L'année 2020 a été déclarée année internationale de la santé des végétaux par la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture). Cette mesure a vocation à sensibiliser le grand public, mais aussi les producteurs et les décideurs politiques. Le colloque « Santé du végétal, une seule santé et un seul monde » (One Health) était organisé par l'Académie d'agriculture de France (AAF) en partenariat avec le consortium de recherche DIM (domaine d'intérêt majeur) One Health Île-de-France et l'Académie nationale de pharmacie le 28 janvier à Paris à cette occasion.
La répartition mondiale des agents pathogènes est sans précédent. Or la capacité de prévention, de détection et de réponse des pays n'est pas uniforme. Un défi pour la santé des végétaux consiste donc à adopter des stratégies communes.
Les biotechnologies, outils puissants mais controversés
Les biotechnologies font partie des outils incontournables pour préserver et améliorer la santé humaine, la santé végétale et la santé animale, c'est ce qu'a souligné Catherine Regnault-Roger, de l'AAF et de l'Académie de pharmacie. Parmi les techniques les plus récentes, on peut citer CRISPR/Cas 9, utilisée en médecine, agronomie, environnement, etc. En santé du végétal, ces techniques peuvent permettre l'obtention de variétés qui améliorent la qualité sanitaire des récoltes, comme par exemple le maïs MON 810 qui diminue le risque de mycotoxines. Mais les techniques de modification génétique souffrent d'une mauvaise image chez une large part du grand public.
Pas de solution unique pour les problèmes phytosanitaires
« La chimie, la génétique, le biocontrôle, l'arrachage, le feu... aucune méthode à elle seule ne suffit à résoudre durablement un problème phytosanitaire », rappelait André Fougeroux, membre de l'AAF. Pour lutter au mieux, il faut développer des méthodes de protection intégrées et combiner les produits de biocontrôle, les outils biotechnologiques, les pratiques culturales, les solutions mécaniques (robotisation), les outils d'aide à la décision, etc. Pour cet ingénieur agricole spécialiste de la protection des cultures, les défis de demain sont : la gestion des résistances, les usages orphelins, les nouveaux bioagresseurs, les interventions ciblées (assistance électronique, robotique, GPS, modélisation, drones, etc.), le développement de résistances variétales et ce qu'il appelle le passage des « cides » aux « fuges » (utilisation de phéromones, allomones, kairomones, interactions plantes/insectes, connaissances des interactions au sein d'un microbiome...).
Développer l'approche intégrée est donc essentiel, mais aussi multidisciplinaire : les santés humaine, animale et végétale sont interdépendantes.
Liens entre santé humaine et santé végétale
Les liens entre santé animale et humaine sont maintenant établis, a indiqué Pascal Boireau, directeur du laboratoire de santé animale de l'Anses, avec la transmission des maladies entre animaux et humains qu'illustre le coronavirus Covid 2019, dernier exemple en date, mais aussi l'utilisation des antibiotiques dans l'élevage par exemple, qui a des répercussions sur l'antibiorésistance.
La santé des végétaux exerce aussi une influence sur la santé humaine, notamment à travers l'alimentation et les allergies. Bernard Ambolet, de l'AAF, relève que des plantes toxiques colonisent certaines cultures, comme le datura dans les champs de tournesol. Parmi les exemples qu'il donne : les mycotoxines, produites par certaines moisissures (ou champignons) sur les plantes au champ ou en cours de stockage ; le pollen de l'ambroisie, qui provoque de fortes réactions allergiques ; ou encore les soies des chenilles processionnaires du pin, qui sont également urticantes et peuvent provoquer des allergies.
Le colloque, qui a rassemblé 260 experts de tous horizons, s'est conclu avec deux tables rondes démontrant la nécessité de susciter un dialogue sociétal informé et ouvert. Il a montré combien les approches en santés humaine, animale et végétale sont à la fois similaires et complémentaires.