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Le Muscadet retrouve des ambitions

La vigne - n°84 - janvier 1998 - page 0

Dans le Muscadet, après des campagnes difficiles, on retrouve des ambitions : on ne parle plus d'arrachage mais d'expansionnisme et de reconquête des marchés. Mais si les volumes ont repris en 1997, les prix restent faibles et de nombreux vignerons sont en difficulté financière. Un audit a mis le doigt sur les fragilités de la filière.

Dans le Muscadet, après des campagnes difficiles, on retrouve des ambitions : on ne parle plus d'arrachage mais d'expansionnisme et de reconquête des marchés. Mais si les volumes ont repris en 1997, les prix restent faibles et de nombreux vignerons sont en difficulté financière. Un audit a mis le doigt sur les fragilités de la filière.

L'année 1995 a été active dans le Muscadet. L'élément marquant fut la sortie d'un audit de la filière vitivinicole, réalisé par un cabinet parisien. Ses conclusions ressemblent à la plupart de celles des exercices de ce genre : retrouver le professionnalisme (les producteurs l'avaient-ils perdus?), réguler l'offre et la demande, reconstruire l'image du Muscadet, rénover le tissu des exploitations, favoriser l'émergence d'opérateurs commerciaux plus importants et plus efficaces. On attend aujourd'hui des aides des pouvoirs publics. ' Après une période de crise comme celle qu'a connue la Loire-Atlantique, il est toujours bon de ' recaler ' les choses. Par ailleurs, de tels propos sont souvent plus crédibles auprès des opérateurs, quand ils sont tenus par un intervenant extérieur... ' indique un responsable local.Avec un changement d'équipe à la tête du syndicat des producteurs à la mi-1996, la politique est manifestement plus expansionniste. Elle s'appuie sur une idée simple : la reconquête du marché en volume après un assainissement des stocks. Sur ce deuxième point, 86 000 hl ont été distillés (à revenu pratiquement zéro pour le producteur), de fin 1996 jusqu'au 31 août dernier.Ces vins, parfois de qualité médiocre (le muscadet est quand même un vin à boire jeune!), étaient détenus en stocks et correspondaient aux récoltes 1993, 1994 et 1995 (auparavant, plus de 50 000 hl de stocks de 1992 furent déclassés en vin de table). Cette deuxième opération a pu se réaliser, notamment sur les conseils des Bordelais, à travers la mise en place d'un volume substituable individuel (VSI) sur la récolte 1996. Au 31 août dernier, les appellations du Muscadet avaient donc 478 000 hl de stocks (contre 550 000 hl un an avant et 597 000 hl en 1995).' Après cet assainissement, le marché a réagi et on s'y attendait ' explique Jean-Pierre Méchineau, vigneron à La Haye-Fouassière et nouveau président du syndicat. Durant la campagne 1996-1997, la reprise en volume est nette : 698 000 hl ont été commercialisés (235 000 hl de sur lie, 288 000 hl en sèvre-et-maine et 170 000 hl en AOC Muscadet pour les catégories les plus importantes). Le total est supérieur de 24 % à la campagne précédente. Les premiers mois de l'actuelle campagne se situent dans la même dynamique, avec les stocks mentionnés et une récolte de 700 000 hl. Les disponibilités sont supérieures à 1 153 000 hl. Au 15 décembre, 286 000 hl (toutes appellations du Muscadet confondues) étaient déjà commercialisés. Le VDQS gros plant affiche, lui, 61 175 hl.Pour l'instant, si les volumes repartent, les prix ne suivent pas : durant la campagne, les sur-lie ont été commercialisés à 774 F/hl en moyenne, les sèvre-et-maine à 440 F et le muscadet à 410 F. Parfois, cela couvre à peine les coûts de production.' Sur les 1 300 producteurs de la région (sur 13 000 ha), 300 sont en difficulté financière et la moitié n'est pas très à l'aise ', constate le président du syndicat. Un constat somme toute alarmant, confirmé par un banquier spécialisé dans les comptes des vignerons locaux : ' En huit ans, je n'avais jamais vu une telle situation d'ensemble. Il est évident que des gens vont rester sur le bord de la route '. ' Ce qui nous a préservé, c'est la solidarité familiale, explique un responsable. Ce qui pouvait être perçu comme une faiblesse, nos petites structures familiales, s'est finalement avéré être une force. On s'est serré les coudes, certains parents acceptent que les fermages ou autres métayages soient payés plus tard... Finalement, la crise nous a fait percevoir les vrais valeurs de la vie. '' Le muscadet est un vin populaire au vrai sens du terme. Il a un vrai ressort extraordinaire : quand la situation économique est saine et que les millésimes sont de qualité, comme ce fut le cas en 1996 et en 1997, la clientèle répond présent. C'est une force extraordinaire. Avoir voulu opérer une politique artificielle de rétention de l'offre pour espérer faire monter les cours fut une erreur majeure. Nous pouvons vendre bien plus de vin mais les prix doivent reprendre aussi ', reprend le président Méchineau. D'ailleurs, au niveau des hommes, l'ambiance dans le vignoble n'est pas toujours au beau fixe.1997 a aussi été l'année de mise en place ou de développement de mesures visant à ' professionnaliser ' la filière. Si une charte interprofessionnelle a vu le jour, on retiendra surtout les questions d'agrément. Concernant les stocks de la récolte 1997 qui resteraient en cave en 1998, on voudrait mettre en place un ' agrément caduque ', ce qui serait tout simplement révolutionnaire, juridiquement l'agrément étant aujourd'hui acquis une fois pour toute. Les prises d'échantillons pour les stocks pourraient avoir lieu en même temps que celles du millésime suivant (automne 1998 dans notre cas). On pourrait éviter ainsi que de mauvais vins arrivent sur le marché et le tirent à la baisse.Dans plusieurs vignobles, les responsables sont prêts pour cette avancée. L'Inao ferait bien d'y réfléchir (un audit national est également en cours sur toutes les questions concernant les agréments).1997 a vu également l'extension aux AOC régionales et au muscadet de l'obligation pour les jurys participant aux agréments de suivre des formations préalables. Cela existait déjà pour le sur-lie. A terme, tout membre d'un jury devra être formé; ce sera aussi le cas pour les primeurs en 1998. A la fin 1997, 300 personnes (vignerons, négociants...) y étaient passées. L'idée est de suivre une séance par personne et par an. ' Depuis la mise en place de ce système, il n'y a pratiquement plus d'absentéisme lors des dégustations. L'impact psychologique auprès de la base est remarquable ', estime-t-on sur place. Dans le même ordre d'idée, un soutien technique est proposé aux ' abonnés du recalage '.Enfin, une hiérarchisation du vignoble est en gestation avancée. L'idée est d'avoir une fusée qualitative à plusieurs étages : le muscadet simple, les appellations régionales et, au sommet, des ' vins de terroir ' (à défaut d'un autre nom pour l'instant). Il faudra repérer ces terroirs plus qualitatifs. Se pose alors la question du sur-lie, qui n'est pas une appellation mais une méthode de vinification. L'appellation de base n'y aurait pas droit alors que les vins de terroir n'auraient que cela. 1998 pourrait apporter un début de réponse.

L'année 1995 a été active dans le Muscadet. L'élément marquant fut la sortie d'un audit de la filière vitivinicole, réalisé par un cabinet parisien. Ses conclusions ressemblent à la plupart de celles des exercices de ce genre : retrouver le professionnalisme (les producteurs l'avaient-ils perdus?), réguler l'offre et la demande, reconstruire l'image du Muscadet, rénover le tissu des exploitations, favoriser l'émergence d'opérateurs commerciaux plus importants et plus efficaces. On attend aujourd'hui des aides des pouvoirs publics. ' Après une période de crise comme celle qu'a connue la Loire-Atlantique, il est toujours bon de ' recaler ' les choses. Par ailleurs, de tels propos sont souvent plus crédibles auprès des opérateurs, quand ils sont tenus par un intervenant extérieur... ' indique un responsable local.Avec un changement d'équipe à la tête du syndicat des producteurs à la mi-1996, la politique est manifestement plus expansionniste. Elle s'appuie sur une idée simple : la reconquête du marché en volume après un assainissement des stocks. Sur ce deuxième point, 86 000 hl ont été distillés (à revenu pratiquement zéro pour le producteur), de fin 1996 jusqu'au 31 août dernier.Ces vins, parfois de qualité médiocre (le muscadet est quand même un vin à boire jeune!), étaient détenus en stocks et correspondaient aux récoltes 1993, 1994 et 1995 (auparavant, plus de 50 000 hl de stocks de 1992 furent déclassés en vin de table). Cette deuxième opération a pu se réaliser, notamment sur les conseils des Bordelais, à travers la mise en place d'un volume substituable individuel (VSI) sur la récolte 1996. Au 31 août dernier, les appellations du Muscadet avaient donc 478 000 hl de stocks (contre 550 000 hl un an avant et 597 000 hl en 1995).' Après cet assainissement, le marché a réagi et on s'y attendait ' explique Jean-Pierre Méchineau, vigneron à La Haye-Fouassière et nouveau président du syndicat. Durant la campagne 1996-1997, la reprise en volume est nette : 698 000 hl ont été commercialisés (235 000 hl de sur lie, 288 000 hl en sèvre-et-maine et 170 000 hl en AOC Muscadet pour les catégories les plus importantes). Le total est supérieur de 24 % à la campagne précédente. Les premiers mois de l'actuelle campagne se situent dans la même dynamique, avec les stocks mentionnés et une récolte de 700 000 hl. Les disponibilités sont supérieures à 1 153 000 hl. Au 15 décembre, 286 000 hl (toutes appellations du Muscadet confondues) étaient déjà commercialisés. Le VDQS gros plant affiche, lui, 61 175 hl.Pour l'instant, si les volumes repartent, les prix ne suivent pas : durant la campagne, les sur-lie ont été commercialisés à 774 F/hl en moyenne, les sèvre-et-maine à 440 F et le muscadet à 410 F. Parfois, cela couvre à peine les coûts de production.' Sur les 1 300 producteurs de la région (sur 13 000 ha), 300 sont en difficulté financière et la moitié n'est pas très à l'aise ', constate le président du syndicat. Un constat somme toute alarmant, confirmé par un banquier spécialisé dans les comptes des vignerons locaux : ' En huit ans, je n'avais jamais vu une telle situation d'ensemble. Il est évident que des gens vont rester sur le bord de la route '. ' Ce qui nous a préservé, c'est la solidarité familiale, explique un responsable. Ce qui pouvait être perçu comme une faiblesse, nos petites structures familiales, s'est finalement avéré être une force. On s'est serré les coudes, certains parents acceptent que les fermages ou autres métayages soient payés plus tard... Finalement, la crise nous a fait percevoir les vrais valeurs de la vie. '' Le muscadet est un vin populaire au vrai sens du terme. Il a un vrai ressort extraordinaire : quand la situation économique est saine et que les millésimes sont de qualité, comme ce fut le cas en 1996 et en 1997, la clientèle répond présent. C'est une force extraordinaire. Avoir voulu opérer une politique artificielle de rétention de l'offre pour espérer faire monter les cours fut une erreur majeure. Nous pouvons vendre bien plus de vin mais les prix doivent reprendre aussi ', reprend le président Méchineau. D'ailleurs, au niveau des hommes, l'ambiance dans le vignoble n'est pas toujours au beau fixe.1997 a aussi été l'année de mise en place ou de développement de mesures visant à ' professionnaliser ' la filière. Si une charte interprofessionnelle a vu le jour, on retiendra surtout les questions d'agrément. Concernant les stocks de la récolte 1997 qui resteraient en cave en 1998, on voudrait mettre en place un ' agrément caduque ', ce qui serait tout simplement révolutionnaire, juridiquement l'agrément étant aujourd'hui acquis une fois pour toute. Les prises d'échantillons pour les stocks pourraient avoir lieu en même temps que celles du millésime suivant (automne 1998 dans notre cas). On pourrait éviter ainsi que de mauvais vins arrivent sur le marché et le tirent à la baisse.Dans plusieurs vignobles, les responsables sont prêts pour cette avancée. L'Inao ferait bien d'y réfléchir (un audit national est également en cours sur toutes les questions concernant les agréments).1997 a vu également l'extension aux AOC régionales et au muscadet de l'obligation pour les jurys participant aux agréments de suivre des formations préalables. Cela existait déjà pour le sur-lie. A terme, tout membre d'un jury devra être formé; ce sera aussi le cas pour les primeurs en 1998. A la fin 1997, 300 personnes (vignerons, négociants...) y étaient passées. L'idée est de suivre une séance par personne et par an. ' Depuis la mise en place de ce système, il n'y a pratiquement plus d'absentéisme lors des dégustations. L'impact psychologique auprès de la base est remarquable ', estime-t-on sur place. Dans le même ordre d'idée, un soutien technique est proposé aux ' abonnés du recalage '.Enfin, une hiérarchisation du vignoble est en gestation avancée. L'idée est d'avoir une fusée qualitative à plusieurs étages : le muscadet simple, les appellations régionales et, au sommet, des ' vins de terroir ' (à défaut d'un autre nom pour l'instant). Il faudra repérer ces terroirs plus qualitatifs. Se pose alors la question du sur-lie, qui n'est pas une appellation mais une méthode de vinification. L'appellation de base n'y aurait pas droit alors que les vins de terroir n'auraient que cela. 1998 pourrait apporter un début de réponse.

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