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Typicité : cultivons nos différences

La vigne - n°75 - mars 1997 - page 0

La typicité constitue le socle des appellations françaises. Même si le consommateur n'en a qu'une idée assez floue et malgré les critiques que connaît l'agrément, elle demeure un atout de poids face aux autres pays producteurs.

La typicité constitue le socle des appellations françaises. Même si le consommateur n'en a qu'une idée assez floue et malgré les critiques que connaît l'agrément, elle demeure un atout de poids face aux autres pays producteurs.

La table ronde qui clôturait les dernières rencontres rhodaniennes en Avignon avait pour thème ' La typicité, un argument commercial pour les AOC '. Vaste programme. Encore faut-il savoir ce qui se cache derrière ce terme. ' On devrait parler de typicités au pluriel, juge Philippe Treutenaere, PDG de Courvoisier groupe Calvet. Il faut accepter la notion de diversité. La typicité est complexe, différente selon les cépages, les terroirs... Et il faut encourager les différences. ' Patrick Aigrain, ancien de l'Onivins, aujourd'hui conseiller pour le cabinet DVA-consultant, se pose la question sous un autre angle : ' Typicité pour qui? Pour le consommateur, il y a deux degrés de typicité. Le premier correspond à un standard, une norme donnée. C'est la marque, le fond de rayon en grandes et moyennes surfaces (GMS). Le second correspond à l'expression de toutes les potentialités, en admettant toute leur complexité. C'est le stade de l'amateur, à la recherche d'une découverte '.Mais Philippe Treutenaere s'empresse d'ajouter qu'il faut éviter le clivage petits volumes typiques-grands volumes atypiques. Le Champenois Marc Brugnon définit lui aussi deux typicités : celle issue de l'héritage, de la tradition, qui existe depuis plusieurs siècles et dont s'est inspiré l'Inao, et celle construite de toutes pièces par des groupes financiers qui plantent plus sur des terrains que sur des terroirs.Pour Jérôme Quiot, président du Comité interprofessionnel des vins de la vallée du Rhône, ' c'est parce que le terme ' qualité ' est aujourd'hui dévalorisé qu'on use de ' typicité ' ou de ' caractère '. Qualité veut dire aujourd'hui sans vache folle, sans danger pour le consommateur ', ajoute-t-il. Cette typicité qui fait, semble-t-il, notre richesse, comment l'amener jusqu'au consommateur? Tout le monde semble d'accord sur un point : à l'exception d'une mince frange de la population, l'acheteur de vin a besoin de repères. Frédéric Brochet, de l'école pratique des hautes études, observe que ' le vin est un produit de culture. Or, la culture générale est en déliquescence, notamment chez les jeunes. Ceux-ci ont besoin de modèles simples '.' Le consommateur distingue assez mal la hiérarchie des produits, renchérit Patrick Aigrain. Par rapport à la totalité des identifiants, il fonctionne avec un seul : la forme de la bouteille, la marque, l'appellation... Devant un linéaire avec 306 références dans un hypermarché moyen, il peut être perdu. Et quand il ne connaît pas, il élimine les extrêmes : les premiers prix et le haut de gamme. Se pose alors un problème de positionnement des prix, pas facile à résoudre. ' Pour Philippe Treutenaere, le consommateur veut en premier lieu connaître l'origine du vin, puis le cépage et enfin le millésime. ' Il faut l'informer sur le cépage ', en déduit-il, avis loin d'être partagé par tous au sein de l'Inao.Les liens typicité-qualité ont largement été évoqués : ' La typicité d'un vin au pot au comptoir est parfois bien éloignée de la qualité ', témoignait Thierry Desseauve, rédacteur en chef de la Revue des vins de France. Jérôme Quiot, en charge de la présidence du Comité national des vins et eaux-de-vie de l'Inao, se devait de réagir : ' Ceux qui dégustent lors de l'agrément sont des vignerons, des négociants, des techniciens mais pas des gens de l'Inao. On peut toujours accuser l'Inao mais ce sont les syndicats qui ne font pas leur travail! Il y a deux réformes de l'agrément en cours. Les syndicats doivent dire avant le mois de mai ce qu'ils veulent faire de l'agrément. Et des discussions sont entamées avec la CNAOC... L'agrément n'est pas définitif. La mise en bouteilles, le transport, le stockage doivent être considérés. 'Marc Brugnon, ancien président du Syndicat des vignerons champenois, ajoute que ' la typicité relève d'une chaîne de production et des erreurs sont parfois commises '. En effet, cette typicité peut s'envoler avec une hausse des rendements, des enrichissements trop importants ou l'extension inconsidérée d'une aire d'appellation. Il constate cependant : ' La typicité évolue. Quand il y a des syndicats vivants à la base, les textes changent. En Champagne, par exemple, le temps minimum entre le tirage et la sortie des caves sera bientôt porté de douze à quinze mois '. Jérôme Quiot appelle, lui, à la prudence quant aux nouvelles technologies ou à l'entrée de nouveaux cépages. ' Le produit d'appellation d'origine contrôlée se doit d'être un produit naturel. Il faut rester strict sur l'évolution des techniques. Cependant, rien n'est figé et il serait aberrant de rester là où l'on en est. '' La typicité des vins français est un atout extraordinaire, conclut un orateur. Un Californien me racontait qu'il avait fait très tôt du chardonnay et du cabernet sauvignon. Ça a bien marché au début. Mais les concurrents se sont multipliés. Et il regrette aujourd'hui de ne pas avoir de système AOC pour expliquer pourquoi son cabernet est mieux que les autres. ' Jérôme Quiot ajoute que les Britanniques sont intéressés par la typicité, le caractère de nos produits. ' Ils disent de nous : ' Vous les Français, vous pouvez être très bons mais êtes-vous sûrs de le vouloir? Les étrangers ont fait plus de progrès que vous '. On n'a peut-être pas toujours fait les efforts suffisants. '

La table ronde qui clôturait les dernières rencontres rhodaniennes en Avignon avait pour thème ' La typicité, un argument commercial pour les AOC '. Vaste programme. Encore faut-il savoir ce qui se cache derrière ce terme. ' On devrait parler de typicités au pluriel, juge Philippe Treutenaere, PDG de Courvoisier groupe Calvet. Il faut accepter la notion de diversité. La typicité est complexe, différente selon les cépages, les terroirs... Et il faut encourager les différences. ' Patrick Aigrain, ancien de l'Onivins, aujourd'hui conseiller pour le cabinet DVA-consultant, se pose la question sous un autre angle : ' Typicité pour qui? Pour le consommateur, il y a deux degrés de typicité. Le premier correspond à un standard, une norme donnée. C'est la marque, le fond de rayon en grandes et moyennes surfaces (GMS). Le second correspond à l'expression de toutes les potentialités, en admettant toute leur complexité. C'est le stade de l'amateur, à la recherche d'une découverte '.Mais Philippe Treutenaere s'empresse d'ajouter qu'il faut éviter le clivage petits volumes typiques-grands volumes atypiques. Le Champenois Marc Brugnon définit lui aussi deux typicités : celle issue de l'héritage, de la tradition, qui existe depuis plusieurs siècles et dont s'est inspiré l'Inao, et celle construite de toutes pièces par des groupes financiers qui plantent plus sur des terrains que sur des terroirs.Pour Jérôme Quiot, président du Comité interprofessionnel des vins de la vallée du Rhône, ' c'est parce que le terme ' qualité ' est aujourd'hui dévalorisé qu'on use de ' typicité ' ou de ' caractère '. Qualité veut dire aujourd'hui sans vache folle, sans danger pour le consommateur ', ajoute-t-il. Cette typicité qui fait, semble-t-il, notre richesse, comment l'amener jusqu'au consommateur? Tout le monde semble d'accord sur un point : à l'exception d'une mince frange de la population, l'acheteur de vin a besoin de repères. Frédéric Brochet, de l'école pratique des hautes études, observe que ' le vin est un produit de culture. Or, la culture générale est en déliquescence, notamment chez les jeunes. Ceux-ci ont besoin de modèles simples '.' Le consommateur distingue assez mal la hiérarchie des produits, renchérit Patrick Aigrain. Par rapport à la totalité des identifiants, il fonctionne avec un seul : la forme de la bouteille, la marque, l'appellation... Devant un linéaire avec 306 références dans un hypermarché moyen, il peut être perdu. Et quand il ne connaît pas, il élimine les extrêmes : les premiers prix et le haut de gamme. Se pose alors un problème de positionnement des prix, pas facile à résoudre. ' Pour Philippe Treutenaere, le consommateur veut en premier lieu connaître l'origine du vin, puis le cépage et enfin le millésime. ' Il faut l'informer sur le cépage ', en déduit-il, avis loin d'être partagé par tous au sein de l'Inao.Les liens typicité-qualité ont largement été évoqués : ' La typicité d'un vin au pot au comptoir est parfois bien éloignée de la qualité ', témoignait Thierry Desseauve, rédacteur en chef de la Revue des vins de France. Jérôme Quiot, en charge de la présidence du Comité national des vins et eaux-de-vie de l'Inao, se devait de réagir : ' Ceux qui dégustent lors de l'agrément sont des vignerons, des négociants, des techniciens mais pas des gens de l'Inao. On peut toujours accuser l'Inao mais ce sont les syndicats qui ne font pas leur travail! Il y a deux réformes de l'agrément en cours. Les syndicats doivent dire avant le mois de mai ce qu'ils veulent faire de l'agrément. Et des discussions sont entamées avec la CNAOC... L'agrément n'est pas définitif. La mise en bouteilles, le transport, le stockage doivent être considérés. 'Marc Brugnon, ancien président du Syndicat des vignerons champenois, ajoute que ' la typicité relève d'une chaîne de production et des erreurs sont parfois commises '. En effet, cette typicité peut s'envoler avec une hausse des rendements, des enrichissements trop importants ou l'extension inconsidérée d'une aire d'appellation. Il constate cependant : ' La typicité évolue. Quand il y a des syndicats vivants à la base, les textes changent. En Champagne, par exemple, le temps minimum entre le tirage et la sortie des caves sera bientôt porté de douze à quinze mois '. Jérôme Quiot appelle, lui, à la prudence quant aux nouvelles technologies ou à l'entrée de nouveaux cépages. ' Le produit d'appellation d'origine contrôlée se doit d'être un produit naturel. Il faut rester strict sur l'évolution des techniques. Cependant, rien n'est figé et il serait aberrant de rester là où l'on en est. '' La typicité des vins français est un atout extraordinaire, conclut un orateur. Un Californien me racontait qu'il avait fait très tôt du chardonnay et du cabernet sauvignon. Ça a bien marché au début. Mais les concurrents se sont multipliés. Et il regrette aujourd'hui de ne pas avoir de système AOC pour expliquer pourquoi son cabernet est mieux que les autres. ' Jérôme Quiot ajoute que les Britanniques sont intéressés par la typicité, le caractère de nos produits. ' Ils disent de nous : ' Vous les Français, vous pouvez être très bons mais êtes-vous sûrs de le vouloir? Les étrangers ont fait plus de progrès que vous '. On n'a peut-être pas toujours fait les efforts suffisants. '

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