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DOSSIER

Protection des abricotiers : un projet de haute volée

LAURENT BRUN, FLORA BOURBIER, CHRISTOPHE GROS ET FREDDY COMBE, Inra UERI Gotheron - Saint-Marcel-lès-Valence. - Phytoma - n°720 - janvier 2019 - page 29

Réduire les produits phyto sans perte de rendement, tout en maintenant la pérennité du verger : tel est l'objectif d'un dispositif expérimental implanté en moyenne vallée du Rhône, nommé Abric'Haut car il teste le greffage haut.
Deux des modalités du dispositif expérimental.  Ci-dessus, Abric'Haut 3 (conduite palmette, filets).      > Ci-contre, Abric'Haut 1 (gobelet, sans filet). Toutes deux ont été plantées en 2015 avec greffage haut.

Deux des modalités du dispositif expérimental. Ci-dessus, Abric'Haut 3 (conduite palmette, filets). > Ci-contre, Abric'Haut 1 (gobelet, sans filet). Toutes deux ont été plantées en 2015 avec greffage haut.

 Photos : Inra UERI

Photos : Inra UERI

Fig. 1 : Baisse d'IFT : mission accomplie      IFT par système de culture et par type de produits phyto. Avantage à Abric'Haut 3.

Fig. 1 : Baisse d'IFT : mission accomplie IFT par système de culture et par type de produits phyto. Avantage à Abric'Haut 3.

 L'anneau de glu sur ce tronc d'abricotier constitue une protection physique contre les dégâts de forficules. Photo : Inra UERI

L'anneau de glu sur ce tronc d'abricotier constitue une protection physique contre les dégâts de forficules. Photo : Inra UERI

Fig. 2 : Cumul des rendements commercialisables de 2016 à 2018 en fonction du système de culture et de la variété      Grâce à la densité de plantation doublée, les rendements à l'hectare sont toujours supérieurs ou égaux dans les modalités Abric'Haut comparées à la référence.

Fig. 2 : Cumul des rendements commercialisables de 2016 à 2018 en fonction du système de culture et de la variété Grâce à la densité de plantation doublée, les rendements à l'hectare sont toujours supérieurs ou égaux dans les modalités Abric'Haut comparées à la référence.

Fig. 3 : Marges brutes avec amortissement en 2017 et 2018 par système de culture et par variété      Valeurs observées (A) et valeurs simulées selon les hypothèses d'une absence de grêle et d'une aide à l'installation des filets et bâches de 60 % du prix (B).

Fig. 3 : Marges brutes avec amortissement en 2017 et 2018 par système de culture et par variété Valeurs observées (A) et valeurs simulées selon les hypothèses d'une absence de grêle et d'une aide à l'installation des filets et bâches de 60 % du prix (B).

Trouver des systèmes de production d'abricots plus durables, cela suppose des vergers productifs (durabilité socio-économique), recevant le minimum d'intrants (durabilité environnementale) et de bonne longévité.

L'abricotier a des ennemis

Maladies et ravageurs

L'abricotier est une espèce affectée par de nombreuses maladies dont certaines entraînent le dépérissement des arbres : bactériose à Pseudomonas responsable du chancre bactérien, enroulement chlorotique de l'abricotier (ECA) dû à un phytoplasme transmis par un psylle, et enfin sharka, virose transmise par des pucerons.

De nombreuses autres maladies peuvent affecter la production. Les attaques de monilioses sur fleurs provoquent le dessèchement des rameaux fructifères et peuvent anéantir la récolte. La rouille atteint le feuillage et peut entraîner une défeuillaison précoce. L'oïdium, la tavelure et les monilioses sont préjudiciables à la qualité du fruit.

Les principaux ravageurs que sont les forficules (Forficula auricularia), la tordeuse orientale (Cydia molesta) et la petite mineuse (Anarsia lineatella) causent des blessures sur les fruits à l'approche de la récolte.

Ainsi, la culture des abricotiers nécessite de mettre en oeuvre des stratégies de protection pour éviter les pertes de production et des mortalités d'arbres. La plupart de ces stratégies de protection reposent sur le recours aux produits phytosanitaires. Cependant, la demande sociétale actuelle plébiscite les productions fruitières bas-intrants phytosanitaires. Il apparaît donc nécessaire de concevoir des systèmes de culture qui permettent de réduire l'usage des produits phytosanitaires dans les vergers d'abricotiers.

Réduire les IFT chimiques

Un fil directeur, le greffage haut

Dans le cadre du projet Écophyto Dephy Expé CAP-ReD(1), le dispositif Abric'Haut a été implanté en 2015 sur l'Inra UERI Gotheron, dans la Drôme. L'objectif général du projet CAP-ReD était une réduction de 50 % de l'indice de fréquence de traitement (IFT).

La bactériose de l'abricotier est une maladie très grave qui peut entraîner une forte mortalité de charpentières et d'arbres. Elle s'observe les printemps précédés d'un hiver rigoureux avec alternance de périodes de gel et de dégel. Elle est également favorisée par les sols caillouteux à texture grossière. C'est donc une maladie très présente dans les sols d'arène granitique et ceux formés sur diluvium alpin que l'on trouve fréquemment dans la zone septentrionale de production de l'abricot (Drôme, Ardèche).

Pour réduire les mortalités dues au chancre bactérien, le greffage haut des abricotiers à 120/140 cm de hauteur sur le porte-greffe (prunier ou pêcher) est une technique bien connue (Prunier et al., 1999). Le mécanisme en cause n'est pas élucidé, mais comme l'intensité et la fréquence des températures négatives sont plus marquées près du sol, on suppose qu'en éloignant l'abricotier du sol, on diminue les facteurs micro-climatiques favorables à la bactériose.

Pour préserver le potentiel productif, jouer la densité de plantation

Cependant, cette technique est peu utilisée en vergers malgré la sécurité qu'elle apporte vis-à-vis de la bactériose car le greffage haut diminue la vigueur de l'arbre, donc le potentiel de production par arbre. La tendance actuelle en verger à risque bactériose est une hauteur de greffage à 60 cm qui n'affecte pas la vigueur de l'arbre mais ne permet pas un aussi bon niveau de protection contre la bactériose que le greffage haut.

Un des premiers objectifs du dispositif Abric'Haut est de montrer qu'il est possible de maintenir les volumes de production à l'hectare en compensant la baisse de production de chaque arbre induite par le greffage haut par un nombre d'arbres par hectare supérieur.

Ainsi, dans notre essai, nous comparons des vergers de référence dont les abricotiers sont greffés à 60 cm de hauteur à des vergers où les abricotiers sont greffés à 120 cm de hauteur, avec une densité d'arbre doublée par rapport à la référence (Tableau 1).

Glu antiforficules et désherbage mécanique

La protection contre les dégâts de forficules sur fruits peut être réalisée grâce à des barrières engluées sur les troncs et les poteaux de palissage qui vont empêcher l'accès des forficules à la frondaison de l'arbre. Cette technique donne de bons résultats à condition d'éliminer tous les ponts entre le sol et l'arbre (branche touchant le sol, adventice touchant une branche).

Le greffage haut permet de former des arbres avec un tronc de 1,2 à 1,4 m de hauteur avant l'insertion des premières branches fruitières. Ainsi, il est possible de positionner facilement un anneau de glu suffisamment haut sur les troncs afin d'éviter les ponts avec les adventices. À noter que le risque de branche touchant le sol est très faible avec cette forme d'arbre.

Le désherbage chimique du rang de plantation peut être remplacé en arboriculture fruitière par un travail mécanique. Il existe différents outils permettant le travail du sol, le brossage ou le fauchage. Les arbres formés haut facilitent le passage de ces outils mécaniques.

Autres méthodes du dispositif

La confusion sexuelle contre la tordeuse orientale est homologuée depuis plusieurs décennies. Mais si elle est fréquemment utilisée en vergers de pêchers, elle ne présentait qu'un intérêt limité en vergers d'abricotiers car la protection insecticide devait être maintenue contre la petite mineuse (Anarsia), ravageur important de l'abricotier. Depuis la saison 2018, la double confusion tordeuse orientale/Anarsia est commercialisée.

Dans notre dispositif, la forme classique de conduite des arbres en France en gobelet, les charpentières rayonnant à partir du tronc, est comparée à une conduite en palmette, avec charpentières palissées pour obtenir une forme plate de la frondaison.

Les protections antipluie ont montré leur efficacité pour réduire certaines maladies en verger de pommiers (Zavagli et al., 2016) et d'abricotiers (Brun et al., 2015). Ces bâches antipluie (couplées à des filets paragrêle) ont été introduites sur des modalités conduites en palmette dont la forme linéaire des arbres palissés permet une protection antipluie plus efficace (Tableau 1).

Cinq variétés ont été étudiées dans chacun des systèmes de culture. Elles sont toutes sensibles à très sensibles aux principales maladies fongiques, à la bactériose à Pseudomonas et à l'ECA. Cependant, trois des variétés sont résistantes à la sharka (gamme Aramis), il s'agit de Bergeval Aviclo cov (3950), Shamade cov (3902) et Anegat cov (4481).

Le dispositif expérimental

Un essai système pour quatre systèmes, à deux répétitions

Le dispositif expérimental Abric'Haut a été implanté en janvier 2015 sur une parcelle de l'Inra UERI Gotheron favorable aux dégâts de chancre bactérien (sol formé sur diluvium alpin).

Les quatre systèmes de culture évalués sont une référence régionale (référence 60), deux systèmes en greffage haut à double densité d'arbres conduits en gobelet (Abric'Haut 1) ou en palmette (Abric'Haut 2), et un système en palmette intégrant des protections physiques (Abric'Haut 3).

Dans chaque système, cinq variétés sont évaluées, les trois variétés de la gamme Aramis, ainsi que Bergeron (660) qui est une référence régionale, et Frisson (2821), variété très sensible au chancre bactérien. Chaque système de culture est répété deux fois dans un dispositif expérimental en blocs (Tableau 1).

Règles de décision pour la protection phytosanitaire

Lors de la première année de pousse en verger (2015), la protection phytosanitaire est assez limitée (absence de fleurs et de fruits). Elle n'a pas été différenciée entre les systèmes de culture et n'a nécessité que quelques applications contre le psylle vecteur de l'ECA et la rouille.

À partir de la deuxième feuille en verger (2016), les systèmes de culture intègrent des stratégies phytosanitaires différentes (Tableau 2). La protection cuprique contre le chancre bactérien a été supprimée pour les modalités en greffage haut.

La protection contre les monilioses sur fleurs est maintenue pour toutes les modalités. En effet, des essais préliminaires avaient montré une efficacité partielle (25 à 60 %) des bâches antipluie sur cette maladie (Brun et al., 2015).

En revanche, pour les autres maladies fongiques, la protection fongicide est supprimée sous les bâches antipluie. Ces bâches antipluie, installées fin 2015, sont déroulées du débourrement des abricotiers (fin février) à la fin de la récolte (mi-août).

La pose d'un anneau de glu et le désherbage mécanique ont été introduits seulement à partir de la saison 2017, pour éviter sur les arbres jeunes les risques de brûlure des troncs par la glu ou de blessure par le désherbage mécanique (Tableau 2).

La double confusion tordeuse orientale/Anarsia a été introduite dès 2017 (permis d'expérimentation n° 212185) dans l'ensemble du dispositif Abric'Haut.

Baisse des intrants phyto et contrôle des bioagresseurs

Baisse des IFT de 25 à 60 %

En 2017 et 2018, la présence de périodes pluvieuses sur la fleur, l'observation d'un vol de psylles de longue durée et la présence d'un épisode de grêle début mai ont entraîné des décisions d'intervention phytosanitaire comparables. Les choix des spécialités commerciales sont parfois différents de 2017 à 2018, mais les IFT par cible sont équivalents. Nous présentons donc l'IFT moyen 2017-2018 par souci de simplicité (Figure 1).

Par rapport à la référence, la baisse des IFT chimiques (hors biocontrôle) observée en 2017 et 2018 est de 25 % pour les systèmes Abric'Haut 1 et Abric'Haut 2, 60 % pour le système Abric'Haut 3.

Les fongicides sont les produits phytosanitaires les plus utilisés en culture d'abricotiers. L'IFT fongicides pour le système de référence est de 7, alors que dans le système Abric'Haut 3, l'introduction du greffage haut et de bâches antipluie permet de réduire le nombre d'IFT fongicides à 2.

Moins de dépérissements dans les systèmes bas-intrants

Le chancre bactérien est la maladie qui affecte le plus d'arbres, essentiellement sur les deux variétés les plus sensibles, Frisson et Anegat. Quatorze charpentières mortes de bactériose ont été coupées en 2017 et 33 en 2018. Le pourcentage d'arbres touchés par la bactériose est plus important dans le système référence 60. L'effet protecteur du greffage haut semble effectif. Il devra être confirmé dans la durée et pour des années à forte pression bactériose (Tableau 3).

Le pourcentage d'arbres touchés par l'ECA semble également supérieur pour le système référence. Ceci pourrait être dû à l'effet du nombre d'arbres par hectare. En effet, si on émet l'hypothèse que, lors de son vol de retour dans la parcelle, un psylle porteur du phytoplasme de l'ECA va contaminer un nombre fixe d'arbres par unité de surface, alors mathématiquement les parcelles ayant deux fois plus d'arbres (1 000 vs 500 pour la référence) seront deux fois moins touchées en pourcentage d'arbres touchés. La sharka n'a pour l'instant été détectée sur aucune des variétés du dispositif.

Un bon contrôle des bioagresseurs affectant la production

Les dégâts de monilioses sur fleurs et rameaux sont faibles dans les quatre systèmes de culture, avec seulement quelques rameaux desséchés par la moniliose. La protection supplémentaire permise par les bâches antipluie dans le système Abric'Haut 3 se traduit par un nombre de rameaux moniliés très faible (Tableau 4).

Lors des récoltes 2017 et 2018, le contrôle des maladies affectant le fruit a été efficace dans tous les systèmes de culture. En effet, aucun symptôme de tavelure sur fruits n'a été détecté. Quelques symptômes d'oïdium, sur 2 à 5 % des fruits, ont été observés en 2017 sans que cela n'entraîne un déclassement commercial de ces fruits (par exemple, une tache d'oïdium ayant évolué en coloration rouge qui se confond avec la surimpression rouge du fruit).

Différents niveaux de dégâts

Quasiment aucun fruit non blessé ne présentait de pourriture lors des récoltes 2017 et 2018, et seulement 2 à 6 % des fruits ont pourri (principalement en raison de monilioses) après une semaine de conservation à une température comprise entre 22 et 26 °C.

En 2017, aucun fruit ne présentait des dégâts de tordeuse orientale ou de petite mineuse. En 2018, ces dégâts représentaient 0,42 % des fruits de l'ensemble du dispositif. La confusion sexuelle semble tout de même avoir eu un effet protecteur. En effet, une parcelle composée des cinq mêmes variétés mais située en zone non confusée à l'extérieur du dispositif principal présentait 3 % de dégâts de tordeuse orientale et de petite mineuse en 2018.

Le ravageur occasionnant le plus de déclassement des fruits à la récolte est le forficule, via ses morsures sur fruits. La protection par un anneau de glu sur le tronc est plus efficace que la protection insecticide avant récolte. En effet, on observe deux fois moins de dégâts dans les parcelles Abric'Haut 1 et Abric'Haut 2 que dans la parcelle référence 60. La parcelle Abric'Haut 3 présente une situation intermédiaire que l'on pourrait expliquer par le nombre supérieur de passages à protéger par la glu (tronc, câbles d'ancrage, poteaux de palissage).

En 2016, 2017 et 2018, le développement de la rouille a été correctement contrôlée dans tous les systèmes de culture.

Des rendements plus élevés malgré la baisse des IFT

Entrée en production plus rapide des systèmes à haute densité d'arbres

Le cumul des rendements commercialisables sur les deux premières années de production (2017 et 2018) montre que les systèmes de culture à 1 000 arbres par hectare produisent davantage que la référence à 500 arbres par hectare. Ceci peut être le fait d'une meilleure occupation de l'espace en troisième et quatrième feuilles par les branches fruitières des systèmes à double densité d'arbres, mais aussi le fait d'un taux de dépérissement plus faible des arbres dans ces systèmes (Figure 2, Tableau 3).

Les rendements commercialisables sont plus importants pour le système Abric'Haut 3, avec en particulier des calibres de fruits plus élevés en 2017.

De plus, des épisodes de grêle sur petits fruits verts ont été observés le 2 mai 2017 et le 5 mai 2018. Ces impacts de grêle ont entraîné le développement de croûtes liégeuses sur les fruits qui sont responsables d'une baisse de leur valeur commerciale. Les fruits du système Abric'Haut 3 n'ont pas été touchés par la grêle grâce à la protection des filets. Ces fruits présentent également moins de défaut d'épidermes de type boisage.

Ils présentent cependant une surface de surimpression rouge moins importante et un taux de sucre un peu plus faible que dans les autres systèmes, sans que cela n'affecte leur valeur commerciale.

Des analyses réalisées sur un échantillon de fruits de Bergeval et Frisson ont montré l'absence de résidus de produits phytosanitaires détectables pour le système Abric'Haut 3.

Fort effet variétal

Bergeval, Frisson et Shamade sont les variétés les plus productives du dispositif. Anegat a présenté un faible taux de nouaison des fruits en 2018, ce qui a fortement affecté son niveau de production. En 2018, Anegat a essentiellement produit des fruits sur les rameaux longs, et comme ce type de rameaux est supprimé par la taille dans les systèmes en palmette (Abric'Haut 2 et Abric'Haut 3), le niveau de production de cette variété a été très faible dans ces systèmes (Figure 2).

Performances économiques des systèmes de culture

Marge brute avec amortissement

La marge brute avec amortissement (en hors taxes) est calculée en prenant en compte le chiffre d'affaires bord verger auquel on retire les coûts de main-d'oeuvre, de mécanisation et d'approvisionnement, ainsi que les charges d'amortissement des infrastructures installées au verger. Le prix de vente des fruits considéré est celui du référentiel de prix du RNM pour l'abricot(2).

Ce prix va dépendre de la variété, du calibre et de la période de production. La perte de valeur des fruits marqués par la grêle a été estimée à 40 %. Ces marges brutes avec amortissement ont été calculées pour les différents couples systèmes de culture × variété (Figure 3).

En 2017, le prix de vente des abricots a été plus faible qu'en 2018. La présence d'un épisode de grêle sur petits fruits verts en 2017 comme en 2018 touche fortement les performances économiques des systèmes sans filet paragrêle. En effet, aucun de ces systèmes ne dégage une marge brute avec amortissement positive en 2017. En 2018, pour les systèmes sans filet, la variété Shamade dans la référence 60 et le système Abric'Haut 1, ainsi que la variété Frisson dans le système Abric'Haut 1, sont les seules à dégager une marge brute avec amortissement satisfaisante (environ 3 000 à 5 600 euros/ha).

Impact de la grêle

Les calculs réalisés en prenant en compte le prix de vente des abricots sans la décote liée à la grêle montrent que si les épisodes de grêle avaient été absents, les systèmes sans protection physique dégagent des marges positives (Figure 3). En l'absence de grêle, la moyenne des deux années 2017 et 2018 et des cinq variétés indique une marge brute avec amortissement de +4 000 euros/ha pour le système Abric'Haut 1, de +2 900 euros/ha pour le système référence 60 et de -1 300/ha euros pour le système Abric'Haut 2.

Le système Abric'Haut 3 présente de fortes charges d'amortissement. Ces performances économiques sont fortement touchées les années où le prix de vente des abricots est faible, comme en 2017, ainsi que lorsqu'un faible volume de récolte est observé, comme pour Anegat en 2018 (Figure 3).

Simulations

Comme il existe déjà des aides pour l'installation des filets paragrêle, nous avons fait des simulations en considérant que ces aides pourraient être étendues à l'installation des structures associant filets et bâches antipluie (financement de 60 % du coût total).

Ces aides permettraient des performances économiques acceptables uniquement en 2018, à condition que la variété soit productive. Dans le cadre de ces aides potentielles, la moyenne des deux années 2017 et 2018 et des cinq variétés indique une marge brute avec amortissement de -1400/ha euros pour le système Abric'Haut 3.

Conclusion et perspectives

Un système peu contraignant

Le système Abric'Haut 1 permet une baisse de 25 % de l'IFT chimique tout en augmentant les rendements et la performance économique par rapport au système de référence. Le greffage haut et le nombre plus élevé d'arbres à l'hectare devraient permettre de limiter l'impact des maladies de dépérissement dans les années futures. Ce système ne demande pas trop d'investissements supplémentaires à la plantation, ni une rupture technique importante. Par contre, si l'augmentation des épisodes de grêle observée ces dernières années se confirme, la conduite en gobelet des arbres n'est pas trop adaptée à l'installation de filets paragrêle.

Critère économique

Le système Abric'Haut 2 permet une baisse des IFT comparable au système Abric'Haut 1 mais les rendements sont plus faibles et la performance économique n'est pas suffisante. La conduite des arbres en palmette de ce système entraîne un investissement supplémentaire lié au palissage et aux temps de travaux.

Ce système ne fait sens économiquement que si la forme linéaire induite par le palissage est exploitée pour réduire les coûts d'entretien du verger (mécanisation de l'éclaircissage et de la taille), permettre l'introduction de filets paragrêle ainsi que donner lieu à l'adaptation de la pulvérisation (par exemple pulvérisateurs avec panneaux récupérateurs).

Label ou circuit court

Le système Abric'Haut 3 permet une baisse importante des IFT, des rendements importants et une sécurisation de la récolte. Mais c'est un système coûteux en investissement et en temps d'entretien. La performance économique de ce système passe obligatoirement par le choix de variétés produisant régulièrement chaque année et par la possibilité d'avoir un prix de vente supérieur aux prix de vente des abricots conventionnels en circuit long (voir référentiel de prix du RNM). Cette possibilité de prix supérieurs pourrait être effective via la possibilité de vendre les fruits sous un label (zéro résidu de pesticides, agriculture biologique) ou en circuit court. Le dispositif Abric'Haut sera conservé sur l'UERI Gotheron encore au moins trois à quatre années. De nouvelles innovations ou l'introduction de plus de mécanisation pourront alors être expérimentées.

(1) CAP-ReD : Cerisiers, abricotiers, pruniers - réduction des intrants et durablilité, projet Écophyto Dephy Expé 2013-2018. Des dispositifs expérimentaux ont été implantés sur neuf sites (quatre concernent l'abricotier, quatre le prunier et un le cerisier).(2) www.rnm.franceagrimer.fr/prix?FRUITSREMERCIEMENTS Nous remercions Pédro Asencio, Marie Gaslain et Frédéric Oboussier pour leur appui technique de l'entretien du dispositif expérimental, Guy Clauzel pour ses conseils sur les choix variétaux et Christophe Mouiren pour ses conseils sur les modes de conduite des arbres.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - Les vergers d'abricotier étant en butte à des bioagresseurs, dont des maladies de dépérissement, est-il possible, dans le cadre d'Écophyto, de trouver des systèmes de production maintenant la productivité et la longévité des vergers en baissant l'IFT ?

TRAVAIL - Un essai système a été implanté en 2015 à l'Inra de Gotheron (Drôme). Il compare, pour cinq variétés, un système de référence (greffage à 60 cm, gobelet) avec trois systèmes « Abric'Haut » à greffage haut (120 cm) pour prévenir la bactériose, compensant la baisse de la productivité de chaque arbre en doublant leur densité.

RÉSULTATS - Comparés au système de référence, les trois systèmes Abric'Haut offrent des résultats techniques égaux, voire meilleurs (état sanitaire des arbres, rendement/ha...), pour des IFT réduits de 25 à 54 %. Les investissements nécessaires (achat des plants, palissage pour deux systèmes palmette, protection antipluie et grêle pour un de ceux-ci) plombant leur rentabilité, une aide est souhaitée pour les encourager.

MOTS-CLÉS - Vergers d'abricotier, essai système, greffage haut, gobelet, palmette, Écophyto, IFT (indice de fréquence de traitements), rendement, marge brute.

POUR EN SAVOIR PLUS

CONTACT : laurent.brun@inra.fr

LIEN UTILE : https://www6.paca.inra.fr/ueri

BIBLIOGRAPHIE : la bibliographie de cet article est disponible auprès des auteurs (contact ci-dessus).

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