Attaques de mildiou sur pomme de terre. La principale maladie de la culture a fait l'objet de nombreuses communications. Elles concernaient son évolution, la lutte via la génétique (résistance variétale) ou encore la lutte fongicide. Photo : L. Culiez - Fredon Nord-Pas-de-Calais
Bruxelles a accueilli, du 7 au 11 juillet 2014, la 19e conférence de l'EAPR. L'Association européenne de la recherche sur la pomme de terre réunit tous les trois ans toutes ses sections dans une rencontre de ce type.
Le fil conducteur était la durabilité de la culture et de son industrie. Les recherches en génomique et sélection (résistance au mildiou notamment) et les autres moyens de protection de la culture ont représenté plus de 50 % des présentations.
Face au mildiou, que fait la génétique ?
Vision internationale
Le CIP (Centre international de la pomme de terre de Lima, Pérou), travaille, dans le cadre de la lutte contre l'insuffisance alimentaire, sur les variétés résistantes au mildiou dû à Phytophthora infestans. L'activité porte sur la sélection de variétés « natives » résistantes à P. infestans comme Pallay Poncho et Puka Lliclla, notamment pour le Pérou et l'Amérique latine, mais aussi sur le développement de variétés obtenues par cisgénèse pour différents pays d'Afrique.
Plusieurs présentations scientifiques confirment les recherches sur la « résistance durable » à P. infestans via la cisgénèse sur plusieurs continents.
Notons les exposés du Pr G. Gheysen, de l'université de Gent sur les travaux belges, du Docteur Vossen sur la stratégie de sélection par cisgénèse aux Pays-Bas, et du Dr M. Ghislain, de l'antenne kenyanne du CIP sur le fort développement de ce type de variétés pour l'Afrique subsaharienne.
Variétés « résistantes conventionnelles » : la situation
Dans le cadre de la protection intégrée (IPM), la résistance variétale permet de limiter l'usage des fongicides. Ce critère entre dans plusieurs outils d'aide à la décision. Mais, chez les variétés ne contenant qu'un gène dominant (R gène) de résistance, souvent issu de Solanum demissum ou plus récemment d'autres Solanum « sauvages », la résistance peut être rapidement contournée. Les méthodes classiques ne permettent d'échanger des gènes qu'à l'intérieur d'une espèce ou entre espèces relativement proches, ce qui est le cas entre la pomme de terre cultivée Solanum tuberosum et plusieurs Solanum sauvages.
Le croisement « classique » des gènes de résistance de Solanum nécessite de nombreuses années. La technique du « bridge cross breeding » ne permet de croiser qu'un gène à la fois, sauf si plusieurs gènes de résistance sont très proches sur l'ADN de la variété sauvage. Après le premier croisement, de nombreux rétrocroisements sont nécessaires pour éliminer les caractères défavorables et obtenir les caractéristiques recherchées.
Les variétés Toluca et Bionica, qui possèdent le gène de résistance Rpi-blb-2 issu de Solanum bulbocastanum, sont prises en exemple : le premier croisement entre Solanum acaule et S. bulbocastanum a été effectué en 1959, le croisement avec S. tuberosum dans les années 1970 pour aboutir enfin aux deux variétés commerciales en 2005... Il aura fallu quarante-six ans.
Introduction de la résistance par modification génétique
Le génie génétique désigne les techniques permettant d'introduire et de faire exprimer dans un organisme vivant un ou des gènes provenant de n'importe quel autre organisme.
La transgénèse permet d'introduire dans un organisme receveur un gène provenant d'un organisme donneur avec lequel il est « non croisable naturellement » (plante, animal), voire un gène artificiel. Ce qui donne un OGM : organisme génétiquement modifié. L'introduction peut se faire par différents moyens. Pour la transgénèse végétale, le plus courant est le transfert à l'aide de la bactérie du sol Agrobacterium tumefaciens. Le gène « d'intérêt » est introduit dans la bactérie (rendue avirulente au préalable) puis transféré par celle-ci dans la plante et intégré à son génome. Pour repérer et suivre le gène durant le processus de fabrication de l'OGM et sur le résultat final, un marqueur de sélection est introduit.
La cisgénèse permet de transférer des gènes entre des organismes qui peuvent être croisés naturellement, mais ceci plus rapidement et plus précisément que par hybridation classique. La cisgénèse permet ainsi d'introduire des gènes de résistance au mildiou provenant de Solanum sauvages dans des variétés commerciales connues, tout en gardant les caractéristiques de ces variétés commerciales. Dans le cadre des techniques développées à l'université de Wageningen, aucun marqueur n'est introduit, aucun antibiotique n'intervient dans le processus. La variété Désirée a été utilisée comme « modèle » et le premier gène introduit a été RPI-vnt1.1 issu de l'espèce sauvage Solanum venturii. La technique est pratiquée dans d'autres centres de recherche : Cornell University aux États-Unis, le CIP de Lima, Sainsbury Labratory, Johnes Center au Royaume-Uni. Depuis 2011, des essais de plein champ sont conduits notamment en Irlande et en Belgique avec pour témoins des variétés conventionnelles types Sarpo Mira (plusieurs gènes de résistance) et Bionica. La sélection par cisgénèse est bien plus rapide que les méthodes classiques. Il faut moins de dix ans pour créer une nouvelle variété, avec plusieurs étapes nécessaires.
Les quatre étapes de la cisgénèse
La première consiste à identifier et isoler le gène d'intérêt responsable du caractère à transférer. Les variétés sauvages sont semées et testées pour leur résistance en test in vitro et la recherche porte sur la détection de l'emplacement du ou des gènes de résistance dans l'ADN. Une vingtaine de gènes sont connus. Dans le cadre des travaux belges en collaboration avec Wageningen, trois R gènes ont été utilisés : Rpi-sto1 issu de Solanum stoloniferum, Rpi-vnt1.1 de S. venturii et Rpi-blb3 de S. bulbocastanum.
La seconde étape consiste à modifier les variétés de pommes de terre. Le gène d'intérêt est introduit dans la bactérie A. tumefasciens et est produit en de nombreux exemplaires via la multiplication de la bactérie. Le gène est intégré sur un fragment d'ADN que la bactérie transmet à l'ADN de la plante. Pour cela, la bactérie modifiée est appliquée sur des tissus cellulaires de pomme de terre. De nouvelles plantes sont régénérées in vitro à partir de cette culture de tissus.
La bactérie n'ayant pas infecté toutes les cellules de pomme de terre, certaines plantes n'ont pas intégré le gène de résistance. En l'absence de marqueur, toutes les plantes sont cultivées ; l'ADN de chacune est prélevé, un test génétique PCR vérifie si la plante a intégré l'ADN souhaité et seules les plantes positives sont gardées.
La troisième étape est celle des tests en serre. Son but est de repérer les plantes possédant toutes les caractéristiques de la variété d'origine. Elles sont dites « true to type ».
Enfin, ces plantes retenues sont testées en champ afin d'évaluer le niveau de résistance.
Exemples de travaux en Europe
Des essais de plein champ sont conduits aux Pays-Bas, en Irlande et en Belgique : ils comparent le comportement en contamination naturelle de mildiou des lignées de Désirée modifiées et contenant chacune un gène de résistance ou des combinaisons doubles ou triples de gènes, avec comme témoins des variétés conventionnelles résistantes telles Sarpo Mira (plusieurs gènes de résistance) et Bionica ainsi que des variétés sensibles, Bintje, Nicolas, Désirée...
En Belgique, le syndicat flamand du négoce Belgapom et celui des producteurs Boerenbond apportent leur soutien financier à un projet mené par le VIB (Institut flamand de biotechnologies), l'Ilvo (Institut de recherche pour l'agriculture et la pêche) et l'université de Gent. Il s'agit de transférer des gènes de résistance au Phytophthora par cisgénèse sur Bintje à l'aide des constructions néerlandaises. Les premières Bintje résistantes pourraient être cultivées en 2021-2022.
Au Kenya
Dans les travaux menés au Kenya, les gènes RB et Rpi-blb2 provenant de S. bulbocastanum, et Rpi-vnt1.1 provenant de S. venturi ont été introduits dans la variété Désirée et des variétés d'Afrique subsaharienne (SS A). Sur 251 événements transgéniques (TE), c'est-à-dire des plantes obtenues avec un R gène et 331 avec un empilement de trois R gènes, à la fin des tests en serre, le résultat est de 10 % de plantes très résistantes : sept sur 64 RB TE, quatre sur 117 Rpi-blb2 TE, un sur 25 Rpi_vnt1.1 TE, seize sur 162 cumulant les trois R gènes.
Plusieurs variétés africaines ont été identifiées comme bonnes candidates à la transformation : Tigoni et Shang au Kenya, Cruza 148 pour la région du Lake Kivu au Burundi et Rwanda. Les dix meilleurs événements avec trois R gènes vont être testés au champ.
Aux États-Unis
Un autre programme de cisgénèse est mené par les Américains du groupe Simplot au travers d'une plate-forme de biotechnologie « InnateTM Technology », afin d'améliorer des variétés comme Russet Burbank, Ranger Russet, Atlantic et Snowden.
Plusieurs objectifs sont fixés : baisse des taux d'acrylamide, sensibilité aux chocs (taches noires) et, dans un second temps, réduction du taux de sucres réducteurs et résistance au mildiou avec le gène Rpi-vnt1. Simplot espère lancer ses premières variétés Innate Potatoes pour 2015. Puis d'autres caractéristiques seront travaillées : besoin en eau, résistance aux virus Y et maladies fongiques.
Résistance au mildiou par cisgénèse et lutte intégrée
Des travaux très importants sont conduits aux Pays-Bas. Un premier plan de dix ans « ombrella plan », conduit par l'université de Wageningen à la demande des autorités officielles et des professionnels, a porté sur la lutte intégrée contre P. infestans : étude du pathogène (génotype, souches, épidémiologie...), relations hôte/pathogène (variétés résistantes), outils de lutte (systèmes d'aide à la décision, fongicides, techniques agronomiques). Ce plan a donné des résultats très intéressants mais insuffisants. D'où le nouveau projet DuRPH (résistance durable au Phytophthora) débuté en 2006.
La gestion de la durabilité de la résistance associe la cisgénèse permettant « l'empilement » de plusieurs gènes de résistance dans une variété déjà connue à une gestion dans l'espace (ex. : culture de plusieurs variétés modifiées ou d'une « même variété » contenant des gènes différents dans un même site), une alternance des variétés dans le temps et un « léger contrôle fongicide » (deux ou trois par campagne).
Quel avenir pour les variétés issues de cisgénèse en Europe ?
La cisgénèse est une modification génétique. Sera-t-elle soumise à la législation européenne sur les OGM ? (voir « Pour en savoir plus »). La pomme de terre issue de cisgénèse sera-t-elle acceptée par la société civile ? Le projet DuRph tient compte des aspects économiques, écologiques et sociaux. Une forte communication est engagée avec les citoyens néerlandais. Les professionnels belges rencontrés à la conférence sont très optimistes sur la réaction des consommateurs avec lesquels ils débattent.
Un point important qui rassure le citoyen : les travaux et la propriété des gènes sont entre les mains de centres de recherche indépendants et d'organisations professionnelles et non de multinationales privées.
La sélection conventionnelle reste toutefois indispensable pour créer de nouvelles variétés. A. Soete, du Centre de recherche agricole de Wallonie, a présenté le programme de recherche visant à enregistrer de nouvelles variétés belges, notamment résistantes au mildiou. À noter d'ailleurs l'utilisation des souches de P. infestans récentes 13_A2, 6_A1, dites plus agressives, par plusieurs chercheurs européens.
Évolution du mildiou et lutte contre la maladie
Suivi des populations avec toutes les souches de P. infestans en Europe
Louise Cooke (Irlande du Nord) a fait le point sur l'évolution du mildiou en Europe à partir des caractéristiques génotypiques et phénotypiques des nouvelles souches, telle que Blue 13 (13_A2), trouvée dès 2004 aux Pays-Bas, 2005 en Grande-Bretagne, 2007 en Irlande du Nord et désormais généralisée. Cette souche est résistante au métalaxyl et, selon des chercheurs écossais, plus agressive à faible température. La souche Pink 6 (6_A1) a été détectée en 2002 aux Pays-Bas et en 2004 en Grande-Bretagne. En extension, elle est agressive sur feuilles.
Green 33(33_A2), détectée en 2011 aux Pays-Bas, progresse peu ; elle paraît moins sensible au fluazinam mais sa « fitness » semble faible et elle est en régression quand le fluazinam est moins utilisé.
Suivi en France
Nicolas Mariette, de l'Inra Rennes, évoque les évolutions de la population de P. infestans en France de 2001 à 2008. Il rappelle les résultats de D. Cook et al. 2012 en Grande-Bretagne. Une des hypothèses de l'évolution était l'agressivité des souches, notamment 13_A2, donnée comme plus agressive.
L'objectif de ce travail est d'observer l'évolution de la structure génétique de la population française de P. infestans et de vérifier si ces changements peuvent être expliqués par la sélection d'isolats plus agressifs.
Les souches 2_A1 dominent de 2001 à 2006, 8_A1 et1_A1 sont fortement présentes puis disparaissent. Puis les souches 13_A2 (Blue 13), observées dès 2005 deviennent vite prédominantes (Figure 1). L'agressivité de 824 souches de 2001 à 2007 est étudiée sur folioles de Bintje en conditions contrôlées (18 °C jour/15 °C nuit). Un indice d'agressivité est calculé : efficacité de l'infection (nombre de folioles contaminées × taille des nécroses × capacité de sporulation, soit le nombre de sporanges/cm²).
Dans les conditions de l'étude, 13_A2 et 2_A1 sont les génotypes les moins agressifs, en revanche 8_A1 et 1_A1 sont plus agressifs. L'explication possible est que les souches plus agressives, détruisant plus vite les tubercules contaminés, ont une survie hivernale plus faible. Ceci contredit le lieu commun : « la sélection favorise les souches les plus agressives ».
Protection : dithiocarbamates, stimulateurs, programmes mixtes
Sur les différents types de souche, à noter les travaux conduits par Huub Schepers (NL) sur l'effet des dithiocarbamates (voir p. 30, J.-J. Heller & Goswami-James). Plusieurs présentations ont évoqué les stimulateurs de défense de la plante. La société Fytofend, associée aux universités de Namur et Louvain, a exposé l'étude en conditions contrôlées sur tomate et pomme de terre d'un oligosaccharide : COS OGA qui agit sur P. infestans et Alternaria solani. L'efficacité reste à confirmer en plein champ.
Les chercheurs suédois ont travaillé sur le mode d'action de phosphites : en partie éliciteur, en partie direct, avec interactions différentes selon les variétés.
L'association phosphite/demi-dose de fongicide a une action égale ou supérieure au fongicide seul à pleine dose. En diminuant la pression du mildiou, cet outil peut-il augmenter la durabilité des résistances variétales ?
Autres maladies
Alternaria, ozone et acide salicylique
L'équipe néerlandaise de Turkeinsteen, qui travaille depuis des années sur le diagnostic des taches « type alternaria » a, de nouveau, montré la grande importance des dégâts d'ozone qui apparaissent tôt en saison avant les attaques d'Alternaria. Les variétés ont des sensibilités différentes à cette « phytotoxicité ».
Les chercheurs suédois ont montré l'influence du rôle de l'acide salicylique dans la plante pour la résistance à A. solani.
Maladies de présentation : bactéries et virus
Karima Bouchek (Inra) et Stuart Wale (Écosse) ont présenté le nouveau site participatif de diagnostic sur les altérations superficielles des tubercules (voir « Pour en savoir plus » ci-dessous).
Différentes recherches sont conduites sur la caractérisation (structure génétique) des espèces de bactéries pectinolytiques associées à la maladie de la jambe noire et de la pourriture molle des tubercules qui progresse dans l'Union européenne, en Russie, au Maroc... : Pectinobacterium carotovorum subsp carotovorum, P. carotovorum subp brasiliensis, P. atrosepticum, P. wasabiae, Dickeya solani, D. dianthicola. À noter le travail de Y. Raoul des Essarts (Cifre, FN3PT) sur des antagonistes aux Pectinobacterium et Dickeya dans la rhizosphère des pommes de terre.
Des recherches (Canada, Suisse, Turquie...) sont conduites sur la dissémination des virus Y et ses effets sur les moyens de lutte. Caractérisation des variants, transmission et incidence sur les dégâts sur feuillage et sur tubercules (Sasa Écosse).
Gembloux travaille sur un outil de détection moléculaire PCR en temps réel des virus directement sur tubercules.
Côté nématodes
Quelle présence et quels risques ?
Les nématodes, en forte progression, ont fait l'objet de nombreuses présentations.
Nicole Viaene, de Belgique (Ilvo), a montré les risques importants liés aux échanges internationaux. Ils concernent les nématodes de quarantaine (Globodera rostochiensis et G. pallida : Potato cyst nematode directive 2007/33/EC ; Ditylenchus desctructor, Meloidogyne chitwoodi et M. fallax, Nacobbus aberrans Plant Health Directive 2000/29/EC), mais aussi d'autres en forte dissémination tels que les nématodes libres : des publications signalent Pratylenchus spp. en Norvège, au Portugal, en Allemagne et en Belgique, ainsi que Trichodorus spp. en Allemagne. Elle évoque deux vecteurs de dissémination :
– le sol (un suivi récent en Belgique a montré que 22 % des échantillons de tare terre contenaient des nématodes à kyste) ;
– les tubercules (en Belgique, lors d'inspections visant Meloidogyne spp., 30 % des échantillons étaient contaminés par Pratylenchus spp.).
France, Pays-Bas, Belgique : comment s'appliquent les règles européennes
L'exposé sur les mesures prises contre les nématodes à kyste Globodera puis les discussions ont révélé les différences d'application de la directive européenne pour les pommes de terre de consommation selon les pays :
– approche très stricte en France avec déclaration officielle de toute analyse positive et mise en place de mesure d'éradication avec interdiction de culture sur plusieurs années ; les producteurs semblent effrayés et restent dans l'ignorance de la situation sanitaire de leurs parcelles ;
– aux Pays-Bas, « les nématodes ne sont pas un problème » ; il y a une concertation entre producteurs, gouvernement, négociants, sélectionneurs et chercheurs, et usage de nombreux outils : analyses de sol (si elles viennent du producteur, pas de déclaration officielle en cas de détection mais mise en place de mesures), système d'aide à la décision (Nema Decid), variétés résistantes selon les espèces, plantes-pièges, nématicides ;
– en Belgique, les mesures sont très proches des pratiques néerlandaises : autorisation de culture en sol contaminé avec des conditions adaptées.
Nématodes et gale commune
En Norvège, R. Holgado rappelle que dès 1996, Pratylenchus penetrans était détecté « sur des symptômes type gale commune causée par Streptomyces spp. » sur la variété Saturna. Outre les dégâts de présentation, des baisses de rendement ont été notées en présence de forte densité de nématodes dans le sol. En 2008 et 2009, lors d'une enquête sur la gale commune, P. penetrans a été détecté dans 60 % des tubercules présentant des symptômes type gale commune ; il pourrait causer seul ces symptômes et les aggraver en cas d'attaque de Streptomyces spp. À noter : ce nématode survit très bien en stockage à 4 °C ; en cas de replantation il est vecteur de dissémination.
Wim M. L. Wesemael et les nématologistes de l'Ilvo (Belgique) ont présenté le cycle de vie et les dégâts des nématodes à gale sur pomme de terre : Meloidogyne chitwoodi, M. fallax et aussi M. minor.
Ce dernier, connu pour causer la maladie des taches jaunes des cours de golf, a occasionné d'importants dégâts sur pomme de terre aux Pays-Bas en 2000. Depuis, il a été signalé au Chili, aux États-Unis, au Portugal, en Irlande et en Belgique.
La recherche de variétés résistantes à G. pallida a été exposée par M.-C. Kerlan, de l'Inra Ploudaniel et l'équipe irlandaise de Carlow. Les travaux de F. Ollivier, de l'Anses, sur les Globodera et Meloidogynes, et de V. Leroux sur les espèces de Meloidogynes concernaient le développement d'outils moléculaires pour détecter et quantifier les nématodes.
Autres ravageurs
J.-P. Jansen, de Gembloux, a rapporté vingt ans de suivi des pucerons et des auxiliaires en champs de pommes de terre de consommation de mi-juin à fin juillet avec utilisation d'un outil d'aide à la décision. Résultat : un traitement tous les dix ans avec les insecticides adaptés. Cela permet plus de 90 % de réduction d'insecticide par rapport à une protection systématique.
Concernant les taupins, leurs larves sont attirées par le CO2. S. Vidal a présenté un projet d'utilisation de capsules attractives à base de CO2 associées à des insecticides afin d'améliorer l'efficacité de la lutte.
1 – La 19e conférence EAPR en chiffres
Cette conférence organisée par les structures techniques et de recherche, l'administration et l'industrie belges a réuni 414 participants.
Ces derniers sont venus de six continents et cinquante-six pays. La Belgique a fourni 20 % de l'effectif et la France 10 %, comme les Pays-Bas. Le Centre international de la pomme de terre (CIP), basé au Pérou mais actif dans des pays comme le Kenya, a participé avec quatorze représentants.
Quatorze experts internationaux ont présenté des exposés pléniers développant les aspects économiques, environnementaux et la sécurité alimentaire.
Les interventions se sont déroulées autour de 131 communications orales, six workshops, 172 posters et six excursions scientifiques et culturelles.
2 – La France et l'EAPR
Michel Martin, d'Arvalis Institut du végétal, est le nouveau président de l'EAPR. Il succède à Jean-Pierre Goffart, du CRA-Gembloux.
C'est à Versailles que se tiendra la prochaine et vingtième édition du congrès de l'EAPR, en juillet 2017.
3 – L'agriculture de précision : un outil de protection intégrée
L'agriculture de précision a été évoquée dans plusieurs exposés, ainsi que dans un atelier et des visites d'exploitation, notamment celle de Jacob Van den Borne à Reusel, à la frontière Belgique/Pays-Bas.
Jacob Van den Borne cultive plus de 500 ha de pommes de terre pour l'industrie.
Il agit en chercheur de terrain, en relation avec les constructeurs de matériels et plusieurs centres de recherche pour l'exploitation des données.
Plusieurs technologies ont été présentées : cartographie des caractéristiques pédologiques des parcelles par mesure de la conductivité des sols, mesure du développement des cultures (biomasse) par « radars » sur tracteurs et imagerie aérienne.
Il utilise ces outils pour adapter les densités de plantation et les doses de fertilisants en fonction des caractéristiques des sols et du développement des cultures.
Il repère les foyers de nématodes par résistivité des sols pour localiser le nématicide.
Il module les doses de défanants en fonction la biomasse.
Globalement, il économise près de 14 % des intrants grâce au GPS RTK avec coupure de rampe qui évite les recoupements de traitements (ses parcelles sont nombreuses, irrégulières et dispersées).
Les rampes des pulvérisateurs sont équipées de groupes de six jets et peuvent être modulées par section.
Les traitements antimildiou sont faits à 150 l/ha à partir d'un outil d'aide à la décision et des données de trois stations météorologiques ; il privilégie la réactivité face aux risques.