Quand en 1985, Dupont de Nemours vend son activité zones non agricoles (ZNA) à Roussel-Uclaf, Benoît Vennin, alors responsable régional pour le Grand Ouest, ne suit pas.
Avec un collègue, il décide de créer une société spécialisée dans les produits phytosanitaires pour les massifs forestiers. Son nom : Arole, nom commun du pin cembro, résineux de haute montagne.
« Aucune firme n'était vraiment spécialisée sur ce segment et l'offre était dispatchée », raconte Benoît Vennin, aujourd'hui DG d'Arole PFB.
Un rôle d'interface
Très vite, Arole PFB devient une interface entre les firmes et la distribution.
« Le marché forestier étant un segment de niche, les firmes préfèrent nous confier la mise en marché de leurs produits. Elles comptent également sur nous pour avoir un avis sur ceux-ci. » Ses clients ? Les coopératives forestières françaises, les applicateurs (pépiniéristes et exploitants forestiers principalement) mais également la distribution agricole et non agricole. Chacun représente environ un tiers des ventes. Arole PFB stocke les produits livrés par ses fournisseurs et les oriente vers les clients via des transporteurs. Côté salariés, l'activité repose aujourd'hui sur deux personnes.
« Étant les seuls spécialisés en protection sanitaire forestière, nous avons un rôle de conseil important auprès des professionnels de la forêt tels que les responsables techniques de l'ONF, ceux du Département Santé des Forêts, les experts forestiers. Nous avons peu de relations avec les clients finaux. »
Une gamme spécifique
Au départ, la gamme des produits était surtout composée d'herbicides et de quelques insecticides. Aujourd'hui, l'offre est complètement inversée avec 50 % du chiffre d'affaires en insecticides. Le nombre d'herbicides a fortement réduit en raison des pressions environnementales importantes, notamment Ecophyto. S'y ajoutent quelques fongicides et un répulsif gibier.
« Quand aucun produit des firmes présentes en France ne correspond à la demande du marché, je les sollicite pour une extension d'usage, explique le spécialiste. Si besoin, nous démarchons des fabricants étrangers pour qu'ils déposent une AMM en France. » Mais en protection des massifs forestiers, on utilise peu de produits phytosanitaires, seulement en cas de problèmes importants. D'où une offre des fournisseurs peu développée. Conséquence : une dizaine de produits représente aujourd'hui 80 % du chiffre d'affaires, rendant ainsi la société très sensible et dépendante des retraits et nouvelles AMM.
Un répulsif gibier qui monte en puissance
Ainsi, depuis fin 2007, Benoît Vennin commercialise la spécialité Arbinol B, un répulsif gibiers produit par Stähler, une société allemande. « Les firmes s'intéressent peu au marché des répulsifs car il est difficile de trouver des principes actifs suffisamment efficaces tout en étant non toxiques. Plusieurs spécialités ont été retirées du marché. Il reste aujourd'hui quelques produits exotiques dont l'efficacité reste très aléatoire. Arbinol B a donc pris de l'importance. » Ce répulsif est à base de Bitrex, puissant amérisant (0,11 g/l), très persistant, utilisé dans les produits lessiviels, adapté aux cervidés et mélangé à un support blanc sélectif des végétaux. Il est peu ou pas efficace sur les lapins et lièvres, mais ce sont les cervidés qui causent le plus de dégâts aux arbres et arbrisseaux. Arbinol B s'utilise en forêt et en pépinière, sur les plants au moment des plantations par pulvérisation, trempage dans un seau ou bien badigeonnage plant par plant.
« Nous avons également quelques demandes pour les arbres fruitiers et les jeunes vignes avant production. » 3 000 ha sont ainsi traités chaque année, soit un chiffre d'affaires de 200 000 € sur un total de 1 M€.
Le fomes des résineux, un nouveau marché pour Arole PFB ?
« Malgré l'impact important de la réglementation sur notre activité, bon an mal an, il y a toujours quelques nouveautés – produits, réglementations ou parasites – qui nous permettent de la maintenir. » C'est le cas actuellement avec un nouveau produit contre le fomes des résineux, champignon pathogène capable de provoquer d'importants troubles de gestion dans les peuplements résineux, et donc des pertes économiques considérables. « Il faut absolument traiter les souches fraîches au moment de la coupe du bois pour éviter l'infection de celles-ci et la transmission aux arbres voisins sains via les racines. » Les engrais à base de bore et d'urée utilisés pendant des années sont interdits depuis le 24 avril 2013.
« Nous venons d'obtenir l'AMM en France pour le Rotstop, préparation biologique à base de champignon antagoniste du fomes, déjà homologué en Finlande. Ce produit va permettre de répondre à un problème phytosanitaire majeur des forêts françaises. » À condition toutefois que les gestionnaires des massifs forestiers prennent conscience de l'importance de traiter en préventif.
L'avenir pour Benoît Vennin, proche de la retraite, c'est aussi de dénicher un passionné de la protection des forêts comme lui, pour prendre la relève, ou bien de s'associer à une structure plus importante à laquelle pourrait s'adosser Arole PFB. Un défipeut-être aussi important que le maintien de son chiffre d'affaires !