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Sur le métier

Jérôme Jullien, au service de la surveillance des cultures

PAR VALÉRIE VIDRIL - Phytoma - n°734 - mai 2020 - page 48

Au sein du réseau national d'expertise phytosanitaire de la Direction générale de l'alimentation du ministère chargé de l'agriculture, Jérôme Jullien occupe depuis dix ans la fonction d'expert national en Surveillance biologique du territoire. Pour ce passionné de santé des végétaux, fort d'un parcours professionnel dédié à la protection des plantes depuis plus de trente ans, épidémiosurveillance, diagnostic, suivi des organismes réglementés et biovigilance sont les maîtres-mots de son activité.

À 53 ans, Jérôme Jullien a eu un « parcours atypique ». Aujourd'hui ingénieur divisionnaire, auteur de treize ouvrages et de 300 articles de presse, il a débuté sa formation par apprentissage suivi d'un BTSA. À partir de 1989, il a enchaîné les postes en lien avec la protection des cultures, d'abord en tant que conseiller privé, puis au sein des Services régionaux de la protection des végétaux (SRPV), où il a été tour à tour responsable des contrôles phytosanitaires, de la filière grandes cultures puis de la filière cultures ornementales. Il y a suivi les bioagresseurs pour les Avertissements agricoles puis pour les Bulletins de santé du végétal, expérimenté des méthodes de lutte, effectué des inspections phytosanitaires... « Je changeais de filières mais pas vraiment de techniques de travail. En particulier, j'ai toujours tenu à pratiquer les analyses de diagnostic en laboratoire. » Chargé de mission en agroenvironnement en 2007, il devient expert national en surveillance biologique du territoire (SBT) à la DGAL-SDQSPV(1), basée à la Draaf-Sral des Pays de la Loire(2). À cette fonction s'ajoute depuis un an celle d'expert national en horticulture, jardins et espaces verts.

Écophyto et SBT

La SBT s'appuie sur plusieurs directives européennes dont la directive 2009/128/CE pour une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable, qui a été suivie en France par le plan Écophyto. L'objectif est de créer les conditions nécessaires à la mise en oeuvre d'une lutte intégrée contre les ennemis des cultures. « Dans ce contexte, mon rôle est d'analyser et synthétiser les données pour une mise en oeuvre de la surveillance des cultures et de leur environnement, explique Jérôme Jullien. Cette surveillance concerne les organismes nuisibles, les auxiliaires et les effets non intentionnels (ENI) des pratiques phytosanitaires. » Il traduit ainsi en mesures opérationnelles les instructions que l'administration centrale, la DGAL-SDQSPV, donne aux services déconcentrés, les Draaf-Sral. L'entrée en vigueur du nouveau règlement européen santé des végétaux va d'ailleurs s'accompagner de nouvelles consignes à traduire sous forme d'instructions, de notes ou de formations (passeport phytosanitaire, surveillance des bioagresseurs de quarantaine...).

Organismes nuisibles

Jérôme Jullien travaille à la mise en place de protocoles d'épidémiosurveillance avec les experts filières de la DGAL-SDQSPV et des partenaires professionnels. Objectif : connaître la situation phytosanitaire du territoire, afin d'améliorer la protection intégrée des cultures. Parmi les bioagresseurs suivis, il y a les organismes réglementés et/ou émergents qui font l'objet de plans de surveillance et de contrôle spécifiques. « J'utilise la base de données Epiphyt qui agrège les données géoréférencées des réseaux d'observation. On peut suivre la progression territoriale, les courbes de vol... » Outre cette analyse, associée à la veille documentaire, l'expert n'hésite pas à consulter des « personnes ressources » pour comprendre les évolutions constatées, les traduire concrètement en termes de surveillance, puis contribuer à la rédaction de documents de référence. Et l'expert SBT de citer des bioagresseurs particulièrement préoccupants comme le ToBRFV, le longicorne à col rouge sur Prunus, la maladie des mille chancres sur noyer, Xylella fastidiosa, Popillia japonica...

Notes et protocoles

« Je m'occupe de superviser la qualité technique des bulletins de santé du végétal (BSV), en proposant une méthodologie d'observation, des règles de rédaction... Je participe également à la publication des notes nationales sur les organismes nuisibles réglementés et émergents, ou encore la protection des pollinisateurs. Ces notes sont diffusées avec les BSV. » L'expert contribue également chaque année à la rédaction d'une note de service nationale qui fixe les règles de fonctionnement en SBT. « Elle fait état des évolutions financières, organisationnelles et techniques pour la mise en oeuvre du plan Écophyto, et met en évidence les exigences et priorités d'actions. Pour ce faire, une concertation avec les experts filière est nécessaire, ainsi que la prise en compte des retours d'expérience des Sral.

Effets non intentionnels

La SBT consiste aussi à suivre les effets non intentionnels des pratiques agricoles sur l'environnement en utilisant pour cela des indicateurs de la biodiversité : vers de terre, oiseaux, flore spontanée des bords de champs, coléoptères. » Dans ce cadre, Jérôme Jullien a initié et corédigé en 2012 le vade-mecum de l'observateur en biovigilance, un guide décrivant les méthodologies et protocoles pour faciliter le travail d'observation sur le terrain et l'acquisition de données agroécologiques. La résistance des bioagresseurs aux produits phytopharmaceutiques fait aussi partie des ENI suivis. Autre mission de l'expert en horticulture et Jevi: les dérogations 120 jours. « Je travaille sur la partie technique des dossiers d'expertise pour les dérogations d'AMM dans les cas d'urgences sanitaires. » Cette activité nécessite de nombreuses concertations (personnes ressource, instituts techniques...). « Autrefois, on pouvait faire valoir en priorité les aspects technico-économiques, aujourd'hui ce sont les questions santé et environnement qui sont déterminantes. »

(1) Direction générale de l'alimentation-Sous-direction de la qualité, de la santé et de la protection des végétaux.(2) Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt-Service régional de l'alimentation, pôle phytosanitaire.

BIO EXPRESSJÉRÔME JULLIEN

 Photo : F. Guignard

Photo : F. Guignard

1989. BTSA horticulture-pépinières-Jevi à Angers. Conseiller agricole à la Fredec Centre.

1993. Technicien du ministère de l'Agriculture. Responsable des contrôles phytosanitaires au SRPV Poitou-Charentes à La Rochelle.

1996. Responsable filière grandes cultures au SRPV Pays de la Loire à Angers.

2000. Responsable filières cultures ornementales au SRPV d'Angers.

2006. Ingénieur de l'agriculture et de l'environnement (IAE). Chargé de mission en agroenvironnement au SRPV Centre.

2008. Master en biologie spécialisé dans les technologies du végétal, AgroCampus Ouest-université d'Angers.

2010. Expert national en SBT.

2019. Expert national en horticulture et Jevi.

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