Avant d'être nommée en région parisienne, j'étais conseillère pédagogique à Villefranche-sur-Saône. Nous avons démarré le travail sur le goût en 1992, en partenariat avec l'Union viticole du Beaujolais. L'objectif était de former des maîtres au cours de cinq séances d'éveil sensoriel pour qu'ils puissent ensuite élaborer des projets avec les enfants. Cette formation est fondée sur le volontariat et les maîtres intéressés doivent y consacrer bénévolement cinq mercredis matin. Il s'agit de montrer qu'à travers le goût, il est possible de toucher à de nombreuses matières comme les mathématiques, l'histoire, la géographie, les sciences naturelles... Le goût devient alors un prétexte à l'apprentissage. On peut aussi travailler l'art plastique en associant des saveurs à des matières ou des couleurs. En six années de fonctionnement, nous avons beaucoup progressé au niveau des outils pédagogiques qui sont mis à la disposition des enseignants. En revanche, sur le fond, le contenu des stages ne change pas. Nous pouvons juger du succès de l'opération auprès des maîtres qui sont toujours plus nombreux à souhaiter suivre ces formations. Tous disent d'ailleurs que ces cessions les ont fait évoluer dans leur façon de manger et de boire, dans leur attitude de consommateur en général. Nous avons aussi des retours par les parents qui, dans certaines écoles, s'impliquent en préparant, par exemple, des goûters. L'opération dans le Rhône est soutenue financièrement et d'un point de vue logistique par les vignerons, même s'il n'est pas question de goûter de vin dans les écoles. Les Champenois se lancent aussi et des projets sont en cours en Alsace. J'aimerais lancer une expérience du même ordre dans l'académie dont je m'occupe désormais. Il faut que je trouve les soutiens professionnels nécessaires. ' Depuis trois ans, dans le cadre du salon régional de l'agriculture d'Aquitaine, des programmes d'initiation au goût sont proposés aux élèves de CM1 et CM2. L'USVA a été sollicitée par les organisateurs car c'est la seule structure viticole régionale. Pendant la foire de Bordeaux, nous organisons des petites cessions de 30 min. avec des classes de vingt-cinq à trente enfants. Au programme, la découverte des arômes avec des petites boîtes, une dégustation de différents jus de fruits pour distinguer les saveurs et la présentation simplifiée du processus de la vinification. Au terme de ces 30 min., les enfants ont un diplôme d'oenophile en herbe. Le programme est envoyé aux écoles et les enseignants intéressés réservent une cession. C'est en général l'occasion pour eux de faire un thème sur la vigne. En 1998, l'action a été relayée par les jeunes agriculteurs d'Aquitaine qui accompagnaient les écoles, depuis leur département jusqu'à la foire, en leur faisant faire un parcours auquel les 30 min. de découverte des arômes étaient intégrées. Certains syndicats, membres de l'USVA, sont demandeurs et aimeraient d'ailleurs mettre des actions semblables en place lors de foires ou de manifestations organisées dans leur secteur. ' Nous avons vu ce qui se faisait dans le Beaujolais et nous avons été convaincus. Nous avons donc voulu mettre un programme en place en Champagne. L'éducation nationale a désigné une conseillère pédagogique avec laquelle nous avons monté le projet, en bénéficiant de l'expérience et des conseils de Mme Gratier de Saint-Louis. Notre démarche a démarré en 1996 et c'est au début de 1998 qu'est née l'association L'univers du goût en Champagne avec, comme partenaires et membres fondateurs, le Syndicat général des vignerons, Groupama et le Crédit agricole. Nous avons aussi officialisé notre partenariat avec l'éducation nationale en signant une convention l'été dernier. Sur l'année scolaire 1997-1998, nous avons formé deux cents personnes (enseignants de maternelle et de primaire, conseillers pédagogiques et inspecteurs). Ce sont des cessions d'une journée avec un travail pratique sur les sens, la dégustation d'un produit (pomme, miel ou chocolat, par exemple) et un travail pédagogique sur le goût pour que les enseignants puissent utiliser ce savoir avec les enfants qu'ils encadrent. Nous avons aussi mis en place des mallettes du goût adaptées aux différents niveaux. Elles comprennent des jeux, des posters, des livres, des saveurs que les enfants peuvent reconnaître... Les mallettes sont disponibles pour les enseignants au centre de documentation pédagogique. Devant la demande, nous en avons refait quatre pour cette rentrée. Nous avons aussi en projet la création de classes du goût, comme il existe déjà des classes de neige ou des classes vertes. Pour le moment, nous nous arrêtons au primaire. Nous essaierons aussi au niveau du collège mais ce sera certainement plus difficile avec un public d'adolescents. Actuellement, les Alsaciens ont déjà bien avancé dans la démarche. La Savoie, les côtes du Rhône et l'Ardèche y travaillent également.