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Cécidomyie orange : repérer les blés qui lui résistent

SANDRINE CHAVALLE*, GUILLAUME JACQUEMIN** ET MICHEL DE PROFT*, D'APRÈS LEUR COMMUNICATION À LA 10E CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LES RAVAGEURS ET AUXILIAIRES EN AGRICULTURE DE L'AFPP, À MONTPELLIER, LES 22 ET 23 OCTOBRE 2014 - Phytoma - n°687 - octobre 2015 - page 35

Mise au point d'une méthode d'évaluation en conditions contrôlées de la résistance variétale du blé tendre d'hiver à la cécidomyie orange du blé, Sitodiplosis mosellana.
1. Adulte femelle de cécidomyie orange prête à pondre sur un épi de blé. Ce petit moucheron fait des dégâts variables mais parfois importants.  Photo : O. Charlier

1. Adulte femelle de cécidomyie orange prête à pondre sur un épi de blé. Ce petit moucheron fait des dégâts variables mais parfois importants. Photo : O. Charlier

2. Ces « paniers » contenant chacun quelques centaines de larves de cécidomyie orange sont placés tout l'hiver en plein air afin que se déroule la phase de vernalisation des larves.  Photo : M. De Proft

2. Ces « paniers » contenant chacun quelques centaines de larves de cécidomyie orange sont placés tout l'hiver en plein air afin que se déroule la phase de vernalisation des larves. Photo : M. De Proft

Émergence. 3. Vue du dispositif de récupération : on distingue la cage à émergence et le collecteur.  Photo : S. Chavalle

Émergence. 3. Vue du dispositif de récupération : on distingue la cage à émergence et le collecteur. Photo : S. Chavalle

Émergence. 4. Gros plan sur le collecteur avec les jeunes cécidomyies.  Photo : S. Chavalle

Émergence. 4. Gros plan sur le collecteur avec les jeunes cécidomyies. Photo : S. Chavalle

5. Variétés à tester placées en conteneurs et recouvertes de voiles. Les lâchers de cécidomyies adultes peuvent être réalisés. Et l'échelonnement des émergences permet de répéter ces lâchers autant de fois que nécessaire.  Photo : M. De Proft

5. Variétés à tester placées en conteneurs et recouvertes de voiles. Les lâchers de cécidomyies adultes peuvent être réalisés. Et l'échelonnement des émergences permet de répéter ces lâchers autant de fois que nécessaire. Photo : M. De Proft

6. Extraction active des larves. Chaque entonnoir est posé sur un tube de verre et contient deux épis. Le tout va être arrosé... Photo : M. De Proft

6. Extraction active des larves. Chaque entonnoir est posé sur un tube de verre et contient deux épis. Le tout va être arrosé... Photo : M. De Proft

La cécidomyie orange, Sitodiplosis mosellana (Géhin) (diptères : Cecidomyiidae) est un ravageur du blé présent dans toutes les régions céréalières de l'hémisphère nord.

Elle peut se montrer fort nuisible mais passe inaperçue jusqu'à ce qu'il soit trop tard pour la contrôler. D'où l'intérêt d'utiliser la résistance variétale... qu'il faut alors tester !

Pourquoi tester la résistance en conditions contrôlées

Un cycle, du sol aux épis

Cette espèce est univoltine (une génération par an). Ses larves passent l'hiver dans le sol. Au printemps, elles montent vers la surface et se nymphosent, puis les adultes émergent du sol.

Après accouplement sur le site d'émergence, les femelles (photo 1) volent à la recherche d'une plante-hôte pour pondre leurs oeufs dans les épis (Pivnick et Labbé, 1992). Les oeufs éclosent quelques jours plus tard et les larves se nourrissent aux dépens des grains en formation (Reeher, 1945).

Vers début juillet, lorsqu'elles ont achevé leur phase alimentaire, les larves se laissent tomber des épis à la faveur d'une pluie et pénètrent dans le sol où elles tissent un cocon et entrent en diapause, au moins jusqu'au printemps suivant (Barnes, 1956).

Dégâts souvent sous-estimés et parfois importants

Des pullulations accompagnées de dégâts ont été observées en Europe, particulièrement au Royaume-Uni (Oakley et al., 2005), en Allemagne (Gaafar et Volkmar, 2010), en France (Rouillon et al., 2006) et en Belgique (Jacquemin et al., 2014), mais aussi en Amérique du Nord (Olfert et al., 1985 ; Lamb et al., 1999 ; Knodel et Ganehiarachchi, 2008) et en Asie (Katayama et al., 1987 ; Wu et al., 2013).

Les dégâts sur blé peuvent être graves. Au Royaume-Uni, les pertes ont atteint 30 000 000 £ en 1993 (Oakley, 1994) et le double en 2004 malgré l'application d'insecticides sur 500 000 ha (Oakley et al., 2005).

Les dégâts de ce ravageur sont souvent sous-estimés vu les difficultés de détection. Ils sont aussi très inégaux entre les champs et les années.

Pourquoi des dégâts si irréguliers

La principale raison de cette irrégularité est la nécessaire coïncidence de trois événements : phase sensible du blé, présence de l'insecte adulte et conditions climatiques favorables pour le vol et la ponte (Basedow et Gillich, 1982 ; Pivnick et Labbé, 1993 ; Oakley et al., 1998).

La phase sensible du blé va de l'émergence des épis à la floraison (Barnes, 1956 ; Ding et Lamb, 1999). Les dégâts sont plus forts si les épis sont exposés à la ponte durant l'épiaison (stades 51-59 de l'échelle Zadoks) que durant la floraison (stades 61-69) (Zadoks et al., 1974 ; Elliott et Mann, 1996). En effet, le taux de survie des larves décline après le début de l'anthèse (Elliott et Mann, 1996 ; Ding et Lamb, 1999).

La biologie et le comportement de S. mosellana ont été étudiés de façon approfondie. L'activité des adultes est inhibée par la pluie et des vents supérieurs à 10 km/h (Pivnick et Labbé, 1993). Les vols requièrent au moins 15 °C. Les pontes ont plutôt lieu le soir et tôt le matin et requièrent 11 °C (Pivnick et Labbé, 1993).

Émergences modélisées

Plusieurs modèles prévisionnels des émergences ont été proposés en Europe (Basedow et Gillich, 1982 ; Kurppa, 1989 ; Oakley et al., 1998 ; Jacquemin et al., 2014 ) et en Amérique du Nord (Wise et Lamb, 2004 ; Knodel et Ganehiarachchi, 2008 ; Elliott et al., 2009).

En Belgique, le récent modèle de Jacquemin et al., (2014) comporte quatre phases successives :

- vernalisation, au cours de laquelle les besoins en froid doivent être remplis pour permettre la levée de la diapause ; dans nos régions, ils le sont toujours (Oakley et al., 1998) ;

- accumulation de température de 250 degrés-jours (DJ) en base 3 °C à partir du 1er janvier ;

- troisième phase, de durée variable, commençantà la fin de la deuxième puis se poursuivant jusqu'à l'apparition d'un double signal : élévation de la température moyenne à 13 °C suivie de précipitations, ce qui déclenche...

- la phase finale : accumulation de température 160 DJ en base 7 °C... et les adultes émergent.

Ce modèle, éprouvé de 2007 à 2014, permet de prévoir les émergences avec un écart moyen de moins d'un jour et un écart maximum de deux jours par rapport aux émergences observées.

La sensibilité variétale

Une autre source d'irrégularité des dégâts de S. mosellana est le degré de sensibilité des variétés à ce ravageur. Certaines se montrent vulnérables et d'autres résistantes (Oakley et al., 2005 ; Ellis et al., 2009).

Chez le blé tendre, la résistance variétale à S. mosellana est associée à l'antixénose ou à l'antibiose : l'antixénose inhibe la ponte (Lamb et al., 2002) tandis que l'antibiose, conférée par le gène Sm 1, inhibe l'alimentation des larves par production accrue d'acides phénoliques menant à leur mort (Ding et al., 2000).

Cependant, selon des travaux anglais, un taux élevé d'acides phénoliques chez des blés résistants n'est pas corrélé à la seule présence du gène Sm 1 : deux ou trois autres gènes seraient eux aussi impliqués (Oakley et al., 2005 ; Ellis et al., 2009). La résistance de ces blés pourrait ainsi être multigénique, donc robuste face à d'éventuels contournements de résistance par le ravageur.

La culture de variétés résistantes ou peu sensibles à S. mosellana est une méthode élégante car elle limite la multiplication de l'insecte en évitant tout traitement insecticide. Ces traitements sont difficiles à positionner et réalisés avec des insecticides à large spectre pouvant gêner les ennemis naturels des pucerons, voire de la cécidomyie, dont Macroglenes penetrans, un parasitoïde très abondant (Olfert et al., 2009).

Résistance difficile à tester en plein champ

Cependant, en plein champ, les dates d'épiaison des différentes variétés s'échelonnent sur deux à trois semaines. Il est très rare d'observer des femelles de S. mosellana prêtes à pondre et des conditions favorables aux pontes durant toute cette période.

Pour s'affranchir de ces aléas et exposer toutes les variétés de façon homogène au ravageur, une méthode d'évaluation en conditions contrôlées de la résistance variétale à S. mosellana a été mise au point.

Conteneurs, paniers, volières

Blé tendre d'hiver en conteneur sous voile

Les plantes testées peuvent provenir de semis effectués en conteneurs, ou de champs d'essai où elles ont hiverné avant d'être repiquées en conteneurs.

Dans le cas des semis en conteneur, les blés sont semés en décembre sous serre pour accélérer leur levée, puis disposés à l'extérieur pour assurer la vernalisation. La culture est conduite comme au champ : désherbage, fumure, fongicides, etc. À l'approche de l'épiaison du blé, les conteneurs doivent être rentrés sous serre et couverts de voiles pour éviter la dispersion des insectes dans toute la serre.

L'arrosage cible alors la base des plantes afin de limiter l'effet destructeur sur les cécidomyies. Les conteneurs sont examinés tous les jours et débarrassés des criocères et autres ravageurs, et même des araignées afin d'éviter des captures de S. mosellana par des toiles.

Récoltes puis paniers : constitution d'une réserve de S. mosellana

Pour disposer de jeunes adultes à lâcher dans les volières, il faut, un an à l'avance, constituer une réserve de larves de S. mosellana. Pour cela, une technique efficace consiste à récolter les épis de blé dans un champ fortement infesté avant que les larves de cécidomyie orange ne soient retournées au sol.

Ces épis, disposés sur des grillages posés sur des bacs en plastique, sont soumis à un arrosage continu de plusieurs heures afin d'inciter les larves à se laisser tomber. Les larves coulent au fond des bacs où elles sont récoltées très facilement.

Elles sont ensuite disposées, par lots de quelques centaines, voire milliers, dans des paniers contenant environ 3 dm³ de terre limoneuse bien arrosée, où on les laisse s'enfouir. Le nombre de ces paniers doit au moins égaler celui des jours pendant lesquels les lâchers d'adultes auront lieu.

Les paniers sont disposés à l'extérieur dans une tranchée et y subissent les conditions extérieures jusqu'après l'hiver (photo 2). En cas de sécheresse, il est prévu de les arroser. Les températures sont enregistrées à l'aide de ThermoPuce (Waranet Solutions SAS, Auch, France).

Production des jeunes adultes et lâchers dans les volières de testage de variétés

À la fin de l'hiver, les larves ont subi le froid nécessaire à leur vernalisation. La suite de la méthode visant à échelonner les émergences d'adultes utilise les acquis récents sur les facteurs déclenchant ces émergences chez S. mosellana (Jacquemin et al., 2014). Les paniers sont placés en chambre froide (5 °C) afin de ralentir la première phase d'accumulation de 250 DJ en base 3 °C (Jacquemin et al., 2014).

À ce stade, la réserve de S. mosellana est prête à être utilisée. Ensuite, l'activation de la fin du développement est échelonnée. Tous les jours ou tous les deux jours, un ou plusieurs paniers sont sortis de chambre froide et soumis à une température voisine de 20 °C afin de compléter l'acquisition des 250 DJ en base 3 °C. Des arrosages légers maintiennent la terre humide afin de provoquer, dès les 250 DJ en base 3 °C atteints, la sortie des larves de leur cocon et leur migration vers la surface en vue de la nymphose.

Les paniers sont alors immergés délicatement dans l'eau durant deux minutes afin d'enclencher la deuxième phase d'accumulation (160 DJ en base 7 °C) menant à l'émergence des adultes. Puis chaque panier est placé dans une cage d'émergence en toile noire surmontée d'un collecteur en plastique transparent pour récupérer les insectes (photos 3 et 4).

Dès que les premières gaines des variétés à tester éclatent, les lâchers d'insectes commencent. Chaque jour, le nombre de jeunes adultes émergés de S. mosellana est estimé et ils sont relâchés dans les volières contenant les variétés testées (photo 5).

Récupération des larves

Le degré de résistance des variétés à S. mosellana est mesuré via le nombre de larves développées dans les épis. Ce nombre est déterminé par lot de vingt épis par variété. En 2011, le degré de résistance de chaque variété a été établi à partir d'un seul lot de vingt épis ; en 2012 et 2013, deux lots ont été utilisés.

Afin de s'assurer que tous les blés sont suffisamment exposés à l'insecte, des variétés témoins (résistantes ou sensibles sur toute la gamme de précocité à l'épiaison) sont intégrées dans chaque essai.

Les épis ont été prélevés le 29 juin 2011, le 25 juin 2012 et le 24 juillet 2013. À ces dates, les larves de cécidomyie avaient achevé leur phase alimentaire même sur les blés les plus tardifs, et attendaient la pluie. Aucune larve n'avait quitté les épis car les blés étaient sous serre avec arrosage au sol.

Afin de déterminer le nombre de larves développées dans les épis, lequel mesure la résistance de chaque variété, deux méthodes distinctes ont été utilisées : extraction mécanique au laboratoire en 2011 et 2012 et extraction active en 2013.

En 2011 et 2012, les épis récoltés ont été conservés à -18 °C, en attendant l'extraction des larves. Puis les épillets ont été détachés des rachis et immergés dans l'eau maintenue sous agitation pendant 20 minutes. Ensuite, l'eau contenant les épillets a été versée au-dessus de trois tamis superposés aux mailles successives de 2,8 mm, 1,0 mm et 0,3 mm.

Les épillets disposés sur les tamis ont été manipulés à la main, sous jet d'eau continu durant 20 minutes. Seul le tamis de mailles de 0,3 mm retenait les larves de S. mosellana. Ces larves ont été récoltées, identifiées et comptées sous loupe binoculaire.

En 2013, l'extraction active des larves a été utilisée. Les épis sont disposés par deux dans de petits entonnoirs emmanchés sur des tubes en verre (photo 6). Ce dispositif est arrosé par pluie artificielle durant plusieurs heures afin de provoquer la sortie naturelle des larves de S. mosellana des épis.

Les larves sont récupérées au fond des tubes, identifiées et comptées sous loupe binoculaire. Afin de s'assurer que toutes les larves avaient quitté les épis, plusieurs pluies artificielles successives sont appliquées.

Lâchers de S. mosellana

Chaque année, les lâchers d'adultes de S. mosellana ont été effectués durant toute la période sensible des variétés étudiées (Figure 1).

En 2011, des insectes ont été lâchés de deux en deux jours du 10 au 26 mai. En 2012, la période des lâchers a été brève : du 24 mai au 2 juin. En revanche, en 2013, de grandes disparités de précocité entre variétés ont imposé des lâchers sur plus d'un mois, mobilisant beaucoup d'insectes.

Le nombre total d'insectes lâchés par dix plantes était en moyenne de onze individus en 2011, dix-neuf en 2012 et cent vingt et un en 2013 (Figure 1).

En 2011, la production d'insectes d'élevage n'avait pas encore atteint un niveau suffisant. Les lâchers d'insectes produits ont été complétés par des lâchers de femelles capturées au champ, à hauteur d'épi à la tombée du jour (femelles occupées à pondre) à l'aide d'un aspirateur à insectes de type Vortis (Burkard Manufacturing Co. Ltd., Hertfordshire, Angleterre).

Les années suivantes, les progrès accomplis ont permis de se passer des apports d'insectes capturés.

Volières de plein air pour récolter les larves

Désormais, la récolte de larves devant constituer la réserve est réalisée au champ dans des parcelles protégées par des volières. Des adultes de S. mosellana produits en élevage y sont lâchés en grand nombre au cours de la période vulnérable du blé.

Les volières ont pour fonction d'éviter la dispersion des cécidomyies, améliorer les conditions de vol et de ponte par réduction du vent, augmenter la température et, surtout, protéger les oeufs contre le parasitisme de M. penetrans, parfois très important.

Dès que les larves approchent du stade L3 et donc risquent de se laisser tomber à la première pluie, ces volières sont couvertes d'une feuille de plastique imperméable à toute pluie.

Désormais, la production de jeunes adultes prêts à pondre et l'échelonnement de leurs émergences sont au point : il est possible d'étaler la production d'insectes sur quatre à cinq semaines, voire plus, et ceci quasiment en toutes saisons.

Résultats sur les blés et sur la méthode

La résistance des blés existe, mais...

Le nombre de larves développées dans les épis varie selon la variété, avec des niveaux de sensibilité variétale différents. Dix-huit des vingt-huit variétés testées se sont montrées nettement sensibles à S. mosellana. Les dix autres sont apparues résistantes mais à des degrés divers. Toutes ne sont pas présentées ici pour raison de confidentialité.

En 2011, quasiment aucune larve ne s'est développée dans Altigo, Farandole, Viscount et Azzerti. Il en est de même en 2012 chez Heros et Robigus. Ces six variétés présentent un haut niveau de résistance à S. mosellana. Les variétés KWS Horizon (en 2011) et Trapez (en 2012) ont un niveau de résistance intermédiaire (< 5 larves par épi) (voir Figure 2).

En 2013, vu l'abondance des lâchers, les infestations ont été fortes (jusqu'à > 50 larves/épi). Les grands écarts-types peut-être liés aux différences de température et d'humidité entre volières. Azzerti et Koreli, pourtant classées résistantes (Jacquemin, 2014), ont permis le développement de plusieurs larves par épi (Figure 2).

Certes leurs niveaux d'infestation sont inférieurs à ceux des autres variétés testées. Mais ils indiquent que la résistance d'Azzerti et Koreli à la cécidomyie orange est soit partielle, soit contournée par une fraction de la population de l'insecte (Smith et al., 2007). Ainsi, face à une forte pression du ravageur, quelques larves peuvent se développer même sur variétés résistantes.

Les observations ont été validées par le fait que toutes les variétés étaient encadrées par des variétés sensibles (témoins positifs) sur lesquelles les larves se sont développée en grand nombre.

La méthode se perfectionne

Nos résultats ne sont pas sans défauts. En effet, ils proviennent d'une méthode qui s'est perfectionnée d'année en année et reste perfectible. Ainsi, l'entretien de la culture en conteneurs pourrait être simplifié et homogénéisé avec arrosage goutte-à-goutte. Les variétés pourraient être semées par spots séparés les uns des autres plutôt qu'en ligne.

La production d'insectes en nombre suffisant est désormais bien maîtrisée, de même que l'étalement des émergences. Ceci permet d'ajuster les nombres d'insectes lâchés de manière à obtenir une image pertinente de la résistance.

Jusqu'à présent, les insectes ont été lâchés dans des volières leur offrant le choix des variétés sur lesquelles pondre. Cela pose le problème de l'indépendance des résultats. S'en affranchir est possible en isolant chaque variété dans une volière individuelle.

La méthode d'extraction active des larves par arrosage est efficace et économe en temps. Elle pourrait être perfectionnée afin de donner des résultats épi par épi.

Conclusion

Les résultats obtenus indiquent que l'on peut effectivement parler de « résistance » à la cécidomyie orange du blé de la part de plusieurs variétés.

Toutefois, aucune variété étudiée ne s'est montrée immune. La résistance a donc des limites. Elle peut être dépassée en cas de pression élevée du ravageur, ou à la suite d'une pression sélective continue du fait de la culture exclusive de variétés résistantes. L'étude de ce phénomène pourrait permettre, d'une part, de mieux comprendre les mécanismes de la résistance à S. mosellana et, d'autre part, de déterminer les risques de son contournement.

Moyennant quelques perfectionnements, notre méthode pourrait permettre de déterminer la variation d'infestation entre épis d'une plante ou entre plantes d'une même variété. Des renseignements aussi précis, utilisés tôt dans le processus de sélection, pourraient orienter les choix des sélectionneurs, voire révéler des mécanismes de résistance originaux.

Grâce aux avancées méthodologiques évoquées ici, il est désormais possible d'analyser la relation hôte-ravageur en conditions contrôlées ; des points pourraient être précisés (ex. : limites exactes de la phase de vulnérabilité du blé).

Il en va de même d'éventuels phénomènes d'antixénose et de facettes de la biologie de S. mosellana : comportement, longévité, prolificité, etc.

La méthode mise au point pour évaluer la résistance variétale du blé à S. mosellana peut évidemment s'étendre aux autres céréales, voire aux graminées prairiales ou sauvages.

Fig. 1 : Dispositif adapté aux différentes précocités des blés

Nombre moyen de S. mosellana lâchés par dix plantes durant la phase sensible des différentes variétés de blé testées en 2011, 2012 et 2013.

Fig. 2 : Des différences variétales évidentes

Nombre moyen de larves par épi observées pour chaque variété en 2011, 2012 et 2013. Variétés classées par ordre décroissant de précocité d'épiaison. En gras, les quatre variétés testées deux des trois années.

SUMMARY

ASSESSMENT OF WINTER WHEAT VARIETAL RESISTANCE TO ORANGE WHEAT BLOSSOM MIDGE, SITODIPLOSIS MOSELLANA (GÉHIN), UNDER CONTROLLED CONDITIONS

Varietal resistance is an effective control method against orange wheat blossom midge, Sitodiplosis mosellana (Géhin).

The determination of the resistance degree through field trials is hindered by the homogeneity lack of the exposure to the insects due to the variation in the date of heading of various varieties.

To overcome this obstacle, a novel method has been developed, where the varieties sown in containers are placed in greenhouse at the approach of heading, and covered with a veil. Starting from the appearance of first ears, and for ten days, young adults of S. mosellana are released into these enclosures.

The degree of resistance is measured from the number of larvae that developed in the ears.

This easy, economical and reliable method, benefits from the recent advances of knowledge in the biological cycle of S. mosellana, which allow to induce the emergence of young adults ready to lay eggs over several weeks.

KEYWORDS - Midge, Sitodiplosis mosellana, wheat, resistance, variety.

REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient D. Gasia, J. Denayer et A. Mahieu pour leur aide technique et la région wallonne (DGARNE) pour le soutien financier.

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RÉSUMÉ

CONTEXTE - La résistance variétale peut constituer une méthode de lutte efficace contre la cécidomyie orange du blé, Sitodiplosis mosellana (Géhin).

Mais la détermination du degré de résistance dans les essais de plein champ se heurte au manque d'homogénéité de l'exposition à l'insecte, en raison des décalages de précocité à l'épiaison.

TRAVAIL - Pour s'affranchir de cet obstacle, une méthode originale a été mise au point, où les variétés semées dans des conteneurs sont rentrées en serre à l'approche de l'épiaison, et couvertes d'un voile. Dès l'apparition des premiers épis, et pendant une dizaine de jours, de jeunes adultes de S. mosellana sont lâchés dans ces volières.

Le degré de résistance est mesuré via le nombre de larves qui se sont développées dans les épis.

RÉSULTATS - Cette technique aisée, économe et fiable, profite des acquis récents sur le cycle biologique de S. mosellana, qui permettent d'échelonner sur plusieurs semaines l'émergence de jeunes adultes prêts à pondre.

MOTS-CLÉS - Blé, cécidomyie, Sitodiplosis mosellana, résistance, variété.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEURS : *S. CHAVALLE, *M. DE PROFT, unité Protection des plantes et écotoxicologie, département Sciences du vivant, Centre wallon de recherches agronomiques, chemin de Liroux 2, 5030 Gembloux, Belgique.

**G. JACQUEMIN, unité Stratégie phytotechniques, département Productions et filières, Centre wallon de recherches agronomiques, Rue du Bordia 4, 5030 Gembloux, Belgique.

CONTACTS : s.chavalle@cra.wallonie.be

m.deproft@cra.wallonie.be

g.jacquemin@cra.wallonie.be

LIEN UTILE : afpp@afpp.net

BIBLIOGRAPHIE : La bibliographie de cet article (29 références) est disponible auprès de ses auteurs (contacts ci-dessus) ainsi que dans les Annales de la 10e Cira de l'AFPP (lien ci-dessus).

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