Les frères Mérias gèrent à la fois une propriété familiale et une société de travaux viticoles. Au fur et à mesure que la société s'équipait, ils ont mécanisé leur propre vignoble.
La propriété familiale, le château Cadet Pontet, à Saint-Emilion, étant une trop petite structure pour nous permettre d'en vivre à deux, mon frère et moi nous sommes associés en société de fait en 1973, puis en SARL en 1979. Nous travaillons surtout en viticulture et essayons de nous tenir à l'écoute des besoins de nos clients et des avancées des firmes, explique Philippe Mérias. Au début, nous proposions surtout les travaux avant plantation (arrachage, terrassement, défonçage et désinfection...). Nous avons ensuite évolué vers des travaux viticoles : vendange mécanique, épandage, relevage, effeuillage, rognage, traitement d'hiver, prétaillage, dévitalisation, pulvérisation, essentiellement en traitements localisés type antibotrytis. ' Actuellement, nous fonctionnons avec quatre machines automotrices polyvalentes de Pellenc. Elles sont beaucoup mieux rentabilisées du fait qu'elles tournent une grande partie de l'année : l'adaptation des outils sur les bras permet d'effectuer tous les travaux viticoles, en vignes étroites ou larges. Nous avons été parmi les premiers à utiliser les machines à vendanger pour l'épandage de fumier ou marcs de raisin. En ce moment, les vendanges sont finies, et elles sont utilisées, une pour dévitaliser et une pour l'épandage , poursuit Philippe Mérias.Les deux frères possèdent, en association avec leur troisième frère, un domaine de 8 ha à Saint-Emilion et 20 ha environ à Saint-Sulpice-de-Faleyrens en appellation Bordeaux et Bordeaux supérieur. Les 8 ha, en vignes étroites, sont plantés à 1,33 m et les 20 ha, en vignes hautes et larges, à 3 m. Ils travaillent sur ces deux domaines avec les machines de la SARL. ' Techniquement, la mécanisation est possible sur les deux types de vignobles mais les vignes larges y sont évidemment plus adaptées, ne serait-ce qu'en terme de rentabilité puisque le nombre de passages à l'hectare est inférieur. 'Si la mécanisation ne cesse d'évoluer et de gagner de plus en plus d'opérations, elle ne convient pas à tous les vignobles. Sur les parcelles de vieilles vignes où les taux d'esca sont parfois importants, le passage de la machine à vendanger peut être risqué.Quelques adaptations simples sur le vignoble peuvent améliorer les conditions et l'efficacité du travail mécanisé. Sur les deux exploitations, Philippe Mérias a dû faire quelques modifications en introduisant progressivement la mécanisation. L'enherbement a été l'une des premières. ' A Saint-Emilion, les parcelles les plus vigoureuses sont conduites en enherbement permanent. Pour les autres, nous cessons le travail du sol fin juillet pour éviter qu'il ne soit trop meuble à la récolte. A Saint-Sulpice, dans les vignes à 3 m, le terrain riche permet d'enherber toute l'année, mais tous les ans après la vendange, le rotalabour est passé un rang sur deux pour aérer le sol, explique Philippe Mérias. D'abord l'enherbement améliore la portance : cela peut permettre de faire certains traitements à temps. Ensuite, il évite de trop compacter le sol. Quand on passe en pulvérisation sur un sol détrempé, les difficultés d'avancement rendent inexacte la dose apportée, si le pulvérisateur n'a pas de régulation DPA (débit proportionnel à l'avancement). 'La conformation des souches a été modifiée pour le passage de la machine à vendanger. ' Lorsque la souche est établie trop bas et que la zone fructifère est en dessous de 30 cm, qu'il s'agisse d'une machine à écailles ou à godets, la qualité du ramassage est moins bonne : on laisse des grappes ou elles s'égrènent sans que tous les grains soient recueillis. C'est pour cela que dans les parcelles vendangées mécaniquement, nous avons rehaussé les pieds à 60 cm. C'est d'ailleurs plus pratique pour le désherbage sur le rang ', explique Philippe Mérias.Les piquets ont également leur importance : Philippe Mérias les choisit en acacia. Il est satisfait mais reconnaît que tous les piquets ne se prêtent pas au passage de la machine, en terme de résistance à la casse.Quant au relevage, sur le château Cadet Pontet, il est encore souvent manuel car les équipes de salariés permanents y suffisent. A Saint-Sulpice, en revanche, il est intéressant de le mécaniser. Philippe Mérias souligne quelques points qui lui permettent d'optimiser le passage : vérifier au préalable que les fils sont en parfait état; éviter de placer les tendeurs face à face sur les fils leveurs, qui pourraient sauter au passage de la machine; contrôler que les fils releveurs ne se croisent pas à l'amarrage. Pour ne faire qu'un passage, il place un fil à une vingtaine de centimètres au dessus du fil d'attache de la baguette qui permet à la vigne de s'accrocher; ainsi le relevage peut être fait un peu plus tard, un peu plus haut et bien souvent en une seule fois.Pour l'effeuillage mécanique, avec une effeuilleuse également montée sur la machine Pellenc, Philippe Mérias préfère le faire tôt, après la fermeture de la grappe. Par la suite, les traitements localisés tels que les antipourritures seront plus efficaces et, de plus, les baies s'adaptent mieux au changement d'exposition. ' Pour la réussite de l'effeuillage, le plus important, c'est d'appliquer un itinéraire technique adapté : un bon relevage, fait à temps, pour ne pas risquer de blesser les rameaux ou les baies et avant l'effeuillage, un rognage pour éviter que des rameaux qui dépassent soient hachés par l'effeuilleuse ', explique-t-il.Si Philippe Mérias est équipé d'une prétailleuse, elle ne lui sert qu'à nettoyer le fil supérieur. ' La taille Guyot n'est pas adaptée pour le prétaillage. On court le risque de ne pas laisser de baguette assez longue, d'autant plus qu'ici, beaucoup préfèrent rallonger la baguette et faire sauter un oeil sur deux pour répartir la charge ', ajoute-t-il.