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Amélioration variétale

La sélection des plantes en question

VALÉRIE VIDRIL, Phytoma. - Phytoma - n°742 - mars 2021 - page 10

Les techniques de création variétale ont évolué, avec le recours aux biotechnologies cellulaires et moléculaires. De quoi parle-t-on ? Comment la réglementation encadre-t-elle ces outils et les plantes qui en résultent ?

Les trois articles suivants sont complémentaires :

• « De la génétique aux biotechnologies végétales », de Michel Dron, p. 11 ;

• « Quelle réglementation pour les produits d'édition du génome ? », de Catherine Regnault-Roger, p. 41 ;

• « Qu'est-ce qu'une variété OGM ? Exemple du blé tendre 'Renan' », d'André Gallais, p. 46.

Ils visent à fournir des notions et éléments de réflexion utiles à la compréhension de l'amélioration variétale, tant d'un point de vue technique que réglementaire. D'un côté, les outils employés sont de plus en plus sophistiqués. De l'autre, la réglementation européenne fournit un cadre strict mais sujet à interprétation, comme peut l'être la définition du terme « organisme génétiquement modifié » (OGM). Cette réglementation peut être modifiée pour tenir compte des avancées des connaissances scientifiques et technologiques.

Le débat sur les OGM est aujourd'hui un débat d'opinions : suis-je pour ou contre les OGM ? Il nécessite de se mettre d'accord au préalable sur la définition même d'OGM. Grâce au cadre réglementaire, les règles sont fixées. S'il faut les respecter, elles ne doivent pas empêcher de s'interroger et de chercher à comprendre. Comprendre par exemple pourquoi le terme « OGM » n'a pas la même signification partout dans le monde. Au sein de l'Union européenne, ce terme définit les organismes, « à l'exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d'une manière qui ne s'effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle. » (directive 2001/18/CE).

La définition réglementaire distingue ainsi les modifications génétiques qui relèvent de la nature et celles qui relèvent de l'intervention humaine. La variation génétique est en effet à la base de la biodiversité, permettant aux différentes formes de vie de s'adapter sous la pression de sélection de l'environnement. Naturellement, les mutations sont une clé de cette variation. Elles peuvent être spontanées, au fil des divisions cellulaires (réplication, recombinaison), ou être causées par des facteurs externes (rayons UV...). Au sens littéral, les organismes qui en résultent, et qui survivent, peuvent être considérés comme « génétiquement modifiés ». Mais à ce titre et en ajoutant le facteur humain, la majorité des variétés issues des programmes de sélection seraient alors considérées comme « génétiquement modifiées »... À L'opposé de cette acception étendue, une définition restrictive associe les OGM aux organismes modifiés artificiellement par transgenèse.

Naturel vs. artificiel, outils vs. résultats

L'homme a cherché à reproduire les mutations naturelles, d'abord de manière aléatoire, puis de plus en plus ciblée. Il a développé des techniques de plus en plus perfectionnées (voir p. 11). Grâce à ces outils, il crée de nouvelles variétés, que la nature aurait pu concevoir et sélectionner... ou pas. Et c'est peut-être ici que le débat quitte le champ sémantique pour un questionnement plus complexe : quelle création humaine est contre nature, quelle autre - tout aussi artificielle soit-elle - aurait pu être créée par la nature ? La réglementation européenne s'épargne cette interrogation en basant sa distinction « OGM/non OGM » sur les moyens d'obtention (voir p. 41) : certaines techniques sont considérées comme entraînant des modifications génétiques et donc générant des OGM (réglementés ou exemptés), d'autres non. Dans certains pays hors Europe, ce sont les caractéristiques du produit final qui conditionnent la réglementation.

Du fait des contraintes réglementaires imposées aux variétés définies comme OGM, de l'image péjorative accolée au terme OGM ou encore des risques liés à la brevetabilité du vivant, la controverse est intense, comme l'illustrent les nombreux échanges autour de l'obtention du blé 'Renan' résistant au piétin-verse. La réglementation européenne ne la considère pas comme un OGM ; les techniques d'obtention utilisées sont classiques. Pour autant, explique André Gallais, si le même génotype avait été obtenu grâce à une technique moderne, la variété obtenue serait considérée comme un OGM (voir p. 46).

L'amélioration variétale fait partie intégrante de l'histoire de l'agriculture. Elle constitue un levier indispensable pour répondre aux défis en cours : préservation de l'environnement et de la biodiversité, réchauffement climatique, augmentation de la population, occupation des sols... Quels que soient les outils utilisés, il est indispensable de s'interroger sur les impacts que pourraient avoir les nouvelles obtentions, à tous les niveaux.

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