, en s'appuyant sur les tonnages de ventes annuelles de substances actives. Cependant, nous avons remarqué que les produits récemment autorisés ont des doses/ ha beaucoup plus faibles que celles des produits plus anciens, ce qui pourrait peut être expliquer cette diminution.

Des consommateurs

Ensuite Mme Jacqueline Jamet, bénévole pour la CLCV (Association nationale de consommateurs et usagers), est intervenue en tant qu'association de consommateurs.

Mme Jamet nous a parlé de l'inquiétude des consommateurs vis-à-vis de la qualité des aliments. La CLCV milite pour une agriculture plus respectueuse de l'environnement et respectant, également, la santé des consommateurs. Mme Jamet nous a donné un avis favorable sur le plan Ecophyto mais a souligné un manque d'information auprès des consommateurs.

Encore les spécificités ZNA

Laurent Morano, représentant l'UPJ, a pris la suite pour développer la stratégie d'adaptation du plan Ecophyto en zones non agricoles. Il a parlé de l'accord cadre destiné aux jardiniers amateurs. Puis il a abordé la communication au sein des communes en vue de réduire l'utilisation des produits phytopharmaceutiques. Cela nous a permis d'avoir le point de vue d'acteurs des zones non agricoles et de mieux comprendre leur implication dans le plan « Écophyto 2018 ».

L'État, l'agriculture biologique, les méthodes alternatives et la loi

M. Xavier Langlet, représentant la Direction générale de l'alimentation (DGAL) du ministère chargé de l'agriculture, est intervenu en tant qu'expert national DGAL/SDQPV en agriculture biologique et méthodes alternatives. Il a abordé les solutions complémentaires et alternatives à l'usage de produits phytos, suivi des lois en vigueur liées à l'environnement.

Témoignage d'agriculteur

Le forum s'est conclu par l'intervention de M. Serge Martin-Pierrat, viticulteur et arboriculteur, membre du réseau FARRE, témoignage d'acteur de terrain.

Il s'est exprimé sur les stratégies de luttes alternatives à l'échelle de son exploitation. Puis il a donné son avis sur le plan Ecophyto et son déploiement en Languedoc-Roussillon.

Pour lui, ce plan est audacieux, mais son point faible est un manque de communication entre l'administration et les agriculteurs, associé à un manque de formation de ces derniers. Selon lui, il faudrait davantage de formations car les agriculteurs ont soif de connaissances.

Cet intervenant nous a bien montré les réalités et les enjeux de ce plan au niveau des principaux intéressés : les agriculteurs qui, jusqu'à ce jour, n'avaient principalement qu'un objectif de production. Dorénavant, ils doivent également rendre un « service écosystémique » avec obligations de résultats. Ils ont besoin d'être accompagnés dans cette démarche.

Nouvelles impressions d'étudiants

Discussions en tous sens

« Lors du repas, nous avons pu discuter avec des professionnels. Puis les intervenants nous ont présenté leurs points de vue, ce fut source de nombreuses questions. Cependant, les débats sont restés très objectifs.

À propos du témoignage

L'intervention qui nous a le plus interpellés est celle de l'agriculteur, M. Martin-Pierrat. Son discours clair et bien argumenté a réellement captivé l'auditoire.

Il est vraiment et fortement engagé dans l'amélioration des pratiques culturales et la diminution de l'utilisation des intrants phytosanitaires. Et pourtant, il a montré du pessimisme quant à la faisabilité du projet. Il a en particulier alerté les acteurs à propos du manque de formation des agriculteurs, pourtant demandeurs. »

Table ronde

Des points à retenir

Après une courte pause, les professionnels réunis pour une table ronde ont répondu aux questions de la salle.

Monsieur Cousinier, coordonnateur du réseau d'exploitations des lycées agricoles engagés dans l'axe 2, action 16, en a profité pour présenter les actions réalisées par la DGER (Direction générale de l'enseignement et de la recherche du ministère chargé de l'agriculture). Il a ainsi montré le rôle pilote de ces établissements.

Cette table ronde a permis de souligner deux points négatifs du plan « Écophyto 2018 », à savoir un manque de communication (déjà signalé par M. Martin-Pierrat) et de coordination entre les différents acteurs.

Les discussions furent intéressantes par la diversité des intervenants. Mais le nombre élevé de participants et la richesse des échanges qui s'étaient déjà produits durant la matinée ont limité le nombre de questions posées. Le débat aurait mérité d'être plus vivant. Au final, la table ronde n'a pas répondu à nos attentes.

Un bilan positif

Deux agricultures émergent des débats

Le bilan de la journée est très positif, la qualité des interventions et des participants a permis son bon déroulement. Ce forum a été l'aboutissement de plusieurs mois de travail pour nous et l'occasion d'échanger avec des professionnels.

Il nous a permis d'ouvrir le débat sur la problématique des produits phytos. Les participants ont su s'exprimer avec courtoisie, ce qui a rendu le débat agréable à écouter. Il faut noter que tout le monde était en accord sur l'utilité des produits phytos pour l'agriculture d'aujourd'hui et la mission qu'elle devra remplir : nourrir 9 milliards d'êtres humains.

Cette journée nous a donné un aperçu des deux modèles d'agriculture qui vont se dessiner dans un futur proche : une agriculture industrielle et une agriculture de circuit court où le rendement n'est pas une priorité. Avec tous les enjeux actuels, notre devoir sera de trouver le consensus entre productivité et conservation de la nature et des paysages.

Indépendamment du sujet, des compétences acquises

A posteriori, la préparation d'une telle journée nous a permis d'acquérir certaines compétences (monter un projet, prendre des contacts avec des personnes ressources, etc.), et de nous exprimer devant un public qualifié sur un sujet précis. Marquant la fin de notre formation, l'exercice nous a préparés à notre avenir professionnel. Nous nous devions d'être aussi précis que concis, mettant en application les connaissances apprises durant notre formation.

Nous tenons à remercier les intervenants, ainsi que les sponsors ayant permis le succès de cette journée : SupAgro Fondation et ses membres fondateurs (AFD, BASF Agro, Agrosud, Alliance Occitane, Diam Bouchage SAS, Groupama Sud, Groupe les Journaux du Midi), l'UIPP, Bayer CropScience et Terra Vitis. Merci également aux membres de l'équipe pédagogique qui se sont investis dans l'accompagnement des groupes de projets et dans l'organisation du forum.

<p>(1) Direction régionale de l'Agriculture et de la Forêt.</p> <p>(2) Association nationale des consommateurs et usagers.</p> <p>(3) Union des entreprises pour la protection des jardins et des espaces publics.</p> <p>(4) Direction générale de l'Alimentation (du ministère chargé de l'agriculture).</p> <p>(5) Forum de l'agriculture raisonnée respectueuse de l'environnement.</p>

Du nouveau pour les « Licences pros »

La licence professionnelle Agriculture raisonnée et certification environnementale, qui existe depuis 2001, peut désormais être suivie en alternance sur 22 mois, en contrat de professionnalisation. La formation reste accessible par la voie classique (formation en un an avec stage de fin d'études de trois mois).

La licence professionnelle Viticulture raisonnée et certification environnementale, qui existe depuis 2006, est désormais accessible aux diplômés de bac+2 (BTSA, DUT, L2...) par la voie de l'alternance, en contrat de professionnalisation. Les enseignements et périodes en entreprise sont répartis sur 12 mois.

Le rythme d'alternance prévoit des périodes en centre de formation à Montpellier de 3 à 10 semaines, combinées à de longues périodes en entreprise. Ceci permet à l'étudiant de réaliser son stage professionnel dans la région de son choix.

L'objectif est de former des cadres intermédiaires accompagnant la profession dans les mutations technico-économiques, sociétales et environnementales en cours. Les débouchés sont variés.

Renseignements pédagogiques : Sylvia.Guglielmi@supagro. inra.fr (Tél. : 04 99 61 29 97).

Renseignements administratifs : Fabien.Prevot@supagro. inra.fr (Tél. : 04 99 61 25 14).

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RÉSUMÉ

CONTEXTE : Sur proposition des responsables pédagogiques de la licence professionnelle « Agriculture raisonnée et certification environnementale » de Montpellier SupAgro, les étudiants concernés ont organisé un forum consacré au plan Ecophyto 2018 sur le campus de Montpellier SupAgro le 15 mars 2012.

PROGRAMME : Quatre groupes d'étudiants ont présenté le plan Ecophyto :

– présentation générale,

– déclinaison régionale du réseau de démonstration « Ferme »,

– déclinaison régionale du réseau d'expérimentation «EXPEcophyto»

– déclinaison ZNA (zones non agricoles). Six intervenants extérieurs, représentant l'administration régionale et nationale, les fabricants de produits phytos pour l'agriculture et les ZNA, les consommateurs et la production agricole, ont donné leurs points de vue puis débattu en table ronde.

ENSEIGNEMENTS POUR LES ÉTUDIANTS :

– mieux cerner les enjeux, intérêts, limites et marges de progrès du plan Ecophyto ;

– de façon générale, une acquisition de compétences (montage et suivi de projet, organisation, prise de parole, entre autres).

MOTS-CLÉS : Ecophyto 2018, produits phytopharmaceutiques (produits phytos), forum, Montpellier SupAgro, licence professionnelle « Agriculture raisonnée et certification environnementale ».

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEURS : ÉTUDIANTS de la Licence professionnelle citée.

LIEN UTILE : www.supagro.fr

CONTACTS : voir encadré ci-dessus.

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