Depuis que l'on a amélioré la maîtrise de l'élevage des vins blancs sur lies, des vignerons et des oenologues se tournent vers les rouges. Ils cherchent à savoir s'ils ne bénéficieraient pas, eux aussi, de ce mode d'élevage. La réponse est plus nuancée que dans le premier cas.
Depuis que l'on a amélioré la maîtrise de l'élevage des vins blancs sur lies, des vignerons et des oenologues se tournent vers les rouges. Ils cherchent à savoir s'ils ne bénéficieraient pas, eux aussi, de ce mode d'élevage. La réponse est plus nuancée que dans le premier cas.
Les blancs élevés sur lies en ressortent transformés. Ils sont plus gras, plus stables et plus longs en bouche. Leur amélioration est telle que l'on ne cesse de se demander comment appliquer le même traitement aux rouges. Eux ne font pas bon ménage avec leurs lies. Ils risquent de perdre de la couleur car les levures en fixent à leur surface. Ils risquent surtout la réduction. Jusqu'à présent, on ne connaissait qu'imparfaitement les causes de l'apparition de ce défaut qui devient rapidement tenace. C'était une raison supplémentaire de s'en méfier. Or, cette raison n'est plus. Des travaux conduits à la faculté d'oenologie de Bordeaux ont détaillé l'origine des goûts de réduit (voir La Vigne n° 68). Dans le cas des blancs, on sait désormais qu'ils proviennent d'un excès de bourbes ou de sulfites ou de la surpression qui règne au fond des grandes cuves. A condition d'éviter ces erreurs, on se préserve de toute déviation vers des odeurs d'oeuf pourri, de chou cuit ou de bock.Après les succès obtenus sur les blancs, il était tentant d'appliquer les mêmes méthodes aux rouges. Dans le Sud-Ouest, plusieurs vignerons et oenologues en ont fait l'essai. Certains logent leurs vins en barriques, d'autres en cuve. Les premiers entonnent des vins troubles dont la fermentation alcoolique est achevée et dont la malo se fera sous bois. Ils ne les sulfitent pas et ne les soutirent pas. Ils les bâtonnent régulièrement afin d'assurer la diffusion du gras et la protection du haut de la barrique contre l'oxydation.En fait, ils élèvent leurs rouges comme leurs blancs. Quelques-uns sont convaincus de l'intérêt de la méthode. D'autres sont bien plus sceptiques. ' Ce que l'on gagne au départ en termes de rondeur s'estompe rapidement, remarque Jean-Philippe Fort, du laboratoire Rolland à Libourne. A la fin de l'élevage, il n'y a pas de différence significative. C'est la conclusion à laquelle nous parvenons après deux ans d'essais dans quelques propriétés. Cependant, la méthode peut être intéressante pour mettre en valeur les dégustations en primeur. ' Cet oenologue confirme les pertes de couleur, même si elles ne sont pas perceptibles à l'oeil nu quand on travaille des vins très riches. En Bordelais, ces essais ont un caractère de nouveauté et intriguent beaucoup de monde. En Bourgogne, l'élevage sur lies fines relève de la tradition dont l'un des principes dit qu'il ne faut pas se précipiter pour clarifier les vins. Dans cette région, les vignerons qui entonnent des rouges troubles ne les bâtonnent pas. Ils se contentent de les surveiller très régulièrement. Dès qu'apparaissent des signes de réduction, ils les soutirent. Le moment d'opérer cette séparation dépend des millésimes. Certains se prêtent au séjour sur lies pendant toute la durée de l'élevage. D'autres au contraire s'y refusent très tôt. Les causes de ces variations tiennent en grande partie à l'état sanitaire de la récolte car elles sont une conséquence de l'importance du sulfitage.D'autres essais quittent le cadre de la barrique au profit des grands volumes. Ils ont lieu dans la région de Madiran, sous l'impulsion de Patrick Ducourneau qui est à l'origine de la technique d'apport d'oxygène par microbullage. Ce vigneron propose là encore d'appliquer aux rouges la même technique qu'aux blancs. Il les sépare de leurs lies pendant quelques semaines, le temps qu'elles perdent leur pouvoir réducteur puis il les rajoute au vin. Pendant la période de conservation séparée, il les brasse régulièrement. ' Au bout de deux mois, elles changent totalement d'aspect, précise-t-il. Elles perdent leur caractère filant et deviennent liquide. 'Lors de ses premières tentatives, Patrick Ducourneau ne récupérait que les lies fines issues du premier soutirage après la fin de la fermentation malolactique. ' Au bout de quelques mois de contact avec le vin, elles disparaissent totalement, observe-t-il. A leur place, il reste une croûte au fond de la cuve. ' Le même phénomène se produit dans les barriques bourguignonnes. Maintenant, il s'intéresse également aux lies de fermentation alcoolique, bien qu'il ne soit pas facile de les récupérer. Dans tous les cas, il combine le microbullage à l'élevage sur lies. Le but qu'il poursuit est de compenser le manque de gras dont souffre le tannat qui est le principal cépage de l'appellation Madiran.Pour l'instant, il ne préconise qu'un principe : le microbullage doit démarrer très tôt pour qu'il structure les vins avant l'ajout des lies. Elles consomment en effet de très fortes quantités d'oxygène, ce qui est contradictoire avec l'évolution des rouges qui en ont besoin, ne serait-ce que pour stabiliser la couleur. La combinaison de ces deux techniques est à réserver en priorité aux vins charpentés. ' Les petits vins risquent de se faire capter par leurs lies ', prévient notre vigneron. En dehors de ces deux recommandations, il reste beaucoup de choses à préciser quant au volume de lies à rajouter, à la fréquence de leur remise en suspension et à l'importance de l'apport d'oxygène, critère qui doit être relié au trouble du vin car dès que les corps des levures sont en suspension, ce sont eux qui consomment l'oxygène en priorité. L'élevage des rouges sur lies n'est pas encore entré dans le domaine des pratiques courantes. Cela n'empêche pas plusieurs domaines de se lancer dans l'aventure.
Les blancs élevés sur lies en ressortent transformés. Ils sont plus gras, plus stables et plus longs en bouche. Leur amélioration est telle que l'on ne cesse de se demander comment appliquer le même traitement aux rouges. Eux ne font pas bon ménage avec leurs lies. Ils risquent de perdre de la couleur car les levures en fixent à leur surface. Ils risquent surtout la réduction. Jusqu'à présent, on ne connaissait qu'imparfaitement les causes de l'apparition de ce défaut qui devient rapidement tenace. C'était une raison supplémentaire de s'en méfier. Or, cette raison n'est plus. Des travaux conduits à la faculté d'oenologie de Bordeaux ont détaillé l'origine des goûts de réduit (voir La Vigne n° 68). Dans le cas des blancs, on sait désormais qu'ils proviennent d'un excès de bourbes ou de sulfites ou de la surpression qui règne au fond des grandes cuves. A condition d'éviter ces erreurs, on se préserve de toute déviation vers des odeurs d'oeuf pourri, de chou cuit ou de bock.Après les succès obtenus sur les blancs, il était tentant d'appliquer les mêmes méthodes aux rouges. Dans le Sud-Ouest, plusieurs vignerons et oenologues en ont fait l'essai. Certains logent leurs vins en barriques, d'autres en cuve. Les premiers entonnent des vins troubles dont la fermentation alcoolique est achevée et dont la malo se fera sous bois. Ils ne les sulfitent pas et ne les soutirent pas. Ils les bâtonnent régulièrement afin d'assurer la diffusion du gras et la protection du haut de la barrique contre l'oxydation.En fait, ils élèvent leurs rouges comme leurs blancs. Quelques-uns sont convaincus de l'intérêt de la méthode. D'autres sont bien plus sceptiques. ' Ce que l'on gagne au départ en termes de rondeur s'estompe rapidement, remarque Jean-Philippe Fort, du laboratoire Rolland à Libourne. A la fin de l'élevage, il n'y a pas de différence significative. C'est la conclusion à laquelle nous parvenons après deux ans d'essais dans quelques propriétés. Cependant, la méthode peut être intéressante pour mettre en valeur les dégustations en primeur. ' Cet oenologue confirme les pertes de couleur, même si elles ne sont pas perceptibles à l'oeil nu quand on travaille des vins très riches. En Bordelais, ces essais ont un caractère de nouveauté et intriguent beaucoup de monde. En Bourgogne, l'élevage sur lies fines relève de la tradition dont l'un des principes dit qu'il ne faut pas se précipiter pour clarifier les vins. Dans cette région, les vignerons qui entonnent des rouges troubles ne les bâtonnent pas. Ils se contentent de les surveiller très régulièrement. Dès qu'apparaissent des signes de réduction, ils les soutirent. Le moment d'opérer cette séparation dépend des millésimes. Certains se prêtent au séjour sur lies pendant toute la durée de l'élevage. D'autres au contraire s'y refusent très tôt. Les causes de ces variations tiennent en grande partie à l'état sanitaire de la récolte car elles sont une conséquence de l'importance du sulfitage.D'autres essais quittent le cadre de la barrique au profit des grands volumes. Ils ont lieu dans la région de Madiran, sous l'impulsion de Patrick Ducourneau qui est à l'origine de la technique d'apport d'oxygène par microbullage. Ce vigneron propose là encore d'appliquer aux rouges la même technique qu'aux blancs. Il les sépare de leurs lies pendant quelques semaines, le temps qu'elles perdent leur pouvoir réducteur puis il les rajoute au vin. Pendant la période de conservation séparée, il les brasse régulièrement. ' Au bout de deux mois, elles changent totalement d'aspect, précise-t-il. Elles perdent leur caractère filant et deviennent liquide. 'Lors de ses premières tentatives, Patrick Ducourneau ne récupérait que les lies fines issues du premier soutirage après la fin de la fermentation malolactique. ' Au bout de quelques mois de contact avec le vin, elles disparaissent totalement, observe-t-il. A leur place, il reste une croûte au fond de la cuve. ' Le même phénomène se produit dans les barriques bourguignonnes. Maintenant, il s'intéresse également aux lies de fermentation alcoolique, bien qu'il ne soit pas facile de les récupérer. Dans tous les cas, il combine le microbullage à l'élevage sur lies. Le but qu'il poursuit est de compenser le manque de gras dont souffre le tannat qui est le principal cépage de l'appellation Madiran.Pour l'instant, il ne préconise qu'un principe : le microbullage doit démarrer très tôt pour qu'il structure les vins avant l'ajout des lies. Elles consomment en effet de très fortes quantités d'oxygène, ce qui est contradictoire avec l'évolution des rouges qui en ont besoin, ne serait-ce que pour stabiliser la couleur. La combinaison de ces deux techniques est à réserver en priorité aux vins charpentés. ' Les petits vins risquent de se faire capter par leurs lies ', prévient notre vigneron. En dehors de ces deux recommandations, il reste beaucoup de choses à préciser quant au volume de lies à rajouter, à la fréquence de leur remise en suspension et à l'importance de l'apport d'oxygène, critère qui doit être relié au trouble du vin car dès que les corps des levures sont en suspension, ce sont eux qui consomment l'oxygène en priorité. L'élevage des rouges sur lies n'est pas encore entré dans le domaine des pratiques courantes. Cela n'empêche pas plusieurs domaines de se lancer dans l'aventure.