Retour

imprimer l'article Imprimer

DOSSIER - Jardins, espaces végétalisés et infrastructures

Conférence AFFP : les enseignements généraux

GILBERT CHAUVEL, expert national DGAL ZNA - Cultures ornementales et président de la CoZNA de l'AFPP. - Phytoma - n°705 - juin 2017 - page 31

Première partie du compte rendu et des impressions à l'issue de la conférence AFPP sur l'entretien des jardins, espaces verts et infrastructures, en lien avec leurs composantes végétales : les sessions « toutes plantes confondues ».
Présentation d'une des trente-neuf communications orales de cette conférence, à l'Ensat, près de Toulouse. Photo : M. Decoin

Présentation d'une des trente-neuf communications orales de cette conférence, à l'Ensat, près de Toulouse. Photo : M. Decoin

Le comité d'organisation de la Commission « Zones non agricoles » (CoZNA) de l'Association française de protection des plantes (AFPP) a organisé sa quatrième conférence généraliste sur l'entretien des ZNA ou jardins, espaces végétalisés et infrastructures (jevi) les 19 et 20 octobre 2016.

Présentation

Sept conférences depuis 2004

L'École nationale supérieure agronomique (Ensat) a accueilli l'événement pour la troisième fois après les éditions 2007 et 2013, dans d'excellentes conditions.

Rappelons que ces conférences généralistes ont été entrecoupées de conférences thématiques : chancre coloré du platane, charançon rouge des palmiers, nématode du pin. Ainsi, la CoZNA a organisé sept conférences depuis sa création en avril 2004.

Sept sessions de communications

Trente-neuf communications orales et treize affichées étaient réparties en sept sessions. Celles-ci (forêt, arboriculture ornementale, jardins amateurs, végétation spontanée et gestion de la flore, plantes exotiques envahissantes, gazons et réglementation) correspondent globalement aux champs d'activité des acteurs des ZNA.

L'ensemble des problématiques

Plébiscités par les participants vu les réponses aux questionnaires, ces colloques généralistes couvrent l'ensemble des problématiques d'entretien phytosanitaire de tous les compartiments des jevi. Cela permet aux professionnels de croiser leurs expériences et élargir leurs horizons à la connaissance des contraintes et pratiques d'entretien de chaque sous-filière concernée.

Cet article rend compte des communications en mettant l'accent sur les points ayant retenu l'attention. Il cite les auteurs présentateurs ou, en cas d'incertitude, les premiers auteurs. Ceci ne diminue en rien la qualité et le degré d'implication des coauteurs.

Trois grandes tendances

L'Ensat a été présentée par son directeur Grégory Dechamp-Guillaume. La volonté des dirigeants de l'Ensat d'accueillir de nombreux événements extérieurs à contenu scientifique et technique dénote l'orientation résolue d'ancrage des enseignements de cette école sur les travaux effectués par la recherche publique ou privée. Le président de la CoZNA, Gilbert Chauvel, a remercié chaleureusement les personnes associées à l'élaboration des communications. Il a évoqué les tendances principales actuelles en jevi, dont trois marquantes :

- une conception des espaces verts végétalisés urbains plus naturels, d'expression bien plus libre, moins figée dans le temps, en train de s'accélérer pour s'imposer progressivement ; elle reflète la volonté politique de répondre aux besoins de nature des citadins et également de faire comprendre au plus grand nombre le rôle du vivant et sa nécessaire conservation par la connaissance de la biodiversité ;

- la montée en puissance de l'agriculture urbaine avec de nombreux projets et réalisations de villes ; ceux-ci visent à préserver le foncier agricole, augmenter l'autosuffisance en produits frais et développer les circuits courts en économie circulaire, mais aussi à bénéficier d'autres fonctionnalités environnementales, paysagères, pédagogiques et récréatives ;

- l'importante mutation en cours vers un entretien écologique des cimetières ; ceux qui réussissent abordent le sujet sous plusieurs angles avec notamment une communication soutenue et prolongée sous des formes variées et adaptées à leurs cibles, ils ont su faire évoluer la qualification des agents vers davantage de fonctions de médiation et de communication directe auprès des usagers, et réaménagent les cimetières existants selon des principes de conception écologique.

Session « jardins amateurs »

Réseaux et projets

La session jardins amateurs coanimée par Anne-Isabelle Lacordaire (Lacordaire Formation) et Hervé Loussert (DRAAF Occitanie) présentait cinq exposés oraux et deux posters. Anne-Gaëlle Cabelguen (Société nationale d'horticulture de France) a montré le rôle de la SNHF dans les réseaux d'épidémiosurveillance et la diffusion de savoirs pour l'entretien des jardins sans pesticides.

Camille Dumat (CNRS UPS Toulouse) a présenté le projet Jassur (Jardins associatifs urbains) via l'étude, en jardins associatifs de banlieue toulousaine, de la qualité des légumes produits en lien avec la qualité des eaux, des sols et de l'air, les pratiques culturales et le contexte environnemental (eau d'irrigation polluée par l'arsenic). Les échanges entre jardiniers, élus et chercheurs ont fait comprendre le risque sanitaire lié aux pollutions et accepter des règles de précaution.

Études scientifiques

Le cas de jardins familiaux contaminés par le plomb en région nantaise a fait l'objet du test de culture de légumes peu accumulateurs avec dépollution du sol en place par phyto-extraction par la moutarde brune Brassica juncea. Dorine Bouquet (université de Nantes) a montré que les tomates et choux accumulent peu de plomb dans leurs parties consommables, mais que B. juncea est peu efficace pour dépolluer (la majorité du plomb, d'origine naturelle, est non phyto-disponible).

Philippe Branchu (Cerema Île-de-France) a exposé les risques sanitaires et environnementaux liés à la pollution par certains éléments métalliques de sols de jardins sur sept territoires urbains de grandes villes. Ont été pointés le manque de connaissances sur le lien entre niveau de pollution des sols et risques réels, ainsi que les incertitudes liées au manque de normes réglementaires.

Christophe Schwartz (université de Lorraine) a présenté la qualité globale de l'écosystème jardin à partir de plusieurs centaines d'analyses physico-chimiques et biologiques caractérisant la fertilité, la biodiversité et les niveaux de contamination de sols sur 52 sites répartis dans toute la France. Il en ressort que les sols de jardins sont très fertiles mais souvent potentiellement contaminés et, dans de rares cas, réellement pollués. Grands réservoirs de biodiversité, ils jouent aussi un rôle essentiel de production vivrière et recyclage de déchets organiques. Il faut donc évaluer les risques réels de transferts de composés toxiques à l'homme : un des enjeux du projet Jassur qui fédère la plupart de ces études.

Posters SNHF et FNJCF

Un poster présente le travail de la SNHF pour promouvoir les méthodes alternatives aux pesticides auprès du grand public (Hannah Surmely - SNHF) : plateforme d'échanges « Jardiner autrement », lettres d'information, réseaux sociaux, communiqués de presse, conférences et rencontres.

Jean-Noël Consales (université de Marseille) montre l'importance des jardins comme réservoirs de biodiversité fournissant des services écosystémiques aux territoires, biodiversité promue par la Fédération nationale des jardins collectifs et familiaux malgré l'ambivalence de certains jardiniers préférant la biodiversité cultivée à celle spontanée souvent ignorée, voire combattue.

Session « réglementation »

Espèces exotiques envahissantes

Trois exposés oraux et un poster ont été groupés dans cette session animée par Gilbert Chauvel (DGAL SDQPV).

Arnaud Albert (FCBN) a brossé le tableau de l'application du règlement européen (2014) et de la stratégie française (2016) de lutte contre les espèces exotiques envahissantes (EEE) copilotée par plusieurs ministères (Environnement, Agriculture, Santé...). La coordination scientifique et technique est assurée par l'Agence française de la biodiversité et le Museum national d'histoire naturelle. Des groupes de travail, réseaux d'acteurs, groupes de recherche, réseaux et structures de coordinations territoriales quadrillent le territoire aux échelles infranationale, suprarégionale, régionale et locale. La stratégie nationale de lutte contre les EEE se décline en 37 actions visant douze objectifs groupés en cinq axes :

- prévention de l'introduction et de la propagation des EEE ;

- interventions pour l'éradication et la restauration des systèmes ;

- amélioration et mutualisation des connaissances ;

- actions de communication, sensibilisation, mobilisation et formation ;

- actions de gouvernance et d'animation.

Étude Compamed Santé

Pauline Laïlle, de Plante & Cité, organisme coordinateur de Compamed achevé en 2015, a présenté l'ultime partie de cette étude, Compamed Santé. Rappelons le but de Compamed : la comparaison multicritère des méthodes de désherbage en espaces verts. Des données originales sur l'hygiène et la sécurité (exposition aux bruits, vibrations, poussières, gaz d'échappement et désherbants chimiques), les charges physiques ressenties (pénibilité et difficultés) et une approche ergonomique des tâches ont permis de répondre aux objectifs attendus :

- documenter, évaluer, comparer les risques ;

- compléter un outil d'aide à la décision prenant en compte les aspects santé pour le choix des méthodes de désherbage ;

- proposer des préconisations de prévention et des outils méthodologiques pour le suivi des expositions professionnelles.

Ce projet a permis d'évaluer et comparer les risques professionnels associés aux diverses méthodes de désherbage à trois échelons : l'opérateur, le management de proximité et le décisionnaire. Unique par son ampleur et ses objectifs, il fournit une foule de renseignements pour favoriser un choix éclairé de méthodes adaptées à chaque situation.

Avis d'un expert près les tribunaux

La dernière intervention orale a permis à un expert phytosanitaire près les tribunaux, Bruno Gauthier (BG-Consultant), d'exprimer son avis sur la réglementation.

Outre l'augmentation des cas de litiges avec la progression des contraintes réglementaires, l'auteur pointe des imprécisions terminologiques (« pesticide » pour « produits phytosanitaires », « zéro pesticide » pour « zéro phyto »...) émaillant parfois les textes réglementaires, ainsi que des contradictions et manques d'harmonie entre textes encadrant l'usage des produits phytosanitaires. Il en résulte des difficultés d'interprétation des textes et des risques en terme de responsabilité des prescripteurs.

Il souhaite une concertation renforcée des compétences techniques, scientifiques et juridiques pour la rédaction de textes réglementaires plus clairs et précis, afin de réduire les mauvaises interprétations et clarifier les champs d'action des acteurs.

Professionnels et amateurs

Enfin, Émilie Vianay (Lynxee Consulting) a proposé une utile et intéressante synthèse des différences réglementaires encadrant les produits phytosanitaires destinés aux ZNA professionnelles et amateurs. Son analyse de douze textes réglementaires et trois avis montre la complexité de l'encadrement des conditions de vente, emballage/étiquetage, utilisation, mode d'application et élimination de ces produits.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - La quatrième conférence sur les jevi de la CoZNA de l'AFPP, les 19 et 20 octobre 2016 à l'Ensat Toulouse, a fait le point sur les problématiques des ZNA, dont les jevi. Cet article en évoque une partie.

GÉNÉRALITÉS - Après l'accueil par l'Ensat, l'exposé introductif du président de la CoZNA a pointé trois grandes évolution vers :

- davantage de naturalité dans espaces verts urbains ;

- l'agriculture urbaine ;

- l'entretien écologique des cimetières.

JARDINS D'AMATEURS - Cette session a traité notamment des actions autour de la dépollution des lieux et des services rendus par les « écosystèmes jardins », entre autres pour la biodiversité.

RÉGLEMENTATION - Cette session a évoqué l'étude Compamed Santé et la réglementation des EEE et des produits phytosanitaires.

MOTS-CLÉS - Jevi (jardins, espaces végétalisés et infrastructures), ZNA (zones non agricoles), AFPP (Association française de protection des plantes), jardins d'amateurs, réglementation, EEE (espèces exotiques envahissantes).

POUR EN SAVOIR PLUS

CONTACT : gilbert.chauvel@agriculture.gouv.fr

LIEN UTILE : www.afpp.net

BIBLIOGRAPHIE : les annales de cette rencontre sont disponibles auprès de l'AFPP (lien ci-dessus).

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :