Retour

imprimer l'article Imprimer

Actus

RÉGLEMENTATION ÉCHANGES MONDIAUX ET SANTÉ DES PLANTES : STRATÉGIE PRÉVENTIVE

Phytoma - n°733 - avril 2020 - page 4

Les organismes nuisibles n'ont pas de frontières. En santé végétale, comme en santé humaine, la mondialisation implique de coordonner les efforts, en commençant par la prévention.
Anoplophora chinensis est un organisme de quarantaine prioritaire. Photo : M. Maspero (Italie - 2009)

Anoplophora chinensis est un organisme de quarantaine prioritaire. Photo : M. Maspero (Italie - 2009)

æLe14 décembre dernier est entré en application un nouveau règlement (UE 2016/2031) relatif à la santé des végétaux(1)) avec comme objectif de limiter la propagation d'organismes nuisibles au sein de l'Union européenne, et de mieux gérer les risques existants et émergents. Pour ce faire, les bioagresseurs sont classés par ordre de priorité, les opérateurs professionnels sont responsabilisés pour la mise en circulation de végétaux sains (passeport et certificat phytosanitaires, traçabilité, obligation d'information en cas de suspicion, mesures d'urgence), et les règles de surveillance et de lutte sont uniformisées au sein de l'UE.

æLe règlement distingue deux catégories principales d'organismes nuisibles : les organismes de quarantaine (OQ - ex. : Xylella fastidiosa, Bursaphelenchus xylophilus), non présents sur le territoire ou peu disséminés et dont la propagation aurait une grave incidence ; et les organismes réglementés non de quarantaine (ORNQ, plus de 250 listés - ex. : virus de la sharka, charançon rouge du palmier), présents sur le territoire et transmis principalement par des végétaux spécifiques destinés à la plantation. Parmi les quelque 175 OQ listés, vingt OQ prioritaires font l'objet d'une surveillance annuelle, d'exercices de simulation ou de plans d'action particuliers. Le règlement n° 2019/2072 du 28 novembre 2019 inventorie ces différentes catégories d'organismes nuisibles(2).

En France, près de 200 organismes (OQ, organismes faisant l'objet de mesures d'urgence UE ou de mesures nationales) feront l'objet de mesures de surveillance en 2020 contre une trentaine en 2019 (examen visuel, prélèvement « asymptomatique », piégeage...). Afin d'améliorer cette surveillance, une plateforme d'épidémiosurveillance a été mise en place en 2018 ; son site internet(3) a été lancé lors du Salon de l'agriculture 2020.

æL'UE instaure une stratégie préventive à l'importation, basée sur le niveau de risque que présentent les différentes marchandises introduites sur le territoire de l'UE. Le passeport phytosanitaire (PP) est obligatoire pour la circulation intra-UE de tous les végétaux destinés à la plantation, de certaines semences (par exemple, celles soumises à certification) et de produits particuliers (ex. : écorces vis-à-vis des nématodes du pin). Il n'est pas requis pour le transfert à des utilisateurs finaux non professionnels (ex. : jardiniers amateurs), sauf en cas de e-commerce.

Le certificat phytosanitaire (CP) devient obligatoire pour l'importation en provenance de pays tiers (hors UE) de toutes les plantes ou parties de plantes vivantes. Seuls certains fruits (ananas, noix de coco, banane, durian et datte) peuvent être importés dans l'UE sans CP. Certains végétaux, produits végétaux et autres objets, provenant de pays tiers déterminés, sont interdits d'importation s'ils représentent un risque élevé d'introduction d'OQ sans possibilité d'atténuer ce risque. D'autres « végétaux à haut risque » nécessitent une analyse de risque phytosanitaire préalable (règlement UE 2018/2019). Les territoires des Drom sont considérés comme des espaces phytosanitaires tiers dans le cadre de l'application du règlement 2016/2031.

æL'harmonisation, à l'échelle internationale, des mesures de protection des plantes repose notamment sur les normes internationales pour les mesures phytosanitaires (NIMP)(4), élaborées par la Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV) : par exemple, la NIMP 6 « Surveillance » ; la NIMP 8 « Détermination de la situation d'un organisme nuisible dans une zone ». Le prochain cadre stratégique 2020-2030 de la CIPV(5) prévoit huit axes de développement pour protéger les cultures dans un contexte de mondialisation :

1. installer un système mondial harmonisé d'échange électronique basé sur les certificats phytosanitaires électroniques (ePhyto) ;

2. élaborer une NIMP spécifique pour les produits agricoles de base ;

3. coordonner à l'échelle internationale la lutte contre la propagation des organismes nuisibles liée au commerce électronique ;

4. élaborer des orientations sur le recours à des entités tierces pour des actions phytosanitaires (inspections, traitements...), tout en garantissant l'application correcte des NIMP ;

5. renforcer les systèmes d'alerte et d'intervention en cas d'épidémie ;

6. lancer un programme de travail pour évaluer et gérer les impacts du changement climatique sur la santé des plantes, et sur le commerce international de végétaux et produits végétaux ;

7. coordonner la recherche phytosanitaire mondiale ;

8. établir un réseau de laboratoires et de protocoles de diagnostic pour aider les pays à identifier les ravageurs de manière plus fiable et en temps opportun.

V. Vidril, R. Mazzucchelli (CIPV)

(1) Voir Phytoma n° 723.

(2) Le virus ToBRFV (voir article p. 6-10) fait l'objet de mesures d'urgence européennes (décision (UE) 2019/1615 du 26 septembre 2019), mais n'a pas encore intégré ces listes.

(3) https://plateforme-esv.fr/

(4) Les NIMP sont téléchargeables sur www.ippc.int/fr/publications/346/files/

(5) Ce programme doit être approuvé lors de quinzième session plénière de la Commission des mesures phytosanitaires (CMP-15) de la CIPV, qui devait se tenir fin mars au siège de la FAO à Rome et a été reportée du 29 juin au 3 juillet compte tenu de l'épidémie de covid-19. Dans le cadre de cette CMP-15 sera proposée la mise en place d'une Journée internationale de la santé des plantes.

POUR EN SAVOIR PLUS

Sur le nouveau règlement santé du végétal :

https://tinyurl.com/qt8ezvw

https://tinyurl.com/vrzzhpm

GLOSSAIRE

• AMM = autorisation de mise sur le marché

• De biocontrôle L. 253-5 = figurant sur la liste des produits de biocontrôle « établie au titre des articles L. 253-5 et L. 253-7, IV du code rural (...) »

• JORF = Journal officiel de la République française

• JOUE = Journal officiel de l'Union européenne

• MAA = ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation

• Phyto = phytopharmaceutique (qualifie un produit, une substance, un pesticide, un marché...)

• UAB = utilisable en agriculture biologique

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :