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Le Guyot n'a pas dit son dernier mot

La vigne - n°92 - octobre 1998 - page 0

Dans des régions traditionnellement en taille longue, des essais de passage en taille courte ont été menés. Les résultats varient beaucoup selon les cépages.

En cordon de Royat, il est possible de prétailler. Cela nous permet de gagner 50 % de temps à la taille par rapport au Guyot, explique Manuel Da Silva, responsable du vignoble de la maison Henri Maire, dans le Jura. Sur le pinot noir, nous savons que les résultats sont bons. En revanche, sur poulsard et trousseau, cela ne convient pas. Des essais sont en cours pour mesurer les conséquences d'une taille courte sur chardonnay au niveau du rendement, de l'état sanitaire et des caractéristiques des moûts. 'Outre le gain de temps à la taille, le cordon de Royat présente aussi l'intérêt de mieux répartir la charge sur la souche et d'améliorer l'aération des grappes. D'autres évoquent en plus la diminution des plaies de taille par rapport au Guyot, ce qui limite les risques de contamination de la souche par des maladies du bois. Cependant, cet avantage tombe lorsqu'il faut rajeunir le cordon car les plaies sont alors importantes.En dépit de ces bonnes raisons, c'est la fertilité de la variété qui dicte généralement le choix du système de taille. On le sait, la taille permet à la fois de réguler le rendement et de lutter contre la tendance à l'allongement de la vigne (acrotonie). Dans son ouvrage de référence sur la physiologie de la vigne, François Champagnol rappelle qu'' avec les variétés fertiles, la taille courte permet à la fois de lutter contre l'acrotonie et d'obtenir un volume de récolte suffisant '. Avec des variétés peu fertiles, au contraire, ' un rendement correct ne peut être atteint qu'en sollicitant l'entrée en croissance de bourgeons situés en position médiane sur le sarment (taille longue) et la lutte contre l'allongement des charpentes impose l'arcure ou le maintien d'un courson de rappel '. Sur certains cépages, la taille longue en Guyot simple, double ou en arcure, continue donc de s'imposer.En Gironde, après des années d'études comparatives, le Médoc a obtenu la possibilité de tailler en cordon bilatéral. Pourtant, tous les cépages ne réagissent pas de la même manière. Sur merlot et petit verdot, les résultats sont satisfaisants. La taille en cordon permet de réguler le rendement (mais sans excès) et d'éviter la vendange en vert. Sur cabernet sauvignon, par contre, la taille courte est délicate. ' Si un cot ne part pas ou si un bras meurt, il sera difficile de se rattraper car les bourgeons de la couronne ne démarrent pas. Cela pose des problèmes notamment en cas de gel ou lorsqu'on désire rajeunir le cordon. Sur merlot, en revanche, il y a toujours des pampres qui repartent ', constate Laurent Bernos, de la chambre d'agriculture de Blanquefort (Gironde). Pour le moment, on continue donc de préconiser une taille longue sur cabernet sauvignon en Gironde.En Alsace, on observe que le cordon convient bien aux pinots blanc, gris et noir. En revanche, sur les autres cépages dont les yeux de la base sont peu fertiles, on observe d'importantes chutes de rendement. ' D'autre part, avec la taille en cordon, la charge étant plus faible, la vigueur devient plus importante. Les grappes et le feuillage sont plus entassés et il y a davantage de pourriture. En cordon, il faut aussi savoir parfaitement bien tailler, sinon la souche s'allonge rapidement. Enfin, on constate que la taille courte provoque un départ important de gourmands, ce qui oblige à ébourgeonner. Le temps gagné à la prétaille est en partie perdu à l'ébourgeonnage. En Alsace, les décrets d'appellation ne préconisent pas un système de taille particulier. Mais le Guyot, simple ou double, s'est imposé car il convient bien à tous nos cépages ', précise un technicien de la chambre d'agriculture de Colmar (Haut-Rhin).En Beaujolais, au contraire, une comparaison sur dix ans de plusieurs systèmes de taille ne fait pas apparaître de différence significative en termes de qualité ou de quantité entre Guyot et cordon. Le gamay s'adapte donc bien à une taille courte. En Bourgogne, les observations menées par l'Association technique viticole de Bourgogne (ATVB) montrent les limites de la taille courte sur pinot noir.' L'objectif de la taille courte est de réduire la production de clones productifs. Sur des clones moyennement vigoureux, on observe une augmentation du rendement en cordon les premières années, puis une forte diminution. On se retrouve alors parfois sous le seuil de rentabilité économique. C'est donc un système de taille à réserver aux situations très fertiles. Dans les autres cas, Il y a des façons plus adaptées de contrôler le rendement ', remarque Jean-Michel Menant, de l'ATVB.Sur chardonnay, la taille courte pose aussi des problèmes. En Bourgogne, elle n'est pas ou peu utilisée car elle diminue trop les rendements. ' Dans nos vignes d'Ardèche, nous avons essayé le cordon. Mais c'est une grosse erreur dans des secteurs gélifs car la fertilité des contre-bourgeons est beaucoup plus faible sur bois court que sur bois long. Par ailleurs, la productivité en cordon de Royat est très aléatoire et on n'arrive pas à contrôler la régularité de la production ', indique Denis Fetzmann, responsable des vignobles de la maison Louis Latour, à Beaune (Côte-d'Or).Ainsi, le Guyot, s'il présente des inconvénients, notamment au niveau du temps de taille, reste-t-il encore un système de taille incontournable dans certaines régions.

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