Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 1998

Ecouler à l'heure H

La vigne - n°91 - septembre 1998 - page 0

Les macérations longues ne conviennent pas à tous les cépages. Il faut en finir avec l'idée qu'elles sont indispensables à l'obtention de grands vins.

Quelques jours au plus tard après la fin de la fermentation, le pinot noir doit être décuvé. Après sept années d'essais, Vincent Gerbaux, de l'ITV de Beaune (Côte-d'Or), est formel : les longues macérations ne conviennent pas à ce cépage. Le jury qui a dégusté ses essais a préféré les cuvées écoulées trois jours après la fin de la fermentation alcoolique à celles qui sont restées huit jours, voire plus sous marc. Dans une région où certains ne se font pas à l'idée que le pinot noir ait une charpente légère, il ne fut pas toujours facile d'admettre cette conclusion. Longtemps, la mode fut à la recherche d'extractions poussées. Elle a conduit certains à préconiser la macération sulfitique et d'autres à prolonger les cuvaisons au-delà de quinze jours. Les premiers ont conseillé de verser jusqu'à 20-30 g de SO2 par hl pour bénéficier de son action de destruction des pellicules, qui aboutit à une libération de la couleur. Les seconds ont voulu ' extraire davantage de tanins pour stabiliser la couleur, analyse Eric Grandjean, oenologue au laboratoire conseil de l'interprofession de Bourgogne. Mais on s'est aperçu que c'était au détriment de la couleur. Aujourd'hui, les macérations durent en moyenne douze à quinze jours. 'Dans les côtes du Rhône, le cinsault est un autre exemple de cépage rouge qui ne supporte pas les longues macérations. Il n'est pas très coloré. Dès que l'on prolonge le contact des marcs avec les jus au-delà de quelques jours, les vins s'assèchent. Voilà deux cas pour lesquels les choses sont claires. Il en est d'autres pour lesquels elles le sont moins, le cabernet franc notamment. Dans le Val-de-Loire, certains se demandent si le fait de prolonger sa macération au-delà de trois semaines ne revient pas à le brusquer, même lorsqu'il est récolté parfaitement mûr. En agissant ainsi, ils obtiennent des vins plus charpentés. Mais en contrepartie, ils sont plus durs et plus végétaux.A l'inverse, le carignan, dont on a longtemps dit dans le Midi qu'il fallait l'écouler rapidement, montre depuis peu qu'il se goûte bien après des cuvaisons de quatre à cinq semaines. A une condition : que la vendange soit de parfaite qualité, c'est-à-dire de grande maturité et tout à fait saine. Cette condition s'applique à tous les raisins. On ne peut espérer réussir des vins après de longs séjours sur marc que si elle est remplie. Dans ce cas, on observe que les tanins, après un temps d'expression brutale, finissent par se fondre et s'enrober. Les vins sont puissants et riches sans être rêches. Le cabernet sauvignon est le meilleur exemple de ce type de comportement. On l'observe également avec le tannat. Pour autant, il ne faut pas en conclure que tous les cépages réagissent pareillement. Contrairement à une idée dominante, il n'est pas indispensable d'entreprendre des cuvaisons d'au moins trois semaines pour faire de grands vins. Le pinot noir le prouve.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :