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Tordeuses Visez les œufs en deuxième génération

La vigne - n°6 - mars 2012 - page 56

Plusieurs RCI très utilisés contre le vers de la grappe ont été retirés du marché. Mais de nouveaux produits sont apparus et donnent de bons résultats dans le cadre d’une utilisation préventive.

Comment s’est comporté ce ravageur en 2011 ?

} Les vers de la grappe (cochylis et eudémis) ont globalement été moins nombreux dans les vignobles en 2011.
« Les populations sont restées modérées. Les vignerons n’ont pas eu à intervenir en première génération », indique Sébastien Beauvallet, de la Coopérative agricole des Pays de la Loire, basée à Thouarcé (Maine-et-Loire).
« La pression a été plus faible dans le Bordelais, même si certaines parcelles ont été très touchées », remarque Ludivine Davidou, responsable expérimentations et protection du vignoble à la chambre d’agriculture de Gironde.
« Sur l’ensemble de la saison, la pression a été plus faible que les années précédentes. Les deuxième et troisième générations ont été moyennes mais nous avons enregistré pas mal de dégâts liés à la récolte abondante et aux grappes très compactes. Une seule chenille pouvait faire des attaques importantes », explique Marc Guisset, conseiller viticole à la chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales.

La G1 est-elle nuisible ?

} « En règle générale, les chenilles de première génération (G1) sont peu nuisibles. Il est rare de devoir intervenir. Les dégâts occasionnés sont surtout quantitatifs. La période à laquelle ils ont lieu permet une compensation du poids des grappes », détaille Ludivine Davidou de la chambre d’agriculture de Gironde. En Anjou,
« certains vignerons font, dès le départ, le choix de ne pas intervenir en G1 et laissent un bourgeon supplémentaire pour compenser les pertes éventuelles », observe Sébastien Beauvallet, de la CAPL. Pour Marc Guisset, de la chambre d’agriculture de Pyrénées-Orientales, traiter contre la G1 n’est nécessaire que dans les
« parcelles à fort historique d’infestation ».

Quand faut-il traiter la G1 et avec quels produits ?

} Dans certaines régions, le seuil est de 100 glomérules pour 100 grappes. En Alsace, il est de 30 glomérules pour 100 grappes. Dans les Pyrénées-Orientales, la chambre d’agriculture a défini un seuil de 7 à 8 chenilles pour 10 grappes.
« À partir de ce niveau, les dégâts sont importants. Il faut traiter systématiquement, avec un larvicide neurotoxique préventif (organo-phosphoré, pyréthrinoïde) à partir du début des éclosions », préconise Marc Guisset. L’équipe viticole de la chambre a également constaté en 2011 que l’utilisation de
Bacillus thuringiensis donne des résultats satisfaisants
« quand le développement végétatif de la vigne est homogène, au moment de l’application ».

Pour Sébastien Beauvallet, de la CAPL, en Anjou, la décision de traiter en G1 se raisonne en fonction du suivi des populations par le piégeage et par le comptage des glomérules. « Mais les vols sont souvent étalés et il est difficile de positionner le traitement de façon préventive. On intervient donc en curatif avec un produit doté d’une action larvicide, du spinosad (Success 4, Musdo 4) par exemple ou du chlorpyriphos-méthyl. Il faut les positionner sur jeunes larves entre le stade tête noire et le stade baladeur. Au-delà, une fois que les glomérules sont dans leurs nids, il est plus difficile de les atteindre. »

Pierre Rougier, chef produits insecticides chez DuPont, conseille de s’appuyer sur les indications du « Bulletin de santé du végétal » pour décider ou non de traiter. « En G1, je conseille d’appliquer de l’indoxacarbe. »

Quelle stratégie adopter en G2 ?

} En deuxième et troisième génération (G2 et G3), les vers de la grappe causent des dégâts non seulement quantitatifs mais surtout qualitatifs. Les larves perforent les baies, créant une porte d’entrée au botrytis et aux autres champignons. Il faut donc soigner la lutte et agir en préventif. Là encore, les piégeages, les observations dans les vignes et les données issues de la modélisation sont indispensables à la prise de décision. Il faut aussi prendre en compte l’historique de la parcelle en terme de pression botrytis et vers de la grappe.
« En G2, les populations sont plus groupées. En général, les vols durent quinze jours. Il est plus facile d’appliquer des ovicides, ce qui est en outre plus respectueux de l’environnement, souligne Sébastien Beauvallet, de la CAPL Anjou.
On peut opter pour du spinosad ou de l’indoxacarbe (Steward, Explicit) à positionner au stade tête noire pour bénéficier de leur rémanence maximale. La pulvérisation doit bien cibler les grappes et se faire dans de bonnes conditions météo. Il faut éviter les pluies. S’il pleut 20 ou 30 mm, le traitement est à refaire. »

« Il faut travailler en pré-éclosion et éviter les traitements de rattrapage, renchérit Ludivine Davidou, de la chambre d’agriculture de Gironde. Les chenilles de G2 occasionnent plus de dégâts en perforant les grains. Dans notre région, les parcelles concernées sont souvent qualitatives. Notre référence est aujourd’hui l’indoxacarbe, à appliquer en un traitement, sur pontes et jusqu’au stade tête noire. »

Marc Guisset a constaté une bonne efficacité en G2 du méthoxifénozide (Runner), un RCI, « positionné dès les premières pontes et jusqu’au stade tête noire ». Ce produit fait toutefois l’objet d’une restriction d’utilisation (une seule fois, un an sur deux, sur la même parcelle). « En G2 également, le spinosad a montré de très bons résultats dans nos essais, positionné du stade tête noire aux premières éclosions. Mais la période d’application optimale ne dure que quelques jours. » Les nouveaux produits Coragen et Affirm ont par ailleurs montré des effets concluants l’année dernière (voir encadré page ci-contre).

Dans quelles conditions faut-il renouveler le traitement de G2 ?

} Une seconde application peut être nécessaire en cas de forte pression. Il faut alors opter pour un produit qui provoque une action de choc sur les larves, comme un organo-phosphoré ou un pyréthrinoïde. Pierre Rougier, de DuPont, conseille des observations régulières pour décider au mieux de la nécessité de renouveler le traitement.
« Si l’on constate qu’un vol s’arrête d’un coup et reprend une semaine après, il faut être très vigilant. Il est bon d’aller visiter ses vignes au moins une fois par semaine. »

Et en G3 ?

} La G3 ne concerne que l’eudémis. Les pontes sur baies débutent fin juillet. La décision de traiter peut être conditionnée aux observations de perforations à la véraison ou être prise d’emblée, tant elle peut entraîner des dégâts quantitatifs et qualitatifs.
« Il est difficile d’anticiper la dangerosité des populations. Dans nos essais, nous avons constaté que les résultats étaient systématiquement meilleurs si l’on traite les trois générations, observe Marc Guisset, de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales.
En G3, on peut utiliser du méthoxifénozide, jusqu’au 15 août, ou du spinosad. » À cette période, il faut dans tous les cas tenir compte du délai avant la récolte des produits.
« L’indoxacarbe est, de ce point de vue, intéressant, avec un DAR de dix jours, très avantageux si l’on prévoit des vendanges précoces », remarque Pierre Rougier, de DuPont.

Existe-t-il une relation entre les générations ?

} « Une forte population en G1 ne va pas forcément engendrer une nombreuse progéniture en G2, car beaucoup de paramètres ont une influence et font qu’un potentiel s’exprime ou pas. Des bio-agresseurs peuvent ainsi rendre les raisins moins appétents pour les chenilles et les dégâts sont alors limités », explique Pierre Rougier, chef produits insecticides chez DuPont.

« Il n’a pas été montré de liens entre les générations, avance Marc Guisset, de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales. Les conditions climatiques ont un impact et d’autres facteurs aussi sans doute, comme les stades de la vigne. »

Un potentiel important au départ peut entraîner des dégâts importants si les conditions sont favorables, notamment au niveau des températures et de la météo. « Mais des températures élevées peuvent faire avorter les œufs, ou les pluies peuvent les lessiver, détaille Sébastien Beauvallet, de la CAPL Anjou. Une population moyenne peut aussi faire des dégâts significatifs. »

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