Les restrictions touchent les produits phyto EAJ (gamme amateur), plus les produits « pro » en espaces verts ouverts au public et relevant de personnes publiques, et sur certaines voiries. Photo : M. Decoin
Tableau 1 : Produits de biocontrôle à base de micro-organismes « demi-taxés » en 2016 sur les ventes de 2015
Selon le précédent article, seuls certains produits phyto resteront utilisables par les professionnels sur espaces publics relevant de personnes publiques et ouverts au public, ainsi que sur certaines voiries, à partir du 1er janvier 2017, et d'autres par les amateurs à partir du 1er janvier 2019. Mais au fait, quels sont ces produits ?
Les produits phyto épargnés
Trois catégories avec recoupements
Pour ces deux types d'usage (détails pages précédentes), de par les loi Labbé de 2014 et de transition énergétique de 2015, ne seront utilisables que les produits reconnus :
- soit UAB, utilisables en agriculture biologique ;
- soit à faible risque au sens réglementaire ;
- soit « de biocontrôle portés sur une liste établie par l'autorité administrative ».
Certains produits relèvent à la fois de deux voire trois de ces catégories. Mais pas tous.
Produits UAB : catégorie bien définie
Pour les produits utilisables en agriculture biologique, c'est clair. Leurs substances actives doivent être inscrites à l'annexe du règlement bio européen. Ensuite vient leur reconnaissance officielle. Selon le site E-Phy de l'Anses, consulté le 20 juin :
- la fiche de chacun des 1 951 produits autorisés (certains chapeautant plusieurs spécialités identiques) indique s'il est UAB ;
- le caractère UAB est un critère de sélection ; E-Phy liste 195 produits UAB (des actualisations sont attendues).
À noter : les produits UAB ne sont pas réservés à l'agriculture biologique ! Les produits UAB « pro » (destinés aux professionnels) sont utilisables aussi par les agriculteurs conventionnels et/ou les professionnels de l'entretien des Jevi. Par ailleurs, E-Phy recense 28 produits à la fois EAJ (utilisables par les jardiniers amateurs) et UAB.
Produits « à faible risque » et Europe
Viennent ensuite les produits à faible risque, c'est-à-dire dont les substances actives sont reconnues à faible risque par l'Union européenne. Ces substances sont au nombre de sept. Quatre entrent dans la composition de produits autorisés en France :
- le phosphate ferrique, substance naturelle molluscicide (antilimace), à la base de produits UAB, certains EAJ et d'autres « pro » utilisables en Jevi et agriculture ;
- la souche Apopka 97 de Paecilomyces fumusoroseus (dorénavant Isaria fumosorosea) à la base du PreFeRal (voir Tableau 1, page suivante), anti-aleurode UAB utilisable notamment sur cultures florales sous serre ;
- le Cos-Oga, substance naturelle de l'anti-oïdium « pro » UAB Messager (ce produit pour légumes n'intéresse pas les Jevi) ;
- et, depuis le 15 juin 2016, la souche SC1 de Trichoderma atroviride, autorisée par dérogation dans Vintec de février à juin 2016 en pépinières viticoles, donc pas en Jevi.
Biocontrôle : liste à épisodes
Quant à la troisième catégorie... La liste offi-cielle n'est pas sortie. Seule certitude, elle sera plus courte que celle qui résulterait de la définition du biocontrôle issue de la loi d'avenir agricole de 2014. Ainsi, les produits UAB à base de cuivre n'y figureront pas. Par ailleurs, la liste s'autorise des produits naturels non UAB, herbicides notamment.
Publiée début 2015, une liste dite Nodu vert 2014 avait servi à deux calculs :
- celui du Nodu (nombre de doses unités) de ces produits en 2014, différant de celui des produits phyto classiques dont le Nodu doit baisser, selon Écophyto ;
- celui d'une taxe créée par la loi d'avenir pour financer la phytopharmacovigilance ; les produits de la liste vendus en 2014 ont été, en 2015, taxés à demi-tarif.
Publiée en 2016 en trois épisodes, une nouvelle liste sert au calcul de la taxe phytopharmacovigilance 2016 prélevée sur les ventes de 2015. Ses produits sont cités dans les Tableaux 1, 2 et 3. Elle contient les produits de la liste Nodu vert 2014, sauf ceux retirés du marché. S'y ajoutent :
- les produits récemment autorisés à base de substances actives déjà Nodu vert (Btk, phéromones, acides pélargonique et giberellique, phosphate ferrique) ;
- ceux à base de substances inédites, à savoir la souche de Pythium de Polyversum, celle de Trichoderma de Vintec (Tableau 1) et le Cos-Oga de Messager (Tableau 3) ;
- ceux qui font entrer leur substance active sur la liste alors qu'ils étaient déjà autorisés en 2014 sans être Nodu vert ; ce sont Syneïs Appat à base de spinosad, Bioxeda à base d'huile de girofle, Stifénia à base de fénugrec, 34 spécialités à base de sulfate de fer et huit à base de 6-benzyladéine.
Article L. 253-5 du code rural : une liste si attendue...
Il est probable que la liste serve au calcul du Nodu vert 2015. D'autre part, selon l'arrêté du 9 mars 2016 fixant le taux de la taxe, les produits taxés demi-tarif sont ceux cités par « l'article L. 253-5 du code rural ». Lequel doit lister les produits « pro » restant utilisables sur certaines voiries et certains espaces verts publics le 1er janvier 2017, et les produits EAJ restant autorisés le 1er janvier 2019.
Alors, on la tient, la liste, fusion de celles sorties en mars et mai ? Pas tout à fait ! Cette liste provisoire pourrait être enrichie.
Les critères permettant de savoir a priori si un produit est incluable dans la liste ou non sont en discussion. Il y a fort à parier que les produits des Tableaux 1, 2 et 3 resteront disponibles (sauf ceux qui seraient retirés du marché entre-temps). À noter : beaucoup sont aussi UAB... Mais pas tous ceux à base de substances naturelles.
Mode de vente aux amateurs
Catégories en libre-service
Par ailleurs et dans l'état actuel de la loi au 20 juin 2016, ne seront en vente libre aux amateurs, à partir du 1er janvier 2017, que les produits EAJ de biocontrôle listés à « l'article L. 253-5 » (qui resteront autorisés en 2019), ainsi que les produits composés exclusivement de substances de base.
L'Europe a approuvé onze substances de base : la prêle, le chitosan et le saccharose en 2014, l'hydroxyde de calcium (= chaux éteinte), la lécithine, le saule, le vinaigre, le fructose et le bicarbonate de sodium en 2015, et enfin le PDA (phosphate diammonique) et le petit-lait en 2016.
Le reste sous clé
Et les autres produits phyto ? Ils seront mis sous clé ou derrière un comptoir et délivrés par un vendeur... même les produits UAB et à faible risque qui ne sont pas par ailleurs listés biocontrôle « article L. 253-5 » ? La loi biodiversité pourrait modifier la règle mais, tant qu'elle n'est pas adoptée, rien n'est sûr...
Penser aussi « hors phyto »
Des PNPP aux auxiliaires
Reste deux catégories d'outils de biocontrôle utilisables sans restriction réglementaire par les amateurs comme les professionnels, aussi bien en Jevi qu'en zones agricoles. Ce sont les PNPP à usage biostimulant et les macro-organismes auxiliaires (insectes, acariens et nématodes utiles).
Les premiers produits n'ont pas d'usage phytopharmaceutique, et leur définition légale est en construction, voir les articles précédents...
Non indigènes listés
Les auxiliaires réglementés sont ceux qui ne sont pas indigènes des territoires où ils sont testés, vendus et utilisés.
Parmi ces « non indigènes », seules sont utilisables les espèces et souches figurant sur une liste publiée en avril 2015 (arrêté du 26 février). Elle contient 372 souches de 95 espèces d'insectes, acariens ou nématodes.
Pour toute autre souche non indigène, il faut obtenir une AET (autorisation d'entrée sur le territoire) et/ou AIE (autorisation d'introduction dans l'environnement). Des demandes d'AET et d'AIE sont en cours d'examen par l'Anses.
Indigènes connus ou dénichés
Par ailleurs, les macro-organismes indigènes sont en vente libre. La notion d'indigène d'un territoire est large. Elle englobe les organismes qui y sont naturalisés, c'est-à-dire installés sans poser de problème.
Ainsi, toute souche ou population dénichée sur un territoire sans y être nuisible sera classée comme indigène dudit territoire. Elle pourra y être testée puis, si elle est efficace et facile à élever, vendue sans formalité aux amateurs et/ou professionnels.
C'est le cas des trichogrammes du Trichotop Buxus de Biotop. Étudiés par l'Inra (Enriquez & al.) et agissant sur les pontes, ils sont complémentaires des bio-insecticides à base de Bacillus thuringiensis qui agissent sur les larves. Autre exemple, les nématodes utiles (Tigranem) et chrysopes (Chrysolis Arbres) vendus avec un adjuvant végétal (Squad) par Koppert contre le tigre du platane.