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Gestion des maladies

Stimulation des défenses du fraisier par les flashs d'UV-C

JAWAD AARROUF*, HUGO GONCALVES**, LOÏC LEDERMANN**, YVES MATTON**, YVES LIZZI*, SANDERS JUNGLEE***, SÉVERINE SUCHAIL**** ET LAURENT URBAN* *UMR QualiSud Avignon Université. **UV Boosting - Boulogne-Billancourt. ***Promo-Vert groupe Acceres - Serres-Cast - Phytoma - n°732 - mars 2020 - page 48

Une méthode physique innovante, utilisant les rayonnements ultraviolets, ouvre des perspectives dans la protection vis-à-vis des maladies fongiques.
Dispositif UV Boosting, générateur des flashs d'UV-C Photo : UV Boosting

Dispositif UV Boosting, générateur des flashs d'UV-C Photo : UV Boosting

Fig. 1 : Effets des différentes doses (D1, D2 et D3 J.m-2) de flashs d'UV-C sur la sensibilité du fraisier à l'oïdium Les traitements étaient espacés de 7 (J7) ou 14 jours (J14). L'expérimentation a été réalisée sous serre en conditions contrôlées à Avignon Université. Les notations portaient sur le pourcentage de feuilles atteintes (fréquence). Les différentes lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées avec les flashs UV-C.

Fig. 1 : Effets des différentes doses (D1, D2 et D3 J.m-2) de flashs d'UV-C sur la sensibilité du fraisier à l'oïdium Les traitements étaient espacés de 7 (J7) ou 14 jours (J14). L'expérimentation a été réalisée sous serre en conditions contrôlées à Avignon Université. Les notations portaient sur le pourcentage de feuilles atteintes (fréquence). Les différentes lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées avec les flashs UV-C.

Fig. 2 : Présence de l'oïdium (flèche) sur les feuilles du fraisier témoin non traitées contrairement aux feuilles traitées aux flashs d'UV-C

Fig. 2 : Présence de l'oïdium (flèche) sur les feuilles du fraisier témoin non traitées contrairement aux feuilles traitées aux flashs d'UV-C

Fig. 3 : Effets de traitements de flashs d'UV-C et d'un produit conventionnel (Luna Sensation à la dose de 0,8l.ha-1) sur la sensibilité du fraisier à l'oïdiumL'expérimentation a été réalisée en conditions de production dans une exploitation du Vaucluse (2018). Les notations portaient sur la sévérité et sur le pourcentage de feuilles atteintes (fréquence). Les différentes lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées.

Fig. 3 : Effets de traitements de flashs d'UV-C et d'un produit conventionnel (Luna Sensation à la dose de 0,8l.ha-1) sur la sensibilité du fraisier à l'oïdiumL'expérimentation a été réalisée en conditions de production dans une exploitation du Vaucluse (2018). Les notations portaient sur la sévérité et sur le pourcentage de feuilles atteintes (fréquence). Les différentes lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées.

Fig. 4 : Effets de différents traitements seuls ou combinés sur la sensibilité du fraisier à l'oïdiumL'expérimentation a été réalisée en conditions de production sous serre par Promo-Vert (2019). Les notations portaient sur la sévérité et sur le pourcentage de feuilles atteintes (fréquence). Les lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées.

Fig. 4 : Effets de différents traitements seuls ou combinés sur la sensibilité du fraisier à l'oïdiumL'expérimentation a été réalisée en conditions de production sous serre par Promo-Vert (2019). Les notations portaient sur la sévérité et sur le pourcentage de feuilles atteintes (fréquence). Les lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées.

Fig. 5 : Effets de différents traitements seuls ou combinés sur la sensibilité des fraises à Botrytis cinereaL'expérimentation a été réalisée sous serre par Promo-Vert. Les notations portaient sur le pourcentage des fruits atteints par B. cinerea (fréquence) le 30 avril 2019 pour la notation 1 et le 24 mai 2019 pour la notation 2. Les différentes lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les fraises issues des plantes traitées.

Fig. 5 : Effets de différents traitements seuls ou combinés sur la sensibilité des fraises à Botrytis cinereaL'expérimentation a été réalisée sous serre par Promo-Vert. Les notations portaient sur le pourcentage des fruits atteints par B. cinerea (fréquence) le 30 avril 2019 pour la notation 1 et le 24 mai 2019 pour la notation 2. Les différentes lettres indiquent les différences significatives entre le témoin non traité (TNT) et les fraises issues des plantes traitées.

Fig. 6 : Effets de traitements de flashs d'UV-C et d'un produit conventionnel (Luna Sensation) sur le goût, la texture et les sucres des fraisesL'expérimentation a été réalisée en conditions de production dans une exploitation du Vaucluse. Les lettres n'indiquent aucune différence significative entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées.

Fig. 6 : Effets de traitements de flashs d'UV-C et d'un produit conventionnel (Luna Sensation) sur le goût, la texture et les sucres des fraisesL'expérimentation a été réalisée en conditions de production dans une exploitation du Vaucluse. Les lettres n'indiquent aucune différence significative entre le témoin non traité (TNT) et les plantes traitées.

La lumière est un régulateur important des interactions plante/pathogène via des photorécepteurs et des voies de signalisation comme les hormones ou les espèces réactives de l'oxygène(1) (Demkura et Ballaré, 2012 ; Urban et al., 2016). En plus de la lumière visible, il existe d'autres rayonnements électromagnétiques comme la lumière ultraviolette (UV). Les rayonnements UV se divisent en trois groupes : les UV-A (315-400 nm) qui représentent 95 % des UV solaires atteignant la surface de la terre, les UV-B (280-315 nm) qui représentent 5 % des UV solaires atteignant la surface de la terre, et les UV-C (100-280 nm) qui sont absorbés en totalité par la couche d'ozone. En plus de leur effet désinfectant en post-récolte, il est actuellement admis que les rayonnements UV-B et UV-C peuvent stimuler les défenses des plantes en pré- et post-récolte.

Une autre façon de protéger : stimuler les défenses

Stimulations chimique, biologique et physique

La stimulation des défenses des plantes suscite un intérêt croissant parmi les professionnels. Le développement des SDP chimiques, comme la laminarine, ou biologiques, comme Bacillus subtilis, est toutefois freiné par l'efficacité aléatoire de certains, notamment en raison de problèmes de formulation et de stabilité au champ. Les SDP physiques n'ont pas ces inconvénients et présentent l'avantage supplémentaire d'être aisément combinables aux autres formes de traitements existantes, chimiques ou biologiques. En outre, ils ne nécessitent pas d'homologation dans le cadre du règlement (CE) n° 1107/2009.

Différents facteurs physiques sont susceptibles de stimuler les défenses naturelles des plantes : le manque d'eau, les températures excessives, les rayonnements UV... Ces derniers sont de plus en plus étudiés dans le cadre de la protection des végétaux. Les nombreuses études réalisées démontrent clairement que les rayonnements UV stimulent les défenses des plantes avec des doses relativement faibles et non délétères pour les plantes (tableau p. 49). La résistance a été attribuée à la production d'espèces réactives de l'oxygène (ERO) et l'accumulation de composés phénoliques qui jouent un rôle dans les défenses contre les pathogènes, mais aussi à la forte expression de gènes liés à la défense, tels que la chitinase ou la <03B2>-1,3-glucanase (Urban et al., 2016 ; Urban et al., 2018). Cependant, pour être efficaces, les durées d'exposition requises sont longues, typiquement de plusieurs minutes ou de plusieurs heures. Or les expositions prolongées sont difficiles à être imposées dans la pratique.

Les flashs d'UV-C, pour des temps courts d'exposition

Les outils de traitement mis au point par l'entreprise UV Boosting sont fondés sur un procédé à base de flashs d'UV-C de moins de 2 secondes, soumis à un dépôt de brevet par des chercheurs d'Avignon Université (Urban et al., 2015). Dans la pratique, les temps d'exposition sont de l'ordre d'une seconde. Les flashs d'UV-C induisent une forte diminution de la sensibilité aux pathogènes cryptogamiques. L'invention met en oeuvre des facteurs purement physiques et naturels(2). Le procédé ne laisse pas de résidus de substance active et est combinable avec d'autres approches (SDP chimique, prophylaxie, biocontrôle...).

Expérimentations sur fraisier

Limiter les pertes dues à l'oïdium et la pourriture grise

Le fraisier (Fragaria x ananassa) est une importante culture maraîchère, avec une production mondiale de 8,1 millions de tonnes par an dans plus de 70 pays (FAO, 2017). Les fruits très fragiles comme la fraise ne se consomment que quelques jours après la récolte. Les pertes sont globalement estimées entre 15 et 20 % de la production avec une durée de stockage de deux à quatre jours (Jeannequin et al., 2015). L'origine de ces pertes est souvent liée à des maladies cryptogamiques telles que l'oïdium et la pourriture grise, causés respectivement par Podosphaera aphanis et Botrytis cinerea. L'application de fongicides est la stratégie de lutte la plus courante et la plus efficace. Outre un impact négatif sur l'environnement et la santé humaine, leur utilisation excessive peut entraîner le développement d'une résistance des agents pathogènes (Fillinger et Walker, 2015).

Des essais ont été menés par les chercheurs d'Avignon Université (2018) et par la société UV Boosting (2018 et 2019) afin de tester les rayonnements UV-C sous forme de flashs seuls ou combinés à un SDP chimique et d'évaluer leur capacité à diminuer la sensibilité des plantes à ces deux pathogènes, tout en préservant la qualité et la conservation des fruits.

Essais sur oïdium dans la serre de l'université d'Avignon

Les premiers tests ont été réalisés en 2018 dans la serre de l'université d'Avignon en conditions contrôlées pour définir la dose de stimulation des défenses du fraisier la plus efficace. Plusieurs doses d'UV-C (D1, D2 et D3 J.m-2) sous forme d'un flash unique par passage ont été appliquées sur des plants de fraisiers, tous les 7 ou 14 jours, avant l'inoculation d'oïdium. Après l'apparition des symptômes, quatre notations ont été effectuées. Les résultats (Figure 1) montrent une diminution de la sensibilité à l'oïdium, quelle que soit la dose administrée, avec une efficacité maximale pour les traitements à D3 J.m-2 répétés tous les sept jours et sans dégâts visibles sur les feuilles (Figure 2).

Essai sur oïdium chez un producteur

Une autre expérimentation a été réalisée entre le 24 mai 2018 et le 14 juin 2018 par UV Boosting chez un producteur du Vaucluse, pour analyser l'efficacité des flashs d'UV-C en conditions de production sur la stimulation des défenses du fraisier contre l'oïdium par comparaison à un seul traitement conventionnel chimique de référence (Luna Sensation à la dose de 0,8 l.ha-1). Les résultats (Figure 3) montrent que les traitements par les flashs d'UV-C sont aussi efficaces que l'unique traitement conventionnel.

Essai sur oïdium et pourriture grise chez Promo-Vert

Cet essai a été réalisé à la demande d'UV Boosting et géré totalement par la société de services Promo-Vert, agréée BPE, entre le 20 février 2019 et le 17 mai 2019. L'objectif était de valider l'efficacité SDP des flashs d'UV-C à la dose efficace, répétée tous les sept jours en conditions de production, et en combinaison avec un autre SDP chimique (Vacciplant Fruits et légumes à la dose de 2 l.ha-1). L'efficacité des traitements a été évaluée par des notations de pourcentage de feuillage atteint (fréquence) et de sévérité sur les feuilles du fraisier. Les résultats (Figure 4) montrent une forte diminution de la sensibilité à l'oïdium chez les plantes traitées aux flashs d'UV-C. Lorsque les traitements par flashs d'UV-C sont combinés au SDP chimique, les plants de fraisier apparaissent quasiment protégés contre l'oïdium.

Observations sur la qualité des fruits

Les essais réalisés chez Promo-Vert et chez le producteur ont été menés jusqu'à la production afin d'analyser l'impact des flashs d'UV-C sur la qualité des fruits. Les fruits issus des plantes traitées avec des flashs d'UV-C présentent moins de contamination à Botrytis cinerea (Figure 5). Cette protection est presque totale lorsque les flashs d'UV-C sont combinés à Vacciplant Fruits et légumes. Les fraises issues de l'expérimentation chez le producteur ont été analysées et les résultats (Figure 6) montrent que les traitements par les flashs d'UV-C n'ont pas modifié la texture, la qualité gustative ou le taux de sucres des fraises traitées par rapport au témoin.

Perspectives

Les résultats obtenus sont encourageants et justifient la mise sur le marché rapide d'une machine professionnelle pour la culture du fraisier, en parallèle du développement d'un outil destiné à la protection de la vigne. Par ailleurs, des travaux scientifiques ambitieux ont été engagés par l'université d'Avignon, en relation avec l'ensemble de ses partenaires scientifiques, avec l'objectif d'accroître la connaissance des mécanismes d'action des flashs d'UV-C.

(1) Les espèces réactives de l'oxygène (ERO) sont des radicaux oxygénés libres. Ils présentent une grande réactivité en raison de la présence d'électrons de valence non appariés.(2) Au cours de l'évolution, les plantes ont été soumises aux rayonnements UV-C, aujourd'hui absents du rayonnement solaire en raison de l'effet de filtrage de la couche d'ozone actuelle.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - Les restrictions réglementaires vis-à-vis des produits fongicides conventionnels incitent à trouver de nouvelles solutions de protection, comme celles visant à stimuler les défenses des plantes (SDP) ou des organes végétaux. Les méthodes physiques de stimulation, malgré leurs nombreux avantages théoriques, semblent en retrait par rapport aux SDP biologiques et chimiques. L'entreprise UV Boosting a mis au point un procédé innovant à base de flashs d'UV-C qui permet de réduire significativement l'utilisation de produits phytopharmaceutiques en agriculture. Ce procédé est fondé sur un brevet déposé par des chercheurs de l'université d'Avignon (Urban et al., 2015).

ÉTUDES - Les résultats présentés dans cet article sont issus d'essais menés à Avignon Université en 2018, chez un producteur de fraise situé dans le Vaucluse en 2018 et chez Promo-Vert (groupe Acceres) en 2019. Les flashs d'UV-C stimulent les défenses du fraisier et de ses fruits, respectivement contre Podosphaera aphanis et Botrytis cinerea. La protection est presque totale en combinant les traitements à base de flashs d'UV-C avec d'autres produits SDP, tels que ceux à base de laminarine.

MOTS-CLÉS - Stimulation des défenses des plantes (SDP), flashs d'UV-C, fraisier, oïdium, Botrytis cinerea.

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