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Un risque véritable ou une question d'image?

La vigne - n°90 - juillet 1998 - page 0

Il y a plusieurs catégories de boues d'épuration. Les boues urbaines, riches en azote mobilisable lorsqu'elles ne sont pas chaulées et présentent en l'état peu d'intérêt pour le vignoble, sont utilisées en grandes cultures. Les boues cellulosiques de papeterie sont relativement pauvres en azote mais riches en matières organiques carbonées et en calcium. Elles présentent un intérêt en viticulture pour leur caractère d'amendement calcique ayant un effet structurant sur les sols; pour les secteurs pentus, elles peuvent enrichir en matière organique et lutter contre l'érosion. Pour les jeunes plantations, on peut les épandre pour un effet mulch, qui maintient l'humidité autour des pieds; elles protègent le sol contre l'érosion pendant les premières années, où l'enherbement est déconseillé pour éviter une forte compétition. L'épandage de ces boues est précédé d'analyses des boues et vérification de leur conformité aux normes, analyse du sol récepteur (beaucoup de parcelles viticoles sont impropres en raison d'une teneur en cuivre élevée). L'épandage est organisé par des sociétés spécialisées, encadrées par les chambres d'agriculture et la mission de recyclage agricole. Le producteur de boues prend en charge l'étude préalable, l'analyse, le conseil et l'épandage. L'agriculteur reçoit une fiche-produit avec les caractéristiques de la boue. Les sols du vignoble représentent un débouché marginal au niveau tonnage. Cependant, il ne faudrait pas que le mot d'ordre de la profession viticole alsacienne jette un discrédit sur l'épandage de boues, qui se répercute parmi les producteurs de céréales. D'autant qu'il s'agit uniquement d'une question d'image, sans fondement technique : la couleur bleue des boues de papeterie jure dans le vignoble. Pour les aspects agronomiques, l'épandage des boues est bien surveillé et sans risque particulier dès lors qu'il est correctement conduit. ' Il y a un an, Yves Bénard, président des négociants, et moi-même avons pris la décision interprofessionnelle d'interdire les apports de composts urbains. Nous ne sommes pas les premiers : l'AOC pomme de terre de l'Ile de Ré l'avait fait avant nous et le vignoble alsacien a aussi interdit l'utilisation de boues. En tant qu'AOC Champagne, nous avons une image à respecter. Nous ne pouvons nous permettre de prendre le moindre risque. La crise de la vache folle a sensibilisé le public sur les questions de santé publique. Si nous épandons un produit dangereux, qui nuit à la santé (la dioxine, par exemple, qui peut être présente dans les déchets urbains), l'impact sur l'opinion serait terrible. A l'heure actuelle, nous n'avons aucune garantie d'épandre un produit propre, donc nous préférons le refuser. On nous presse de toutes parts pour que nous fassions des efforts de lutte intégrée, de bonnes pratiques agricoles.Pour l'instant, cette interdiction professionnelle a été suivie à 99,9 %. Toutefois, les interprofessions ont un pouvoir de sanction limité. Nous avons donc fait appel à l'Inao en mai, afin de faire figurer cette interdiction dans les conditions de production de l'AOC Champagne. Ainsi, l'utilisation des composts urbains conduira au déclassement de la récolte. Cette modification devrait passer en juillet ou en septembre. ' Les boues de station d'épuration et celles d'origine industrielle ne sont pas conformes à des normes au titre des matières fertilisantes qui permettraient d'en assurer la distribution sans encadrement spécifique. Leur épandage est donc soumis à la loi sur l'eau pour les premières, sur les installations classées pour les secondes. Il doit être fait dans une logique agronomique, dans le but de fertiliser une culture ou d'améliorer la structure des sols. Il fait l'objet d'un suivi agronomique et de qualité des sols. L'épandage est soumis à des contraintes : surveillance de la qualité des boues, éloignement des points d'eau et des habitations, interdiction d'épandre sur les cultures légumières ou les sols trop acides, respect d'un délai entre épandage et pâturage... Le plan d'épandage est fait par l'exploitant de la station d'épuration, en accord avec les agriculteurs. Quant les compost urbains, ils entrent dans le cadre de la norme 44 051 sur les matières fertilisantes. Ce sont des déchets urbains en majorité, qui font l'objet d'un traitement d'hygiénisation par compostage en vue d'une utilisation spécifique en agriculture. Pour les composts urbains, dans le cadre de la norme matière fertilisante ', leur épandage n'est pas réglementé, contrairement à celui des boues. '

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