Depuis que les vignerons regardent leurs vignes de plus près, ils s'en occupent mieux. Et ils discutent, beaucoup plus, avec leurs collègues car il est nécessaire de confronter les résultats de ses observations à ceux des autres.
Depuis que les vignerons regardent leurs vignes de plus près, ils s'en occupent mieux. Et ils discutent, beaucoup plus, avec leurs collègues car il est nécessaire de confronter les résultats de ses observations à ceux des autres.
Dès qu'on s'est mis à traiter la flavescence dorée, on a eu des acariens , rappelle Robert Cathary, le président de la cave coopérative de Monze, dans l'Aude. Cette dégradation de la situation phytosanitaire a conduit les vignerons à s'engager dans la lutte raisonnée. Ils ont démarré voilà sept ans. Aujourd'hui, 85 % des 360 ha cultivés par les adhérents de la cave sont protégés de cette manière. C'est devenu une affaire collective et l'un des principaux motifs de rencontre des vignerons. Pendant la période végétative, ils se retrouvent tous les vendredis après 17 heures. Chacun expose ce qu'il a vu sur les parcelles dont il a la charge. Ses collègues sont exigeants. Les comptes-rendus doivent être précis. ' Personne n'a intérêt à venir sans avoir fait ses observations. S'il y a des problèmes, on en discute et on se rend sur place ', résume Vincent de Beaulieu, qui a rejoint la cave voilà trois ans et qui a pris la responsabilité de la lutte raisonnée.Les observations des uns et des autres sont débattues en bien d'autres occasions, en dehors de ces réunions programmées. ' On n'a pas besoin de se convoquer pour se réunir ', poursuit notre interlocuteur. Les adhérents passent régulièrement à la cave. C'est là qu'ils se retrouvent. Après leur journée de travail, une partie de leurs conversations porte sur l'état du vignoble. Si l'un d'entre eux signale une dégradation que les autres n'ont pas vue, ils n'hésitent pas à retourner dans les vignes.En quelques années, ces visites en groupe sont devenues monnaie courante. Pour Jean Baron, le directeur de la cave, elles sont une bonne chose. ' Avant, la plupart des gens n'allaient pas dans les vignes des autres parce que c'était mal vu. Ce n'est plus le cas. Et c'est très formateur. C'est une source d'émulation. Chacun voit comment son voisin travaille, donc tout le monde essaie de bien faire. Quand ils se promènent dans les parcelles, les coopérateurs discutent également d'autres sujets, par exemple des systèmes d'attache des fils releveurs.Ils s'échangent leurs expériences. L'information circule très vite. 'Eric de Suremain n'est pas en coopérative. Il est le propriétaire du château de Monthélie, en Bourgogne. Avec quatre de ses collègues, il fait partie du groupe de lutte raisonnée de sa commune. Une fois par an, ils se retrouvent avec un conseiller viticole pour dresser un bilan de la campagne. Au printemps, ils se donnent rendez-vous sur le terrain, pour discuter au bout d'une vigne, des résultats de leurs comptages de typhlodromes et d'acariens, puis de vers de la grappe. ' On fait un bon groupe. Cela nous permet de travailler en synergie, c'est sympathique ', apprécie notre vigneron. ' Au moins, on parle d'autre chose que de la pluie et du beau temps et du prix du tonneau ', observe un autre Bourguignon, membre lui aussi d'un groupe de lutte raisonnée.Eric de Suremain savoure le temps qu'il consacre à l'observation. Il examine ses vignes avec précision à trois périodes : lors du débourrement, lorsqu'elles ont trois à cinq feuilles étalées puis peu avant la floraison. ' C'est un temps agréable, explique-t-il, je me dis que je vais faire le tour des vignes pour les regarder. Ça permet de voir leur comportement, l'état du sol et de l'enherbement. 'Au stade trois à cinq feuilles étalées, il faut une demi-journée, à deux, pour dénombrer les typhlodromes et les acariens présents sur les treize parcelles du château de Monthélie qui couvre 5 ha. ' Ce n'est pas grand-chose. ' Par la suite, Eric de Suremain consacre autant de temps à l'estimation de la population de la première génération de vers de la grappe. C'est la dernière de ses tournées, spécifiquement consacrée à l'examen sanitaire du vignoble. Il ne suit pas les pontes de la seconde génération. Il estime être assez renseigné par ce qu'il voit lors des travaux en vert et par ce qu'il lit sur les bulletins d'Avertissements agricoles pour décider de ses traitements fongicides. Maladies et ravageurs se reconnaissent facilement pour peu qu'on ait eu la formation nécessaire. ' Une fois qu'on vous les a montrés, vous ne pouvez plus vous tromper ', estime Michel Labatté, un vigneron de Madiran. Les difficultés d'une protection fondée sur l'observation sont ailleurs. Lorsqu'on n'a pas trouvé les parasites ou les maladies qu'on cherche, il faut être certain qu'ils sont vraiment absents : on pourrait en effet ne pas les avoir vus. La comparaison de ses observations avec celles de ses collègues, permet d'en avoir le coeur net.Une autre difficulté vient du fait qu'on peut être amené à consacrer beaucoup de temps à la surveillance des vignes. Ce n'est pas le cas d'Eric de Suremain. Depuis dix ans, ses comptages lui indiquent que les typhlodromes sont en nombre suffisant dès le printemps. Il n'aura pas à les recompter par la suite, ni à faire de traitement acaricide.Ce n'est pas le cas pour les vignerons de Monze. En raison de la lutte obligatoire contre la flavescence dorée, ils n'ont pas encore réussi à restaurer définitivement la faune auxiliaire. Ils sont donc amenés à faire des comptages réguliers pour juger l'évolution des populations d'acariens et de leurs ennemis. Ils essaient de retarder le plus longtemps possible le déclenchement de la lutte contre le mildiou. Cette volonté se paie, elle aussi, d'observations fréquentes. Finalement, le supplément de temps passé dans le vignoble réduit l'impact des économies de traitements. ' Si l'on ne recherchait que les économies, ce ne serait pas intéressant, calcule Vincent de Beaulieu, nous, la vigne, ça nous plaît. ' Comme d'autres, les vignerons de Monze estiment qu'ils s'en occupent mieux depuis qu'ils la regardent de plus près. Il leur reste à réussir le pari d'intéresser leurs acheteurs à leur façon de travailler.
Dès qu'on s'est mis à traiter la flavescence dorée, on a eu des acariens , rappelle Robert Cathary, le président de la cave coopérative de Monze, dans l'Aude. Cette dégradation de la situation phytosanitaire a conduit les vignerons à s'engager dans la lutte raisonnée. Ils ont démarré voilà sept ans. Aujourd'hui, 85 % des 360 ha cultivés par les adhérents de la cave sont protégés de cette manière. C'est devenu une affaire collective et l'un des principaux motifs de rencontre des vignerons. Pendant la période végétative, ils se retrouvent tous les vendredis après 17 heures. Chacun expose ce qu'il a vu sur les parcelles dont il a la charge. Ses collègues sont exigeants. Les comptes-rendus doivent être précis. ' Personne n'a intérêt à venir sans avoir fait ses observations. S'il y a des problèmes, on en discute et on se rend sur place ', résume Vincent de Beaulieu, qui a rejoint la cave voilà trois ans et qui a pris la responsabilité de la lutte raisonnée.Les observations des uns et des autres sont débattues en bien d'autres occasions, en dehors de ces réunions programmées. ' On n'a pas besoin de se convoquer pour se réunir ', poursuit notre interlocuteur. Les adhérents passent régulièrement à la cave. C'est là qu'ils se retrouvent. Après leur journée de travail, une partie de leurs conversations porte sur l'état du vignoble. Si l'un d'entre eux signale une dégradation que les autres n'ont pas vue, ils n'hésitent pas à retourner dans les vignes.En quelques années, ces visites en groupe sont devenues monnaie courante. Pour Jean Baron, le directeur de la cave, elles sont une bonne chose. ' Avant, la plupart des gens n'allaient pas dans les vignes des autres parce que c'était mal vu. Ce n'est plus le cas. Et c'est très formateur. C'est une source d'émulation. Chacun voit comment son voisin travaille, donc tout le monde essaie de bien faire. Quand ils se promènent dans les parcelles, les coopérateurs discutent également d'autres sujets, par exemple des systèmes d'attache des fils releveurs.Ils s'échangent leurs expériences. L'information circule très vite. 'Eric de Suremain n'est pas en coopérative. Il est le propriétaire du château de Monthélie, en Bourgogne. Avec quatre de ses collègues, il fait partie du groupe de lutte raisonnée de sa commune. Une fois par an, ils se retrouvent avec un conseiller viticole pour dresser un bilan de la campagne. Au printemps, ils se donnent rendez-vous sur le terrain, pour discuter au bout d'une vigne, des résultats de leurs comptages de typhlodromes et d'acariens, puis de vers de la grappe. ' On fait un bon groupe. Cela nous permet de travailler en synergie, c'est sympathique ', apprécie notre vigneron. ' Au moins, on parle d'autre chose que de la pluie et du beau temps et du prix du tonneau ', observe un autre Bourguignon, membre lui aussi d'un groupe de lutte raisonnée.Eric de Suremain savoure le temps qu'il consacre à l'observation. Il examine ses vignes avec précision à trois périodes : lors du débourrement, lorsqu'elles ont trois à cinq feuilles étalées puis peu avant la floraison. ' C'est un temps agréable, explique-t-il, je me dis que je vais faire le tour des vignes pour les regarder. Ça permet de voir leur comportement, l'état du sol et de l'enherbement. 'Au stade trois à cinq feuilles étalées, il faut une demi-journée, à deux, pour dénombrer les typhlodromes et les acariens présents sur les treize parcelles du château de Monthélie qui couvre 5 ha. ' Ce n'est pas grand-chose. ' Par la suite, Eric de Suremain consacre autant de temps à l'estimation de la population de la première génération de vers de la grappe. C'est la dernière de ses tournées, spécifiquement consacrée à l'examen sanitaire du vignoble. Il ne suit pas les pontes de la seconde génération. Il estime être assez renseigné par ce qu'il voit lors des travaux en vert et par ce qu'il lit sur les bulletins d'Avertissements agricoles pour décider de ses traitements fongicides. Maladies et ravageurs se reconnaissent facilement pour peu qu'on ait eu la formation nécessaire. ' Une fois qu'on vous les a montrés, vous ne pouvez plus vous tromper ', estime Michel Labatté, un vigneron de Madiran. Les difficultés d'une protection fondée sur l'observation sont ailleurs. Lorsqu'on n'a pas trouvé les parasites ou les maladies qu'on cherche, il faut être certain qu'ils sont vraiment absents : on pourrait en effet ne pas les avoir vus. La comparaison de ses observations avec celles de ses collègues, permet d'en avoir le coeur net.Une autre difficulté vient du fait qu'on peut être amené à consacrer beaucoup de temps à la surveillance des vignes. Ce n'est pas le cas d'Eric de Suremain. Depuis dix ans, ses comptages lui indiquent que les typhlodromes sont en nombre suffisant dès le printemps. Il n'aura pas à les recompter par la suite, ni à faire de traitement acaricide.Ce n'est pas le cas pour les vignerons de Monze. En raison de la lutte obligatoire contre la flavescence dorée, ils n'ont pas encore réussi à restaurer définitivement la faune auxiliaire. Ils sont donc amenés à faire des comptages réguliers pour juger l'évolution des populations d'acariens et de leurs ennemis. Ils essaient de retarder le plus longtemps possible le déclenchement de la lutte contre le mildiou. Cette volonté se paie, elle aussi, d'observations fréquentes. Finalement, le supplément de temps passé dans le vignoble réduit l'impact des économies de traitements. ' Si l'on ne recherchait que les économies, ce ne serait pas intéressant, calcule Vincent de Beaulieu, nous, la vigne, ça nous plaît. ' Comme d'autres, les vignerons de Monze estiment qu'ils s'en occupent mieux depuis qu'ils la regardent de plus près. Il leur reste à réussir le pari d'intéresser leurs acheteurs à leur façon de travailler.