Mise en selle par la douceur printanière, l'épidémie d'oïdium a démarré tôt et fort. Par la suite, elle n'a pu être contenue. Les programmes actuels ne sont pas infaillibles dès lors que les conditions sont favorables à la maladie.
Mise en selle par la douceur printanière, l'épidémie d'oïdium a démarré tôt et fort. Par la suite, elle n'a pu être contenue. Les programmes actuels ne sont pas infaillibles dès lors que les conditions sont favorables à la maladie.
Indiscutablement, c'est la maladie de l'année à l'échelon du vignoble français. L'oïdium s'est manifesté avec une vigueur exceptionnelle sur tout le pourtour méditerranéen. Il était très présent en Midi-Pyrénées, à Cognac et dans le Val de Loire. En fait, il n'a épargné que les régions septentrionales : l'Alsace, la Bourgogne et la Champagne.Dans les vignobles touchés, beaucoup ont l'impression d'avoir assisté à une sorte de déferlement prévisible. Depuis quelques temps, l'oïdium semble monter en puissance. On dirait que chaque année, ses attaques sont plus mordantes. En 1994, il avait causé bien des soucis aux vignerons de Provence et des Charentes. L'année suivante, il s'était manifesté dans tout le Midi. L'année suivante, c'était au tour des vignobles de l'ouest de la France d'avoir à ferrailler contre la maladie. Et cette année, tout le monde, ou presque, y a eu droit.L'oïdium serait-il devenu incontrôlable? En juillet, il en donnait l'impression tant les alertes furent chaudes. A la veille des vendanges, l'insatisfaction des vignerons renforçait cette impression. Ils étaient très nombreux, mécontents des résultats de leurs traitements. Mais rien ne permet de conclure que la maladie ne cesse de se renforcer. Elle a bénéficié d'une succession de campagnes favorables sur le plan climatique. Celle qui vient de s'achever l'a été encore plus que les précédentes.' Il n'y a rien d'exceptionnel dans ce qui vient de se produire, affirme Hervé Stéva, de la société Biorizon, qui connaît bien l'oïdium pour avoir été le premier à étudier les phénomènes de résistance aux IBS. Cela fait trois ou quatre ans que nous disons qu'il y aura des difficultés en cas de forte pression. Cette année, cela s'est vérifié. Les mois d'avril et mai, chauds et peu pluvieux, ont été très favorables au développement précoce de l'épidémie. ' Ce constat concorde avec celui fait par la Protection des végétaux en 1995. Elle avait alors montré, à l'appui d'une étude sur trente-trois campagnes, qu'au printemps, la chaleur stimule l'oïdium. En avril, il lui faut peu de pluie, une durée d'insolation et des températures élevées. Ce fut le cas.Dans le Midi, les drapeaux sur carignan ont été extrêmement nombreux. Ce cépage est l'un des plus sensibles à la maladie. Il en souffre dès le débourrement. Ses premières feuilles sont attaquées par le mycélium qui, au cours de l'hiver, se conserve dans les bourgeons. ' Habituellement, les drapeaux apparaissent sur les trois ou cinq premières feuilles, puis les suivantes sortent et poussent normalement, explique Bernard Molot, de l'Institut technique du vin de Nîmes. Là, ce ne fut pas le cas. Dans les parcelles sensibles, l'oïdium suivait la croissance de la vigne. Il grimpait sur les pousses à mesure qu'apparaissaient de nouvelles feuilles. ' Par la suite, la pression n'a pas faibli. Dans quelques parcelles d'essai, laissées sans protection, la récolte était détruite dès mi-juin dans le Midi et dès le début juillet dans le Sud-Ouest. Les baies avaient alors la taille de petits pois.Face à une telle vigueur, la protection devait être sans faille. Il n'en a pas toujours été ainsi. D'abord parce que tous les traitements n'ont pas commencé à temps. Des vignerons se sont laissés surprendre par la précocité de l'année, d'autres par la grande dispersion des stades végétatifs, d'autres encore par des symptômes inhabituels. ' Beaucoup de gens ont pris les attaques d'oïdium sur feuille pour du mildiou ', rappelle Jean-Jacques Balikian, de la chambre d'agriculture du Var. ' Même des techniciens se sont faits prendre ', ajoute Bernard Molot.Indirectement, le mildiou a pu jouer d'une autre manière en faveur de l'oïdium. Jusqu'en juin, le temps lui a été défavorable. Certains ont donc jugé qu'il n'était pas nécessaire de commencer les traitements. On sait pourtant que les deux maladies n'ont pas les mêmes exigences climatiques. A ces incertitudes et à ces hésitations se sont ajoutées des pratiques qui ont, une fois de plus, révélé leurs limites : sous-dosage du soufre, cadences trop lâches, nombre de rangs traités par passage trop élevé, manque d'entretien et mauvais réglage des pulvérisateurs... il n'y a là rien de nouveau. A chaque fois que le climat stimule une maladie, ces façons de faire deviennent des erreurs.Cependant, tous les vignerons ne les ont pas commises. Loin s'en faut. Les cas de pertes de récolte sont rares mais les insatisfactions sont nombreuses du fait de la présence du feutrage gris de la maladie sur les baies. Même dans des champs d'essais, on a pu l'observer. Ils sont pourtant protégés de la meilleure manière qui soit. ' Nous avons des résultats pratiquement satisfaisants mais ils ne sont pas indemnes. Peu ou prou, on trouve de la maladie ', constate Robert Agulhon, de la société Viti R & D, basée dans l'Hérault, qui teste des produits de traitement pour le compte de firmes phytosanitaires.' Tout le monde a traité et beaucoup traité, poursuit-il. On ne peut pas seulement accuser les mauvaises pratiques. Il y a des cas où l'on n'est pas arrivé à maîtriser l'oïdium malgré ce qu'on sait sur le fait qu'il faut commencer tôt, respecter les cadences et les doses. 'Faut-il y voir un renforcement de la résistance aux IBS? Rares sont ceux qui soutiennent cette thèse. Et aucune étude ne permet de l'étayer. En fait, on redécouvre qu'il est difficile d'obtenir un contrôle total de l'oïdium dès lors que le climat joue fortement en sa faveur. C'est une sorte de retour en arrière.Avant l'arrivée des IBS, les vignerons savaient que les programmes classiques à base de soufre et de dinocap présentaient des insuffisances face à de fortes pressions. La grande efficacité des fongicides systémiques a modifié la donne pendant une courte décennie. La maladie paraissait avoir perdu la partie.Cependant, dès 1989, elle prenait sa revanche. Certaines de ses souches, résistantes aux nouvelles matières actives, avaient repris le dessus. Par la suite, on allait découvrir ces souches rebelles dans tous les vignobles. Il a fallu revoir les programmes de traitement et limiter l'emploi des IBS. Ces programmes sont aujourd'hui conçus autour de produits qui ont tous leurs limites. Il n'est donc pas étonnant qu'en cette année d'exceptionnelle pression, le contrôle de la maladie ne soit pas parfait. ' Des efficacités de 100 % ne sont plus d'actualité, déplore François Desaché, de la station viticole du BNIC (Bureau national interprofessionnel du cognac). Dans nos essais, les meilleurs programmes tournent autour de 90. %'Ce constat d'impuissance, personne ne s'en contente. L'industrie phytosanitaire a cherché et trouvé de nouvelles molécules. Sopra met en marché cet automne le Quadris, homologué contre cinq maladies dont l'oïdium. La matière active de ce fongicide est de la famille des strobilurines que BASF explore également. La firme allemande a trouvé une molécule qui pourrait être homologuée au printemps prochain. Ces deux nouveaux produits redonneront du nerf aux programmes de traitement.De leur côté, techniciens et chercheurs s'attachent à mieux comprendre la maladie. La Protection des végétaux de Montpellier nous promet de présenter lors d'Euroviti (le 19 novembre au Corum de Montpellier), un indice de pression calculé d'après des données climatiques. Cet indice donnera une mesure de la virulence du champignon.Un autre thème très concret fait l'objet d'actives expérimentations : quand faut-il commencer la protection? et quand peut-on l'arrêter? Dans les régions septentrionales, la première de ces questions est résolue depuis quelque temps. Il n'est pas nécessaire de traiter avant le stade boutons floraux séparés. Dans les vignobles méridionaux et atlantiques, elle est encore débattue. Le problème se pose dans les termes suivants : est-il indispensable, sur toutes les parcelles, d'effectuer un premier traitement au stade trois à cinq feuilles étalées? Ou peut-on s'en passer pour ne commencer qu'en préfloraison, dès lors qu'on a affaire à un cépage peu sensible ou à une parcelle régulièrement saine? L'analyse des essais conduits en cette année difficile devrait permettre d'y voir plus clair.
Indiscutablement, c'est la maladie de l'année à l'échelon du vignoble français. L'oïdium s'est manifesté avec une vigueur exceptionnelle sur tout le pourtour méditerranéen. Il était très présent en Midi-Pyrénées, à Cognac et dans le Val de Loire. En fait, il n'a épargné que les régions septentrionales : l'Alsace, la Bourgogne et la Champagne.Dans les vignobles touchés, beaucoup ont l'impression d'avoir assisté à une sorte de déferlement prévisible. Depuis quelques temps, l'oïdium semble monter en puissance. On dirait que chaque année, ses attaques sont plus mordantes. En 1994, il avait causé bien des soucis aux vignerons de Provence et des Charentes. L'année suivante, il s'était manifesté dans tout le Midi. L'année suivante, c'était au tour des vignobles de l'ouest de la France d'avoir à ferrailler contre la maladie. Et cette année, tout le monde, ou presque, y a eu droit.L'oïdium serait-il devenu incontrôlable? En juillet, il en donnait l'impression tant les alertes furent chaudes. A la veille des vendanges, l'insatisfaction des vignerons renforçait cette impression. Ils étaient très nombreux, mécontents des résultats de leurs traitements. Mais rien ne permet de conclure que la maladie ne cesse de se renforcer. Elle a bénéficié d'une succession de campagnes favorables sur le plan climatique. Celle qui vient de s'achever l'a été encore plus que les précédentes.' Il n'y a rien d'exceptionnel dans ce qui vient de se produire, affirme Hervé Stéva, de la société Biorizon, qui connaît bien l'oïdium pour avoir été le premier à étudier les phénomènes de résistance aux IBS. Cela fait trois ou quatre ans que nous disons qu'il y aura des difficultés en cas de forte pression. Cette année, cela s'est vérifié. Les mois d'avril et mai, chauds et peu pluvieux, ont été très favorables au développement précoce de l'épidémie. ' Ce constat concorde avec celui fait par la Protection des végétaux en 1995. Elle avait alors montré, à l'appui d'une étude sur trente-trois campagnes, qu'au printemps, la chaleur stimule l'oïdium. En avril, il lui faut peu de pluie, une durée d'insolation et des températures élevées. Ce fut le cas.Dans le Midi, les drapeaux sur carignan ont été extrêmement nombreux. Ce cépage est l'un des plus sensibles à la maladie. Il en souffre dès le débourrement. Ses premières feuilles sont attaquées par le mycélium qui, au cours de l'hiver, se conserve dans les bourgeons. ' Habituellement, les drapeaux apparaissent sur les trois ou cinq premières feuilles, puis les suivantes sortent et poussent normalement, explique Bernard Molot, de l'Institut technique du vin de Nîmes. Là, ce ne fut pas le cas. Dans les parcelles sensibles, l'oïdium suivait la croissance de la vigne. Il grimpait sur les pousses à mesure qu'apparaissaient de nouvelles feuilles. ' Par la suite, la pression n'a pas faibli. Dans quelques parcelles d'essai, laissées sans protection, la récolte était détruite dès mi-juin dans le Midi et dès le début juillet dans le Sud-Ouest. Les baies avaient alors la taille de petits pois.Face à une telle vigueur, la protection devait être sans faille. Il n'en a pas toujours été ainsi. D'abord parce que tous les traitements n'ont pas commencé à temps. Des vignerons se sont laissés surprendre par la précocité de l'année, d'autres par la grande dispersion des stades végétatifs, d'autres encore par des symptômes inhabituels. ' Beaucoup de gens ont pris les attaques d'oïdium sur feuille pour du mildiou ', rappelle Jean-Jacques Balikian, de la chambre d'agriculture du Var. ' Même des techniciens se sont faits prendre ', ajoute Bernard Molot.Indirectement, le mildiou a pu jouer d'une autre manière en faveur de l'oïdium. Jusqu'en juin, le temps lui a été défavorable. Certains ont donc jugé qu'il n'était pas nécessaire de commencer les traitements. On sait pourtant que les deux maladies n'ont pas les mêmes exigences climatiques. A ces incertitudes et à ces hésitations se sont ajoutées des pratiques qui ont, une fois de plus, révélé leurs limites : sous-dosage du soufre, cadences trop lâches, nombre de rangs traités par passage trop élevé, manque d'entretien et mauvais réglage des pulvérisateurs... il n'y a là rien de nouveau. A chaque fois que le climat stimule une maladie, ces façons de faire deviennent des erreurs.Cependant, tous les vignerons ne les ont pas commises. Loin s'en faut. Les cas de pertes de récolte sont rares mais les insatisfactions sont nombreuses du fait de la présence du feutrage gris de la maladie sur les baies. Même dans des champs d'essais, on a pu l'observer. Ils sont pourtant protégés de la meilleure manière qui soit. ' Nous avons des résultats pratiquement satisfaisants mais ils ne sont pas indemnes. Peu ou prou, on trouve de la maladie ', constate Robert Agulhon, de la société Viti R & D, basée dans l'Hérault, qui teste des produits de traitement pour le compte de firmes phytosanitaires.' Tout le monde a traité et beaucoup traité, poursuit-il. On ne peut pas seulement accuser les mauvaises pratiques. Il y a des cas où l'on n'est pas arrivé à maîtriser l'oïdium malgré ce qu'on sait sur le fait qu'il faut commencer tôt, respecter les cadences et les doses. 'Faut-il y voir un renforcement de la résistance aux IBS? Rares sont ceux qui soutiennent cette thèse. Et aucune étude ne permet de l'étayer. En fait, on redécouvre qu'il est difficile d'obtenir un contrôle total de l'oïdium dès lors que le climat joue fortement en sa faveur. C'est une sorte de retour en arrière.Avant l'arrivée des IBS, les vignerons savaient que les programmes classiques à base de soufre et de dinocap présentaient des insuffisances face à de fortes pressions. La grande efficacité des fongicides systémiques a modifié la donne pendant une courte décennie. La maladie paraissait avoir perdu la partie.Cependant, dès 1989, elle prenait sa revanche. Certaines de ses souches, résistantes aux nouvelles matières actives, avaient repris le dessus. Par la suite, on allait découvrir ces souches rebelles dans tous les vignobles. Il a fallu revoir les programmes de traitement et limiter l'emploi des IBS. Ces programmes sont aujourd'hui conçus autour de produits qui ont tous leurs limites. Il n'est donc pas étonnant qu'en cette année d'exceptionnelle pression, le contrôle de la maladie ne soit pas parfait. ' Des efficacités de 100 % ne sont plus d'actualité, déplore François Desaché, de la station viticole du BNIC (Bureau national interprofessionnel du cognac). Dans nos essais, les meilleurs programmes tournent autour de 90. %'Ce constat d'impuissance, personne ne s'en contente. L'industrie phytosanitaire a cherché et trouvé de nouvelles molécules. Sopra met en marché cet automne le Quadris, homologué contre cinq maladies dont l'oïdium. La matière active de ce fongicide est de la famille des strobilurines que BASF explore également. La firme allemande a trouvé une molécule qui pourrait être homologuée au printemps prochain. Ces deux nouveaux produits redonneront du nerf aux programmes de traitement.De leur côté, techniciens et chercheurs s'attachent à mieux comprendre la maladie. La Protection des végétaux de Montpellier nous promet de présenter lors d'Euroviti (le 19 novembre au Corum de Montpellier), un indice de pression calculé d'après des données climatiques. Cet indice donnera une mesure de la virulence du champignon.Un autre thème très concret fait l'objet d'actives expérimentations : quand faut-il commencer la protection? et quand peut-on l'arrêter? Dans les régions septentrionales, la première de ces questions est résolue depuis quelque temps. Il n'est pas nécessaire de traiter avant le stade boutons floraux séparés. Dans les vignobles méridionaux et atlantiques, elle est encore débattue. Le problème se pose dans les termes suivants : est-il indispensable, sur toutes les parcelles, d'effectuer un premier traitement au stade trois à cinq feuilles étalées? Ou peut-on s'en passer pour ne commencer qu'en préfloraison, dès lors qu'on a affaire à un cépage peu sensible ou à une parcelle régulièrement saine? L'analyse des essais conduits en cette année difficile devrait permettre d'y voir plus clair.