Station individuelle en Rhône-Alpes. Au premier plan, aire de remplissage et lavage du pulvérisateur. Noter le rebord et le dénivelé interne, pour que le liquide épandu coule vers le regard menant au dispositif de traitement des effluents. On observe ce dispositif au second plan. Noter la couverture (pour éviter que la pluie n'entraîne un excès d'eau, le pire ennemi des Phytobacs) et la façon astucieuse dont elle est rendue mobile : ça roule ! ph. Bayer
Les stations phytos(1), qu'est-ce que c'est ? Quels en sont les trois éléments principaux ? Comment choisir entre station individuelle (d'exploitation, espace vert ou propriété) et collective, ou associer les deux ? Comment articuler tout cela ? Réponses et résumé de grands principes.
Stations phytos, pas de quoi avoir peur
D'abord, de quoi parle-t-on ?
Une station phyto regroupe les installations dédiées à la gestion des produits phytos(2). De l'arrivée des produits à la ferme jusqu'au départ de l'appareil de traitement vers la parcelle à traiter, puis du retour de l'appareil jusqu'à la « disparition » des déchets (effluents, emballages vides et produits inutilisables) : leur élimination sur place ou leur envoi pour gestion à l'extérieur.
Une station phyto comporte donc trois éléments. D'abord et obligatoirement(3), un local de stockage des produits phytos conforme à la réglementation avec ses annexes éventuelles. Puis une aire dédiée aux (et équipée pour les) remplissage, lavage et vidange des appareils de traitement. Enfin les équipements de gestion des déchets : stockage et/ou traitement des effluents, stockage des emballages vides et des PPNU (produits phytos non utilisables).
À l'impossible nul n'est tenu
Et si c'est impossible ? Par exemple si on n'a pas la place pour une aire dédiée au remplissage et au lavage des appareils et/ ou à la gestion des effluents, pour cause d'enclavement dans le village ? On peut gérer le maximum d'effluents à la parcelle (Encadré 1) et se tourner vers une solution collective pour remplir et laver ses appareils et/ou traiter les effluents résiduels.
Parlons argent : il y a des aides
Reste la question du coût de ces équipements pas directement productifs. On peut se faire aider, par exemple dans le cadre du PVE (Plan végétal pour l'environnement ; attention, il se termine bientôt). Les Agences de l'eau y contribuent.
Par exemple, l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée- Corse a co-financé en 2012 pas moins de 526 aires individuelles de lavage (et remplissage) des pulvérisateurs, et 22 aires collectives regroupant 493 agriculteurs. Soit plus de 1 000 nouveaux agriculteurs « dans les clous » grâce à elle. À comparer aux 350 aires, dont une dizaine collectives, qu'elle avait co-financées en 2011 et aux 60 de 2010. L'aide est de 50 % du coût d'investissement.
Pour sa part l'agence Loire-Bretagne ne comptabilise pas à part les stations phytos, mais a financé sur les 5 dernières années 165 aires de lavage de machines à vendanger, tant individuelles ou collectives, dont la plupart sont ouvertes au lavage des pulvérisateurs avec des cuves de stockage de leurs eaux de lavage et l'organisation de leur traitement.
Pas forcément chic et cher
Par ailleurs, vous l'avez lu en 2012(4), une station phyto « n'est pas forcément un équipement chic, cher et clé en main ». Ce peut être :
l'aménagement de bâtiments existants pour stocker les produits et emballages,
l'aménagement d'une aire existante pour l'aire de remplissage-lavage,
l'installation d'un procédé de traitement des effluents rustique ou d'un simple stockage de ces effluents avant leur traitement délégué à d'autres.
On peut ainsi réduire ses investissements… Mais il y en a deux dont on ne peut pas faire l'économie.
Ils ne sont pas financiers. Ce sont la réflexion préalable et le diagnostic personnalisé.
Prendre le temps d'un bon diagnostic
Seuls investissements obligatoires : réflexion et diagnostic
Car il faut réfléchir avant d'investir. Par exemple, va-t-on préférer une station complète avec ses trois éléments (pour le stockage des produits, le remplissage-lavage des appareils, la gestion des effluents) ou bien en combiner un ou deux avec l'appel à des stations collectives et/ou prestataires ? Si on prend les trois éléments, comment les articuler ?
Quel type de local de stockage des produits choisir ? À quel emplacement ? Avec quel type de rétention ?
Où placer l'aire de remplissage en fonction des points d'eau ? Avec quels équipements et là encore quel type de rétention ?
Quel moyen de gestion des effluents sera le mieux adapté ? De quelles dimensions ? Où le placer ?
Les réponses à ces questions seront différentes dans chaque exploitation ou espace vert (pour les stations individuelles), et dans chaque groupe d'agriculteurs, coopérative ou autre organisme pour les stations collectives. Ceci en fonction de la situation de chacun, qu'il faut d'abord diagnostiquer.
Compliqué ? On peut se faire aider. Un regard extérieur aide à prendre du recul. Divers organismes proposent leur aide.
Aides au diagnostic, profession et coopératives
Certains ne font que conseiller. Selon les régions et départements, ce peut être la Chambre d'Agriculture et/ou la MSA.
Il y a aussi le secteur coopératif. Un cas très parlant est celui d'Unimed Arbo. Ce réseau de service coopératif de la filière arboricole du sud de la France commence toujours par effectuer un diagnostic de l'exploitation de son adhérent futur client.
Puis il co-construit avec lui le projet de station phyto, bien entendu aux normes, la plus compacte et fonctionnelle possible. Il l'oriente vers l'investissement le plus adapté en matière de stockage des produits et des effluents (avec une gamme de fournisseurs), d'équipements de remplissage (certaines coopératives du réseau fabriquent des colonnes) et de traitement des effluents.
Pour ce dernier élément, il offre le choix entre les Phytobacs (marque déposée Bayer) des sociétés Hermex et Biotisa (il ne construit pas de bacs bétonnés et/ou enterrés car il veut éviter les problèmes d'étanchéité à la longue), l'Heliosec ou l'Osmofilm.
Et les « privés » ?
Il y a enfin le vendeur « privé »… Certes, il vous conseillera d'acheter son local phyto plutôt que de le construire vous-même, et vous orientera vers ses propres dispositifs de remplissage du pulvérisateur ou de gestion des effluents. Mais beaucoup proposent des achats cohérents et fonctionnels.
Comment savoir si c'est le cas ? Si le vendeur potentiel propose un diagnostic personnalisé, ou s'il diagnostique sans le dire en visitant le site, en interrogeant, en adaptant son offre à la situation et en l'accompagnant de conseils de mise en œuvre, c'est bon signe. Sinon, méfiance.
Ainsi Vita Consult, basé à Gorges en Loire- Atlantique, effectue d'abord un diagnostic d'exploitation Aquasite labellisé par Arvalis. Ensuite, il aide à monter le projet de station. Il indique au client des fournisseurs de locaux phytos, rétentions, cuves de stockage, colonnes de remplissage, etc., et peut se charger des commandes sur demande. Pour traiter les effluents, il propose sa gamme… Mais il y a le choix : des Phytobacs agréés Bayer (il est expert phytobac) sous le nom d'Efflubacs, des Héliosec ainsi que le BF Bulles pour de gros volumes comme ce pépiniériste du Maine-et-Loire et ses 180 m3/ an d'effluents de trempage des plants.
Par ailleurs, certaines sociétés (encadré 2) proposent tous les éléments d'une station phyto donc une station complète et cohérente après diagnostic.
C'est le cas d'Axe Environnement. Basée à Romilly (Aube), la société propose deux types de locaux phytos (un en deux tailles et l'autre en quatre soit six possibilités), des armoires sécurisées pour stocker ses produits entre des murs existants, de quoi monter sa station de remplissage-lavage avec quatre types de colonnes de remplissage, des équipements pour sécuriser celles existantes, une rétention mobile, des outils annexes (rince-bidon, etc.) et le procédé de traitement des effluents Osmofilm avec les équipements annexes. Plus l'outil de diagnostic cité dans l'article p. 18 et une gamme d'EPI dont ceux cités p. 32 à 37.
C'est aussi le cas de Comod, basé à Conelles, (Eure). À sa carte, sept tailles de locaux de stockage plus des locaux annexes dits « saniphytos » (avec vestiaires, douches, etc.) et des armoires sécurisées (fabrication française). Mais aussi des colonnes de remplissage sécurisées, des cuves de stockage des effluents et l'adresse d'un fournisseur de débourbeurs si nécessaire. Mais encore des lits biologiques, certes non agréés Phytobac mais protégés de l'excès d'eau : le fond est un filtre à travers lequel l'eau en excès s'écoule par gravité dans le bac de rétention-stockage de l'effluent situé juste dessous, étanche et d'une capacité de 1 500 l (1,5 m3). Le dispositif peut traiter 2 500 l (2,5 m3) par an.
Avant le diagnostic, savoir les grands principes
Un diagnostic, cela se prépare avant de recevoir le diagnostiqueur. Il y a des règles générales, des grands principes à savoir. Voici quelques indications pour :
ceux qui ont une station phyto ou certains éléments, pour vérifier si c'est parfait ou… améliorable ;
ceux qui pensent s'équiper, pour préparer le diagnostic personnalisé de leur cas ;
les conseillers et autres technico-commerciaux pas spécialisés dans le diagnostic, pour pouvoir répondre en cas de question lors de leurs visites d'exploitations…
… Et, pour les conseillers déjà spécialisés, un rappel pour vérifier qu'ils savaient déjà tout.
Le local, divers mais…
Diversité et points communs
Commençons par le local de stockage. Nous en avions beaucoup parlé de 2003 à 2008 pour signaler les nouveautés et encourager leur développement. Aujourd'hui, 88 % des agriculteurs sont équipés, selon une enquête publiée en janvier 2013 par le magazine AgroDistribution. Avec une diversité justifiée et, parfois, des détails à améliorer.
La diversité est dans l'aspect visuel. Aménagement de locaux existants, montage d'un bâtiment dédié ou encore achat d'un local « clé en main » façon container ou bungalow de chantier.
Les détails à améliorer ? Le respect des contraintes réglementaires, ce que les fournisseurs sérieux de locaux clé en main assurent mais que certains auto-aménageurs peuvent ignorer. Et le suivi de certains conseils pratiques.
La loi exige, pour la sécurité
Les exigences réglementaires sont, globalement, justifiées par des raisons de sécurité.
D'abord il faut assurer celle des personnes en temps normal. Donc :
Le local est réservé aux produits phytos ; on y range aussi les ustensiles de préparation de la bouillie et les objets souillés type reliquats secs d'effluents bien ensachés et EPI (équipements de protection individuelle) usés dans leur poubelle dédiée.
Les produits sont conservés dans leur emballage d'origine, certains doivent être classés à part (voir ci-dessous).
Les EPI utilisables (neufs ou réutilisables après lavage) doivent être rangés dans un lieu extérieur au local de stockage.
Le local de stockage sera séparé des habitations et du logement des animaux (pas de porte directement communicante) ;
Il aura un « accès contrôlé » (pas d'entrées inutiles), du bon vieux cadenas au chic code électronique en passant par la serrure plus ou moins classique.
Il sera soit aéré soit ventilé (sécurité de ceux qui y entrent) ;
Les consignes de sécurité seront lisibles et accessibles, avec un accès facile aux FDS, fiches de données de sécurité.
Ensuite, il y a la sécurité en cas d'incident. Il faut donc :
que la porte s'ouvre vers l'extérieur pour une sortie plus facile en cas d'urgence ;
une rétention pour parer aux déversements accidentels de produits : rétention totale au sol ou, si ce n'est pas possible, bacs sous tous les espaces de rangement (étagères, socles) portant ces produits, et d'un volume suffisant ;
des matières absorbantes à portée de main dans le local lui-même ;
un extincteur hors du local mais facilement disponible en cas d'incendie (l'idéal est à côté de la porte, du côté où elle s'ouvre) ;
une arrivée d'eau, extérieure aussi mais proche, pour rincer rapidement en cas d'éclaboussures ;
détail à signaler : certains services d'inspection du travail exigeraient qu'aucun rayonnage d'étagère ne dépasse 1,20 m de haut. Sinon, les bouchons des emballages de 20 et 25 l seraient à une hauteur telle qu'il y aurait risque d'aspersion pour qui attraperait un bidon entamé et mal refermé.
Conseils pratiques pour l'efficacité
À côté des contraintes, il y a des conseils pour un usage efficace donc rentable.
La bonne conservation des produits demande un local hors canicule (si on a choisi un module à parois métalliques, lui trouver si possible un emplacement qui ne sera pas en plein soleil l'été) et hors gel, donc bien isolé et/ou avec chauffage.
Dans ce cas attention à la norme ! En effet, le chauffage ne doit pas présenter de « risque d'ignition » (pas de flamme). Il sera souvent électrique. Il faut une installation électrique à la norme NFC 15-100 (type salle de bain), avec interrupteur hors du local.
Pour retrouver facilement les produits donc mieux gérer leur stock, on a intérêt à les séparer par catégories et stocker à part les produits phytos non utilisables (PPNU).
On évitera les étagères en bois brut, faute de devoir les éliminer comme des déchets dangereux si elles sont souillées de produit (le bois les absorbe).
On implantera le local le plus près possible du lieu de remplissage du pulvérisateur et le plus loin possible des habitations et cours ou plans d'eau.
Aire de remplissage et/ou lavage, exigences et bon sens
Exigences pour la sécurité et l'environnement
Sur le site de remplissage, là encore, il y a des exigences à respecter. Elles visent à protéger les utilisateurs et aussi l'environnement. En effet, c'est une fois le pulvérisateur sorti et les bidons ouverts que le risque environnemental commence vraiment. Les exigences sont, citons l'arrêté du 12 septembre 2006 :
« un moyen de protection du réseau d'eau ne permettant en aucun cas le retour de l'eau de remplissage de cette cuve vers le circuit d'alimentation en eau ; »
« un moyen permettant d'éviter tout débordement de cette cuve. »
Cela peut prendre la forme d'une colonne de remplissage sécurisée comme en vendent Axe Environnement, Comod, Unimed et la Chambre d'Agriculture du Gard. Ou d'une installation « maison » avec clapet anti-retour (contre le retour d'eau ; attention, à inspecter tous les ans) et volucompteur (contre le débordement).
Équipement de rinçage d'emballages : facultatif mais utile
On peut ajouter l'équipement pour rincer les bidons avant de verser l'eau de rinçage dans la cuve (ne pas gaspiller de produit). Il sera inclus dans la cuve d'incorporation du pulvérisateur (photo ci-dessus) ou « autonome » (rince-bidon type Lav'Box, de Tecnoma ou Rinçotop, de la Chambre d'Agriculture du Gard vendu notamment par Axe Environnement, kit de rinçage des bouchons Smartline de Bayer vu p. 32…)
L'eau d'égouttage de ces bidons et bouchons devrait aller dans le dispositif de traitement des effluents. On peut placer des piques au-dessus de la rétention d'eau générale ou du phytobac ou acheter un égouttoir avec rétention comme ceux vendus par Axe Environnement en attendant ceux testés par Adivalor (voir p. 50).
On pensera aussi aux saches Adivalor pour les emballages vides et secs, avec supports sécurisants. Il faut deux saches différentes : une pour les bidons plastique rincés et séchés et les bouchons eux aussi rincés, et l'autre pour les emballages non rincés : sacs papier, cartons, bouchons sales.
Le sol et le bon sens
Par ailleurs, c'est du bon sens, il faut éviter les ruissellements dans les eaux de surface et les nappes. Or, la plupart des sièges d'exploitation sont situés près d'un cours ou point d'eau. Bizarrement, si on doit choisir entre, d'une part une aire imperméabilisée (bétonnée ou goudronnée) flambant neuve mais sans rétention et surplombant le cours d'eau tout proche et, d'autre part, une aire enherbée éloignée du cours d'eau… il faut préférer la seconde !
Mais l'idéal est, bien sûr, l'aire imperméabilisée avec rétention. Elle pourra être utilisée en toute sérénité pour le remplissage du pulvérisateur, son lavage et sa vidange : les effluents iront dans la rétention en attendant leur traitement.
Gestion des effluents, les quinze et les trois cas
Les procédés sont 15
Pour ce traitement des effluents, 15 procédés sont officiellement reconnus aujourd'hui. Soit « deux de plus et un de moins » que les 14 de l'an dernier. Bref, il y a du nouveau ! L'article p. 44 fait le point. Certains procédés sont mieux adaptés aux stations individuelles ou collectives en fonction de leurs dimensions et modes d'action.
Mais chaque agriculteur est-il obligé d'investir sur son exploitation dans un procédé reconnu ? Pas forcément. On peut s'en passer, en théorie, dans trois cas.
Le cas du traitement délégué
Le premier cas consiste à ne pas traiter les effluents sur place avec son propre dispositif, mais à déléguer le travail :
au dispositif mobile d'un prestataire de services qui viendra traiter sur place ;
à une station collective s'il en existe une assez proche.
Cela demande quand même un équipement individuel.
Si le prestataire vient traiter sur place, il faut une ou des cuve(s) de stockage de capacité totale suffisante pour tous les effluents de l'année. Donc souvent supérieure à celle des cuves de stockage adjointes aux dispositifs de traitement des effluents sur place.
Pour faire appel à une station collective, il faut aussi une ou des cuves, mais d'une contenance ne dépassant pas 1 m3. En effet, elles serviront aussi au transport de l'effluent brut jusqu'à la station collective. Or la réglementation du transport (dite « ADR ») exige de ne pas dépasser 1 000 l soit 1 m3 par transport ; au-delà ça se complique.
Déjà, il y a des exigences : faire une déclaration, se munir d'un extincteur et d'une lampe de poche, et que la cuve soit aux normes UN pour le transport des matières dangereuses (double paroi, etc.).
Le cas du lit sauvage
Deuxième cas : on peut utiliser un procédé non reconnu si rien n'en sort, ou si tout ce qui en sort part en centre agréé pour le traitement des DD (déchets dangereux, dits jadis DIS , déchets industriels spéciaux).
Ainsi les Phytobacs implantés avant la reconnaissance du procédé début 2007 n'avaient rien d'illégal tant que non vidangés.
Il en est de même aujourd'hui pour les lits biologiques « sauvages ». Le problème survient le jour de leur vidange : le substrat doit alors partir en centre agréé, dans un contenant normalisé pour le transport des matières dangereuses…
Certes, certains lits biologiques non reconnus peuvent fonctionner longtemps. Ainsi Comod affirme que ses lits biologiques les plus anciens ont sept ans et n'ont pas été vidangés. Mais peut-on qualifier de sauvages ces dispositifs gérant l'eau en excès, fournis avec conseils de dimensionnement et d'entretien ? Un brin civilisés, non ?
En revanche, un lit biologique bricolé sans conseil et non suivi techniquement devra être vidangé plus souvent qu'un autre.
Le cas du 100 % parcelle
Troisième cas : en théorie, on peut décider de gérer tous ses effluents à la parcelle (Encadré 1 p. 39). Mais il faut embarquer sur son pulvérisateur, outre la cuve de rinçage pour diluer le fond de cuve avant pulvérisation sur la parcelle traitée, des équipements supplémentaires :
un appareil pour l'épandage du volume mort, et/ou un autre pour la dilution séquentielle qui autorisera ensuite la vidange de l'appareil (détails p. 32 à 37) ;
un dispositif de lavage extérieur de l'appareil : cuve et lance sous pression (sans pression, il faut trop d'eau), sans oublier les EPI car l'eau sous pression rebondit.
Et cette option ne supprime pas le risque de débordements accidentels lors du remplissage avec pollutions ponctuelles ! Pour gérer ce risque, il y a deux solutions.
Équiper sa cour de ferme : colonne de remplissage sécurisée, aire bétonnée avec rétention pour récupérer tout débordement accidentel avant envoi en centre agréé ou appel à un prestataire traiteur d'effluents… Aller remplir son appareil en station collective. Pourquoi pas, si elle est proche ? Certains le font. De fait, on les voit parfois y laver leur appareil ou le vidanger…
Ainsi, dans l'option « gestion des effluents à 100 % dans les parcelles », le « 100 % » semble un peu théorique. En pratique, il se mâtine souvent de traitement délégué au prestataire individuel et/ou d'usage de station collective.
Quand les stations jou(ai)ent collectif
Développement
De fait, les stations collectives se sont bien développées. Jusqu'ici.
Des exemples ? Lu p. 39, l'Agence de l'Eau Rhône-Méditerranée en a subventionné 22 en 2012 sur son périmètre d'action.
Autre exemple, l'agence Loire-Bretagne, après la station de Clisson (Loire-Atlantique) citée l'an dernier, a financé une autre station collective montée par Vita Consult, à Brissac dans le Maine-et-Loire.
Cette station devrait traiter 15 m3 d'effluents par BF Bulles en 2013, puis 60 m3/an en régime de croisière. Elle est initiée par la CAPL (Coopérative agricole des Pays-de-Loire) à Thouarcé pour compléter les stations individuelles des adhérents (stockage de produits et effluents, aire de remplissage lavage).
L'agence travaille aussi en milieu viticole avec le procédé Vitimax. Une station fonctionne à Sancerre (Cher) avec 50 viticulteurs, et une autre est en cours de réalisation à Pouilly-sur-Loire (Nièvre).
Coup de frein ?
Mais tous ces développements viennent de subir un coup de frein réglementaire.
En effet, nous avions écrit l'an dernier (voir « Pour en savoir plus ») que, de par un arrêté du 23 décembre 2011(5), les installations stockant et traitant des effluents phytos sont dispensées de la réglementation ICPE (Installations classées pour l'environnement) si :
elles traitent moins de 20 m3 par jour, c'est réaliste même en station collective ;
elles n'en font pas leur activité principale et ne traitent que les effluents de leur propriétaire… et là ça se complique !
Cette exigence est respectée par une station individuelle d'agriculteur, ainsi que par une station de CUMA traitant ses propres effluents, ou une station municipale traitant les effluents de traitements effectués par la commune. Mais que dire d'une station de chambre d'agriculture, de coopérative ou de municipalité, où les agriculteurs du secteur feraient traiter leurs effluents ?
On avait espéré des dérogations… Il semble que cela aurait créé une brèche réglementaire dans lesquels d'autres acteurs économiques auraient voulu s'engrouffrer. Aux dernières nouvelles, il n'y aura pas de dérogation. Même si toutes les eaux utilisées sont recyclées sur place, il faudra en passer par la réglementation ICPE sous la « rubrique 2795 » et le régime DC, déclaration en préfecture, avec obligation de contrôle tous les 5 ans par un organisme agréé(6). À moins d'un… choc de simplification ?
En attendant, certains projets de stations collectives sont au point mort. Combien repartiront-ils ? Combien seront abandonnés ? Nous verrons.
<p>(1) Phytos = phytosanitaires pour les stations, aires, traitements et effluents.</p> <p>(2) Phytos = phytopharmaceutiques pour les produits.</p> <p>(3) En théorie, ce n'est pas obligatoire si :</p> <p>Le chef d'exploitation n'a aucune main-d'œuvre autre que lui-même. Attention, le terme de <i>« main-d'œuvre »</i> désigne non seulement les salariés permanents mais aussi les temporaires (saisonniers, remplaçants), mais encore les non-salariés (stagiaires, entraide familiale ou de voisins, etc.)… même bénévoles et même s'ils ne traitent jamais ! Combien d'exploitations n'ont jamais de main-d'œuvre, dans ces conditions ?</p> <p>Ou si l'exploitation ne stocke, jamais, aucun produit phyto. Même pas une journée... Difficile, à moins d'aller systématiquement remplir son appareil à la station collective proche, qui, elle, stockerait les produits. Un service à créer pour des stations phytos collectives montées par des coopératives ?</p> <p>(4) Effluents, l'installation des stations. <i>Phytoma</i> n° 653, avril 2012, p. 31-34.</p> <p>(5) Arrêté du 23 décembre 2011, au JORF du 10 janvier 2012 + ses annexes au BO du MEDDE du 25 janvier 2012.</p> <p>(6) Si on dépasse 20 m3 par jour on passe au régime A, plus contraignant.</p>
1- Gestion des effluents à la parcelle, un complément aux stations phytos
Gérer les effluents phytos à la parcelle est une pratique autorisée par l'arrêté du 12 septembre 2006(1). Elle est à recommander pour diminuer les effluents à ramener puis gérer à la ferme. Mais il est difficile d'éliminer totalement ces effluents.
D'abord le fond de cuve. On peut le pulvériser, après dilution, sur la parcelle traitée. La somme « traitement + pulvérisation du reliquat » ne doit pas dépasser la dose de produit autorisée sur la parcelle. Facile si on a mis juste la quantité nécessaire dans le pulvérisateur au départ.
Il faut diluer au moins par six ce fond de cuve, lequel, si on n'avait pris que la quantité nécessaire au départ, est le « volume mort » du fond de cuve et du circuit. Cela revient à apporter un volume d'eau égal à cinq fois ce volume de « fond de cuve » restant. Une cuve de rinçage standard suffit pour cette dilution.
On peut équiper son appareil d'un améliorateur de rinçage interne-économiseur d'eau type Sprayer rising cité dans l'article p. 32 à 37 et adaptable sur tout type de pulvérisateur. Mais, de toute façon, il restera ensuite… un volume mort, avec du liquide certes dilué mais pas épuré à 100 %. Qu'en faire ? Deux solutions : pulvériser ce volume mort, ou le vidanger.
Pour pulvériser le volume mort, on peut monter un Kleenjet sur l'appareil. Ce dispositif, évoqué p. 32 à 37 (et photo ci-dessus), permet d'épandre la totalité du volume mort, rampe comprise pour celles à circulation continue ou « seulement » celui du fond de cuve pour les autres. L'appareil est adaptable sur tout type de pulvérisateur.
Pour vidanger l'appareil à la parcelle, il faut d'abord diluer la bouillie au centième. Là, ça se complique. Ajouter en une fois une quantité d'eau égale à 99 fois celle du volume mort, c'est du rêve !
La solution dite du « rinçage séquentiel » exige bien moins d'eau, démonstration faite en 2007(2). Après avoir dilué au sixième et pulvérisé, on redilue au cinquième et on re-pulvérise, puis au quatrième et on pulvérise jusqu'au désamorçage de la pompe.
On a dilué au 120e... À savoir si on est allergique au calcul mental : des dispositifs permettent le pilotage automatique du rinçage séquentiel, sans calcul et depuis la cabine du tracteur (ex. Autonet de Tecnoma).
Une fois dilué au moins au 100e, on peut vidanger… Attention : pas n'importe comment ! Il y a des conditions :
pas plus d'une fois par an au même endroit ; on ne peut pas y dédier toujours la même pointe de parcelle enherbée.
pas partout ; il faut être à au moins 50 m de tout point, plan ou cours d'eau, y compris fossé ou (en zones non agricoles) caniveau ou bouche d'égout, et même…
... à au moins 100 m de tout lieu de baignade, plage, pisciculture, installation conchylicole, prise d'eau pour la consommation humaine ou animale.
Reste l'extérieur de l'appareil. Il a pu être souillé par les embruns de pulvérisation (ou la poudre du poudrage), le laver fera ruisseler des effluents. Le faire à la parcelle est possible, mais dans les mêmes conditions que la vidange : à au moins 50 m de l'eau et 100 m des lieux déjà cités, et pas plus d'une fois par an au même endroit.
Le problème est d'avoir assez d'eau, même si un système embarqué type Lavotop pulvé fait diminuer la quantité nécessaire
(1) Arrêté interministériel du 12/09/2006, JORF du 21.
2- Stations phytos, où trouver des fournisseurs ? Des indications dans l'Index phyto 2013
L'Index phytosanitaire Acta, c'est une mine ! Pour les stations phytos ? Oui, pour les stations phytos aussi ! Depuis son édition 2008, il accueille une rubrique « Bonnes pratiques ». Dans l'édition 2013 sortie à l'automne dernier, on trouve notamment :
p. 670-671, une liste (annoncée « non exhaustive et non officielle ») de 18 « fabricants/distributeurs de moyens de stockage » de produits phytos, suivie p. 672 d'un « exemple de local de stockage » tiré d'une brochure MAAF/MSA ;
p. 677-678, une liste de 19 sociétés ou organismes proposant l'un ou l'autre (ou plusieurs) des 14 procédés de « traitement des effluents phytosanitaires » reconnus à l'automne dernier(1), plus 6 autres proposant aussi des procédés (sans préciser lesquels).
Trois de ces intervenants proposent à la fois du stockage et du traitement des effluents, ce qui est intéressant pour monter une station phyto individuelle cohérente. Ce sont les sociétés Axe Environnement et Comod, ainsi que le réseau coopératif Unimed Arbo. Nous les avons interrogés tous trois, précisions dans l'article (NB : l'Index liste aussi DB Distribution, mais depuis lors la société a été vendue).
(1) Pour les toutes dernières évolutions, voir dans ce numéro p. 44.
Organisation du local de stockage, comment identifier les produits à stocker à part des autres.
Il s'agit des produits les plus dangereux. Les mentions sur l'étiquette peuvent suivre l'ancien système encore autorisé jusqu'en juin 2015, ou le nouveau (suivant le règlement CLP conforme au SGH, système global harmonisé) qui sera obligatoire à partir de juin 2015.
(1) CMR = soit cancérogène (C), soit mutagène (M) soit toxique pour la reproduction (R).
Source pour les équivalences ancien/nouveau systèmes : Index phytosanitaire Acta 2013, p. 23 à 35.