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DOSSIER - Bonnes pratiques Gérer les résistances

Les « mots » de la résistance

RÉSEAU DE RÉFLEXION ET DE RECHERCHES SUR LES RÉSISTANCES AUX PESTICIDES (R4P) : BENOÎT BARRÈS(1), MARIE-FRANCE CORIO-COSTET(2), DANIÈLE DEBIEU(3), CHRISTOPHE DÉLYE(4), SABINE FILLINGER(3), BERTRAND GAUFFRE(5), MOURAD HANNACHI(6), JACQUES GROSMAN(7), GAËLL - Phytoma - n°733 - avril 2020 - page 12

Avant d'entamer le dossier, voici un petit glossaire à l'usage des gestionnaires de la résistance aux produits phytopharmaceutiques.
Fig. 1 : Relation entre résistance biologique et résistance en pratique      Les seuils de facteurs de résistance sont donnés à titre indicatif et peuvent varier selon les bioagresseurs.

Fig. 1 : Relation entre résistance biologique et résistance en pratique Les seuils de facteurs de résistance sont donnés à titre indicatif et peuvent varier selon les bioagresseurs.

Fig. 2 : Principaux mécanismes de résistance aux PPP affectant le fonctionnement cellulaire chez les bioagresseurs des cultures       En rouge : mécanismes de résistance liée à la cible (RLC). En bleu : mécanismes de résistance non liés à la cible (RNLC). Pour plus de détails, voir R4P (2016).

Fig. 2 : Principaux mécanismes de résistance aux PPP affectant le fonctionnement cellulaire chez les bioagresseurs des cultures En rouge : mécanismes de résistance liée à la cible (RLC). En bleu : mécanismes de résistance non liés à la cible (RNLC). Pour plus de détails, voir R4P (2016).

 Chez les champignons phytopathogènes, la résistance aux antifongiques est caractérisée au laboratoire et l'impact sur l'efficacité (résistance en pratique) est estimée par des essais au champ. Photo et vignette haut de page : A.-S. Walker

Chez les champignons phytopathogènes, la résistance aux antifongiques est caractérisée au laboratoire et l'impact sur l'efficacité (résistance en pratique) est estimée par des essais au champ. Photo et vignette haut de page : A.-S. Walker

Fig. 3 : Bases génétiques de la résistance croisée et de la résistance multiple, et phénotypes attendus

Fig. 3 : Bases génétiques de la résistance croisée et de la résistance multiple, et phénotypes attendus

La résistance aux PPP est un phénomène souvent complexe, faisant appel à des notions de biochimie, génétique, sciences de l'évolution. De ce fait, pour apprécier au mieux les articles de ce dossier, il apparaît utile d'avoir sous la main un mémento donnant une définition scientifique des termes les plus courants en gras dans le dossier.

Les termes en gras dans les définitions sont eux-mêmes explicités dans le glossaire.

• Allèle Variant d'un gène. Diffère du gène d'origine par une ou des mutations.

• Bioagresseur Organisme vivant nuisible à la production végétale, pouvant être un animal (arthropode, rongeur...), une plante (adventice, synonyme : mauvaise herbe) ou un micro-organisme phytopathogène (bactérie, champignon, virus...).

• Cible (d'un PPP) Protéine(s) vitale(s) pour la physiologie d'un bioagresseur (enzyme, protéine de structure de la cellule...). Un PPP agit en perturbant suffisamment la fonction de sa ou ses cibles pour tuer ou inhiber le développement du bioagresseur. Ne pas confondre avec l'organisme-cible d'un PPP, qui correspond à l'espèce de bioagresseur ciblée par le traitement.

• Coût de la résistance = perte de valeur sélective Modification de la valeur sélective résultant de l'acquisition d'une résistance par un génotype et pouvant être déterminée par la modification de divers traits de vie (par exemple, nombre de descendants viables produits, vitesse de croissance...). Attention, toutes les résistances n'entraînent pas un coût. Certaines entraînent même un gain. Dans ce cas, les génotypes résistants produisent plus de descendants viables, croissent plus vite... que les génotypes sensibles.

• Dérive génétique Mécanisme aléatoire par lequel on observe une modification de la fréquence des allèles au sein d'une population. Cette modification est d'autant plus rapide et importante que la population est de petite taille.

• Dose efficace Dose tuant 100 % des bioagresseurs ciblés. Peut être inférieure à la dose maximale autorisée, en fonction de la technicité de l'applicateur.

• Facteur de résistance (FR) = niveau de résistance (NR) = ratio de résistance (RR) (Figure 1) Rapport des concentrations de PPP nécessaires pour obtenir la même efficacité sur des génotypes résistants que sur des génotypes sensibles de référence d'une même espèce de bioagresseur. Attention, le facteur de résistance est souvent confondu à tort avec la fréquence de résistance.

• Fréquence (de résistance/d'individus résistants) Proportion de génotypes résistants dans une population de bioagresseurs.

• Fongicide PPP naturel ou de synthèse, poison sélectif contre les champignons.

• Génome Ensemble des gènes d'un individu.

• Génotype Individu ou ensemble d'individus possédant le même génome. Les génotypes résistants diffèrent des génotypes sensibles de la même espèce par une ou plusieurs modifications de leur génome qui induisent le phénotype de résistance.

• Herbicide PPP naturel ou de synthèse, poison sélectif contre les adventices.

• Insecticide PPP naturel ou de synthèse, poison sélectif contre les insectes.

• Mécanisme de résistance Tout mécanisme permettant à un génotype de survivre à une concentration de PPP qui tue ou inhibe la croissance ou le développement des génotypes sensibles de la même espèce (Figure 2).

• Mode d'action Se réfère à la cible biochimique d'un PPP (généralement un enzyme ou une protéine vitale du métabolisme). Les PPP sont classés en fonction de la cible sur laquelle ils agissent, voire de la façon dont ils agissent sur cette cible(1).

• Multisite Se dit d'un PPP (essentiellement des fongicides) ayant plusieurs cibles.

• Mutation Changement dans la séquence de l'ADN du génome. Les résistances sont causées par une ou des mutations modifiant le niveau d'expression d'un gène et/ou la structure de la protéine pour laquelle il code.

• Pression de sélection Contrainte environnementale influençant la capacité de survie des génotypes, c'est-à-dire leur valeur sélective. Une pression de sélection favorise les génotypes ayant la meilleure valeur sélective quand elle s'exerce. Ainsi, une pression de sélection exercée par un ou des PPP favorise les génotypes les moins sensibles (ou les plus résistants).

• Produit de protection des plantes (PPP) Composé (synthétique ou naturel) qui tue les bioagresseurs, ou inhibe leur croissance ou leur développement. Synonymes : pesticides, produits phytosanitaires, produits phytopharmaceutiques. Les principales catégories de PPP sont les fongicides, les herbicides, les acaricides et les insecticides.

• Population Ensemble de génotypes d'une espèce de bioagresseurs échangeant des gènes entre eux. Par commodité, est aussi utilisé pour se référer à l'ensemble des génotypes d'une espèce de bioagresseur présents sur une parcelle.

• Résistance 1) Capacité intrinsèque et héritable de certains génotypes de bioagresseurs leur permettant de survivre à des concentrations de PPP qui tuent ou inhibent le développement de génotypes sensibles de la même espèce. Cette capacité est déterminée par une ou plusieurs mutations naturelles présentes dans le génome des génotypes résistants.

2) Résultat de l'évolution adaptative de populations de bioagresseurs ayant permis la sélection, et donc l'augmentation en fréquence, des génotypes les moins sensibles à la suite de l'exercice d'une pression de sélection par les PPP.

• Résistance croisée Résistance à plusieurs PPP déterminée par le même allèle (ou par extension le même mécanisme). La résistance croisée peut être positive (résistance à plusieurs PPP) ou dans certains cas négative (résistance à certains PPP entraînant une hypersensibilité à d'autres) (Figure 3).

• Résistance en pratique = résistance au champ Baisse d'efficacité au champ d'un PPP par rapport à l'efficacité du même PPP mesurée avant sélection sur une population de référence.

La résistance en pratique est confirmée :

- lorsque les autres hypothèses pouvant expliquer une baisse d'efficacité (par exemple : mauvaise dose, mauvaise application, mauvais positionnement, absence d'activité intrinsèque du PPP considéré sur le bioagresseur ciblé...) ont été réfutées ;

- et lorsque la présence en fréquences significatives de génotypes résistants a pu être démontrée dans la population. La résistance en pratique n'est pas systématique à la découverte d'individus résistants dans les populations.

• Résistance liée à la cible (RLC) Résistance causée par une ou des mutations affectant le gène de la protéine cible du PPP (modification de la protéine cible, amplification ou surexpression de ce gène).

• Résistance multidrogue ou MDR Type de mécanisme de résistance non liée à la cible induisant la résistance à plusieurs PPP de modes d'action différents, et déterminée par un efflux (mécanisme de transport membranaire hors de la cellule) accru des PPP. La MDR est souvent déterminée par la surexpression d'un ou plusieurs transporteurs membranaires.

• Résistance multiple Résistance à plusieurs PPP déterminée par différents allèles (ou par extension par différents mécanismes) (Figure 3).

• Résistance non liée à la cible (RNLC) Résistance causée par des mécanismes autres que la résistance liée à la cible (par exemple, métabolisme exacerbé, efflux de PPP ou résistance multidrogue (MDR), séquestration ou pénétration réduite).

• Spectre de résistance (ou profil de résistance) d'un génotype résistant Ensemble des PPP auxquels ce génotype est résistant.

• Unisite PPP ayant une seule cible biochimique (la grande majorité des PPP).

• Valeur sélective (ou « fitness ») Capacité d'un génotype à survivre en compétition avec d'autres génotypes d'une même population et à produire des descendants viables.

(1) https://www.r4p-inra.fr/fr/classification-des-ppp/

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CONTACTS : Contact_r4p@inra.fr

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