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DOSSIER - Qualité sanitaire des grains

Qualité sanitaire des grains : point réglementaire

MARIANNE DECOIN* - Phytoma - n°686 - août 2015 - page 14

Tour d'horizon des évolutions réglementaires sur la qualité sanitaire des grains vis-à-vis des contaminants naturels et des moyens de les contrôler : toxines T2-HT2, alcaloïdes de datura, ergot, carie et insecticides de stockage.
Tableau 1 : Réglementation et qualité sanitaire des grains / bioagresseurs

Tableau 1 : Réglementation et qualité sanitaire des grains / bioagresseurs

Tableau 2 : Protection contre les insectes, les nouvelles AMM

Tableau 2 : Protection contre les insectes, les nouvelles AMM

La réglementation européenne cherche à garantir la qualité sanitaire des grains contre les déprédations liées à des bioagresseurs. Pour cela, elle déploie différents moyens (Tableau 1). Faisons le point sur le sujet.

Côté toxines

Mycotoxines : T2 et HT2 à la traîne

On sait que, parmi les fusariotoxines, mycotoxines produites par des champignons du genre Fusarium, les toxines T2 et HT2 ne sont pas encore réglementées au contraire du DON (déoxynivalénol), de la zéaralénone et des fumonisines.

Certes, une recommandation européenne du 27 mars 2013 a été publiée le 3 avril 2013. Nous avions évoqué ce texte(1) qui :

- impose de surveiller et analyser les toxines T2 et HT2 dans les grains destinés à l'alimentation humaine et animale ;

- liste les « niveaux indicatifs [...] au-dessus desquels il convient d'effectuer des enquêtes, surtout en cas de découvertes répétées ».

Un règlement du 16 mai 2014 cite les règles d'échantillonnage. Depuis... on attend.

Phytotoxines : alcaloïdes de datura

En revanche, il est sorti une recommandation européenne du 19 juin 2015 sur le « suivi de la présence des alcaloïdes tropaniques dans les denrées alimentaires ». Ces alcaloïdes sont présents dans les graines des plantes du genre Datura (photo en haut de page), dont Datura stramonium, la stramoine ou herbe du diable. Or, dixit le texte européen, on a trouvé récemment des graines de stramoine dans des lots de graines de lin, soja, sorgho, millet, tournesol et sarrasin.

Le texte recommande la surveillance des lots de ces graines, ainsi que de ceux des céréales notamment, et des analyses de ces alcaloïdes (atropine, scopolamine, etc.). En revanche, il ne cite aucun niveau au-delà duquel il convient d'être plus vigilant.

Côté bioagresseurs

L'ergot davantage cadré... bientôt

La réglementation peut aussi limiter les taux de présence de bioagresseurs eux-mêmes. C'est le cas des sclérotes d'ergot (Claviceps purpurea), connus eux aussi pour produire des alcaloïdes (ergotamine, etc.).

Ils étaient déjà réglementés en alimentation animale. Le 14 avril dernier, la Commission européenne a décidé de fixer un taux maximum de 0,5 g d'ergot par kg de céréales brutes (pas le maïs et le riz) destinées à l'alimentation humaine. Le règlement 1881/2006, qui fixe les taux maximaux de contaminants (DON, etc.) sera enrichi en ce sens par un nouveau règlement. Celui-ci a été notifié par la Commission au Parlement et au Conseil le 10 juillet dernier. Sa publication est espérée pour cet automne.

Carie : seuil de dérogation modifié

Autre bioagresseur, la carie. Les spores des champignons responsables (Tilletia spp.), très malodorantes, sont perceptibles avant que leurs taux n'entraînent de risque sanitaire. Les lots sont alors retirés du marché sans besoin de réglementer à ce stade. En revanche, une norme sur les semences certifiées de blé tendre permet d'éviter que les blés issus de ces semences ne soient cariés.

Cette norme est « zéro spores de Tilletia sp. », mais un taux de présence est toléré par dérogation pour les semences non traitées en agriculture biologique. Ce taux, de 20 spores/g de semences pour la dernière campagne, est abaissé à 10 spores/g de semences pour les prochains semis.

Côté insecticides de stockage

Du neuf depuis un an

Passons maintenant à la protection des grains contre les insectes de stockage. Elle avait été bouleversée par l'interdiction du dichlorvos alias DDVP, officielle en 2008 mais effective en pratique dès 2007(2), puis celle du malathion et de la bifenthrine. Une seule nouvelle substance avait été lancée : la cyperméthrine(3) en 2010. Depuis un an, trois nouveautés l'ont rejointe : une barrière physique donc non réglementée (voir p. 30) et deux insecticides (Tableau 2).

Classique et alternatif

Néorel UL, autorisé fin 2014, associe la cyperméthrine et le chlorpyriphos-méthyl. Cette alliance inédite combine deux modes d'action différents pour une belle efficacité sur les lots de grains.

Silicosec vient d'être autorisé. Il est à base de diatomées (dioxyde de silice naturel). Selon des travaux cités en 2013(4), il a un nouveau mode d'action (abrasion de la cuticule) efficace pour la « sanitation » des locaux vides mais moins pour traiter les lots de grains.

Étant de type alternatif, il pourrait figurer sur la liste Nodu vert biocontrôle des produits épargnés par le plan Ecophyto, qui touche aussi la protection post-récolte.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *M. DECOIN, Phytoma.

CONTACT : m.decoin@gfa.fr

RAPPELS PHYTOMA :

- (1) « Mycotoxines non réglementées mais surveillées », Phytoma n° 676, août-septembre 2014, p. 34 (encadré).

- (2) « Insectes de stockage, l'après DDVP a commencé », Phytoma n° 618, septembre 2008, p. 28 à 30.

- (3) « Ravageurs des grains, le panel de l'An 4 », Phytoma n° 636, août-septembre 2010, P. 30 à 33.

- (4) F. Fleurat-Lessard 2013. « Pestes en stock, la PIPS... », Phytoma n° 666, août-septembre 2013, p. 34 à 40.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - La réglementation sur la qualité sanitaire des grains face aux déprédations liées à des bioagresseurs, directement (présence, toxines...) ou non (résidus de pesticides), évolue.

ÉTAT DES LIEUX - Concernant les toxines produites par des bioagresseurs, la réglementation des toxines T2 et HT2 n'a pas évolué depuis un an. Une recommandation a été publiée en 2015 sur les alcaloïdes tropaniques produits par Datura stramonium.

Touchant les bioagresseurs, une norme sur l'ergot dans l'alimentation humaine, fixée, est en attente de publication. La dérogation carie sur semences de blé « bio » a eu son seuil modifié. Enfin, deux insecticides de post-récolte, dont un de biocontrôle, ont été autorisés.

MOTS-CLÉS - Qualité sanitaire des grains, réglementation, toxines T2 et HT2, alcaloïdes, Datura stramonium, ergot Claviceps purpurea, carie Tilletia spp., blé, insecticides.

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