En France, assurer une alimentation saine et de qualité constitue une priorité. Adeptes de gastronomie et de tables conviviales, nous restons attentifs à ce qui se trouve dans notre assiette. Aujourd'hui, 69 % des consommateurs s'intéressent ainsi à l'impact de leur alimentation sur leur santé et 61 % à son impact sur l'environnement (étude Kantar TNS, 2018). Ils favorisent de plus en plus les circuits courts, réduisant le nombre d'intermédiaires entre eux et les agriculteurs. Si la majorité des achats s'effectuent encore en grandes et moyennes surfaces, les marchés, la vente directe et les Amap (Associations de maintien de l'agriculture paysanne) attirent de plus en plus de clients pour l'achat des produits frais ; ces derniers sont d'ailleurs en progression : + 28 % entre 2015 et 2017. Qu'il y ait des intermédiaires ou non, le producteur a la responsabilité de fournir des denrées exemptes de toute contamination susceptible de porter atteinte à la santé du consommateur.
La sécurité alimentaire : une responsabilité de filière
Réglementation européenne et Paquet hygiène
Le Paquet hygiène a été introduit par le règlement (CE) 178/2002, dit « Food Law », donnant les bases d'une nouvelle réglementation européenne harmonisée de sécurité alimentaire et portant création de l'Efsa (agence sanitaire européenne), qui fut complétée par le règlement (CE) 852/2004. Cette réglementation vise la mise sur le marché de denrées saines d'origine végétale, la tenue de cet objectif reposant sur la responsabilité de chaque professionnel intervenant de la production primaire jusqu'à l'achat par le consommateur de denrées brutes ou transformées. Elle précise les exigences liées à la qualité sanitaire des produits végétaux destinés à la consommation humaine ou animale (sur le territoire et à l'exportation). Chaque agriculteur se situe à l'amont de cette chaîne de qualité par ses choix culturaux et des procédés agronomiques adaptés à l'environnement de ses parcelles. La prévention des risques s'impose sur les lieux de culture, mais aussi à la récolte, lors du lavage, du stockage, de la transformation sur l'exploitation...
Au coeur des missions de la DGAL
En France, l'interlocuteur unique de l'Union européenne pour le Paquet hygiène est la Direction générale de l'alimentation (DGAL). Les missions de l'organisme sont multiples, de la santé des végétaux jusqu'à la qualité sanitaire des aliments mis entre les mains des consommateurs, avec notamment une mission de contrôle et d'information sur le Paquet hygiène de la production primaire végétale. Pour répondre aux attentes de la société, maintenir un haut niveau de sécurité sanitaire et renforcer la résilience des systèmes alimentaires, la DGAL s'est d'ailleurs réorganisée, via son plan stratégique 2021-2023, en mettant en place une meilleure transversalité des services. Elle entend ainsi incarner pleinement l'approche « One health » (une seule santé) qui place l'interdépendance entre santé humaine, santé animale, santé végétale et protection de l'environnement au coeur de son action et assure ainsi une approche globale des enjeux.
De multiples risques de contamination
L'agriculteur doit préserver ses productions végétales de toute contamination susceptible de porter atteinte à la santé du consommateur. Cette préoccupation majeure justifie leur suivi au travers des autocontrôles professionnels et des plans de surveillance des services de l'État. Cependant, il ne faut pas sous-estimer le risque de contaminations qui peuvent survenir malgré cette surveillance régulière et conduire parfois à des intoxications graves, dans la mesure où des substances toxiques ou des agents pathogènes peuvent, par mélange ou simple contact, contaminer d'autres plantes comestibles. Ainsi, la présence de parties de plantes toxiques, autochtones (colchiques, digitales, if, ciguë, etc.) ou invasives (datura, etc.), constitue un danger. Par exemple, en introduisant un alcaloïde, des graines de datura parmi celles de sarrasin altèrent la qualité sanitaire de la farine. Il en va de même en cas de présence d'ergot du seigle ou de champignons microscopiques (Aspergillus sp., Fusarium sp., Penicillium sp., etc.) producteurs de mycotoxines dans des céréales. Des fumagines peuvent aussi être source de toxine. Quant aux résidus phytopharmaceutiques sur les végétaux, particulièrement contrôlés, ils doivent respecter les limites maximales autorisées.
Certains micro-organismes pathogènes présents sur des végétaux consommés crus peuvent être dangereux même en faible quantité, à l'instar des bactéries Escherichia coli productrices de shigatoxines (STEC de l'anglais shigatoxigenic E. coli). Celles-ci ont causé, lors de la crise des graines germées de 2011, plusieurs dizaines de morts et des milliers d'hospitalisations en Europe. Ce type de toxi-infections alimentaires, par ailleurs constaté en Californie presque chaque année, peut être relié à la contamination de salades lors de la production primaire. C'est pourquoi la réglementation sanitaire européenne intègre la consommation de végétaux comme pouvant être à l'origine d'intoxications alimentaires graves.
Des moyens proportionnés choisis par le producteur
Guides de bonnes pratiques et autocontrôles
Si chaque agriculteur a l'obligation de mettre sur le marché des produits végétaux sains, il peut choisir les moyens de maîtriser ces risques sanitaires potentiels. Conformément aux objectifs du Paquet hygiène, il hiérarchise les risques selon les spécificités de ses productions et apporte une réponse proportionnée et compatible avec le contexte de son exploitation.
Pour l'y aider, les filières professionnelles ont élaboré des guides de bonne pratique d'hygiène (GBPH), analysant chaque risque spécifique et fournissant les bonnes pratiques agricoles et d'hygiène (BPA/BPH) disponibles afin de les maîtriser. Publié après évaluation par l'Efsa ou l'Anses, chaque GBPH est spécifique à un type de production végétale. Un agriculteur y trouvera les pratiques les mieux adaptées au contexte de son exploitation et à chaque étape de son itinéraire technique. Cependant, l'application stricte du GBPH restant volontaire, le professionnel peut adopter, notamment pour des raisons technico-économiques, une alternative non proposée à une étape donnée, voire n'en appliquer aucune. Dans ce cas, il doit s'assurer de l'atteinte d'un niveau de sécurité équivalent. En apporter la preuve nécessite d'analyser les conséquences de cette alternative sur des échantillons représentatifs des lots ainsi mis sur le marché.
La réglementation européenne précise les limites de concentrations à ne pas dépasser selon les contaminants chimiques ou microbiologiques et les matrices végétales. Cet autocontrôle analytique des végétaux produits est réalisé la plupart du temps par la filière aval, coopératives ou grossistes, notamment en grandes cultures. Le coût des analyses est cependant peu compatible avec la réalité économique de petites exploitations agricoles, notamment de maraîchage en vente directe. Ces dernières ont donc nettement plus intérêt à sélectionner et respecter leurs BPA/BPH, parmi celles proposées dans les GBPH. En cas d'inspection, l'exploitant doit être en mesure de justifier le respect des pratiques mises en oeuvre, la tenue d'un registre est donc indispensable.
Des contrôles de l'amont vers l'aval
500 inspections annuelles chez les producteurs
Chaque État membre contrôle le respect des attendus du Paquet hygiène par tout type d'opérateur, en particulier en production primaire. Aussi, depuis 2009, les services régionaux de l'alimentation (SRAL/SALIM) réalisent, sur instruction de la DGAL, près de 500 inspections annuelles ciblées chez des producteurs primaires de végétaux (respect des exigences du PHPPV - Paquet hygiène en production primaire végétale), en amont de leur première mise sur le marché. L'ensemble de la filière aval est également contrôlée par les services de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). À ces contrôles programmés et ciblés (en fonction des risques calculés selon le type de production concerné, la structure, la quantité consommée...) s'ajoutent les actions déclenchées à la suite d'une urgence sanitaire.
Chaque inspection PHPPV est conduite sur une durée adaptée à la production primaire végétale contrôlée (culture, quantité produite, etc.) et avec pédagogie. Elle fait l'objet d'un rapport commenté en fin d'inspection et transmis par la suite, accompagné d'un courrier explicatif avec, pour chaque point de contrôle non conforme, l'attente réglementaire et le délai pour y répondre (variable selon la remise à niveau nécessaire), la mise en conformité étant vérifiée par la suite.
70 % de non-conformités
Ces contrôles et cette pédagogie s'avèrent indispensables dans la mesure où 70 % des contrôles effectués en 2020 ont relevé des non-conformités, dont près de 50 % de non-conformités majeures. Les non-conformités les plus fréquemment constatées sur les fruits et légumes consommés crus concernent l'hygiène des pratiques à la récolte et l'absence d'analyse microbiologique de l'eau d'irrigation. Même si le producteur n'a pas d'obligation de moyens, il doit connaître les facteurs de risques. Or la qualité de cette eau est très variable selon son origine, et cette connaissance doit conduire le producteur à adapter ses pratiques d'irrigation (goutte-à-goutte plutôt qu'aspersion, voire traitement), notamment à proximité de la récolte. L'amélioration de l'hygiène à la récolte relève quant à elle d'une formation suivie du personnel pour adopter des pratiques adaptées à chaque contexte. Certaines productions sensibles (graines germées, cresson) sont inspectées plus fréquemment.
Dans un contexte d'évolution des modes d'achat, de développement de la consommation de végétaux, cuits ou crus, et des circuits courts, la vigilance de chaque producteur est nécessaire pour garantir au citoyen une alimentation saine. Une information partagée de l'agriculteur au consommateur (« de la ferme à la fourchette ») sur l'hygiène et la qualité des produits primaires végétaux constitue l'une des priorités de la DGAL.
RÉSUMÉ
CONTEXTE - La qualité sanitaire de l'alimentation, du végétal à l'animal, engage l'ensemble des professionnels intervenant de la production primaire jusqu'à l'achat par le consommateur. La Direction générale de l'alimentation (DGAL) a pour mission de contrôler le respect des bonnes pratiques agricoles et d'hygiène qui permettront de limiter les risques pour le consommateur. Ainsi, le producteur doit non seulement protéger ses cultures des bioagresseurs les menaçant, il se doit de mettre sur le marché des denrées saines, notamment exemptes de contaminants (y compris de certains résidus phytopharmaceutiques), en recourant aux moyens appropriés.
MOTS-CLÉS - Sécurité sanitaire, alimentation, contaminants, résidus, micro-organismes, bonnes pratiques, réglementation, contrôle.
POUR EN SAVOIR PLUS
CONTACTS :
philippe.guillemard@agriculture.gouv.fr
bruno.canus@agriculture.gouv.fr
LIEN UTILE : https://plateforme-documentaire.ctifl.fr