A condition de trier sévèrement, de sulfiter abondamment et de levurer rapidement, on limite l'accumulation d'acidité volatile dans les vins issus de vendange pourrie acide.
Il est communément admis que les raisins atteints de pourriture acide sont inaptes à produire des vins de qualité. Il est cependant compréhensible que l'on entreprenne de les vinifier. Des techniques simples et courantes de vinification en rouge peuvent éviter des accidents irréversibles. Toutefois, les vignerons doivent constamment garder à l'esprit que les produits obtenus avec une vendange de piètre qualité sanitaire seront tout au plus des vins convenables, ne générant pas une plus-value importante.Les mesures de prévention (limitation de la vigueur, traitements pour protéger les baies...) seront privilégiées. Un tri des grappes et des raisins fortement atteints devra être pratiqué avant l'encuvage.De nombreux travaux montrent que les niveaux de populations microbiennes des baies infestées par la pourriture acide sont particulièrement élevés par rapport à des raisins sains. Les micro-organismes impliqués dans ces dégradations sont essentiellement des levures. Elles représentent 70 % des germes isolés. Des bactéries lactiques et acétiques composent les 30 % restants. Ces micro-organismes utilisent les sucres et produisent un certain nombre de composés (acides uronique, gluconique...), en particulier de l'acide acétique.De plus, les contaminations peuvent être observées deux semaines avant la maturité technologique. Cette longue durée aggrave les dégâts (grains de couleur brique ou brune, baies vidées de leur pulpe, forte odeur acétique...).Les espèces rencontrées sont courantes sur les baies saines avant la fermentation alcoolique. Cependant, Kloeckera apiculata (production d'acétate d'éthyle) et surtout Candida stellata sont retrouvées systématiquement et en proportion plus grande sur les raisins altérés. La plupart des germes apparaissent comme potentiellement néfastes pour la qualité des vins. Il convient donc de les éliminer le plus strictement et le plus rapidement possible.Sans traitements adaptés, les risques de piqûre acétique s'accroissent fortement. Ainsi, un essai mis en place par l'ITV en 1993 montre-t-il que malgré une vinification bien conduite et une couverture en SO2 conséquente, une forte montée en acidité volatile peut survenir en cours d'élevage.Des essais conduits en 1994 et 1995 par l'interprofession des côtes du Rhône mettent en évidence que des techniques simples permettent d'aboutir à un produit analytiquement correct. L'ensemencement bactérien permet d'obtenir plus rapidement la fermentation malolactique mais n'améliore pas les caractéristiques analytiques des vins. Les lots obtenus après éraflage possèdent une acidité totale plus élevée et une nuance plus faible. Le sulfitage et le levurage apparaissent clairement comme les opérations les plus déterminantes. Un sulfitage à 10 g/hl, combiné à un levurage avec une souche sélectionnée, limite les risques de piqûre. Le seul sulfitage à 10 g/hl peut aboutir au même résultat. Un sulfitage plus faible (autour de 5 g/hl) n'empêche pas une dérive forte de l'acidité volatile. A l'analyse sensorielle, le vin sulfité à 10 g/hl et levuré est globalement mieux noté que le vin uniquement sulfité.La pourriture acide modifie sensiblement les caractéristiques des moûts. Ceux issus de raisins altérés sont moins riches en sucres, possèdent des acidités totales et volatiles plus élevées, les écarts d'acidité volatile pouvant dépasser 0,50 g/hl en équivalent H 2SO4.Après la mise en bouteilles, les observations suivantes sont notées pour deux millésimes (mourvèdre 1994 et cinsault 1995) entre les vins issus d'une vendange saine et ceux élaborés avec une matière première altérée, sulfitée et levurée : identité des niveaux d'acidité totale, écarts d'acidité volatile faible à assez faible, intensité colorante et indice de polyphénols totaux des vins produits avec des raisins altérés plus élevés.Par ailleurs, indépendamment du sulfitage et du levurage, les teneurs en méthanol sont sensiblement plus hauts pour les vins issus de baies attaquées.Les résultats décrits ont été observés pour un faible nombre de cuvées. Par conséquent, on ne peut pas les généraliser. Il est cependant possible de tirer les enseignements suivants : le traitement des raisins atteints de pourriture acide demande une vigilance soutenue; toutes les opérations d'hygiène, de la récolte à la mise en bouteilles, devront être particulièrement soignées; deux interventions doivent être pratiquées. Il convient de sulfiter le plus rapidement possible à dose élevée et de levurer à une dose au moins égale à 20 g/hl pour empêcher les développements incontrôlés des micro-organismes indigènes.Cependant, tous les procédés de vinification ne limitent pas les conséquences négatives d'une vendange déficiente. Ils ne corrigent pas de manière positive les insuffisances de qualité de la matière première.