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Une frayeur pour l'edelzwicker

La vigne - n°84 - janvier 1998 - page 0

En avril, la découverte par les Allemands de traces d'un réfrigérant dans un lot de bouteilles suscite de très vives inquiétudes chez les vignerons alsaciens. Cette affaire retombe rapidement car la santé des consommateurs n'est pas en danger. L'année s'achève par la récolte d'un très beau millésime.

En avril, la découverte par les Allemands de traces d'un réfrigérant dans un lot de bouteilles suscite de très vives inquiétudes chez les vignerons alsaciens. Cette affaire retombe rapidement car la santé des consommateurs n'est pas en danger. L'année s'achève par la récolte d'un très beau millésime.

En Alsace, l'un des indicateurs de la qualité d'un millésime est le volume de vendange tardive qu'il offre. Si l'on en juge par ce critère, 1997 est un cru hors du commun. Il dépasse tous ceux qui l'ont précédé depuis 1984, date de la sortie du décret définissant les vendanges tardives. L'Inao a enregistré 43 700 hl récoltés selon les normes de cette mention et près de 7 900 hl répondant aux spécifications d'une sélection de grains nobles.Le total de ces volumes dépasse de 40 % le précédent record établi en 1989 avec 36 600 hl. Il ne se retrouvera pas intégralement sur le marché. Beaucoup de vins ne seront pas présentés à la dégustation d'agrément spécifique qu'ils doivent subir ou seront recalés lors de cette épreuve (voir infographie). Ils seront vendus comme des cuvées particulières de l'appellation générique et non comme des vendanges tardives.Ces vins de haut de gamme ne représentent que quelques pour cent d'une récolte qui devrait avoisiner 1,2 million d'hl et qui a réussi à tous les cépages. Les raisins sont rentrés dans les chais parfaitement sains et très riches en sucres. Ce millésime est à coup sûr le meilleur depuis cinq ans. Certains n'hésitent pas à le placer au sommet de la hiérarchie de ce dernier quart de siècle. ' La récolte est historique sur le plan qualitatif, clame Pierre Bouard, le directeur de l'interprofession. On n'avait rien vu de tel depuis 1971. 'Cependant, si elle est excellente, elle n'est pas parfaite. Des parcelles, trop chargées, ont produit des vins dilués. Des cuvées sont instables : des pinots noirs ont perdu de la couleur par manque d'acidité et les blancs sont riches en protéines. Les vendanges tardives pourraient manquer de gras et d'onctuosité car elles ne se sont pas concentrées avec l'aide de la pourriture noble, mais sous le simple effet de la surmaturation.Lorsqu'en septembre, le beau temps s'installait pour cinq semaines, la tempête qui avait soufflé en avril n'était plus qu'un lointain et mauvais souvenir. Elle était venue de l'Est. D'Allemagne s'était levé un vent accusateur. Au début de ce mois, le Land de Rhénanie-Palatinat révélait qu'il avait trouvé des traces d'un contaminant dans des bouteilles d'edelzwicker de la cave coopérative d'Eguisheim. C'était de l'éthanediol, un réfrigérant que l'on utilise habituellement lors du dégorgement des vins effervescents. Pendant quelques jours, la presse allemande s'est emparée de cette découverte pour en faire ses choux gras. Les exportateurs alsaciens ont dû multiplier les analyses pour rassurer leurs clients. L'Etat français s'est empressé de ramener le calme. La répression des fraudes de Strasbourg, aux termes d'une enquête auprès de plusieurs maisons, a démontré que l'accident était unique. Comme les doses décelées étaient sans aucun danger pour la santé humaine, la baudruche s'est dégonflée au bout d'une quinzaine de jours.Pour certains, il n'en reste rien; l'affaire est classée depuis bien longtemps. Pour d'autres, cette alerte a donné le coup de grâce à l'edelzwicker en Allemagne. Ce vin est un assemblage de cuvées qui ne méritent pas d'être vendues sous leur nom de cépage. Nos voisins n'en veulent plus. En cinq ans, ils ont divisé leurs commandes par trois, passant de 200 000 à 70 000 hl. La porte de sortie pour les riesling et autres gewurztraminer ratés se referme, obligeant la région à repenser sa politique en matière d'entrée de gamme. ' Il ne faut pas se leurrer, la qualité que l'on a fournie sous le nom d'edelzwicker n'a plus d'autre débouché que la chaudière, prévient Pierre Heydt-Trimbach, le président des producteurs-négociants. Il faut que tous les opérateurs se mettent d'accord pour définir un cahier des charges pour un vin d'assemblage de qualité. 'L'alternative à la chaudière serait de continuer à consentir une baisse des prix pour que les vins ordinaires soient compétitifs sur les marchés extérieurs. Cette chute est déjà engagée. Au cours de la campagne 1996-1997, l'edelzwicker en vrac a perdu 6 % par rapport à la précédente. Il s'agit là de l'accélération d'un mouvement qui lui avait déjà fait perdre deux points en 1995-1996 et trois points en 1994-1995. Ces baisses de prix s'accompagnent d'une diminution bien plus rapide des volumes échangés. Dans leur sillage, elles entraînent le sylvaner, cépage qui est à la base de l'edelzwicker et dont la réputation n'est pas très bonne. Elles se produisent alors que l'Alsace s'affirme comme la région des grands blancs.C'est le thème de la nouvelle campagne publicitaire lancée par l'interprofession, avec un budget de 4 millions de francs, montant qui sera doublé l'an prochain. On y voit une cigogne - alsacienne, bien sûr - toiser de son altière hauteur des oies pataudes qui symbolisent d'autres provenances. Selon le Civa (Comité interprofessionnel des vins d'Alsace), le thème fut très bien perçu par les consommateurs auxquels il fut soumis. L'accueil auprès des professionnels fut moins unanime. Quelques-uns ont jugé saugrenu de symboliser des vins par des volatiles.La nouvelle campagne marque un changement après cinq années de communication sur la diversité des vins, des terroirs et des cépages d'Alsace. Elle sera accompagnée d'un effort promotionnel particulier sur Paris et sa région. Ce volet doit répondre au besoin de mettre en place une politique commerciale plus offensive car quelques indices, cachés par la belle progression des cours des cépages nobles, montrent que les Alsaciens auraient tort de s'endormir sur leurs lauriers. Les consommateurs locaux rouspètent lorsqu'ils voient grimper les tarifs. Plusieurs observateurs signalent que la vente au caveau marque le pas. Les expéditions de l'ensemble du vignoble sont également stables, voire en très léger repli par rapport à l'an dernier. A cela s'ajoutent des disponibilités en légère progression. Ces signaux incitent de nombreux opérateurs à penser que la région doit investir davantage dans le marketing pour asseoir sa notoriété et justifier ses prix élevés. C'est tout le pari de la campagne de communication lancée cet automne.

En Alsace, l'un des indicateurs de la qualité d'un millésime est le volume de vendange tardive qu'il offre. Si l'on en juge par ce critère, 1997 est un cru hors du commun. Il dépasse tous ceux qui l'ont précédé depuis 1984, date de la sortie du décret définissant les vendanges tardives. L'Inao a enregistré 43 700 hl récoltés selon les normes de cette mention et près de 7 900 hl répondant aux spécifications d'une sélection de grains nobles.Le total de ces volumes dépasse de 40 % le précédent record établi en 1989 avec 36 600 hl. Il ne se retrouvera pas intégralement sur le marché. Beaucoup de vins ne seront pas présentés à la dégustation d'agrément spécifique qu'ils doivent subir ou seront recalés lors de cette épreuve (voir infographie). Ils seront vendus comme des cuvées particulières de l'appellation générique et non comme des vendanges tardives.Ces vins de haut de gamme ne représentent que quelques pour cent d'une récolte qui devrait avoisiner 1,2 million d'hl et qui a réussi à tous les cépages. Les raisins sont rentrés dans les chais parfaitement sains et très riches en sucres. Ce millésime est à coup sûr le meilleur depuis cinq ans. Certains n'hésitent pas à le placer au sommet de la hiérarchie de ce dernier quart de siècle. ' La récolte est historique sur le plan qualitatif, clame Pierre Bouard, le directeur de l'interprofession. On n'avait rien vu de tel depuis 1971. 'Cependant, si elle est excellente, elle n'est pas parfaite. Des parcelles, trop chargées, ont produit des vins dilués. Des cuvées sont instables : des pinots noirs ont perdu de la couleur par manque d'acidité et les blancs sont riches en protéines. Les vendanges tardives pourraient manquer de gras et d'onctuosité car elles ne se sont pas concentrées avec l'aide de la pourriture noble, mais sous le simple effet de la surmaturation.Lorsqu'en septembre, le beau temps s'installait pour cinq semaines, la tempête qui avait soufflé en avril n'était plus qu'un lointain et mauvais souvenir. Elle était venue de l'Est. D'Allemagne s'était levé un vent accusateur. Au début de ce mois, le Land de Rhénanie-Palatinat révélait qu'il avait trouvé des traces d'un contaminant dans des bouteilles d'edelzwicker de la cave coopérative d'Eguisheim. C'était de l'éthanediol, un réfrigérant que l'on utilise habituellement lors du dégorgement des vins effervescents. Pendant quelques jours, la presse allemande s'est emparée de cette découverte pour en faire ses choux gras. Les exportateurs alsaciens ont dû multiplier les analyses pour rassurer leurs clients. L'Etat français s'est empressé de ramener le calme. La répression des fraudes de Strasbourg, aux termes d'une enquête auprès de plusieurs maisons, a démontré que l'accident était unique. Comme les doses décelées étaient sans aucun danger pour la santé humaine, la baudruche s'est dégonflée au bout d'une quinzaine de jours.Pour certains, il n'en reste rien; l'affaire est classée depuis bien longtemps. Pour d'autres, cette alerte a donné le coup de grâce à l'edelzwicker en Allemagne. Ce vin est un assemblage de cuvées qui ne méritent pas d'être vendues sous leur nom de cépage. Nos voisins n'en veulent plus. En cinq ans, ils ont divisé leurs commandes par trois, passant de 200 000 à 70 000 hl. La porte de sortie pour les riesling et autres gewurztraminer ratés se referme, obligeant la région à repenser sa politique en matière d'entrée de gamme. ' Il ne faut pas se leurrer, la qualité que l'on a fournie sous le nom d'edelzwicker n'a plus d'autre débouché que la chaudière, prévient Pierre Heydt-Trimbach, le président des producteurs-négociants. Il faut que tous les opérateurs se mettent d'accord pour définir un cahier des charges pour un vin d'assemblage de qualité. 'L'alternative à la chaudière serait de continuer à consentir une baisse des prix pour que les vins ordinaires soient compétitifs sur les marchés extérieurs. Cette chute est déjà engagée. Au cours de la campagne 1996-1997, l'edelzwicker en vrac a perdu 6 % par rapport à la précédente. Il s'agit là de l'accélération d'un mouvement qui lui avait déjà fait perdre deux points en 1995-1996 et trois points en 1994-1995. Ces baisses de prix s'accompagnent d'une diminution bien plus rapide des volumes échangés. Dans leur sillage, elles entraînent le sylvaner, cépage qui est à la base de l'edelzwicker et dont la réputation n'est pas très bonne. Elles se produisent alors que l'Alsace s'affirme comme la région des grands blancs.C'est le thème de la nouvelle campagne publicitaire lancée par l'interprofession, avec un budget de 4 millions de francs, montant qui sera doublé l'an prochain. On y voit une cigogne - alsacienne, bien sûr - toiser de son altière hauteur des oies pataudes qui symbolisent d'autres provenances. Selon le Civa (Comité interprofessionnel des vins d'Alsace), le thème fut très bien perçu par les consommateurs auxquels il fut soumis. L'accueil auprès des professionnels fut moins unanime. Quelques-uns ont jugé saugrenu de symboliser des vins par des volatiles.La nouvelle campagne marque un changement après cinq années de communication sur la diversité des vins, des terroirs et des cépages d'Alsace. Elle sera accompagnée d'un effort promotionnel particulier sur Paris et sa région. Ce volet doit répondre au besoin de mettre en place une politique commerciale plus offensive car quelques indices, cachés par la belle progression des cours des cépages nobles, montrent que les Alsaciens auraient tort de s'endormir sur leurs lauriers. Les consommateurs locaux rouspètent lorsqu'ils voient grimper les tarifs. Plusieurs observateurs signalent que la vente au caveau marque le pas. Les expéditions de l'ensemble du vignoble sont également stables, voire en très léger repli par rapport à l'an dernier. A cela s'ajoutent des disponibilités en légère progression. Ces signaux incitent de nombreux opérateurs à penser que la région doit investir davantage dans le marketing pour asseoir sa notoriété et justifier ses prix élevés. C'est tout le pari de la campagne de communication lancée cet automne.

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