Le machinisme est le parent pauvre de la formation, selon Julien Hérault, conseiller indépendant en agroéquipement. « Or la rentabilité d'une exploitation peut être augmentée en optimisant l'utilisation du matériel. » Pour devenir bon pédagogue et transmettre son savoir, il a suivi une licence pro tout en étant formateur dans une MFR(1). Mais de plus en plus sollicité par des agriculteurs pour des conseils sur telle ou telle problématique liée au matériel, il a décidé de créer sa propre structure de conseil en 2014. « Mon idée était de vulgariser des résultats d'essais, des diagnostics et des expertises, comme cela est fait en protection des cultures, pour aider les agriculteurs à mieux choisir et utiliser leur matériel. »
Conseils et diagnostics
Depuis, Julien Hérault conseille des agriculteurs en direct quand ils ont une problématique particulière (changement de pulvérisateur, de volumes, de vitesse de travail, de buses...) ou via les ETA(2), Ceta(3), GIEE(4), Cuma lors de formations sur les fondamentaux de la pulvérisation. « Il existe déjà des formations mais c'est plutôt de la délivrance de recettes (il faut telle buse à telle pression à telle vitesse pour que ça marche) qui ne permet pas à l'agriculteur de comprendre pourquoi. Donc, il ne peut pas s'adapter à de nouvelles situations. Je veux leur donner les clés de décision, être un OAD vivant ! » Julien Hérault réalise aussi des diagnostics de performance suivis de conseil avec un protocole de test mis au point et déposé sous la marque Farm Test. Il permet de valider les réglages de l'agriculteur à partir d'un traitement réel au champ ou bien un essai à l'eau claire dans la cour de la ferme.
Formations et essais
Les concessionnaires font également appel à lui pour former leurs techniciens. « Ils sont très compétents en mécanique mais pas en optimisation de traitement. Or, quand un agriculteur les appelle pour leur dire que la pulvérisation n'est pas satisfaisante, cela peut venir d'un mauvais réglage du matériel. Sans connaissances sur la pulvérisation, le technicien ne s'en rendra pas compte. » Parmi ses clients, Julien Hérault compte également des constructeurs (formation des équipes, essais de prototypes), la presse spécialisée (essais de comparaison) et des organismes d'événements. Pour ces essais, un protocole est construit pour chaque problématique : comparaison de l'efficacité de rinçage, de dérive avec ou sans adjuvant, de choix de buses, de hauteur de rampe, de plusieurs modèles de pulvérisateurs.... « J'interviens également en bac pro, en BTS machinisme ou productions végétales, en licence pro, en école d'ingénieur pour leur donner des clés de décision le plus tôt possible. » Quel que soit le client, les formations ont lieu à la fois en salle et sur le terrain avec un contrôle sur papier hydrosensible pour visualiser le résultat de la couverture d'un traitement et voir, dès les premiers mètres, si elle est optimale.
Bien choisir et bien investir
Parmi les questions posées à Julien Hérault, « quelle buse choisir ? » est celle qui revient le plus souvent. « Les agriculteurs perdent complètement pied face à cette problématique. Ils attendent une réponse simple de leur conseiller habituel, c'est-à-dire une couleur et un nom de buse. Or, il faut savoir quelle est la cible et le mode d'action du produit pour déterminer la classe de taille de gouttes à viser. Je leur explique comment y parvenir pour qu'ils puissent le faire de façon autonome. Une classification américaine me donne ensuite les buses et pressions nécessaires pour chaque classe. » Deuxième problématique : est-ce rentable pour moi d'investir dans de nouvelles technologies (coupure automatique, modulation de dose) ? « La technologie n'est pas toujours synonyme de performance car elle ne peut pas compenser le manque de compétences agronomiques. » Troisième problématique : quel pulvérisateur choisir lors d'un achat ? « Les agriculteurs sont capables d'établir un cahier des charges mais ont beaucoup de mal à hiérarchiser les critères. » Lors de cette prestation, Julien Hérault co-construit un cahier des charges le plus exhaustif possible en hiérarchisant les contraintes, les exigences et les souhaits. Il analyse ensuite les différentes offres reçues et les classe pour aider l'agriculteur à faire le bon choix.
Marges d'amélioration importantes
Après huit ans passés à conseiller et former aux quatre coins de l'Hexagone, en Belgique ou encore aux Antilles, Julien Hérault constate que la marge d'amélioration des traitements phytosanitaires est énorme. « En réglant son pulvérisateur de façon optimale, on gagne à la fois en termes de réduction de dose, d'impact environnemental et de coût (10 à 20 % d'économie très souvent). » Quant à l'avenir, les demandes des clients suivent les tendances du marché et celles de la réglementation. « Si demain, le coût des produits phyto triple, les questions pour optimiser les pulvérisateurs vont augmenter fortement, comme c'est le cas pour les épandages d'engrais actuellement. » Le développement de nouvelles technologies (automatisation des tâches ingrates, traitements phytosanitaires de précision) apportera aussi son lot de questions. « Mais leur utilisation ne sera valorisée que si les utilisateurs maîtrisent les fondamentaux de la pulvérisation. J'ai encore du pain sur la planche ! », conclut Julien Hérault.
(1) Maison familiale rurale.(2) Entreprises de travaux agricoles.(3) Centres d'études techniques agricoles.(4) Groupements d'intérêt économique et environnemental.
BIO EXPRESS JULIEN HÉRAULT
2006. BTSA Génie des équipements agricoles à la MFR de Loudéac (Côtes-d'Armor).
Formateur en machinisme agricole à la MFR de Bressuire (Deux-Sèvres).
2008. Installation sur l'exploitation familiale en double-actif à Mauléon (Deux-Sèvres).
2009. Licence pro « Gestion et accompagnement des parcours personnels et professionnels » en alternance à l'université de Lille (Nord).
2012. Conseiller technico-commercial chez Ribouleau Monosem à Largeasse (Deux-Sèvres).
2014. Conseiller-formateur indépendant en machinisme agricole à Mauléon.
2018. Obtient une bourse Nuffield pour mettre au point un outil pour définir un investissement optimal en agroéquipement (contrôle des charges de mécanisation).