Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 1998

L'eudémis flaire les grappes

La vigne - n°89 - juin 1998 - page 0

Les vignes les plus chargées sont les plus attaquées par l'eudémis. On suppose que les femelles repèrent les zones riches en grappes par l'odeur intense qui s'en dégage. Cette observation permettra d'élaborer des outils de prévision des niveaux de population et de la répartition des individus dans l'espace.

Quand on parle de répartition spatiale d'insectes, deux notions sont à considérer : l'échelle d'observation et l'évolution dans le temps de cette répartition. Les recherches que nous développons sur ce thème ont pour objectifs :- d'étudier la répartition spatiale des vers de la grappe à l'échelle du cep, de la parcelle (1 ha), du domaine et de la région viticoles (cartographie);- d'identifier les facteurs environnementaux intervenant dans la répartition spatiale des dégâts d'eudémis. Ces facteurs sont naturels (présence de bois, de cours d'eau...) ou liés à l'activité de l'homme (routes, voies ferrées, méthodes culturales, cépages...);- de suivre l'évolution de cette répartition spatiale d'une génération à la suivante, d'une année sur l'autre...- d'intégrer ces données dans un modèle mathématique de prévision de la dynamique spatiale et temporelle de l'insecte.Dans cet article, nous présentons les résultats obtenus à l'échelle de la parcelle. Pour mener ces travaux, depuis 1994, des observations sont réalisées dans des vignes expérimentales de l'Inra et chez des vignerons bordelais.Nous avons retenu des parcelles d'environ 1 ha. Elles sont conduites de façon traditionnelle mais ne reçoivent pas de traitement insecticide en première et deuxième générations. Un échantillonnage systématique en quinconce est effectué. Nous examinons un cep sur quatre sur chacun des rangs et toutes les grappes des ceps retenus sont observées. Nous notons le nombre total de grappes du cep et celui de grappes attaquées. Toutes ces informations servent à dresser pour chaque parcelle la cartographie du nombre de grappes et de l'intensité des dégâts. Des histogrammes, présentant la relation entre le pourcentage de ceps attaqués et la productivité de ces ceps, sont établis pour chacune des deux générations de l'eudémis. Les cartes permettent de visualiser la répartition des grappes sur les parcelles et celle des dégâts larvaires de première et deuxième générations.Deux faits sont tirés de cette étude. Une liaison très nette existe entre les zones de fortes attaques et les zones les plus riches en grappes. Ce lien nous est apparu nettement en 1994. A la mi-avril, les vignes avaient gelé. De ce fait, la charge des ceps fut très hétérogène. A quelques mètres de distance, certains portaient très peu de récolte alors que d'autres avaient conservé un bon potentiel. Pendant le reste de la saison, les premiers paraissaient délaissés par l'eudémis qui concentrait ses attaques sur les seconds. Le lien entre l'intensité des dégâts et l'abondance des grappes a été confirmé les années suivantes.Les histogrammes présentant le pourcentage de ceps attaqués en fonction du nombre de grappes par cep permettent de vérifier la constatation visuelle résultant de l'étude des cartes : les zones ayant les ceps les plus productifs sont celles à plus fort risque de dégâts. Cette répartition des chenilles dans la parcelle peut provenir du choix des sites de ponte par les femelles et d'une hétérogénéité de la mortalité des oeufs et des jeunes chenilles.La première explication est prédominante ici. Des travaux antérieurs, menés dans notre laboratoire par Jacques Stockel, ont montré que les femelles d'eudémis sont attirées par des substances de types alcool et acide gras émises par les fleurs et les grappes. Un gradient de ces odeurs, provenant d'une variation du nombre de grappes au sein des parcelles, peut diriger les femelles vers les zones les plus riches en grappes.D'autre part, une forte concentration de dégâts larvaires est parfois constatée en bordures de parcelles. Nous n'avons pas d'éléments d'explication mais des observations sont en cours pour essayer d'associer des facteurs environnementaux à l'attraction des femelles et à une variation de la survie des insectes sur certaines bordures de parcelles.Ces deux faits nous ont conduits à formuler deux hypothèses qui seront intégrées dans un modèle de prévision des risques d'eudémis : une partie des femelles se déplacent dans les parcelles pour déposer leurs oeufs dans les zones les plus riches en organes fructifères où elles sont attirées; une autre partie sort de la parcelle de vigne : certaines vont mourir ou pondre ailleurs, d'autres vont revenir vers la parcelle et s'arrêter en bordure pour pondre.Ces deux hypothèses sont prises en compte dans un modèle en cours d'élaboration dans notre laboratoire, par l'intégration de termes formalisant ces observations. Notre objectif est de mettre au point un modèle quantitatif pour permettre de simuler les variations dans le temps et dans l'espace des populations de vers de la grappe. A plus long terme, nous souhaitons également appliquer la méthodologie d'étude de la répartition spatiale de l'insecte à de plus larges zones viticoles et une cartographie des attaques d'eudémis dans le Sauternais, en collaboration avec la chambre d'agriculture de la Gironde, fait partie de nos projets de recherche.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :