Jusqu'à la Révolution, les évêques, presque tous nobles, manifestent leur intérêt pour les vignobles de qualité.
Jusqu'à la Révolution, les évêques, presque tous nobles, manifestent leur intérêt pour les vignobles de qualité.
Chez les Romains, le vin est un objet de commerce et de luxe dont les grands ne peuvent se passer. L'agronome latin Columelle ne dit-il pas que la vigne est ' au-dessus des autres plantes '? Au début de l'ère chrétienne, les prélats prennent la succession des tribuns. Au cours des siècles, le vin qui donne l'allégresse et parfois l'ivresse, s'est chargé de convivialité. Servi dans les grandes occasions, il honore ceux que l'on reçoit. A partir du IVe siècle, le christianisme apporte son renfort dans la valeur attribuée au vin. La religion a besoin de vin pour célébrer le mystère de la communion et même si les chrétiens sont à l'origine peu nombreux, il faut suffisamment de vin puisque tous les fidèles communient sous les deux espèces. N'est-ce pas Martin, un saint moine, évêque originaire de Pannonie (Hongrie), qui a implanté la vigne en Touraine dès la fin du IVe siècle?Quand l'empire romain s'écroule, au Ve siècle, la religion chrétienne dispose de solides fondations en Gaule. Chaque cité a son évêque qui, à la suite de la défaillance de l'autorité impériale, devient le premier personnage de la cité. Ne dit-on pas que saint Rémi qui baptisa Clovis, a planté lui-même une vigne en pays rémois? Au VIIe siècle, saint Didier, évêque de Cahors, expédie à Paul, évêque de Verdun, dix tonneaux de vin, et Théodulf, évêque d'Orléans à l'époque de Charlemagne, est honoré du titre de ' père des vignes '. Dans sa ville, l'évêque est alors le personnage le plus en vue. C'est dans son palais épiscopal que les grands s'arrêtent, comme dans une auberge, quand ils voyagent à marche lente, d'étape en étape. C'est lui qui reçoit le roi et qui lui offre les meilleurs vins tirés de sa cave.Pour satisfaire aux règles de l'hospitalité et aux nécessités du culte, les évêques doivent donc entretenir un vignoble de qualité dans la banlieue de leur ville. Le vignoble, source de prestige, est aussi source de profit car les excédents se vendent et l'argent alimente les finances épiscopales. Bien traités, les grands savent aussi donner et élargir le patrimoine de l'Eglise. A partir de l'époque de Charlemagne, l'institution d'un collège de chanoines, adjoint au siège épiscopal, contribue à développer la culture de la vigne. L'évêque lui-même cherche parfois à l'éloigner de sa capitale pour goûter les plaisirs de la campagne. C'est ainsi que Nivard fonde, vers 662, le monastère de Saint-Pierre-d'Hautvillers, sur la rive droite de la Marne, face à Epernay. C'est là que dom Pérignon, mille ans après, oeuvre dans le secret de sa cave pour élaborer le premier champagne.Grégoire de Tours raconte, à la fin du VIe siècle, que son arrière-grand-père, saint Grégoire, était évêque de Langres et qu'il n'y avait pas alors d'évêque de Dijon. Mais il préférait résider dans cette ville parce qu'il avait ' vers le couchant, des coteaux très fertiles et couverts de vignes '. De même, l'évêque de Saint-Quentin se morfondait dans son siège épiscopal; il obtint dès le début du VIIe siècle, le transfert de son évêché à Noyon, dans les coteaux de vigne qui bordaient l'Oise.Les monastères, dont les fondations se multiplient, suivent la même politique car la règle monastique, même sévère, n'exclut pas le vin considéré comme un aliment et une boisson. Les saints évêques ne répugnent pas à faire des miracles pour honorer leurs hôtes : saint Aisy, évêque de Verdun au VIe siècle, s'attire les bonnes grâces de Childebert II, roi d'Austrasie, en l'accueillant dignement, c'est-à-dire en maintenant plein le tonneau dans lequel le roi et sa suite puisent à satiété pendant toute la réception!Jusqu'à la Révolution, les évêques, presque tous nobles, manifestent leur intérêt pour les vignobles de qualité. La Révolution, en vendant les biens de l'Eglise, porte un coup mortel à cette tradition. Mais l'évêque sait encore honorer ses hôtes en leur servant du vin de qualité. Mgr Myriel, évêque de Digne en 1815, presque un saint, accueille simplement Jean Valjean, le forçat libéré et sans abri, en mettant sur sa table une bouteille de vin de Mauves (cru de Saint-Joseph), de quoi redonner force et courage au plus malheureux chrétien qu'il reçoit à sa table dans sa grande bonté...
Chez les Romains, le vin est un objet de commerce et de luxe dont les grands ne peuvent se passer. L'agronome latin Columelle ne dit-il pas que la vigne est ' au-dessus des autres plantes '? Au début de l'ère chrétienne, les prélats prennent la succession des tribuns. Au cours des siècles, le vin qui donne l'allégresse et parfois l'ivresse, s'est chargé de convivialité. Servi dans les grandes occasions, il honore ceux que l'on reçoit. A partir du IVe siècle, le christianisme apporte son renfort dans la valeur attribuée au vin. La religion a besoin de vin pour célébrer le mystère de la communion et même si les chrétiens sont à l'origine peu nombreux, il faut suffisamment de vin puisque tous les fidèles communient sous les deux espèces. N'est-ce pas Martin, un saint moine, évêque originaire de Pannonie (Hongrie), qui a implanté la vigne en Touraine dès la fin du IVe siècle?Quand l'empire romain s'écroule, au Ve siècle, la religion chrétienne dispose de solides fondations en Gaule. Chaque cité a son évêque qui, à la suite de la défaillance de l'autorité impériale, devient le premier personnage de la cité. Ne dit-on pas que saint Rémi qui baptisa Clovis, a planté lui-même une vigne en pays rémois? Au VIIe siècle, saint Didier, évêque de Cahors, expédie à Paul, évêque de Verdun, dix tonneaux de vin, et Théodulf, évêque d'Orléans à l'époque de Charlemagne, est honoré du titre de ' père des vignes '. Dans sa ville, l'évêque est alors le personnage le plus en vue. C'est dans son palais épiscopal que les grands s'arrêtent, comme dans une auberge, quand ils voyagent à marche lente, d'étape en étape. C'est lui qui reçoit le roi et qui lui offre les meilleurs vins tirés de sa cave.Pour satisfaire aux règles de l'hospitalité et aux nécessités du culte, les évêques doivent donc entretenir un vignoble de qualité dans la banlieue de leur ville. Le vignoble, source de prestige, est aussi source de profit car les excédents se vendent et l'argent alimente les finances épiscopales. Bien traités, les grands savent aussi donner et élargir le patrimoine de l'Eglise. A partir de l'époque de Charlemagne, l'institution d'un collège de chanoines, adjoint au siège épiscopal, contribue à développer la culture de la vigne. L'évêque lui-même cherche parfois à l'éloigner de sa capitale pour goûter les plaisirs de la campagne. C'est ainsi que Nivard fonde, vers 662, le monastère de Saint-Pierre-d'Hautvillers, sur la rive droite de la Marne, face à Epernay. C'est là que dom Pérignon, mille ans après, oeuvre dans le secret de sa cave pour élaborer le premier champagne.Grégoire de Tours raconte, à la fin du VIe siècle, que son arrière-grand-père, saint Grégoire, était évêque de Langres et qu'il n'y avait pas alors d'évêque de Dijon. Mais il préférait résider dans cette ville parce qu'il avait ' vers le couchant, des coteaux très fertiles et couverts de vignes '. De même, l'évêque de Saint-Quentin se morfondait dans son siège épiscopal; il obtint dès le début du VIIe siècle, le transfert de son évêché à Noyon, dans les coteaux de vigne qui bordaient l'Oise.Les monastères, dont les fondations se multiplient, suivent la même politique car la règle monastique, même sévère, n'exclut pas le vin considéré comme un aliment et une boisson. Les saints évêques ne répugnent pas à faire des miracles pour honorer leurs hôtes : saint Aisy, évêque de Verdun au VIe siècle, s'attire les bonnes grâces de Childebert II, roi d'Austrasie, en l'accueillant dignement, c'est-à-dire en maintenant plein le tonneau dans lequel le roi et sa suite puisent à satiété pendant toute la réception!Jusqu'à la Révolution, les évêques, presque tous nobles, manifestent leur intérêt pour les vignobles de qualité. La Révolution, en vendant les biens de l'Eglise, porte un coup mortel à cette tradition. Mais l'évêque sait encore honorer ses hôtes en leur servant du vin de qualité. Mgr Myriel, évêque de Digne en 1815, presque un saint, accueille simplement Jean Valjean, le forçat libéré et sans abri, en mettant sur sa table une bouteille de vin de Mauves (cru de Saint-Joseph), de quoi redonner force et courage au plus malheureux chrétien qu'il reçoit à sa table dans sa grande bonté...