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Rongeurs aquatiques, ne pas se faire déborder

MARIANNE DECOIN*, D'APRÈS LES COMMUNICATIONS DE THOMAS RUYS, GÉRALD GUÉDON, C. RICHOMME & AL., MARC PONDAVEN, VINCENT BROCHARD ET FRANCK BOUÉ AU COLLOQUE GEDUVER, ANGERS, 28 ET 29 MAI 2013. - Phytoma - n°664 - mai 2013 - page 25

Aperçu des communications sur les ragondins et rats musqués au colloque GEDUVER, Gestion durable des vertébrés déprédateurs : une problématique et des outils de gestion qui évoluent.
Ragondins en goguette.      > Ces gros rongeurs (un adulte pèse environ 7 kg) creusent leurs terriers près de l'eau, ce qui mine les berges. Ils se nourrissent de végétaux aquatiques ou semi-aquatiques mais ne dédaignent pas des nourritures plus terrestres s'il en pousse à proximité. Si, pour trouver un champ de maïs, il n'y a qu'une bande enherbée à traverser... ph. FDGDON 44

Ragondins en goguette. > Ces gros rongeurs (un adulte pèse environ 7 kg) creusent leurs terriers près de l'eau, ce qui mine les berges. Ils se nourrissent de végétaux aquatiques ou semi-aquatiques mais ne dédaignent pas des nourritures plus terrestres s'il en pousse à proximité. Si, pour trouver un champ de maïs, il n'y a qu'une bande enherbée à traverser... ph. FDGDON 44

 Photos : FDGDON 44

Photos : FDGDON 44

À gauche, piège-cage, fixé sur un radeau pour diminuer le risque de capturer des animaux non cibles, et non vulnérant pour pouvoir relâcher ces derniers.      > À droite, dégâts sur maïs.

À gauche, piège-cage, fixé sur un radeau pour diminuer le risque de capturer des animaux non cibles, et non vulnérant pour pouvoir relâcher ces derniers. > À droite, dégâts sur maïs.

Les rongeurs aquatiques, ragondins et rats musqués, sont des vertébrés déprédateurs car ravageurs directs des végétaux qu'ils consomment. De plus, leur mode de vie entraîne des dégâts hydrauliques. Enfin, ils posent des problèmes d'hygiène voire de santé vétérinaire et humaine.

Le colloque GEDUVER des 28 et 29 de ce mois de mai 2013, rendant compte du programme du même nom, permet de faire le point à leur sujet.

La problématique

Deux espèces, voire trois

Dans son intervention, T. Ruys, de l'association Cistude Nature, évoque le ragondin (Myocastor coypus), le rat musqué (Ondatra zibethicus) et le rat surmulot (Rattus norvegicus, dit rat brun ou rat d'égout).

Tous trois sont arrivés récemment en Europe, le surmulot depuis l'Asie au XVIIIe siècle(1) et les deux autres des Amériques à la fin du XIXe. Tous sont devenus envahissants. Tous sont amphibies car bons nageurs adaptés aux milieux humides. Ils sont potentiellement vecteurs de maladies, notamment la leptospirose pour tous les trois, ainsi que la douve du foie et parfois la forme larvaire du ténia vecteur de l'échinococcose alvéolaire pour le ragondin et le rat musqué.

Ragondin et rat musqué, ruraux et herbivores

Cependant le surmulot est aussi urbain que rural(2), se nourrit de n'importe quoi, et en milieu rural pose de (gros) problèmes surtout aux denrées stockées(3) ou aux écosystèmes fragiles de certaines îles.

Ses pesants cousins (environ 1,5 kg pour un rat musqué et 7 kg pour un ragondin) sont vraiment aquatiques (pattes au moins partiellement palmées, fourrure imperméable) et d'importance agronomique.

Ils sont ravageurs des végétaux vu leur régime surtout végétarien. De plus, ils font des dégâts hydrauliques : leurs griffes fouisseuses leur permettent de creuser des terriers sur les berges (voir la photo de l'introduction de ce dossier p. 15), ce qui mine celles-ci. La suite de ces pages leur sera consacrée.

Faut-il lutter ?

Un brin provocateur, T. R uys se demande s'il faut lutter contre le ragondin et le rat musqué vu l'impossibilité de les éradiquer (même si le Royaume-Uni a réussi avec le ragondin).

C'est pour répondre oui, « ne serait-ce que pour diminuer l'impact à certaines périodes de l'année et anticiper des catastrophes en particulier sur l'effondrement des berges et les risques d'inondation ».

Il signale ensuite le statut légal de ces espèces vis-à-vis desquelles la lutte peut désormais se mener par piégeage ou tir, et ce toute l'année y compris hors périodes d'ouverture de la chasse. En effet, l'empoisonnement par des rodenticides, même en lutte collective encadrée, a été progressivement restreint.

Quatre axes pour cadrer la stratégie

Il précise les quatre axes sur lesquels doit, selon les recommandations des stratégies européenne et nationale relatives aux espèces exotiques envahissantes, s'appuyer une stratégie contre ces espèces. Ce sont plutôt des cadres :

– sensibilisation et assistance, notamment pour éviter les conflits d'usage ;

– collecte, gestion et partage des informations, avec un plaidoyer pour un inventaire national, le développement de la recherche scientifique et la surveillance des espèces ;

– renforcement des cadres politiques, juridiques et administratifs... en signalant que les actions exigent des investissements sur « le long terme qui peut être contradictoire avec des décisions politiques » ;

– une « lutte nationale », en fait cadrée nationalement, avec phases de diagnostic et d'évaluation d'efficacité des méthodes et d'effets secondaires. Pour réitérer ce qui a réussi et pas ce qui a échoué, il faut l'avoir évalué.

Les piégeurs

Il pose aussi la question de l'organisation humaine du piégeage.

En effet, on préfère actuellement les pièges non vulnérants qui ne font que capturer les animaux. Cette solution écologiquement préférable permet de relâcher intacts les individus d'espèces non cibles qui auraient pu être piégés. Mais on est alors obligé de tuer les ragondins et/ou rats musqués.

Et là, citons la communication : « Est-ce que des personnes recrutées, par exemple pour des cas de réinsertion sociale, peuvent supporter le fait de devoir mettre à mort des dizaines d'animaux au jour le jour sur une période assez longue ? » Jusqu'où faut-il professionnaliser et spécialiser le métier de piégeur ? Sinon, que penser du bénévolat ?

Historique vu de Vendée

Année 70 à 90, deux premières périodes se chevauchent

C'est qu'avant, les luttes étaient menées par des agriculteurs bénévoles et à l'aide de rodenticides. G. Guédon, directeur de la FRE DON Pays-de-la-Loire, en fait le récit dans son intervention sur l'historique des luttes en Vendée, en cinq périodes.

La lutte collective contre le rat musqué commence dans les années 70. Dans le Marais breton au nord-ouest de la Vendée, elle utilise des pièges à mâchoires, avec vente de la fourrure car le marché est porteur.

Ailleurs, elle fait appel à l'empoisonnement par la chlorophacinone. Les appâts sont des morceaux de carottes imprégnés du rodenticide et disposés dans les coulées empruntées par les rongeurs. Les applicateurs sont les agriculteurs encadrés par leur FDGDEC(4), ancêtre de la FDGDON(5).

La lutte individuelle est possible même si pas efficace seule : chacun peut acheter du produit et fabriquer ses appâts.

La lutte collective contre le ragondin(6) commence dans les années 80. Elle se fait surtout par empoisonnement à la bromadiolone. Le scilliroside est autorisé aussi, mais il est moins efficace. La lutte individuelle est impossible (vente uniquement via la FDGDEC). Les applicateurs sont les agriculteurs organisés par leur fédération départementale, ou cette dernière à l'aide de bateaux pour placer les appâts. Ceci avec la bénédiction des syndicats de marais et de rivière : la lutte minimise les dégâts hydrauliques.

La période « statut gibier »

À la fin des années 80, commence la troisième période suite à une évolution réglementaire.

Après deux hivers froids qui ont régulé les populations, un arrêté du ministère chargé de l'environnement daté du 26 juin 1987 donne aux deux espèces le statut juridique de gibier. On a le droit de les tirer et les piéger en période d'ouverture de la chasse. Par un arrêté du 30 septembre 1988, le même ministère les déclare nuisibles au sens de la chasse et de l'environnement : on peut les piéger toute l'année.

Le but est, en encourageant le tir et le piégeage, de diminuer l'usage des rodenticides. Les chasseurs tirent des ragondins. Non loin de là, en Charente-Maritime, une équipe de piégeurs espère vivre de la vente de fourrure et de viande. Elle tiendra une année...

La lutte chimique collective reste possible mais son budget diminue. Les travaux sur la lutte biologique et l'immunocontraception n'avancent pas. Les populations se reconstituent et même explosent.

Dès 1995, période « montée du piégeage »

À partir de 1995, le piégeage se développe, si possible à l'aide de pièges-cages sur radeaux flottants.

À côté des luttes collectives par empoisonnement qu'elle continue à coordonner, la FDGDEC s'implique dans la lutte par piégeage sur certains secteurs en lien avec des partenaires et financeurs (cités dans la communication).

En 1996, elle réduit la lutte chimique dans le canton de Chaillé-les-Marais dans le Marais poitevin vendéen, au sud du département. Une association d'insertion va alors y pratiquer le piégeage à grande échelle avec 24 piégeurs. « 24 000 captures sont annoncées la première année. »

Ce canton sera un laboratoire de la gestion des rongeurs aquatiques en « 100 % piégeage ». La question de la gestion du personnel se pose. Car le métier de « 100 % piégeur » est ingrat, on l'a expliqué. Une association autonome se crée, elle remplace le public en insertion par des emplois jeunes. Leur nombre est moindre(7) et leurs tâches plus diversifiées. Ils pratiquent « un nouveau métier, l'agent des marais ».

Hélas ils n'arrivent pas à faire passer la population de ragondins sous le « seuil de nuisibilité acceptable ».

Trois autres associations d'insertion se créent dans le Marais poitevin vendéen. Elles combinent la lutte chimique (quantités fortement diminuées) avec le piégeage. Les résultats techniques sont bons.

Par ailleurs, hors marais, des GDON cantonaux se créent pour lutter contre les taupes sur la terre ferme et pratiquent également le piégeage des rongeurs aquatiques.

Au nord-ouest, dans le Marais breton, un syndicat mixte se crée pour organiser le piégeage par des bénévoles avec prime à la capture gérée par la FDGDEC.

Durant cette période, par un arrêté du 31 juillet 2000, le ministère chargé de l'agriculture classe le ragondin et le rat musqué comme organismes nuisibles au titre de l'agriculture, avec lutte obligatoire.

De 2002 à nos jours

En 2002, deux événements font évoluer les stratégies de lutte.

L'un d'eux est régional : c'est le programme coordonné entre les quatre départements de la Vendée, du Maine-et-Loire, de la Loire-Atlantique et des Deux-Sèvres autour du bassin de la Sèvre nantaise.

L'autre est national, c'est l'arrêté du 25 avril 2002 qui supprime la dérogation permettant d'empoisonner des espèces classées gibier si classées nuisibles par ailleurs. Toute lutte individuelle par empoisonnement est strictement interdite. Le ministère de l'agriculture n'autorise plus de produits et en retire certains du marché ; seule la bromadiolone reste autorisée avec restrictions.

En Vendée, la lutte chimique est abandonnée au profit du 100 % piégeage à l'aide de pièges-cages non vulnérants (photo ci-dessus) permettant de relâcher les espèces non cibles. L'organisation de la lutte collective coordonnée par la FDGDON repose sur un réseau de piégeurs, on y reviendra.

Aspect sanitaire, gare à la leptospirose

Près de 900 rongeurs analysés, 5 zoonoses recherchées

C. Richomme et F. Boué, du laboratoire de Nancy de l'Anses(8), présentent une étude sur les zoonoses chez les rongeurs aquatiques de Basse-Normandie, Bretagne et Pays-de-la-Loire.

Rappel : une zoonose est une maladie qui peut se transmettre de l'animal à l'homme ; et de l'homme à l'animal, du reste.

Près de 900 rongeurs ont été prélevés en 2010 ou 2011 dans 12 départements, selon un protocole rigoureux décrit dans la communication. Deux tiers d'entre eux étaient des ragondins et le restant des rats musqués. Puis cinq zoonoses ont été recherchées, par des analyses là encore décrites dans la communication.

Leptospirose, prévalence établie

Bilan : la zoonose la plus fréquente est la leptospirose : 41 % des ragondins et 51 % des rats musqués sont exposés. En effet, on trouve les anticorps dirigés contre le pathogène Leptospira sp. dans leur sérum : on parle de « séroprévalence ». C'est la preuve qu'ils ont été en contact avec des leptospires. De plus, 20 % des premiers et 35 % des seconds sont porteurs dans leurs reins de leptospires : ils sont infectés ; on parle de « prévalence ».

Les rongeurs hantant les eaux stagnantes (étangs, marais) sont deux fois plus touchés que ceux des eaux courantes (cours d'eau). Ces résultats sont cohérents avec ceux d'une étude de 2001 en Loire-Atlantique.

Conclusion : il y a risque de contamination du milieu via les excrétions de rongeurs, d'où contamination du bétail (prairies et fourrages souillés) mais aussi de l'homme.

Toxoplasmose

Pour la toxoplasmose, seule l'exposition a été mesurée : 27 % des ragondins et 31 % des rats musqués portent des anticorps anti-Toxoplasma gondii. Or, selon les auteurs, « des travaux antérieurs montrent que la majorité des animaux porteurs d'anticorps anti- T. gondii sont infestés par les toxoplasmes ». Les chercheurs n'ont pas trouvé de facteurs expliquant les différences de séroprévalence entre sites.

Bilan : il y a risque de contamination en cas d'ingestion de viande pas assez cuite. En fait le risque est faible : seul le ragondin est consommé, et seulement en pâté donc bien cuit. Il suffit que les habitudes alimentaires n'évoluent pas... De plus, la toxoplasmose n'est un problème que pour les femmes enceintes – en fait, pour leur futur bébé.

Autres maladies : peu d'incidence

Pour les trois autres maladies, la contamination est faible.

Seuls 4 animaux présentaient des kystes hépatiques caractéristiques de la phase larvaire d'Echinococcus multilocularis, agent de l'echinococcose alvéolaire, maladie du foie sournoise mais grave. Un unique rat musqué était contaminant (pour un éventuel renard le consommant, la maladie passant par ces derniers). Globalement, le rôle des rongeurs aquatiques est négligeable dans cette zoonose.

Concernant la fièvre Q, qui fait avorter le bétail et peut causer de graves pneumonies et atteintes du foie chez l'homme, seuls quatre ragondins (sur 730 rongeurs analysés) étaient exposés car porteurs d'anticorps anti-Coxiella burnetti. Aucun des quatre n'était vraiment infesté.

Enfin aucun animal n'était porteur de Francisella tularensis, agent de la tularémie, sur les 505 échantillons où on l'a cherché. Ainsi, c'est bien vis-à-vis de la leptospirose que les rongeurs aquatiques de l'Ouest peuvent poser un problème épidémiologique.

Dénombrer, pas facile

Pourquoi chercher une méthode

Après les constats sur les problématiques, l'historique et l'aspect sanitaire, place aux moyens pour aider à la gestion de ces rongeurs aujourd'hui.

On l'a vu, il faut évaluer l'efficacité des mesures mises en œuvre. Pour cela, il faut mesurer des paramètres, notamment l'évolution des populations. Mais comment dénombrer celles-ci ?

Une méthode dite « de Chizé » a été publiée en 1996, mais elle est lourde et coûteuse. Elle est utile pour la recherche, mais pas pour les suivis de population réguliers dans le cadre des luttes collectives.

Les FDGDON des Pays-de-la-Loire ont donc décidé de comparer trois méthodes plus légères avec un dénombrement de population totale. C'est ce qu'expose M. Pondaven, directeur des fédérations départementales de Vendée et Loire-Atlantique.

Indices, plateaux, piégeage

Les trois méthodes sont :

– l'évaluation d'indices d'abondance par observation-comptage des terriers, coulées, fèces, zones de broutage et animaux vus ;

– la méthode des « plateaux de consommation » : on appâte les animaux, on pèse les consommations (plusieurs pesées et regarnissage, détails dans la communication) et on en déduit le nombre d'animaux ayant consommé les appâts ;

– le piégeage en piège-cage pendant 4 jours (dit « méthode Chizé allégé »).

Le tout est comparé au prélèvement-comptage total : piégeage jusqu'à dépeuplement de la zone d'étude, fermée pour cela.

Compter les populations, non, estimer leur évolution, oui

Résultat, aucune des trois techniques n'a permis de compter les populations.

En revanche, la méthode « Chizé allégé » peut être « valablement retenue pour mesurer l'évolution des populations dans le temps » si on répète le même protocole deux fois par an sur le même site plusieurs années.

Quant aux autres méthodes, des études complémentaires seraient nécessaires afin de statuer à leur sujet.

Luttes collectives, aujourd'hui

Surveiller d'abord

En attendant, aujourd'hui, comment sont réalisées les luttes collectives ? V. Brochard, responsable technique de la FDGDON de Loire-Atlantique, l'explique pour les départements de Vendée et Loire-Atlantique.

Il y a d'abord la surveillance de l'évolution des populations. Elle est effectuée par le personnel des fédérations départementales avec deux campagnes d'une semaine par an de piégeage/comptage, appliquée sur deux sites par bassin versant selon la méthode « Chizé allégé ».

Cela permet, non pas de chiffrer les populations, mais de suivre leur évolution dans l'espace et le temps.

Piéger, campagnes intensives

Puis il y a le piégeage massif, lui aussi avec pièges-cages si possible sur radeaux flottants, par campagnes de trois semaines sur les cours d'eau principaux. Les modalités sont détaillées dans la communication.

Il est réalisé en Loire-Atlantique par les techniciens de la fédération départementale, et en Vendée par les 33 salariés des groupements locaux (GDON) selon un programme coordonné par la fédération départementale.

Réseaux hydrographiques secondaires, réseaux de piégeurs

Sur le réseau hydrographique secondaire, « la lutte s'organise avec des bénévoles ». Ils sont formés par leur fédération départementale et encadrés par elle (carte de piégeur, assurance, etc.)

L'animation est plus intensive en Vendée grâce aux animateurs des groupements locaux : les 33 déjà cités qui, de plus, participent aux opérations.

En Loire-Atlantique, il y a un seul animateur départemental.

Résultats

Résultats pour 2012 ? En Loire-Atlantique, 61 534 rongeurs ont été éliminés : 2 076 piégés dans le cadre de la surveillance, 54 125 piégés dans le cadre des campagnes et 5 333 par tir au fusil.

En Vendée, le nombre monte à 96 813 rongeurs : 1 898 dans le cadre de la surveillance et 94 915 dans celui des campagnes, dont près de la moitié (44 511) piégés par les « agents de régulation salariés » et le restant (50 404) par le réseau de bénévoles. Un bilan meilleur, pour un investissement financier bien supérieur (salaires...). À méditer.

Immunocontraception, demain ?

La contraception, pourquoi pas, mais comment faire ?

Reste une méthode alternative séduisante : la contraception. Le principe est de limiter les naissances plutôt que de tuer par piège, balle ou poison des individus une fois qu'ils sont présents et ont détruit des végétaux, miné des berges par leurs terriers, etc.

F. Boué, de l'Anses, fait l'inventaire des différentes méthodes envisageables.

La stérilisation des femelles ou des mâles, individu par individu, n'est pas adaptée aux espèces sauvages : trop long, trop cher et pas efficace si des individus y échappent. Reste la contraception orale avec des produits consommés dans des appâts.

Mais les produits classiques ont un effet limité dans le temps. Il faudrait donc réappâter très souvent. De plus, les hormones utilisables ne sont pas assez spécifiques de nos rongeurs et risqueraient de perturber d'autres populations.

L'immunocontraception, astucieuse

Reste l'immunocontraception. Le principe est celui d'un vaccin. Il s'agit de stimuler, durant un temps suffisamment long, les anticorps détruisant spécifiquement un organisme étranger bien déterminé, immunisant ainsi l'individu vacciné. Dans le cas de l'immunocontraception, l'organisme étranger n'est pas un agent pathogène mais les spermatozoïdes de l'espèce.

Ainsi les anticorps bloqueront l'activité des spermatozoïdes comme si ces derniers étaient des agents infectieux. D'où l'induction d'une infertilité tant chez les mâles que les femelles. Astucieux, mais à manier avec précaution !

Il n'y a plus qu'à... mettre au point les produits

Hélas, cette méthode contraceptive n'est pas encore disponible. F. Boué termine sa communication par le cahier des charges du vaccin immunocontraceptif idéal : spécifique de l'espèce, ne perturbant pas le comportement, efficace en une prise, pas trop cher, etc... Il ne reste plus qu'à... le mettre au point !

<p>(1) Ce n'est pas le surmulot (rat brun) qui a amené la peste noire en Europe au XIVe siècle, mais le rat noir ( <i>Rattus rattus</i>). Le surmulot, arrivé ensuite, l'a supplanté en ville, surtout dans les égouts d'où un de ses noms.</p> <p>(2) Le cinéma a utilisé (et abusé de) l'aptitude à la nage de l'urbain rat brun. Voir « Bons baisers de Russie » (James Bond ) et « Indiana Jones et la dernière croisade ».</p> <p>(3) Voir Gérer les rongeurs des grains après récolte, de R. Lasseur et A. Bourret, <i>Phytoma</i> n° 618, sept. 2008 p. 31. Dans les silos de grains, on a plutôt affaire au rat noir, moins bon nageur et supportant mieux le manque d'eau.</p> <p>(4) Fédération départementale des groupements de défense contre les ennemis des cultures.</p> <p>(5) Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles.</p> <p>(6) Le rat musqué, d'origine nord-américainne, préfère des zones plus septentrionales que le ragondin, d'origine sud-américaine. Mais les biotopes vendéens leur conviennent à tous deux.</p> <p>(7) 15 personnes en 2001, ndlr.</p> <p>(8) Précisément : de l'unité Pathologie des animaux sauvages du LRFSN (Laboratoire de la rage et de la faune sauvage de Nancy) à Malzéville.</p>

GEDUVER, communications sur les rongeurs aquatiques au colloque de mai 2013

Voici la liste des interventions sur les vertébrés aquatiques programmées au colloque national des 28 et 29 mai 2013.

– Problématique des rongeurs amphibies nuisibles en France ;

– Historique des luttes collectives contre les rongeurs aquatiques ;

– Statut des espèces : bases juridiques(1) ;

– Étude des zoonoses liées à ces rongeurs ;

– Rongeurs aquatiques : étude comparative de méthodes de dénombrement ;

– Les luttes collectives contre les rongeurs aquatiques ;

– Rongeurs aquatiques : l'immunocontraception, méthode de régulation durable contre des espèces invasives de grande taille.

(1) Communication sur les statuts des rongeurs mais aussi des oiseaux. Pas disponible lors de l'écriture de cet article. À découvrir le 28 mai à Angers !

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Consultez les autres articles du dossier :

RÉSUMÉ

- CONTEXTE : Le colloque GEDUVER de restitution du programme du même nom permet de faire le point sur les rongeurs aquatiques : ragondins et rats musqués.

- PROBLÉMATIQUES : Ces rongeurs causent des dégâts agronomiques (/végétaux) et hydrauliques et des risques sanitaires (zoonoses). Une stratégie de régulation efficace doit s'appuyer sur quatre axes, plutôt cadres.

L'historique des luttes collectives en Vendée depuis 1970 (de l'empoisonnement au piégeage en lien avec la réglementation) montre l'évolution des problématiques. En matière de zoonoses, une étude en Bretagne, Basse-Normandie et Pays-de-la-Loire montre la prévalence de la leptospirose chez le ragondin et le rat musqué.

- GESTION : Le gestion des populations doit être collective et appuyée d'une surveillance.

Trois méthodes de surveillance simplifiées ont été comparées à celle publiée (dite « _de Chizé_ »). La méthode « _Chizé allégé_ » permet de suivre l'évolution des populations, pas de les chiffrer.

La présentation de l'organisation des luttes collectives en Loire-Atlantique et Vendée, encadrées par leur FDGDON respective, montre que le piégeage organisé associant salariés et bénévoles est efficace, d'autant plus que des moyens y sont alloués (nombre de salariés pour piéger et/ou encadrer le réseau des piégeurs bénévoles). L'immunocontraception est une méthode de régulation prometteuse qui reste à mettre au point.

- MOTS-CLÉS : vertébrés déprédateurs, programme GEDUVER, Gestion durable des vertébrés déprédateurs, colloque, rongeurs aquatiques, ragondin Myocastor coypus, rat musqué Ondatra zibethicus, problématique, dégâts, zoonoses, leptospirose Leptospira sp., réglementation, luttes collectives, piégeage, piégeurs.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *M. DECOIN, Phytoma.

CONTACT : – m.decoin@gfa.fr

LIENS UTILES : – www.geduver.com + ceux cités dans le « Pour en savoir plus » de l'article précédent, p. 24.

BIBLIOGRAPHIE : Actes du colloque à paraître après la tenue de celui-ci.

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :