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Fermentation des blancs: un débat toujours d'actualité

La vigne - n°91 - septembre 1998 - page 0

Certains cépages admettent-ils plus de trouble ou des températures de fermentation plus élevées que d'autres? Faut-il rechercher la souche de levure idéalement adaptée à un cépage? Autant de questions qui font l'objet de débats dont voici les arguments.

Débourbage, puis fermentation à température contrôlée: rares sont les blancs qui échappent à ce schéma de vinification. Les moûts doivent être clarifiés. Il est admis que 200 NTU (new turbidity unit) constituent le maximum de trouble acceptable. Au-delà de ce seuil, les vins se chargent d'amertume et de goûts de réduit. Et en deçà de 50 NTU, lorsque le jus devient totalement limpide, il faut se préserver des fins de fermentations difficiles en utilisant des levures à haut pouvoir fermentaire, en aérant précocement les moûts et en leur apportant de l'azote.Voilà pour le principe général. Admet-il des nuances? La question reste très débattue.Bien des Bourguignons estiment que les bourbes fines contribuent à soutenir le corps du chardonnay, qu'elles sont d'autant plus intéressantes que le terroir d'origine des raisins l'est. Dans cette région, on pense que les débourbages serrés donnent des vins de nez alors que ceux qui le sont moins aboutissent à des vins de corps. Les premiers sont attrayants dans leur jeunesse, les seconds sont plus aptes à l'élevage et au vieillissement.A Sancerre, où règne le sauvignon, la question de l'utilité du trouble ne se pose pas. ' Nous conseillons aux vignerons d'en garder le moins possible, révèle Nicolas Nepper, de la Sicavac, l'organisme local de conseil viticole et oenologique. 95 % d'entre eux travaillent ainsi. ' Les seuils de tolérance de ces deux cépages seraient-ils différents? Au domaine Virginie, dans l'Hérault, on le constate. ' On peut accepter des débourbages un peu moins sévères pour le chardonnay que pour le sauvignon ', soutient Sylvain Grailard. D'autres oenologues font part de cette souplesse du cépage originaire de Bourgogne. ' Cela ne nous dérange pas d'être à 200 NTU avec le chardonnay, révèle Laurent Mingaud, de la cave des Sieurs d'Arques, à Limoux (Aude). Il y a un potentiel aromatique dans ses bourbes fines. En revanche, avec le mauzac, mieux vaut être entre 50 et 100 NTU car même les bourbes fines sont susceptibles d'ajouter de l'amertume. ' Selon notre interlocuteur, le chardonnay admet également des températures de fermentation plus élevées que le mauzac. Certains de ses collègues méridionaux vont plus loin et soulignent que le cépage tire profit de fermentations conduites entre 20 et 24°C: sa rondeur et son gras s'en trouvent renforcés. Ils précisent que de tels niveaux sont au contraire préjudiciables pour le sauvignon. En Alsace, on constate également que les températures élevées réussissent mieux à certains qu'à d'autres. ' Le tokay (pinot gris) et le gewurztraminer sont des cépages capiteux, intervient Eric Meistermann, de l'ITV de Colmar. On peut se permettre un pic de température à 24°C en fin de fermentation, cela leur donne plus de corps. 'Ces avis ne font pas l'unanimité, loin s'en faut. Pour Yves Grassa, du château du Tariquet, seule la longueur de la macération préfermentaire doit être adaptée au cépage. ' Le reste du travail est rigoureusement le même, qu'il s'agisse de colombard, de sauvignon ou de chardonnay, explique ce vigneron d'Eauze (Gers). Nous débourbons très serré. Si l'on veut avoir du gras dans les vins, il faut viser 40 à 60 hl/ha et non pas 80 hl/ha. C'est au vignoble qu'on l'obtient et non pas en gardant des bourbes. ' Yves Grassa clarifie ses moûts jusqu'à ce que leur turbidité tourne entre 30 et 80 NTU.Après le débourbage, notre interlocuteur continue d'appliquer une règle commune à ses différents cépages. Cette fois, elle concerne la régulation de la fermentation. ' Ce qui compte, c'est la façon dont le vin fermente. Il faut un très léger frémissement et une très belle mousse. Il faut perdre 8 à 10 g de sucre en 24 heures. 'Dernier aspect important: le choix des levures. Là encore, deux écoles s'opposent : l'une privilégie les aptitudes technologiques des souches, l'autre leur origine. La première école s'intéresse en priorité au pouvoir fermentaire, à l'impact sur l'acidité ou encore à la production d'acidité volatile, de mousse, de SO2 ou d'arômes amyliques. Elle dit que la levure doit arriver au bout des fermentations et sans y introduire le moindre défaut. Elle lui confie en quelque sorte une mission minimale, affirmant que le cépage sera révélé si la mission est accomplie. Selon cette optique, une seule souche convient à différents cépages.La seconde école compte plus d'adeptes et voit les choses autrement. Elle recherche la meilleure souche pour un cépage donné. Suivant un raisonnement intuitif, elle la choisit parmi celles qui ont été isolées dans la région d'origine du cépage en question. Elle recommande Bourgoblanc avec le chardonnay ou EG 8 (sélectionnée par l'Inra de Colmar) sur les variétés alsaciennes. Dans un cas, elle peut aller plus loin et indiquer deux souches expressément sélectionnées pour leur aptitude à révéler les arômes du sauvignon, souches qui, de l'avis de nombreux vinificateurs, ne sont pas les seules capables de faire ce travail. Pour les autres blancs, il n'existe pas d'équivalent. C'est peut-être le signe qu'il n'y a pas ou peu d'associations idéales.

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