Malgré tous les discours ' libéraux ' et le retour officiel à la propriété privée, les 14 400 ha du vignoble de la République tchèque restent très encadrés par l'Etat. Il détermine les quantités à produire et les prix des vins à la vente. Le poids du passé est très fort.
Malgré tous les discours ' libéraux ' et le retour officiel à la propriété privée, les 14 400 ha du vignoble de la République tchèque restent très encadrés par l'Etat. Il détermine les quantités à produire et les prix des vins à la vente. Le poids du passé est très fort.
En 1993, la ' Révolution de velours ' a amené la séparation de l'ancienne Tchécoslovaquie entre la République tchèque et la Slovaquie. La plus grande partie du vignoble est restée chez cette dernière. La première compte désormais 14 400 ha, situés en Bohème (nord du pays) et surtout en Moravie, dans la région de Brno. Dans ce pays, comme ailleurs en Europe de l'Est, l'effondrement du Communisme et le retour à la propriété privée a changé la donne : du coup, certains nouveaux propriétaires tentent de mener leur exploitation ' à l'occidentale '. Ils sont considérés comme des aventuriers.Les propriétaires terriens qui ont retrouvé leurs vignes, essaient de cultiver leur différence. Le meilleur exemple est sans doute le domaine Lobkowicz, à Melnick (Bohème), que beaucoup considèrent comme une locomotive dans le pays. Les Lobkowitz, une famille d'aristocrates, ont retrouvé en 1992 leur château et leurs 80 ha de vignes. Ils ont fait le choix de la qualité, élèvent une partie de leurs vins ' à la française ' en fûts neufs, soignent les habillages et la distribution. Il est possible de les déguster chez les cavistes, dans les grands restaurants de Prague et dans les luxueux hôtels des villes d'eau, comme Marienbad ou Karlo-Vivari. Il existe aussi de nombreux petits producteurs, souvent propriétaires de quelques hectares de vignes. L'un des endroits les plus intéressants pour les découvrir dans leur diversité est sans doute le village de Petrov, en Moravie. On y trouve une centaine de caves historiques, construites par les habitants du village à partir du XVIe siècle. La qualité peut aller du meilleur au très approximatif. Il faut savoir qu'en dessous d'une production de 500 l, l'Etat n'exerce aucun contrôle, ni sur la qualité, ni sur le rendement. Un tiers des exploitations du village correspond à ce cas de figure.Pour les autres, dont la production oscille entre 1 000 et 2 000 l, l'Etat détermine si le vin peut être vendu en bouteilles et évalue le prix en fonction de la qualité. La production a du mal à sortir du giron de l'Etat. Par exemple, l'exploitation familiale Rosa Coeli, en Moravie. Trois personnes (les parents et le fils) travaillent pour exploiter 15 ha de vignes. La production est de 100 000 l (60 % en blanc et 40 % en rouge). Les parents travaillaient pour la coopérative du village. Ils ont récupéré les vignes et la possibilité de les exploiter après la ' Révolution de velours '. Ils ont alors suivi une formation technique d'oenologie et de vente. Ils cherchent à améliorer la qualité... mais sont toujours placés sous le contrôle de l'Etat. La majorité de leur production est proposée en ' cubi ' à la propriété, le reste étant vendu en bouteilles à des particuliers, des petits restaurants et des cavistes proches.Les grosses entreprises sont gérées de façon différente. Premier cas de figure, la société Vinium, à Velke Pavlovice, en Moravie. Elle a une production de dix millions de bouteilles. C'est une ancienne coopérative ne possédant pas de vignes mais cent cinquante fournisseurs de raisins, sous contrat, souvent regroupés en coopératives. Sa taille lui permet d'occuper le deuxième rang national et le premier dans le domaine des vins de table. Son personnel est plutôt jeune, d'esprit moderne. La direction souhaite appliquer les nouvelles méthodes de management et de marketing et cherche à s'ouvrir vers l'exportation. Deux directeurs ont découvert Vinexpo en juin 1997 et songent à la mise au point d'un stand tchèque en 1999. Ils admirent les vins français, cherchent à en appliquer les techniques de vinification mais ' malheureusement ', travaillent avec des machines en général allemandes, quelquefois italiennes. Ils misent sur l'amélioration globale de la qualité et l'évolution du goût du consommateur tchèque. Ils sont très optimistes.L'entreprise Bohemia Sekt, à Pilzen (à l'ouest du pays, hors zone de production), est de loin la plus importante du pays. Cette société produit plus de vingt-huit millions de bouteilles dont 50 % d'effervescents, le reste étant constitué par les vins tranquilles, les alcools et les spiritueux. 95 % de la production sont destinés au marché tchèque, le reste partant en Slovaquie, Sicile, Grande-Bretagne et Suisse. C'est aussi une ancienne brasserie qui produit des vins depuis 1942. La gamme des vins effervescents est assez étendue. Trois méthodes sont utilisées : la ' cuve close ', la ' transvasil ' (cuve close et bouteilles) et la ' champenoise '. Le haut de gamme est constituée par une cuvée de prestige : ' Louis Girardot ', en l'honneur d'un oenologue champenois, venu dans les années cinquante expliquer la méthode champenoise. Cette cuvée existe depuis 1994. La méthode ' cuve close ', la seule vendue en République tchèque, est la plus utilisée.Cette entreprise a connu une progression fulgurante : deux millions de bouteilles en 1970, vingt millions en 1980 et vingt-huit millions en 1996. Elle procède actuellement à une politique de rachat d'entreprises comme Vino Mikulof, en Moravie (troisième société tchèque). Mais en octobre dernier, le gouvernement ne lui a pas donné l'autorisation d'acheter Becherovka, à Karlo-Vivari. La société ne possède pas de vignes mais a une politique d'achat de vins de base précise : elle acquiert, par exemple, des vins de base en France et en Italie. Elle est gérée de façon occidentale, très bien équipée sur le plan technique et possède de réelles ambitions aux échelons national et international. Pour certains interlocuteurs, il faudra encore au moins deux ans avant que la situation se décante vraiment.Dans ce pays où il y a encore beaucoup à faire pour moderniser les vignobles et les caves, où la production suffit à la consommation nationale, il existe un réel souci d'amélioration de la qualité et un esprit neuf souffle chez de nombreux entrepreneurs. La mise en place en 1995 d'une loi définissant les régions d'appellation (six en Bohème et dix en Moravie) a aussi clarifié la situation. Mais l'Etat reste omniprésent, sûrement trop. Bonne nouvelle : la consommation nationale de bière serait en diminution au bénéfice de celle du vin.
En 1993, la ' Révolution de velours ' a amené la séparation de l'ancienne Tchécoslovaquie entre la République tchèque et la Slovaquie. La plus grande partie du vignoble est restée chez cette dernière. La première compte désormais 14 400 ha, situés en Bohème (nord du pays) et surtout en Moravie, dans la région de Brno. Dans ce pays, comme ailleurs en Europe de l'Est, l'effondrement du Communisme et le retour à la propriété privée a changé la donne : du coup, certains nouveaux propriétaires tentent de mener leur exploitation ' à l'occidentale '. Ils sont considérés comme des aventuriers.Les propriétaires terriens qui ont retrouvé leurs vignes, essaient de cultiver leur différence. Le meilleur exemple est sans doute le domaine Lobkowicz, à Melnick (Bohème), que beaucoup considèrent comme une locomotive dans le pays. Les Lobkowitz, une famille d'aristocrates, ont retrouvé en 1992 leur château et leurs 80 ha de vignes. Ils ont fait le choix de la qualité, élèvent une partie de leurs vins ' à la française ' en fûts neufs, soignent les habillages et la distribution. Il est possible de les déguster chez les cavistes, dans les grands restaurants de Prague et dans les luxueux hôtels des villes d'eau, comme Marienbad ou Karlo-Vivari. Il existe aussi de nombreux petits producteurs, souvent propriétaires de quelques hectares de vignes. L'un des endroits les plus intéressants pour les découvrir dans leur diversité est sans doute le village de Petrov, en Moravie. On y trouve une centaine de caves historiques, construites par les habitants du village à partir du XVIe siècle. La qualité peut aller du meilleur au très approximatif. Il faut savoir qu'en dessous d'une production de 500 l, l'Etat n'exerce aucun contrôle, ni sur la qualité, ni sur le rendement. Un tiers des exploitations du village correspond à ce cas de figure.Pour les autres, dont la production oscille entre 1 000 et 2 000 l, l'Etat détermine si le vin peut être vendu en bouteilles et évalue le prix en fonction de la qualité. La production a du mal à sortir du giron de l'Etat. Par exemple, l'exploitation familiale Rosa Coeli, en Moravie. Trois personnes (les parents et le fils) travaillent pour exploiter 15 ha de vignes. La production est de 100 000 l (60 % en blanc et 40 % en rouge). Les parents travaillaient pour la coopérative du village. Ils ont récupéré les vignes et la possibilité de les exploiter après la ' Révolution de velours '. Ils ont alors suivi une formation technique d'oenologie et de vente. Ils cherchent à améliorer la qualité... mais sont toujours placés sous le contrôle de l'Etat. La majorité de leur production est proposée en ' cubi ' à la propriété, le reste étant vendu en bouteilles à des particuliers, des petits restaurants et des cavistes proches.Les grosses entreprises sont gérées de façon différente. Premier cas de figure, la société Vinium, à Velke Pavlovice, en Moravie. Elle a une production de dix millions de bouteilles. C'est une ancienne coopérative ne possédant pas de vignes mais cent cinquante fournisseurs de raisins, sous contrat, souvent regroupés en coopératives. Sa taille lui permet d'occuper le deuxième rang national et le premier dans le domaine des vins de table. Son personnel est plutôt jeune, d'esprit moderne. La direction souhaite appliquer les nouvelles méthodes de management et de marketing et cherche à s'ouvrir vers l'exportation. Deux directeurs ont découvert Vinexpo en juin 1997 et songent à la mise au point d'un stand tchèque en 1999. Ils admirent les vins français, cherchent à en appliquer les techniques de vinification mais ' malheureusement ', travaillent avec des machines en général allemandes, quelquefois italiennes. Ils misent sur l'amélioration globale de la qualité et l'évolution du goût du consommateur tchèque. Ils sont très optimistes.L'entreprise Bohemia Sekt, à Pilzen (à l'ouest du pays, hors zone de production), est de loin la plus importante du pays. Cette société produit plus de vingt-huit millions de bouteilles dont 50 % d'effervescents, le reste étant constitué par les vins tranquilles, les alcools et les spiritueux. 95 % de la production sont destinés au marché tchèque, le reste partant en Slovaquie, Sicile, Grande-Bretagne et Suisse. C'est aussi une ancienne brasserie qui produit des vins depuis 1942. La gamme des vins effervescents est assez étendue. Trois méthodes sont utilisées : la ' cuve close ', la ' transvasil ' (cuve close et bouteilles) et la ' champenoise '. Le haut de gamme est constituée par une cuvée de prestige : ' Louis Girardot ', en l'honneur d'un oenologue champenois, venu dans les années cinquante expliquer la méthode champenoise. Cette cuvée existe depuis 1994. La méthode ' cuve close ', la seule vendue en République tchèque, est la plus utilisée.Cette entreprise a connu une progression fulgurante : deux millions de bouteilles en 1970, vingt millions en 1980 et vingt-huit millions en 1996. Elle procède actuellement à une politique de rachat d'entreprises comme Vino Mikulof, en Moravie (troisième société tchèque). Mais en octobre dernier, le gouvernement ne lui a pas donné l'autorisation d'acheter Becherovka, à Karlo-Vivari. La société ne possède pas de vignes mais a une politique d'achat de vins de base précise : elle acquiert, par exemple, des vins de base en France et en Italie. Elle est gérée de façon occidentale, très bien équipée sur le plan technique et possède de réelles ambitions aux échelons national et international. Pour certains interlocuteurs, il faudra encore au moins deux ans avant que la situation se décante vraiment.Dans ce pays où il y a encore beaucoup à faire pour moderniser les vignobles et les caves, où la production suffit à la consommation nationale, il existe un réel souci d'amélioration de la qualité et un esprit neuf souffle chez de nombreux entrepreneurs. La mise en place en 1995 d'une loi définissant les régions d'appellation (six en Bohème et dix en Moravie) a aussi clarifié la situation. Mais l'Etat reste omniprésent, sûrement trop. Bonne nouvelle : la consommation nationale de bière serait en diminution au bénéfice de celle du vin.