Expérimentations visant à évaluer l'intérêt de plantes de services pour réduire l'incidence des attaques de taupins sur maïs. Photo : Arvalis
Fig. 1 : Efficacité d'appâts associés ou non à une substance active (s.a.) insecticide selon leur positionnement Miramont 2009 (% d'attaques dans le témoin : 41 %) et Larreule 2010 (% d'attaques dans le témoin : 75 %) : appâts appliqués à 12 kg/ha sans ou avec substance active (cyperméthrine). Larreule 2012 (% d'attaques dans le témoin : 33 %) : appâts sans substance active appliqués à 20 kg/ha, appâts avec substance active (fipronil) appliqués à 5 kg/ha.
Fig. 2 : Comparaison entre appâts inertes et plantes-appâts pour la protection du maïs contre les taupins (2011, 2012, 2013) Analyse de variance suivie d'un test de comparaison des moyennes (Newman & Keuls). Les valeurs suivies de lettres sont significativement différentes au seuil p < 0,05.
Fig. 3 : Comparaison de l'intérêt de plantes-appâts utilisées seules ou en mélanges pour protéger le maïs contre les taupins (huit essais, 2012-2019) Cette synthèse fait état des résultats valides disponibles fin 2019. A : cinq essais. Moyenne des attaques dans les témoins = 33,4 %. B : six essais. Moyenne des attaques dans les témoins = 35 %. C : deux essais. Moyenne des attaques dans les témoins = 26,9 %. D : deux essais. Moyenne des attaques dans les témoins = 26,5 %. NS = différences non significatives.
Fig. 4 : Rendement avec différentes plantes-appâts dans des essais ayant subi de fortes attaques de taupins (> 50 % de plantes attaquées dans les témoins) (2012-2019) A : deux essais. Rendements = référence (base 100) : 126 q/ha. Témoin : 77,6 q/ha. B : cinq essais. Rendements = référence (base 100) : 143 q/ha. Témoin : 73,2 q/ha.
Fig. 5 : Efficacité de la protection contre les taupins selon différents positionnements des plantes-appâts (2019) Analyse statistique réalisée sur les mesures de plantes attaquées. Un essai. Moyenne des attaques dans les témoins = 69 %.
En France, les taupins représentent les principaux ravageurs du maïs : environ 25 % des surfaces de maïs sont exposées à ce ravageur et les pertes potentielles de production sont estimées à environ 8 % de la production nationale de maïs grain en l'absence de protection insecticide (Thibord, 2017). Pour protéger les semis de maïs contre les attaques de taupins, les producteurs disposent actuellement de produits microgranulés dont la substance active appartient à la famille des pyréthrinoïdes et dont les efficacités oscillent seulement entre 50 et 75 %. Par ailleurs, il n'existe pas de solution satisfaisante pour protéger le maïs contre les taupins en agriculture biologique.
Une nouvelle stratégie
Détourner les larves de la culture
Une nouvelle stratégie de protection consiste à proposer aux larves de taupins une nourriture alternative, c'est-à-dire un appât, au moment du semis, afin de les détourner des plantes à protéger (Vernon, 2000, 2005, 2016 ; Chaton, 2003, 2007 ; Staudacher, 2013 ; Adhikari & Reddy, 2017). Pour le maïs, l'objectif est de diminuer l'exposition des plantes aux attaques entre la levée et le stade 6-8 feuilles, période de grande sensibilité des plantules.
Cette stratégie fait l'objet d'expérimentations mises en oeuvre par Arvalis depuis près de vingt ans. Lors des premiers travaux, les appâts étaient constitués soit de substances inertes à base d'amidon de céréales, soit de semences de maïs. Arvalis a poursuivi et intensifié les expérimentations au cours des dix dernières années en focalisant les travaux de recherche sur les plantes-appâts, fonction recherchée de plantes-compagnes de la culture du maïs. Les résultats de ces travaux permettent de décrire les conditions dans lesquelles la technique des appâts peut présenter une efficacité potentiellement intéressante pour protéger les cultures de maïs contre les attaques de taupins. Cela permet également de mettre en évidence les limites de la stratégie à base de plantes-appâts si sa mise en oeuvre n'est pas optimale.
Dispositifs expérimentaux sur près de vingt années d'essais
Toutes les expérimentations ont été réalisées dans le sud de Nouvelle-Aquitaine (Landes, Pyrénées-Atlantiques) et en Bretagne (Morbihan) dans des parcelles naturellement infestées par des populations abondantes de taupins. Les modalités étaient comparées selon un dispositif expérimental comportant des microparcelles de quatre rangs et 10 mètres de long (ou trois rangs et 20 mètres de long dans les essais réalisés avant 2009), avec quatre répétitions en blocs. Les modalités expérimentales étaient comparées à une modalité témoin dépourvue de protection insecticide et à une modalité de référence comportant une substance active insecticide appliquée soit en traitement de semences (s.a. : imidaclopride, thiaméthoxame), soit en microgranulés en localisation dans la raie de semis (s.a : carbofuran, téfluthrine, cyperméthrine, lambda-cyhalothrine) selon les années et les produits de référence.
Les notations ont consisté à dénombrer les plantes de la culture de maïs (et non des plantes-appâts) présentes à la levée (stade 3 feuilles, BBCH 13), puis à dénombrer les plantes présentes et les plantes présentant un symptôme d'attaque par une larve de taupin à trois ou quatre dates différentes après le stade 3 feuilles (BBCH 13) et jusqu'au stade 9-10 feuilles (BBCH 19) dans le but d'obtenir une cinétique des attaques. Ainsi, le pourcentage de plantes attaquées par les larves de taupins a pu être calculé pour chaque date de notation réalisée après le stade 3 feuilles en rapportant la somme des plantes présentant des symptômes d'attaques et des plantes disparues sur le nombre de plantes présentes lors de la notation réalisée au stade 3 feuilles. Les résultats présentés correspondent à la dernière notation pour chacun des essais et sont exprimés en pourcentage d'efficacité. L'efficacité est calculée en tenant compte du pourcentage d'attaques dans le témoin (efficacité modalité = 1- ([% att témoin - % att modalité] / % att témoin)).
Les modalités expérimentales, très variées, ont été déclinées selon le type d'appâts utilisés, la dose appliquée et le positionnement spatio-temporel (tableau ci-dessous). Les doses des graines de plantes-appâts ont été calculées en tenant compte du poids de mille grains (PMG) de plante-appât, et en considérant l'application en plein sur l'ensemble de la surface de la microparcelle puis enfouie sur le premier horizon du sol sur une profondeur de 15 cm, de telle sorte que la distance entre graines soit comprise entre 3 cm dans le cas du maillage le plus dense à 9 cm dans le cas du maillage le plus large.
Dans la plupart des expérimentations, les appâts ont été appliqués le jour du semis, soit en même temps que le semis de la culture de maïs lors d'application dans la raie de semis ou entre les rangs de maïs, soit juste avant le semis de maïs lors d'une application en plein suivie d'une incorporation au sol. Considérant qu'une levée plus précoce des plantes-appâts de quelques jours par rapport à la culture à protéger serait susceptible d'augmenter l'efficacité de la stratégie, deux essais ont permis d'évaluer l'intérêt d'un semis des plantes-appâts réalisé dix jours avant le semis de la culture de maïs à protéger.
La destruction des plantes-appâts a été réalisée à l'aide de produits de la famille des sulfonylurées ou de cycloxydime (selon les essais) lorsque la culture était entre les stades 3 à 6 feuilles (selon les essais).
De nombreuses modalités testées : les résultats
Appâts inertes avec ou sans substance active insecticide
Trois essais ont permis de comparer des modalités composées de formulation de granulés-appâts comportant ou non une substance active insecticide (cyperméthrine, fipronil) avec différents positionnements des granulés au moment des semis : localisés en raie de semis avec diffuseur, localisé dans l'interrang, ou appliqués en plein puis incorporé au sol avant semis (Figure 1).
Appliqués dans la raie de semis, les granulés-appâts avec substance active présentent des efficacités comprises entre 34 % et 53 %. Dans les mêmes conditions d'application, les granulés-appâts sans substance active présentent des efficacités variables ; les attaques sont plus importantes que dans le témoin dans un seul essai. En revanche, l'efficacité est de 42 % dans les deux autres essais.
Lorsque les granulés-appâts sont appliqués dans l'interrang ou en plein puis incorporés avant semis, l'efficacité de la protection est globalement plus faible par rapport à une application dans la raie de semis. L'application de granulés-appâts plus éloignés par rapport à la ligne de semis permet encore d'abaisser les attaques sur maïs avec une efficacité de l'ordre de 20 à 30 % (hors fipronil), que ceux-ci comportent une substance active ou non. Les résultats acquis avec des granulés-appâts comportant du fipronil tendent à confirmer que l'efficacité de la protection est améliorée lorsque les granulés-appâts sont éloignés de la ligne de semis à protéger.
Comparaison entre appâts inertes et plantes-appâts
Les essais visant à comparer l'efficacité de granulés-appâts inertes à des plantes-appâts ont été réalisés de 2011 à 2013. Les granulés-appâts inertes (sans substance active) ont été appliqués à une dose de 20 kg/ha en plein puis incorporés au sol juste avant semis. Pour les modalités de plantes-appâts, un mélange comportant des grains de blé tendre et de semences de maïs a été appliqué en plein à la dose de 120 kg/ha (60 kg de chaque espèce) et incorporé au sol juste avant le semis de maïs (Figure 2). En moyenne, le mélange de plantes-appâts composé de blé et de maïs présente une efficacité de 49 % alors que les appâts inertes, appliqués dans des conditions comparables, présentent une efficacité de seulement 18 %.
Plantes-appâts : comparaison d'espèces ou de mélange d'espèces
Des expérimentations visant à évaluer l'intérêt de différentes espèces de plantes-appâts ont été mises en oeuvre à partir de 2012. La liste des espèces testées a évolué au fil des années. Pour ces comparaisons, nous avons privilégié le mode d'application ayant démontré le plus d'intérêt dans les travaux antérieurs, c'est-à-dire l'application des graines en plein puis leur incorporation dans le sol juste avant le semis du maïs (Figure 3).
Les modalités composées d'un mélange de blé (60 kg/ha) et de maïs (60 kg/ha) présentent régulièrement l'efficacité la plus intéressante avec une efficacité de 55 % (moyenne calculée sur cinq essais). Ce niveau de protection est comparable à celui obtenu avec la modalité protégée avec un produit insecticide en microgranulés.
Lorsque l'appât est composé uniquement de blé tendre, la stratégie des plantes-appâts présente une efficacité de 38 à 45 % selon les regroupements d'essais. Les résultats sont comparables lorsque l'appât est constitué uniquement de maïs.
Des résultats encourageants ont été obtenus avec des appâts à base d'orge, avec 69,4 % d'efficacité en moyenne sur deux essais ayant subi des attaques de taupins d'intensité moyenne (résultats comparables à la référence conventionnelle). Les essais se poursuivent pour évaluer l'intérêt d'autres espèces telles que le triticale ou l'avoine.
Plantes-appâts : comparaison de doses
Le nombre d'expérimentations permettant de comparer différentes doses de plantes-appâts demeure encore limité. Un essai comparant trois doses de blé tendre (120, 240 et 360 kg/ha) tend à mettre en évidence une amélioration de la protection du maïs lors de l'augmentation de la dose de plante-appât. L'efficacité de la modalité comportant la plus forte dose de blé tendre (360 kg/ha) n'est cependant pas significativement supérieure à l'efficacité de la modalité appât constituée d'un mélange de blé tendre et de maïs (60 kg/ha de chaque espèce).
Incidence de la stratégie des plantes-appâts sur le rendement du maïs
Certains essais ont pu être conduits jusqu'à la maturité de la culture, permettant ainsi de comparer les rendements des différentes modalités en évaluation. Les essais ayant subi de fortes attaques de taupins bénéficient d'une meilleure précision avec une relation cohérente entre l'efficacité de la protection contre les taupins et le rendement mesuré lors de la récolte sur les modalités témoin et de référence. Même si le nombre de situations comparables n'est pas le même, la stratégie qui associe blé et maïs apportés en plein et incorporés avant semis permet d'obtenir un rendement plus proche de la référence que la stratégie composée uniquement de blé (Figure 4).
Positionnement spatial
Les travaux réalisés avec des appâts inertes avaient permis de mettre en évidence une certaine efficacité de la protection lors d'apports en plein et incorporés avant semis ainsi que lors d'une localisation dans l'interrang (Figure 1). Une expérimentation similaire a été réalisée avec une modalité de plantes-appâts constituée d'un mélange de blé tendre (60 kg/ha) et de maïs (60 kg/ha) afin de comparer différentes modalités de positionnement des plantes-appâts : en ligne de part et d'autre de la ligne de semis du maïs, sur une bande de 20 cm dans l'interrang, sur une bande de 60 cm dans l'interrang ou en plein et incorporés juste avant semis. Les résultats (Figure 5) montrent l'intérêt de positionner les plantes-appâts au plus proche de la ligne de semis pour augmenter l'efficacité de la protection de la culture contre les attaques de taupins.
Positionnement temporel
Deux essais avaient pour but d'évaluer l'intérêt d'une application des plantes-appâts réalisée dix jours avant le semis de la culture de maïs à protéger. Les résultats ne permettent pas de mettre en évidence une amélioration de l'efficacité lors d'une application plus précoce des plantes-appâts par rapport à la culture à protéger en comparaison à une application des plantes-appâts réalisée le jour du semis de la culture à protéger (Figure 6).
Des plantes-appâts semées en plein puis détruites
Avantage technique aux plantes-appâts
Nos résultats mettent en évidence une efficacité des granulés-appâts pour la protection des plantules de maïs contre les dégâts de taupins, que ceux-ci soient associés ou non à une substance active insecticide. Ces résultats sont cohérents avec ceux acquis sur blé de printemps (Sharma, 2020). L'efficacité des granulés-appâts est démontrée pour différents positionnements : en localisation dans la raie de semis, dans l'interrang ou en plein avant d'être incorporés dans le sol juste avant semis. Ces résultats démontrent l'intérêt de recourir à des appâts pour détourner les larves de taupins des plantes à protéger.
Lorsque les granulés-appâts sont éloignés de la ligne de semis de maïs (positionnés dans l'interrang) ou bien dilués dans le sol (appliqués en plein puis incorporés au sol), et sans recours au fipronil, les niveaux d'efficacité sont compris entre 20 et 30 %. Ces niveaux d'efficacité sont malheureusement insuffisants pour assurer une protection satisfaisante de la culture de maïs.
La mise en oeuvre de la stratégie avec des plantes-appâts en substitution des granulés-appâts apporte des résultats plus encourageants. Parmi les modalités étudiées à ce jour, le meilleur niveau de protection est obtenu avec un appât constitué d'un mélange associant des grains de blé et de maïs. Lorsque l'appât est constitué uniquement de blé ou de maïs, l'efficacité est plus limitée. D'autres céréales (orge, avoine, triticale...) ont été évaluées en appâts (seules les modalités pour lesquelles plusieurs références sont disponibles ont été présentées), mais le mélange associant des grains de maïs et de blé présente à ce jour des efficacités régulièrement plus intéressantes. Les résultats montrent que la stratégie est plus efficace lorsque les graines germent et produisent des plantes-appâts par rapport aux situations où les graines ne germent pas (les résultats obtenus avec du riz ou du triticale n'ayant pas germé sont proches de ceux obtenus avec des appâts inertes).
Positionner les plantes-appâts en plein pour améliorer l'efficacité
Les plantes-appâts doivent être positionnées à proximité de la plante cultivée pour apporter une protection intéressante de la culture contre les attaques de taupins. Cependant, plus les appâts sont proches de la ligne de semis, plus la concurrence exercée sur la jeune plante de maïs sera importante. Le compromis le plus satisfaisant est donc d'appliquer les grains en plein sur le sol, par exemple avec un semoir centrifuge, puis de les incorporer dans la couche superficielle du sol sur 10-15 cm de profondeur au cours de la dernière préparation du sol, permettant de constituer un maillage des graines d'appâts dans le sol. Par la suite, les larves de taupin qui remontent des couches plus profondes du sol rencontrent les plantes-appâts. Ainsi, les attaques sur les graines et plantules de la ligne de semis de maïs sont moins abondantes car diluées entre la culture et les plantes-appâts. Un semis plus précoce des plantes-appâts par rapport à la date de semis de la culture n'a pas permis d'améliorer l'efficacité de la stratégie dans nos conditions expérimentales.
La destruction des appâts doit être sécurisée
La stratégie des plantes-appâts présente des résultats intéressants dans le cadre de la protection du maïs contre les dégâts de taupins, mais elle peut s'avérer plus nuisible qu'une attaque de taupins si les plantes-appâts ne sont pas détruites à temps car elles sont susceptibles de concurrencer rapidement la culture de maïs.
Pour sécuriser la destruction des plantes-appâts, une technique proposée consiste à utiliser des appâts à base de blé et de maïs sensibles à la cycloxydime, et de semer une culture de maïs avec une variété tolérante à la cycloxydime : ainsi, le désherbage réalisé au stade 3-4 feuilles à l'aide du produit commercial Stratos Ultra (substance active : cycloxydime) permet de lutter contre les graminées et de détruire les plantes-appâts tout en préservant la culture de maïs, et ceci sans augmenter le nombre de passages de désherbage. Une autre possibilité est de recourir à des plantes-appâts autres que du maïs. Cela diminue l'efficacité de la protection contre les taupins mais ouvre la possibilité de détruire les plantes-appâts avec un produit de désherbage appartenant à la famille des sulfonylurées. Cependant, l'action de l'herbicide est plus lente et la destruction des plantes-appâts plus aléatoire que lors d'application d'un produit à base de cycloxydime. Dans nos conditions expérimentales, la destruction des plantes-appâts avec un produit de la famille des sulfonylurées a souvent présenté un intérêt plus limité et la nuisibilité des plantes-appâts sur maïs était accrue.
La destruction mécanique est également envisageable, voire la seule solution disponible en agriculture biologique. La contrainte la plus forte reste la gestion du rang : soit les appâts sont répartis dans l'interrang, ce qui facilite leur élimination grâce au binage mais diminue l'efficacité pour la protection contre les taupins, soit les appâts sont appliqués en plein, ce qui assure une meilleure protection contre les taupins mais occasionne une nuisibilité sur la culture d'autant plus importante que le désherbage sur le rang sera compliqué (selon le matériel disponible).
La destruction des appâts est une étape à ne surtout pas négliger. Il est fortement recommandé de prendre en considération ce point critique dès l'élaboration de l'itinéraire technique, c'est-à-dire dans le choix de la variété de maïs (en privilégiant une variété tolérante à la cycloxydime) et dans le choix de la stratégie de désherbage (chimique ou mécanique).
Un nouveau levier à optimiser
Le recours aux plantes-appâts apparaît comme un nouveau levier pour protéger le maïs contre les taupins. Il reste néanmoins nécessaire de préciser l'itinéraire technique permettant d'optimiser l'efficacité de la protection de la culture vis-à-vis des attaques de taupins et de garantir une destruction rapide et sans faille de ces plantes-compagnes afin que la stratégie mise en oeuvre n'occasionne pas de nuisibilité sur la culture.
Des travaux de recherche et de développement sont encore nécessaires dans le but de sélectionner des espèces de plantes-appâts plus pertinentes et de définir leur dose d'emploi optimale. L'idéal serait de pouvoir disposer d'une plante-appât au moins aussi attractive que le maïs, mais n'appartenant pas à la famille des graminées pour faciliter sa destruction chimique.
Le positionnement spatio-temporel des plantes-appâts doit également être optimisé. La mise en oeuvre en plein avant semis telle que réalisée dans nos expérimentations peut difficilement être simplifiée car elle ne nécessite aucune adaptation de matériel. Une localisation des plantes-appâts plus éloignée de la ligne de semis présenterait l'avantage de simplifier la destruction de l'appât, qu'elle soit mécanique ou chimique (notamment lorsque la variété de maïs n'est pas tolérante à la cycloxydime) mais diminuerait l'efficacité de la protection.
Une fois que l'itinéraire technique intégrant les plantes-appâts aura été optimisé, ce levier pourra être utilisé seul ou en combinaison avec une protection insecticide à l'aide de produit phytopharmaceutiques (conventionnels ou de biocontrôle). Les premiers résultats acquis par Arvalis qui combinent les plantes-appâts et une protection insecticide à l'aide de microgranulés dans la raie de semis de maïs laissent augurer des efficacités additives. Cela pourrait permettre de retrouver un niveau d'efficacité de la protection du maïs proche de celui connu antérieurement et qui n'est plus accessible à ce jour à la suite de la disparition de certaines solutions insecticides.
Comme toute évolution de stratégie induisant des modifications de l'itinéraire technique, les études devront permettre d'évaluer des conséquences à moyen/long termes. Une des principales interrogations concerne notamment l'incidence de cette technique sur l'évolution des populations de taupins dans la parcelle et la question sous-jacente de l'intérêt d'associer les plantes-appâts à une protection insecticide pour abaisser les populations de ravageurs.
RÉSUMÉ
CONTEXTE - Le maïs est sensible aux attaques de larves de taupins à partir de la levée et jusqu'au stade 10-12 feuilles. Afin de limiter l'exposition des jeunes maïs à ces ravageurs, une des stratégies de protection consiste à proposer aux larves de taupin une nourriture alternative, c'est-à-dire un appât, au moment du semis afin de les détourner des plantules de maïs.
ÉTUDE - Cette stratégie fait l'objet d'expérimentations mises en oeuvre par Arvalis depuis près de vingt ans. Les travaux ont d'abord majoritairement été réalisés avec des granulés-appâts constitués de céréales, puis ils ont été poursuivis et intensifiés en focalisant les expérimentations avec des plantes de service utilisées comme appâts.
RÉSULTATS - Les résultats de ces travaux permettent de décrire les conditions de mises en oeuvre - choix des espèces d'appâts, dose, positionnement par rapport à la ligne de semis - dans lesquelles la stratégie des plantes-appâts peut présenter un intérêt permettant de protéger les cultures de maïs contre les attaques de taupins avec une efficacité de l'ordre de 50 %.
Ces travaux permettent également de mettre en évidence les limites actuelles de la stratégie à base de plantes-appâts et de proposer des pistes de recherches pour l'optimiser.
MOTS-CLÉS - Taupins, ravageurs, maïs, appâts, plantes de service.
Positionnement : le juste compromis
Le positionnement des appâts doit être suffisamment :
proche par rapport à la ligne de semis de maïs pour augmenter les chances que les larves de taupins trouvent un appât avant de trouver une plantule de maïs de la culture à protéger, mais au risque d'attirer les larves sur la ligne de semis et que les plantes-appâts, en se développant, exercent une forte concurrence vis-à-vis de la culture ;
éloigné par rapport à la ligne de semis pour ne pas attirer les larves sur la ligne de semis et pour éviter une trop forte concurrence des plantes-appâts sur la culture, mais au risque que les larves de taupins attaquent les plantes de maïs avant de trouver l'appât.
POUR EN SAVOIR PLUS
CONTACT : jb.thibord@arvalis.fr
BIBLIOGRAPHIE : la bibliographie de cet article (11 références) est disponible auprès de ses auteurs (contact ci-dessus).
REMERCIEMENTS
Ces travaux ont été réalisés avec les concours financiers du CasDar géré par le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, et de l'Agence française pour la biodiversité grâce au soutien du projet Startaup (projet Écophyto 2, chef de file : Inrae). Les auteurs remercient les fournisseurs de granulés-appâts dépourvus de substance active, ainsi que les expérimentateurs.