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DOSSIER - Un pilier du biocontrôle : les macro-organismes

Sécuriser la lutte biologique grâce au gîte et au couvert

ANGE LHOSTE-DROUINEAU(1), MARIE-ANNE JOUSSEMET(2), EMMA VALENTIE(2), MARINE LITZLER(2), BENJAMIN GARD(3), JÉRÔME LAMBION(4) ET DR NICOLAS DESNEUX(5) (1) Astredhor Méditerranée. (2) Astredhor Est Horticole. (3) CTIFL - Station de Balandran. (4) Grab Avigno - Phytoma - n°756 - septembre 2022 - page 34

Le projet Hab'Alim a mis en lumière plusieurs leviers à même de favoriser la faune auxiliaire des cultures sous abri et d'extérieur.
Matériaux étudiés : 1. Laine de brebis.

Matériaux étudiés : 1. Laine de brebis.

. 2. Cosses de sarrasin.

. 2. Cosses de sarrasin.

Miscanthus Photos : M. Litzler

Miscanthus Photos : M. Litzler

Fleurs de plante de service étudiées : 4. Inula Photos : 4 et 6. A. Lhoste-Drouineau 5. M.-A. Joussemet

Fleurs de plante de service étudiées : 4. Inula Photos : 4 et 6. A. Lhoste-Drouineau 5. M.-A. Joussemet

5. Sorbaria sorbifolia.

5. Sorbaria sorbifolia.

6. Lobularia maritima.

6. Lobularia maritima.

Agrosystèmes. 7. Aubergine en AB Photos : 7, 9 et 10. 10 A. Lhoste-Drouineau 8. CTIFL

Agrosystèmes. 7. Aubergine en AB Photos : 7, 9 et 10. 10 A. Lhoste-Drouineau 8. CTIFL

8. Fraises en hors-sol.

8. Fraises en hors-sol.

9. Roses fleur coupée.

9. Roses fleur coupée.

10. Rosier paysager.

10. Rosier paysager.

Fig. 1 : Dynamiques de populations de phytoséiides par modalité de paillage en pourcentage de feuilles occupées (A) et nombre d'individus par feuilles (B), dans les conditions de l'essai sur aubergine en 2020

Fig. 1 : Dynamiques de populations de phytoséiides par modalité de paillage en pourcentage de feuilles occupées (A) et nombre d'individus par feuilles (B), dans les conditions de l'essai sur aubergine en 2020

Strate poumon11. Ligne de rosiers fleur coupée avec les deux Photos : 11 A. Lhoste-Drouineau12, 13 et 14. K. Cherfia - Astredhor Méditerranée

Strate poumon11. Ligne de rosiers fleur coupée avec les deux Photos : 11 A. Lhoste-Drouineau12, 13 et 14. K. Cherfia - Astredhor Méditerranée

strates végétales. 12. Transeius montdorensis.

strates végétales. 12. Transeius montdorensis.

13. Neoseiulussp.

13. Neoseiulussp.

14.Cunaxe.

14.Cunaxe.

Fig. 2 : Dynamique de population du prédateur Orius laevigatus (adultes et nymphes) et des pucerons Macrosiphum

Fig. 2 : Dynamique de population du prédateur Orius laevigatus (adultes et nymphes) et des pucerons Macrosiphum

16. Foyer de pucerons sur bouton de rose.

16. Foyer de pucerons sur bouton de rose.

17. Dégâts de thrips californien sur une rose fleur coupée.

17. Dégâts de thrips californien sur une rose fleur coupée.

Fig. 3 : Comparaison des dynamiques de populations de pucerons sur Rosa 'Sunny Pin's' avec ou sans plante anémophile dans les conditions de l'essai en pépinière (2020)

Fig. 3 : Comparaison des dynamiques de populations de pucerons sur Rosa 'Sunny Pin's' avec ou sans plante anémophile dans les conditions de l'essai en pépinière (2020)

Fig. 4 : Comparaison des sources alimentaires au niveau du nombre moyen d'individus par feuille dans les conditions de la culture d'aubergine

Fig. 4 : Comparaison des sources alimentaires au niveau du nombre moyen d'individus par feuille dans les conditions de la culture d'aubergine

Le projet Hab'Alim(1) vise à identifier et à mettre au point des solutions d'habitats naturels et de sources alimentaires pour des prédateurs et des parasitoïdes de plusieurs ravageurs des productions végétales sous serre et d'extérieur. L'intérêt d'apport de pollens, d'utilisation de plantes ressources et de matériaux naturels en tant qu'aliments et habitats a été évalué tant sur les arthropodes entomophages que phytophages.

Les leviers à l'essai pour sécuriser la lutte biologique

Le pollen ressource alimentaire, le lieu de ponte, l'abri naturel pour l'auxiliaire, l'alimentation exogène sont autant de leviers d'action pour favoriser la lutte biologique : la combinaison de ces solutions est novatrice dans une stratégie de protection des plantes. Ainsi, offrir à la fois « un gîte et un couvert » aux auxiliaires de cultures résumerait la stratégie d'innovation du projet Hab'Alim de 2020 à 2023.

Dix leviers habitats et ressources alimentaires sont caractérisés indépendamment au laboratoire et évalués sur quatre sites d'essais. Les habitats étudiés sont :

• des matériaux naturels d'origine animale (laine de brebis - photo 1) et d'origine végétale (cosses de sarrasin Fagopyrum esculentum - Polygonaceae - photo 2 ; chanvre Cannabis sativa - Cannabaceae ; Miscanthus miscanthus - Poaceae - photo 3) ;

• des plantes de service pouvant servir d'habitat pour des auxiliaires indigènes (viorne-tin ou laurier-tin Viburnum tinus - Adoxaceae ; grande aunée ou inule aunée Inula helenium - Asteraceae - photo 4) et l'alysson maritime.

Les compléments alimentaires exogènes d'origine animale étudiés sont :

• le produit Mitefood (Bioline), à base d'acarien des denrées (Thyreophagus entomophagus - Acaridae).

Ceux d'origine végétale sont :

• le produit Nutrimite (Biobest), à base de pollen de massette (Typha angustifolia -Poaceae) ;

• les plantes de service (laurier-tin V. tinus ; sorbaire à feuilles de sorbier ou fausse spirée Sorbaria sorbifolia - Rosaceae - photo 5 ; alysson maritime ou corbeille d'argent Lobularia maritima - Brassicaceae - photo 6).

Le thrips californien et les pucerons sont les principaux ravageurs-cibles dans le projet Hab'Alim. Cependant, les autres bioagresseurs (tétranyques, aleurodes, noctuelles, oïdium, rouille...) sont également pris en compte.

Agrosystèmes, matériel végétal et variables étudiées

Les agrosystèmes et les sites partenaires du projet

Selon les compétences et les savoir-faire, les

leviers intégrés dans les agrosystèmes sont

répartis sur cinq sites d'expérimentation et de recherche :

• aubergine en AB conduite sous tunnel et climat méridional sur une exploitation maraîchère (Grab - Avignon - photo 7) ;

• fraisier en hors-sol sous climat méridional (CTIFL - station de Balandran - photo 8) ;

• fraisier en hors-sol sous climat méditerranéen (Inrae - Sophia Antipolis) ;

• rose fleur coupée en hors-sol sous climat méditerranéen (Astredhor Méditerranée - Hyères - photo 9) ;

• rosier paysager sous climat semi-continental (Astredhor Est Horticole - Roville-aux-Chênes - photo 10).

Des tests de caractérisation des leviers sont conduits au laboratoire « écosystèmes inféodés aux agrosystèmes » à l'Inrae Sophia Antipolis.

De 2020 à 2021, les travaux visaient à améliorer l'installation des auxiliaires dans les cultures par le nourrissage et l'habitat. Pour cela, deux actions ont été conduites simultanément sur les sites d'expérimentation, l'une consistant à comparer des habitats à un témoin sans habitat, et l'autre à comparer des sources alimentaires à un témoin sans nourrissage.

L'impact était évalué sur les populations d'auxiliaires, de ravageurs et la qualité des récoltes. Parmi les leviers étudiés, ceux qui se révèlent favorables aux auxiliaires sont sélectionnés pour combiner à la fois un habitat et une ressource alimentaire par agrosystème.

Le matériel végétal

Dans le dispositif de l'essai sur rosier paysager quatre variétés de rosiers ont été suivies : Rosa rugos 'Rotes Meer', Rosa x floribunda 'Komarec', Rosa 'Kordwarul', Rosa 'Korselary' et Rosa 'The Fairy'.

L'essai PBI de la rose fleur coupée a été conduit sur les variétés 'Aziza !' et 'Cherry Avalanche+' pour toute la durée du projet. Pour les petits fruits rouges, les variétés précoces 'Dream' et 'Clery' ont été les supports de l'essai PBI en hors-sol. L'essai en AB a été conduit sur la variété d'aubergine 'Rioca' greffée sur 'Fortamino'.

Les variables étudiées, les suivis et expertises

Chaque essai se compose au minimum de trois répétitions des modalités étudiées dans des blocs homogènes, de parcelles élémentaires indépendantes avec des rangs ou des bordures de garde. Les suivis agronomiques couvrent les saisons de production commercialisable. Des vides sanitaires sont réalisés dans les cultures maraîchères, les roses fleurs coupées sont cultivées en continue sur plusieurs années et les rosiers paysagers rempotés pour la campagne d'essai suivante. Les suivis portent sur le rendement et qualité des productions, les effectifs de populations (thrips, phytoséiides), l'abondance des communautés (notation par classe des pucerons et autres ravageurs), les inventaires faunistiques dans les paillages et strates végétales. En présence d'un grand nombre de spécimens, des identifications d'espèces et la caractérisation des régimes alimentaires sont demandées aux experts entomologistes et acarologues (Anses, Sup-Agro Inrae, Flor'Insectes).

Favoriser l'habitat des auxiliaires

Matériaux naturels : dispositifs expérimentaux

Dans les conditions de laboratoire équipé d'enceintes climatisées, le chanvre, les cosses de sarrasin et la laine ont été soumis à six températures (6, 10, 15, 20, 25, et 30 °C) et complémentés de nourriture via l'ajout de pollen du Typha (Nutrimite) pour le maintien de l'auxiliaire Transeius montdorensis (Montyline). L'humidité relative a été maintenue à 50 %. La survie des populations a été étudiée durant 40 jours.

Les essais sous abri sur les cosses de sarrasin, broyats de chanvre, miscanthus et la laine ont été conduits dans les cultures d'aubergine en AB, de rose fleur coupée en hors-sol, et de rosiers paysagers en potées fleuries. Les comparaisons avec des témoins sont spécifiques à chaque agrosystème : le paillage plastique micro-perforé en polyéthylène dans l'essai aubergine ; la perlite, substrat de culture de la rose fleur coupée ; et le substrat de culture en pépinière des rosiers paysagers.

Matériaux naturels : résultats

Le chanvre soumis aux températures basses (10 à 15 °C) ou plus fortes (20 à 25 °C) a permis le maintien des populations de Transeius montdorensis. En effet, après 40 jours de suivi des populations, dans les conditions de laboratoire parfois drastiques, 20 à 25 % de la population a survécu aux basses températures et 40 % aux fortes températures, alors qu'elle a totalement disparu dans le témoin.

Dans les conditions de l'essai sur l'aubergine en AB, les cosses de sarrasin et, dans une moindre mesure, le chanvre, ont augmenté la prospection des phytoseiides sur la végétation et leur effectif comparativement au témoin paillage plastique (Figure 1).

La laine utilisée pour le paillage des rosiers paysagers a attiré des ennemis naturels des pucerons en plus grand nombre et sur des périodes plus prolongées comprenant des pics de pression. Cependant, l'abondance et la diversité des auxiliaires indigènes n'ont pas amélioré le contrôle des aphides durant les deux campagnes consécutives d'essais 2020 et 2021.

Les essais de cosses de sarrasin soumises à différentes températures, dans les conditions drastiques de laboratoire, révèlent que la capacité de survie des phytoséiides sur les cosses est la plus faible comparativement au chanvre et à la laine. En revanche, des résultats très encourageants ont été obtenus dans les cultures sous abri. Sous tunnel dans une culture d'aubergine en AB, en 2020, les cosses de sarrasin ont eu un effet positif sur les phytoseiides dès le printemps. En 2021, dans des conditions très proches, elles ont permis de diviser par trois les attaques de tétranyques. À la fin du printemps, les phytoséiides sont répartis sur l'ensemble des plantes, et en abondance sur la strate végétale basse de l'aubergine. Cet effet positif du paillage de cosses de sarrasin s'observe pendant une période au cours de laquelle l'humidité relative en journée est restée assez élevée, entre 50 et 60 %. Dans ces conditions, le contrôle des tétranyques a été nettement amélioré par le paillage « cosses de sarrasin ». Il semble que la combinaison des deux facteurs, climat + habitat, soit favorable aux phytoséiides (Figure 1).

En 2020, l'essai sur la rose fleur coupée révèle une augmentation significative des acariens prédateurs dans la strate basse dite « poumon » en faveur du paillage avec les cosses de sarrasin. En 2021, les acariens prédateurs de la strate haute dite « récolte » sont plus nombreux comparativement au témoin (photo 11). L'inventaire faunistique révèle la présence de trois espèces de phytoséiides (Phytoseiulus persimilis, Neoseiulus californicus et Neoseiulus barkeri), des cunaxes et d'autres spécimens d'acariens prédateurs dans les cosses de sarrasin (photos 12, 13 et 14). Au niveau de la strate du poumon six espèces de phytoséiides ont été identifiées (Neoseiulus cucumeris, N. californicus, N. barkeri, Euseius gallicus, Typhlodromus recki et une majorité de Transeius montdorensis). Les cosses de sarrasin augmentent et diversifient les populations de prédateurs des tétranyques, thrips (photo 15) et autres ravageurs. En revanche, aucun ennemi naturel des pucerons dont la pression est forte au printemps et en automne (photo 16) n'a été relevé.

Le miscanthus est le plus intéressant des matériaux étudié sur les rosiers paysagers. Il attire une diversité de prédateurs des pucerons qui ont été retrouvés sur les plantes. Étant donné le potentiel bénéfique sur la gestion des aphides en pépinière, le miscanthus est le levier habitat combiné avec une plante nourricière de la faune auxiliaire étudié dans l'essai 2022.

Plantes de service de type habitat : dispositifs expérimentaux

Dans l'essai rosier paysager, le facteur étudié est l'éloignement des plantes de production par rapport aux plantes de service.

Plantes-habitats pour la faune auxiliaire : résultats

Pour la viorne, ou laurier-tin, Viburnum tinus, le décalage de floraison en 2020 et le gel au début du printemps 2021 ont été autant de freins pour évaluer le contrôle des pucerons d'une faune auxiliaire potentiellement attirée par ces plantes de service. À la suite de la perte de plants due au gel, l'essai a été implanté sous un tunnel. Ces conditions climatiques ont été défavorables aux auxiliaires, mais ils ont été trop peu nombreux pour juger de l'effet du laurier-tin. Toutefois, V. tinus est l'espèce retenue pour être combinée avec le paillage miscanthus dans l'essai de 2022.

La grande aulnée, Inula helenium, bien qu'elle soit attractive des pollinisateurs, ne constitue pas un habitat pour les parasitoïdes des pucerons du fait de l'absence de leur hôte. En effet, pas un seul puceron n'a été relevé sur Inula dans les conditions de l'essai.

Les ressources alimentaires

Plantes de service nourricières : dispositifs expérimentaux

Dans l'essai sur fraisiers sous serre, un couple d'Orius laevigatus a été introduit dans un microcosme constitué :

- d'un plant de fraisier-contrôle sans ressources alimentaires supplémentaires ;

- d'un plant de fraisier avec apport d'oeufs - d'Ephestia kuehniella (Pyralidae), la source de nourriture référence ;

- d'un plant de fraisier et d'un plant d'alysson (habitat et source de nourriture) ;

- d'un plant de fraisier et d'un plant d'alysson avec oeufs d'Ephestia.

La longévité des prédateurs et le nombre de nymphes (fécondité) ont été mesurés pour chaque traitement en fin d'expérimentation (24 jours).

Plantes de service nourricières : résultats

• L'alysson maritime, Lobularia maritima

Dans les conditions de serre, l'alysson a favorisé et optimisé l'efficience de biocontrôle d'Orius laevigatus (Figure 2). À l'inverse, la présence uniquement des fleurs de fraisiers ne permet pas de soutenir la population du prédateur ; en conséquence, les conditions ont été favorables à l'expansion du ravageur.

La présence des oeufs d'Ephestia a accentué la croissance de la population du prédateur, probablement grâce à son effet sur la fécondation. La quantité de fruits par plant de fraisiers, qui peut être considérée comme proche du rendement chez un maraîcher, suit la même tendance significative : il est maximal pour les traitements contenant l'alysson, intermédiaire pour le traitement avec oeufs d'Ephestia seulement ; et faible pour le contrôle avec fraisiers uniquement.

• Le sorbaire à feuilles de sorbier, Sorbaria sorbifolia

L'espèce Sorbaria sorbifolia a été sélectionnée comme la plante nourricière, du fait de ses caractéristiques anémophiles. Son pollen, transporté par les vents et se déposant sur les rosiers en culture, peut à la fois attirer et retenir les auxiliaires sur la plante cultivée. Entre le 19 et 29 mai 2020, la proximité de S. sorbifolia des rosiers a montré que cette plante de service avait endigué la pression des pucerons sur ces mêmes rosiers. L'écart était d'une vingtaine de pucerons par rameau entre les deux modalités, un résultat en faveur de la plante de service anémophile. La population de pucerons s'est maintenue sans pression pendant un mois. Les températures estivales devenant létales pour les pucerons, ceux-ci ont disparu naturellement de l'essai (Figure 3).

En 2021, les conditions climatiques et les fortes pluies ont été défavorables à l'essai où quelques syrphes ont été observés à proximité des plantes de service. L'échantillonnage étant trop faible pour une caractérisation des régimes alimentaires, cette expertise a été reportée à l'année suivante.

Compléments alimentaires exogènes : dispositifs expérimentaux

Dans les essais conduits sur les cultures de rose fleur coupée et d'aubergine, le pollen de Typha (Nutrimite) et les proies (Mitefood) sont étudiés en comparaison avec un témoin sans nourrissage. L'impact sur les populations de Transeius montdorensis (Montyline) est évalué au niveau des strates végétales (basse, moyenne, haute et récolte). L'essai sur les fraisiers en hors-sol compare l'utilisation indépendante des phytoseiides Amblyseius swirskii et Transeius montdorensis testés avec deux modalités : l'une avec un complément alimentaire (Mitefood) l'autre sans.

Dans les trois agrosystèmes, les impacts sur le contrôle biologique du thrips californien sans négliger les autres ravageurs, la faune auxiliaire et les récoltes sont évalués.

Les compléments alimentaires exogènes : résultats

• Le pollen du Typha angustifolia (Nutrimite)

Dans les conditions de l'essai sur l'aubergine, le nourrissage par le pollen de Typha n'a pas permis d'améliorer la dispersion des auxiliaires observés, ni leurs effectifs. Aucun effet du nourrissage n'a été observé sur les effectifs de pucerons, car les prédateurs capables de consommer du pollen (chrysopes, coccinelles) étaient absents. Les résultats de l'essai sur la rose sont identiques étant donné que la population de phytoséiides n'a pas été augmentée et que la pression du thrips californien n'a pas été mieux contenue comparativement à la modalité sans nourrissage. De même, la population des pucerons n'a pas été contrôlée par des ennemis naturels potentiellement consommateurs du pollen de Typha. De plus, l'utilisation uniquement du pollen de Typha n'a sûrement pas permis de maximiser la survie des prédateurs sur les matériaux naturels dans des conditions de laboratoire.

En 2022, les tests de laboratoires seront renouvelés en cherchant à aller plus loin dans l'acquisition de références.

• Les acariens des denrées Thyreophagus entomophagus (Mitefood)

Dans les conditions de l'essai sur aubergine en AB, il apparaît que le nourrissage avec les proies (Mitefood) a permis une meilleure installation des acariens phytoséiides, avec un effet visible pendant un mois environ en début de culture. Le renouvellement du nourrissage réalisé fin juillet semble avoir aussi permis la remontée temporairement (sur trois semaines) de la population de phytoséiides (Figure 4).

Si en 2020, l'essai sur rose fleur coupée n'a pas fait apparaître de différence entre les leviers et le témoin, en 2021 les lâchers de proies étaient ciblés sur la strate du poumon où les acariens prédateurs sont bien présents. De fait, l'analyse des résultats révèle une augmentation des populations de phytoséiides significative dans la strate du poumon en faveur du nourrissage avec des Thyreophagus entomophagus. A priori le nourrissage avec Mitefood profiterait au prédateur des thrips et des aleurodes, Transeius montdorensis, sur les rosiers.

L'essai sur les fraisiers révèle une différence significative en faveur d'Amblyseius swirskii comparativement à T. montdorensis, tant au niveau de l'abondance des phytoséiides que du contrôle des thrips. Le nourrissage avec les proies augmente la population d'A. swirskii sans que l'écart soit significatif avec le témoin.

Combinaisons de leviers habitat/ressources alimentaires

Parmi les dix leviers caractérisés et évalués, cinq ont été retenus : les cosses de sarrasin et les acariens proies Thyreophagus entomophagus (Mitefood) pour les cultures sous abri, le miscanthus, le laurier-tin et le sorbier pour les cultures d'extérieur. En 2022, l'objectif est de combiner ces leviers habitat/ressource alimentaire qui devraient contribuer au maintien, à l'augmentation et la diversité de macro-organismes auxiliaires. L'étude de ces combinaisons vise à mieux contrôler les thrips, tétranyques, pucerons sans négliger les autres ravageurs. Le chanvre (matériau naturel), les plantes de service alysson maritime et laurier-tin ont été caractérisés comme utiles à la faune auxiliaire, ils sont étudiés en 2022 dans les stratégies de lutte contre les thrips sous serre et les pucerons en extérieur. Le coût et l'indicateur de fréquence de traitement (IFT) seront calculés pour les agrosystèmes dotés du nouveau concept habitat combiné à une ressource alimentaire.

(1) Le projet « Hab'Alim, habitats et sources alimentaires pour la faune auxiliaire des cultures sous abris et d'extérieur » a le concours financier du ministère de l'Agriculture (CasDar 2019) et de Val'Hor. Il est lauréat du prix décerné par la Société nationale de l'horticulture française pour la présentation de son poster aux Rencontres du végétal 2021 sur la recherche de ressources et de moyens pour accompagner durablement la transition agroécologique des entreprises et des territoires.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - La protection biologique intégrée des plantes, qu'elle soit réalisée par des lâchers inondatifs ou par conservation des auxiliaires de culture, ne peut être efficace et rentable que si ceux-ci se maintiennent durablement dans les cultures.

ÉTUDE - Dans ce but, le projet Hab'Alim de 2020 à 2023 vise à identifier et mettre au point les solutions d'habitat et d'alimentation pour des prédateurs et des parasitoïdes de plusieurs ravageurs de productions végétales sous serre et d'extérieur.

L'intérêt de matériaux naturels, d'apport de pollen, d'utilisation de plantes de service, de compléments alimentaires est étudié tant sur les populations d'utiles que de nuisibles.

RÉSULTATS - Parmi les matériaux naturels, le chanvre, les cosses de sarrasin et le miscanthus ont contribué à augmenter et/ou diversifier la faune auxiliaire. Dans les cultures sous abri, le paillage avec les cosses de sarrasin a amélioré le contrôle du thrips californien de la rose fleur coupée et des tétranyques de l'aubergine en AB.

Les espèces Lobularia maritima, Viburnum tinus et Sorbaria sorbifolia ont favorisé le développement d'acariens et d'insectes prédateurs, notamment la punaise Orius, prédatrice du thrips californien sur fraisier et les ennemis naturels des pucerons sur les rosiers paysagers.

Dans les conditions de culture de l'aubergine en AB, du fraisier en hors-sol et de la rose fleur coupée, l'apport du complément alimentaire Mitefood a augmenté les populations de phytoséiides, dont Transeius montdorensis et Amblyseius swirskii.

En conclusion, les résultats permettent d'élaborer des combinaisons d'habitats et de ressources alimentaires bénéfiques à la faune auxiliaire et de poursuivre le projet en 2022.

MOTS-CLÉS - Prédateurs, parasitoïdes, pollen, plantes de service, habitats, alimentation, compléments alimentaires.

POUR EN SAVOIR PLUS

CONTACTS : ange.drouineau@astredhor.fr

marie-anne.joussemet@astredhor.fr

nicolas.desneux@inrae.fr ; benjamin.gard@ctifl.fr

jerome.lambion@grab.fr ; marine.litzler@astredhor.fr

LIENS UTILES : https://www.rencontres-du-vegetal.fr/edition-2021/programme/habalim-habitats-et-sources-alimentaires-pour-la-faune-auxiliaire-des

https://www.snhf.org/wp-content/uploads/2021/04/3-LHOSTE-DROUINEAU-Poster-Session-1.pdf

https://www.grab.fr/wp-content/uploads/2021/05/M20PACA_01501_1-HABALIM.pdf.

https://www.astredhor.fr/videos-des-journees-d-astredhor-2020-17571.html

- Colloque de l'organisation internationale de la lutte biologique (ou IOBC) : https://www.youtube.com/watch?v=A68TriINvp4

BIBLIOGRAPHIE : - Messelink GJ, Bennison J, Alomar O, Ingegno BL, Tavella L, Shipp L, Palevsky E, Wäckers FL, 2014. Approaches to conserving natural enemy populations in greenhouse crops: current methods and future prospects. Biocontrol 59:377-393.

- Drouineau A., Descamps S., 2018. Compléments alimentaires pour la faune auxiliaire. Méthodes alternatives en protection des plantes. Guide technique Astredhor Méthodes alternatives en protection des plantes, p. 61-70.

- Lambion J, Franoux L, 2017. Agroecological infrastructures to enhance the presence of natural enemies against aphids. Acta Hortic, 1164, p. 419-424.

REMERCIEMENTS

à la société Bioline pour la fourniture gratuite des auxiliaires et des proies.

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :