Les risques d'intoxication auxquels sont exposés les agriculteurs lors de la manipulation de produits phytosanitaires sont indéniables et sujets actuellement de nombreuses campagnes de diffusion de la part de la profession, de la MSA... Le choix de la bonne protection est pourtant épineux!
Pendant la préparation de la bouillie, le risque est grand car on manipule des solutions concentrées. Au cours de la pulvérisation, les produits sont plus dilués et parviennent à la cabine en fin brouillard. Cependant, la durée d'exposition étant importante, les risques d'intoxication sont conséquents. Les réglages du pulvérisateur à la parcelle sont également source de contamination.Le choix d'une protection adaptée implique de bien connaître la nature du risque : 90 % des contaminations des voies respiratoires sont sous forme d'aérosols, c'est-à-dire de fines gouttes en suspension dans l'air avec une faible vitesse de chute (comme le brouillard). Le reste est sous forme gazeuse.La MSA a estimé qu'en conditions idéales, le conducteur inspirait 40 microgrammes de produit sous forme d'aérosols par journée de huit heures. La contamination peut être supérieure en conditions réelles. De ce fait, la protection respiratoire adaptée comportera un premier étage, arrêtant les aérosols, et un deuxième étage, arrêtant les gaz.Le choix d'une protection adaptée est un premier pas. Encore faut-il préserver son efficacité en l'entretenant et en la renouvelant régulièrement. Le respect des mesures élémentaires de protection est également indispensable : à quoi bon s'équiper d'un masque si l'on mange et boit pendant le traitement ou si l'on ne se douche pas en rentrant? L'efficacité de la protection sera d'autant meilleure qu'on travaillera dans de bonnes conditions : choix de produits les moins nocifs possible, peu de vent et température fraîche, préparation de la bouillie facilitée, peu d'interventions au champ, bidon d'eau claire à disposition sur le tracteur...Une autre approche de la protection pendant les traitements phytosanitaires concerne la cabine du tracteur : assurer son étanchéité et épurer l'air de ventilation. Ce type de protection ne dispense pas de porter des gants et, éventuellement, un petit masque pendant la phase de préparation de la bouillie et les réglages au champ.Les avantages de ces systèmes sont leur discrétion et leur confort. A condition de choisir une climatisation combinée sans laquelle on ne peut tenir dans la cabine sans ouvrir les fenêtres, ce qui contamine à nouveau le milieu. Par ailleurs, ces systèmes protègent pendant la pulvérisation et les utilisations ultérieures du tracteur puisque l'habitacle reste sain.Il existe deux procédés sur le marché : la filtration ' classique ', développée par la société Buisard, et le procédé de ' lavage d'air ', de la société Aérel (deux entreprises situées dans la Sarthe). Buisard utilise une filtration combinée : antipoussières, antiaérosols et antivapeurs, procédé dont l'efficacité est incontestée mais dont le point faible est connu : une fois le filtre saturé ou dans le cas d'une alternance de produits, il y a des risques de relargages imprévisibles et indétectables. D'où la collaboration de Buisard avec une société allemande pour mettre au point des capteurs indiquant la présence de produits phytosanitaires dans le milieu et signalant la contamination de la cabine par les produits phytosanitaires, signe que le filtre est à changer... Néanmoins, vu l'immense éventail des combinaisons matière active-adjuvant, la conception d'un capteur sensible à l'ensemble de ces produits est d'une grande complexité. La société Buisard mène actuellement des tests afin de valider l'étalonnage de ses capteurs.La société Aérel utilise un principe actif uniquement sur les aérosols : un préfiltre qui retient les plus grosses particules, suivi d'un dispositif de lavage d'air. L'air chargé d'aérosols traverse une chambre où un nébulisateur injecte un brouillard d'eau. L'air est purifié tandis que l'eau est filtrée et recyclée. L'eau du réservoir est changée en fin de chaque journée. De plus, l'évaporation d'une petite partie de l'eau dans la chambre de nébulisation refroidit l'air ventilé dans la cabine. Des tests ont prouvé l'efficacité en termes de climatisation et de filtration des poussières de moissonneuses- batteuses. Les tests sur la rétention des produits chimiques, qui posent des problèmes différents, sont en cours.Ces deux sociétés travaillent actuellement, chacune de son côté, sur l'établissement d'une norme de sécurité ou sur des tests en laboratoire évaluant l'efficacité de leurs produits.