Cité de 22 000 habitants en Seine-Saint-Denis, Neuilly-Plaisance ne manque pas d'espaces verts : un parc de 32 ha (parc des Côteaux d'Avron), 800 m de bords de Marne et une coulée verte (1,6 km) entre les deux, plusieurs espaces avec aires de jeux, un cimetière engazonné, sans compter quelque 860 arbres, des bacs fleuris... Pour leur gestion, Emmanuel Briois dispose d'une équipe de seize employés municipaux et fait également appel à des prestataires. C'est le désherbage qui est le plus gourmand en temps et en budget.
Désherbage manuel
« En 2011, quand je suis arrivé, une grande partie était réalisée chimiquement », se rappelle Emmanuel Briois. Il a développé des techniques alternatives.
« En 2013, j'ai opté pour le désherbage manuel des aires gravillonnées (squares, bords de Marne...), à savoir binage, ratissage et apport de gravillons si besoin. » Mais 2017 marque un tournant pour la municipalité avec la loi Labbé. Si sur les terrains sportifs et cimetières, tous les produits, chimiques ou autres, sont encore utilisables, pour les parcs et voiries seuls les produits de biocontrôle restent autorisés.
« Jusqu'en 2016 inclus, un prestataire désherbait chimiquement les 88 km de voirie. J'ai lancé un nouvel appel d'offres pour utiliser des produits de biocontrôle. En attendant, on ne désherbe plus. Si je ne trouve pas de prestataire adéquat, j'opterai pour une gestion manuelle avec mon équipe comme pour les aires gravillonnées. »
Un budget qui explose
Ce changement de pratique nécessite de la main-d'oeuvre supplémentaire.
« Pour libérer du temps, les aires gravillonnées seront désherbées thermiquement. Nous nous sommes équipés d'une désherbeuse thermique. Un seul employé suffira. Mais c'est très technique. Il ne faut pas brûler la plante mais l'épuiser au fur et à mesure en passant trois fois. »
Et pour les autres espaces ?
Le parc des Côteaux d'Avron étant classé Natura 2000, il n'était pas désherbé chimiquement : les bordures d'allées et les abords d'aires de pique-nique et de jeux sont fauchés.
Dans les massifs fleuris de la ville, Emmanuel Briois utilise déjà une technique alternative : le paillage de miscanthus, très efficace pour limiter la pousse des adventices.
Pour le cimetière, les traitements chimiques restent autorisés. Le prestataire qui désherbait la voirie y intervenait trois fois par an jusqu'en mai 2017, date de fin du contrat. La prestation de désherbage chimique (voiries et cimetière) coûtait 17 000 € par an à la mairie.
« Une même prestation avec produits de biocontrôle et désherbage mécanique revient à 73 000 €, sans garantir une efficacité aussi grande. Les produits de biocontrôle ne détruisent pas la racine alors que les produits chimiques systémiques le faisaient. Quand il va pleuvoir, les adventices vont repartir. Et il faudra à nouveau intervenir. »
A priori, Emmanuel Briois devrait obtenir le budget supplémentaire nécessaire à ce changement profond de technique de désherbage.
Diversifier les espèces
Autre souci : les pins de la ville, âgés d'une quarantaine d'années. Ils sont touchés par Sphaeropsis sapinea, un champignon responsable du dépérissement des pousses du pin qui se propage très vite.
« Notre prestataire traitait deux fois par an avec Scorenet (difenoconazole) et Topsin (thiophanate-méthyl), deux fongicides très efficaces. Malheureusement, il n'existe pas de méthode alternative. J'espère que le fongicide utilisé en 2016 sera suffisamment rémanent sur 2017 pour nous laisser le temps de trouver une solution. »
Faudra-t-il en arriver au remplacement ? Cela a été le cas pour les prunus. Atteints par la moniliose, ils ont été abattus et remplacés par de nouvelles espèces : Cedrela sinensis, Morus kagayamae, Pyrus salicifolia pendula, Pyrus calleryana. « On les alterne pour limiter les maladies. » De plus, ce choix varié d'espèces participe d'un objectif qui tient à coeur aux élus : la biodiversité.
Sur certains arbustes (Berberis thunbergii atropurpurea, Euonymus), il a également dû faire face à l'oïdium. « Avant 2017, on évitait de traiter. Maintenant, on les remplace par des variétés peu sensibles. »
Mineuse et pyrale
Côté ravageurs, la mineuse sur les marronniers était maîtrisée depuis quatre ans avec du Dimilin (diflubenzuron) mélangé à Santaura, un physiostimulant à base d'algues pour leur donner un coup de fouet.
« Nous allons voir comment ils vont se comporter cette année sans insecticide. » Alors que la protection coûtait 2 000 € par an pour 42 marronniers, si Emmanuel Briois doit mettre des pièges à phéromones, seule méthode alternative disponible, il en coûterait 6 500 €, plus la main-d'oeuvre.
« Il faut monter dans les arbres deux, trois fois par an pour vérifier le bon état des pièges ».
Quant aux buis, ils n'ont pas été épargnés par la pyrale. Après deux ans de traitement efficace avec Scuttelo (à base de Bacillus thuringiensis), ils ont été supprimés en 2016. « On a été dépassé par le ravageur. Nous les avons remplacés par des spirées de Bumalda et des Hypericum hidcote. »
Période de transition
« 2017 va nous permettre de voir ce que donne la gestion des espaces verts sans lutte chimique. 2018 sera l'année de mise en place des solutions alternatives quand c'est possible. Si le désherbage thermique fonctionne bien, nous pourrions investir dans une seconde machine. Mais cela reste inadapté pour désherber les rues car le stationnement n'est pas toujours alterné à Neuilly-Plaisance. » L'avenir sera donc synonyme de gestion au cas par cas.