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Photo : M. Decoin
Tableau 1 : toxicité aiguë de l'halauxifène-méthyl et de Pixxaro EC sur mammifères
Tableau 2 : effets de l'halauxifène-méthyl et de Pixxaro EC sur la faune et la flore
Tableau 3 : fiche d'identité de la préparation
CARACTÉRISTIQUES TOXICOLOGIQUES ET ÉCOTOXICOLOGIQUES
Toxicologie
L'halauxifène-méthyl présente une faible toxicité aiguë et n'est pas sensibilisant (Tableau 1). Il n'a pas d'effets tératogènes, mutagènes ou cancérogènes.
Sa dose journalière admissible (DJA) est de 0,058 mg/kg.
Sa dose de référence aiguë (DRFA) est de 5,8 mg/kg et son niveau admissible (dose acceptable) d'exposition pour l'opérateur (NAEO) de 0,058 mg/kg.
Écotoxicologie
L'halauxifène-méthyl est classé dangereux pour les organismes aquatiques (H400, H410) mais les risques sont acceptables en conditions normales d'utilisation. Il a un profil favorable vis-à-vis des autres espèces vivantes testées (voir Tableau 2).
Comportement dans l'environnement
L'halauxifène-méthyl se transforme rapidement dans le sol par voie microbienne (demi-vie en aérobie au labo de 1,5 jour) en halauxifène-acide. Ce dernier se dégrade ensuite en composés inactifs (demi-vie en aérobie au labo de 14 jours, demi-vie de dissipation au champ, en moyenne géométrique, comprise entre 10 et 28 jours).
En conditions normales d'emploi, l'halauxifène-méthyl ne présente donc pas de risque significatif d'entraînement vers les nappes d'eaux souterraines. Il se dégrade rapidement par photolyse dans l'eau de surface (demi-vie moyenne géométrique de 1,8 jour) et ne se concentre pas dans les sédiments.
Il est peu volatil et, de plus, sa durée de demi-vie dans l'air est faible (2,2 jours selon le modèle d'Atkinson).
PROPRIÉTÉS BIOLOGIQUES
Mode d'action
L'halauxifène-méthyl (ArylexTM active) a un mode d'action auxinique (groupe HRAC O) : il agit comme un mimétique de l'acide indolacétique (AIA) en perturbant la régulation de l'auxine. Premier représentant de la famille des arylpicolinates, il possède des propriétés originales par rapport aux autres herbicides auxiniques, notamment :
- une structure biochimique spécifique (un groupement phényle sur un noyau pyridine) ;
- un site d'action préférentiel différent des autres herbicides auxiniques, mis en évidence sur Arabidopsis thaliana ;
- un impact réduit des températures et une efficacité à faible dose (6 à 7,5 g s.a./ha).
Après une absorption principalement par le feuillage des végétaux, l'halauxifène-méthyl est rapidement métabolisé, par désestérification, en sa forme active, l'halauxifène-acide.
Celui-ci, véhiculé dans la plante par systémie ascendante et descendante vers l'apex, s'accumule rapidement dans les cellules des méristèmes. Dans le noyau, il se lie préférentiellement à un récepteur protéique spécifique, le récepteur AFB5, différent de celui d'autres auxiniques (ex. : fluroxypyr et 2,4-D). S'ensuit, dans les plantes sensibles, une cascade d'événements biochimiques aboutissant à une élongation cellulaire anarchique et une perte d'eau entraînant des déformations caractéristiques (feuilles soudées en « trompette »), un flétrissement et la mort rapide de la plante.
Efficacité peu dépendante de la température
Dès les premiers essais, l'efficacité de l'halauxifène-méthyl contre les dicotylédones (gaillet, fumeterre, coquelicot...) s'est montrée peu dépendante des conditions climatiques.
La Figure 1 illustre cette propriété dans un essai sur le coquelicot. L'application a été effectuée en décembre au coeur d'une période de gel de 7 jours atteignant -4 °C à -6 °C avec une durée journalière de 13 à 18 heures de gel, suivie d'autres périodes de gel toutes les 3-4 semaines en janvier et février. L'halauxifène-méthyl à 6 g de s.a./ha est comparé à une référence robuste, réputée efficace sous température froide. Malgré ces conditions, l'efficacité finale de l'halauxifène est maximale (100 %) supérieure à celle de la référence (80 %) : la substance est efficace même en conditions froides.
Sélectivité sur céréales
Les céréales d'hiver et de printemps, hormis les avoines, ont, vis-à-vis de l'halauxifène-méthyl de marque Arylex, une bonne tolérance basée sur une métabolisation de la substance plus rapide dans ces espèces que dans celles sensibles, essentiellement des dicotylédones.
Néanmoins, pour garantir une parfaite sélectivité en conditions extrêmes, les produits contiennent du cloquintocet-mexyl qui accélère la métabolisation de la substance dans les céréales. L'avoine de printemps reste sensible et une réduction de dose est nécessaire sur avoine d'hiver.
Rappel sur le fluroxypyr
Le fluroxypyr-meptyl, lui aussi un « auxinique », appartient à la famille des acides pyridines picolinates. Efficace en particulier contre le gaillet, la stellaire, les renouées et les liserons, il est très actif dès 8 °C sur gaillet. Très sélectif des céréales, il est proposé par Dow AgroSciences depuis 1984 dans divers produits. L'association du fluroxypyr avec l'halauxifène a donc une activité peu dépendante des conditions de température et état hydrique du sol à l'application. Elle peut s'appliquer dès 3 °C.
RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX ET RECOMMANDATIONS D'EMPLOI
Caractéristiques
Pixxaro EC (seconds noms Frimax et Tekken), à base d'halauxifène-méthyl et de fluroxypyr, a obtenu son autorisation de mise sur le marché en novembre 2016 sur céréales d'hiver et de printemps avec une restriction sur avoines, entre les stades trois feuilles et dernière feuille étalée de la culture (voir Tableau 3).
Souple d'emploi, utilisable en application précoce ou tardive, cet herbicide présente un large champ d'activité incluant de nombreuses adventices concurrentielles des céréales.
Étant du groupe O, il se montre intéressant pour prévenir et ralentir le développement des populations de coquelicots résistantes aux inhibiteurs de l'acétolactate synthétase (ALS) par mutation de cible.
Champ d'activité
Les essais réalisés depuis 2010 ont confirmé la grande sensibilité de nombreuses dicotylédones compétitives des céréales d'hiver et de printemps vis-à-vis du nouveau produit.
Celui-ci se révèle très efficace contre le gaillet, les coquelicots (sensibles ou résistants aux herbicides inhibiteurs de l'ALS), le fumeterre, les lamiers, les géraniums, le bleuet, les rumex. De plus, il contrôle l'ambroisie, les chénopodes et les renouées en céréales de printemps (voir Figure 2).
Il a une action intéressante contre une adventice difficile à maîtriser : les repousses de pomme de terre. Contre des repousses de 10 à 20 cm de hauteur, la spécialité à 0,5 l/ha est plus efficace que 140 g/ha de fluroxypyr (Starane 200 à 0,7 l/ha) ou 6 g s.a./ha de la référence sulfonylurée.
L'association d'halauxifène-méthyl, peu dépendant des conditions climatiques, et de fluroxypyr, très actif contre des stades très développés des dicotylédones sensibles, fait de Pixxaro EC un herbicide très souple d'emploi, efficace en application précoce comme tardive sur adventices jeunes ou développées. Ainsi la fumeterre (Figure 3), le gaillet et l'ambroisie et restent très sensibles même à des stades développés.
Le champ d'activité du nouvel herbicide peut être aisément complété contre les véroniques et la pensée par l'association avec des herbicides à base de picolinafène ou de diflufenicanil. De même, cet antidicotylédones s'associe avec les herbicides antigraminées sur toute sa large fenêtre d'application sur céréales.
Coquelicots résistants
Les populations de coquelicot (Papaver rhoeas) résistantes aux herbicides inhibiteurs de l'ALS s'étendent en France. Cinq cas étaient recensés en 2005 dans des céréales, aujourd'hui la résistance touche les principaux départements céréaliers.
Les essais réalisés en France de 2012 à 2014 (Figure 4) ont montré que le nouvel herbicide est efficace contre les coquelicots présentant au moins une mutation de cible avérée affectant les herbicides inhibiteurs de l'ALS.
Ces coquelicots sont classés sensibles à très sensibles à cette association. L'efficacité très réduite de la référence C (sulfonylurée) illustre bien l'effet de la présence de coquelicots résistants aux inhibiteurs de l'ALS. Dans cette série de douze essais, Pixxaro EC à 0,5 l/ha s'avère très efficace sur ces populations de coquelicots résistants aux herbicides inhibiteurs de l'ALS. Toutefois, l'objectif recherché en cas de résistance avérée est 100 % d'efficacité. Dans cette optique, associer le nouvel herbicide à 0,4 l/ha (dose minimale conseillée en association sur adventices résistantes aux herbicides inhibiteurs de l'ALS par mutation de cible) avec la référence D à 1,0 l/ha (400 g/ha de dichlorprop-P et 40 g/ha de picolinafène) offre une performance excellente sur ces populations de coquelicots.
Sensibilité des cultures
Les essais ont montré la bonne sélectivité, vis-à-vis des céréales d'hiver et de printemps et des graminées en général, de Pixxaro EC appliqué à dose simple et double du stade « trois feuilles » au stade « dernière feuille étalée ». D'autre part, les tests de sensibilité variétale ne révèlent pas de différences entre variétés étudiées.
Effets non intentionnels
La dégradation rapide de l'halauxyfène et du fluroxypyr permet d'envisager toutes les cultures suivantes possibles hors légumes racines dans le cadre d'une rotation normale. En cas de retournement de la céréale, toutes les cultures de graminées peuvent être implantées sans labour.
Pour éviter la dérive sur cultures sensibles, il faut respecter une distance non traitée de 5 m le long des cultures voisines.
Des études ont montré l'absence d'effet indésirable sur la qualité des produits transformés (malterie, brasserie, boulangerie).
Recommandations
Pixxaro EC s'inscrit parfaitement dans un programme de lutte contre les dicotylédones adventices des céréales. Souple d'emploi et peu dépendant des conditions climatiques, il s'utilise soit seul en précoce ou tardif sur adventices sensibles jeunes ou développées, soit associé à des partenaires antidicotylédones ou antigraminées qui complètent son champ d'activité.
Contre les fortes populations de coquelicot ou en cas de résistance avérée aux herbicides inhibiteurs de l'ALS par mutation de cible, il sera utilisé associé ou en programme avec des herbicides à base de matières actives efficaces sur coquelicot et à mode d'action différent des auxiniques et des inhibiteurs de l'ALS.
SUMMARY
Halauxifen-methyl (ArylexTM active), a Dow AgroSciences new active substance with an auxinic mode of action (HRAC group O), was approved under european regulation on 2015. It belongs to the new family of Arylpicolinates which provides it uncommon features for auxinic herbicides as an efficiency not dependent on temperature at application.
Pixxaro EC based on halauxifen-methyl mixed with fluroxypyr showed a wide weed spectrum including many competitive weeds in cereals. The preparation is still efficient under early to late application from three leaves up to flag leaf fully enrolled stage. The efficiency is not significantly dependent on application conditions as temperature or soil humidity.
This preparation applied under a large range of cereal growth stages controls both young and developed weeds. It can also be applied in mixtures with other herbicides who enlarge the weed spectrum on Viola arvensis or Veronica spp., or with grasskillers.
This herbicide is an effective tool to control ALS resistant populations of Papaver rhoeas.
https://www.anses.fr/fr/evaluations, https://www.anses.fr/fr/decisions
Fig. 1 : Efficacité de l'halauxifène par temps froid
Application en décembre 2009, résultats sur coquelicot.
Fig. 2 : Large spectre antidicotylédones
Champ d'activité de Pixxaro EC à 0,5 l/ha en céréales d'hiver et de printemps.
Fig. 3 : Souplesse : l'exemple de la fumeterre
Efficacité de Pixxaro EC contre la fumeterre officinale (Fumaria officinalis) jeune ou développée (treize essais).
Fig. 4 : Atout face à la résistance aux ALS
Efficacité de Pixxaro EC contre coquelicots résistants aux ALS (douze essais).
